Chapitre. Introduction générale au droit fiscal. 11 - Définition. 12 - Caractéristiques de l impôt. 21 - Impôts directs et impôts indirects



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Transcription:

Chapitre 1 Introduction générale au droit fiscal La fiscalité est l un des fondements de la souveraineté. Car en l absence de ressources financières, nul gouvernement ne peut conduire de politiques publiques. La fiscalité est un puissant instrument de régulation économique capable d influencer la consommation, d encourager l épargne ou d orienter le mode d organisation et de production des entreprises. Sous ce vocable, se trouvent les prélèvements obligatoires comprenant les impôts (prestations pécuniaires mises à la charge des personnes physiques et morales) les taxes parafiscales (instituées dans un but d ordre économique, professionnel ou social au profit d organismes professionnels), les redevances pour services rendus, les droits de douane (TVA sur les biens provenant des États non membres de l Union européenne, de la taxe sur les produits pétroliers et des accises) et les cotisations sociales. 1 Définition et caractéristiques de l impôt 11 - Définition C est une prestation pécuniaire, mise à la charge des personnes physiques ou morales, requise par voie d autorité à titre définitif sans contrepartie directe, en vue de couvrir les dépenses publiques et de réaliser les objectifs économiques et sociaux fixés par la puissance publique. 12 - Caractéristiques de l impôt L impôt est un prélèvement obligatoire et pécuniaire. Il s oppose à l emprunt qui est un autre moyen de couverture des dépenses publiques. L impôt est effectué par voie d autorité. Il découle du caractère de puissance publique de l impôt. La notion de contrainte, d autorité vise l impôt. C est pourquoi on utilise le terme «contribution». L administration est tenue de percevoir l impôt qui a été autorisé par le Parlement. Un prélèvement effectué sans contrepartie et à titre définitif. Les prélèvements fiscaux reposent sur l idée d absence de contrepartie. La non affectation de l impôt caractérise l absence de contrepartie et constitue un principe budgétaire de la comptabilité publique. On distinguera de l impôt, les prélèvements suivants : - les cotisations sociales : prélèvements assis sur les salaires, associés au financement de prestations sociales. Le Conseil constitutionnel a insisté sur le fait que les cotisations sociales ouvrent droit aux prestations servies par les différents régimes sociaux, ce qui les distingue des impôts ; - les taxes parafiscales : elles servent à financer un organisme public particulier sans lien de proportionnalité avec le service rendu. Par exemple, le produit de la taxe intérieure sur les consommations de gaz naturel est affecté à l Agence de l environnement et de la maîtrise de l énergie ; - les redevances : elles rémunèrent un service rendu. Exemple : le péage ou droit d entrée des musées nationaux. 2 classification des impôts et taxes 21 - Impôts directs et impôts indirects Les impôts directs sont les impôts périodiques supportés directement par les personnes qui y sont assujetties. Ils sont souvent recouvrés à l aide d un rôle, c est-à-dire d une liste nominative des contribuables. Ces derniers ne peuvent reporter la charge de l impôt sur d autres agents économiques. Les impôts indirects sont les impôts sur les dépenses, qui s incorporent dans le prix des biens et des services consommés. Les entreprises les versent à l État. lls sont perçus sans émission de rôle nominatif. Ils reposent sur la réalisation d un acte précis - consommation par exemple. Les impôts indirects touchent une matière imposable quel que soit le contribuable. Ils reposent sur une assiette irrégulière, intermittente, tout au long de l année. Les impôts indirects tels que la TVA sont souvent qualifiés d impôts indolores car le redevable réel tend à percevoir les taxes comme une part du prix normal des biens. Chapitre 1 - Introduction générale au droit fiscal 7

22 - Classification économique IMPOSITION DU REVENU La circulation de l impôt est la suivante : acquitté par le contribuable, versé à l administration, citons par exemple : - l impôt sur le revenu des personnes physiques (IR), - l impôt sur les bénéfices des sociétés (IS). IMPOSITION DE LA CONSOMMATION Prélèvement effectué lors d une «consommation», par exemple : - la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), - la taxe sur les alcools, - les taxes sur certains spectacles et jeux. IMPOSITION DU CAPITAL Prélèvement effectué à la suite d une accumulation (valeur d un patrimoine) ou d un mouvement (transmission de biens) de «capital», exemples : - l impôt de solidarité sur la fortune (ISF), - les droits de succession perçus lors de la transmission du patrimoine par héritage, - les droits de mutation. 23 - Impôt réel et impôt personnel : Un impôt réel s intéresse à la chose, au bien, objet de la matière imposable et ne prend jamais en compte la situation personnelle du contribuable (ex. : la TVA). L impôt personnel est un impôt qui appréhende les facultés contributives avec le souci de personnaliser la charge fiscale. Il prend en compte la situation personnelle du contribuable et surtout sa situation familiale (ex. : l impôt sur le revenu). La justice fiscale va de pair aujourd hui avec la personnalisation de l impôt. 24 - Impôt proportionnel - impôt progressif : L impôt proportionnel s obtient par l application d un taux fixe (TVA, Contribution Sociale Généralisée, impôt sur les sociétés). L impôt progressif s obtient par l application d un barème qui permet de faire croître l impôt avec la matière imposable (impôt sur le revenu, ISF, droits de successions). 3 les sources internes et supranationales du droit fiscal Les sources du droit fiscal ont été durant très longtemps un des domaines réservés de la politique nationale, mais depuis un certain nombre d années, elles proviennent également de conventions et de règles relevant de traités internationaux. Les sources nationales du droit fiscal sont principalement liées aux textes fondateurs que sont la Constitution de la cinquième République et la Déclaration des droits de l Homme et du citoyen (DDHC). 31 - Les principes constitutionnels Les relations entre les contribuables et l administration fiscale trouvent leur fondement dans la «Déclaration des droits de l Homme et du Citoyen» à laquelle se réfère le préambule de la Constitution. 1 - Le principe de légalité de l impôt Il découle de deux articles à valeur constitutionnelle : l article 34 de la Constitution de 1958 : «La loi fixe les règles relatives à l assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des impositions de toutes natures.» Et l article 14 de la Déclaration des droits de l homme et du citoyen : «Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d en suivre l emploi et d en déterminer la quotité, l assiette, le recouvrement et la durée.» Ce principe rend le Parlement seul compétent pour établir ou lever de nouveaux impôts. Cette compétence exclusive du législateur s entend non seulement de la création d impôts mais aussi des règles qui fixent leurs modalités. 8 Chapitre 1 - Introduction générale au droit fiscal

2 - Le principe d égalité devant l impôt Il résulte essentiellement de l article 13 de la Déclaration des droits de l homme et du citoyen : «la contribution commune doit être également répartie entre les citoyens à raison de leurs facultés.» 3 - Le principe de nécessité de l impôt Le Conseil constitutionnel le définit comme découlant de l article 13 de la Déclaration des Droits de l Homme et du Citoyen : «Pour l entretien de la force publique, et pour les dépenses d administration, une contribution commune est indispensable.» Ce principe a pour but en particulier de légitimer la levée de l impôt mais aussi de justifier les droits exceptionnels qui dérogent au droit commun, donnés au fisc pour lutter contre la fraude fiscale. 4 - Le principe d annualité de l impôt Ce principe découle de l annualité du budget de l État. Le budget de l État doit en effet être voté chaque année par le Parlement. 32 - Les sources internationales Depuis plusieurs années, et en particulier avec la construction européenne, le droit fiscal prend sa source dans les conventions internationales et dans les efforts d harmonisation européenne. Conventions internationales Ces accords dérogent très souvent aux règles nationales générales. Ces conventions ont une valeur juridique supérieure aux règles nationales, en vertu de l article 55 de la Constitution. On distingue : - la Convention de lutte contre la double imposition : elle attribue à l un des États le droit d imposer ou alors le partage entre les deux États. Elle vise souvent les impôts directs et retient le critère de territorialité comme critère d attribution. Le pays de résidence fiscale du contribuable sera celui qui appliquera l impôt. À défaut, on applique généralement le critère des intérêts vitaux : l imposition aura lieu dans le pays ou se situe les intérêts économiques essentiels du contribuable, - La Convention d échange d information entre administrations fiscales - la Convention de lutte contre l évasion fiscale : l évasion fiscale est l utilisation habile des lacunes de la loi pour échapper à l impôt. La fraude fiscale est une violation de la loi. Directives fiscales communautaires Un des objectifs de l Union européenne est l harmonisation fiscale des pays membres. Les directives fiscales sont donc de plus en plus nombreuses. Celles-ci s imposent au droit national même si les États ont la faculté de les retranscrire à leur manière dans leur droit. Par ailleurs, le Conseil d État a décidé que le législateur ne pouvait laisser subsister dans le droit national des dispositions contraires à celles des directives européennes, et que l État pourrait être tenu de réparer le préjudice causé si de telles dispositions restaient en place. La directive TVA du 28 novembre 2006 fournit un cadre juridique pour l application de taux de TVA dans les États membres. Les États membres ont fait usage des possibilités offertes dans ce cadre et continuent à le faire ; il en résulte une situation disparate et complexe. Les règles de base sont simples: - les livraisons de biens et prestations de services soumises à la TVA sont en principe soumises à un taux normal fixé à un minimum de 15 %; - les États membres peuvent appliquer un ou deux taux réduits d un minimum de 5 % aux biens et services énumérés dans une liste limitative ; - ils peuvent également, dans certaines conditions, appliquer un taux réduit à certains services à forte intensité de main-d œuvre. Ces règles simples sont cependant compliquées par une multitude de dérogations accordées à certains États membres, dans certains cas à une majorité d États membres. Ces dérogations ont été accordées durant la négociation qui a précédé l adoption de la directive sur les taux de TVA de 1992 et dans les actes d adhésion à l Union européenne. Globalement, de telles dérogations empêchent qu un système cohérent de taux de TVA soit appliqué dans l UE. 33 - Les sources législatives et réglementaires La loi est la source principale du droit fiscal en vertu du principe de légalité de l impôt. Il n y a que pour la création d impôt que le Parlement ne peut pas déléguer son pouvoir. Ce qui fait que le droit fiscal contient aussi beaucoup de dispositions d essence réglementaire. Le législateur ne prévoit en général que les dispositions nécessaires à l application de la loi fiscale. La loi fait ensuite l objet de décrets d application rentrant dans les détails purement techniques. 34 - La jurisprudence Comme pour tous les autres droits en France, la jurisprudence n est pas reconnue comme une source officielle du droit, mais elle occupe tout de même une place importante de par son influence sur l interprétation. En effet, notre système fiscal utilise souvent des concepts pas ou mal définis. Par exemple, la notion de revenu ne bénéficie d aucune définition officielle. Les décisions en matière d impôt direct et de TVA, sont prises : - en première instance par les tribunaux administratifs ; - en appel, par les cours d appel administratives ; - en cassation par le Conseil d État. Chapitre 1 - Introduction générale au droit fiscal 9

En matière de droits de timbre, d Impôt de solidarité sur la fortune et de droits d enregistrement ce sont les juridictions civiles qui sont compétentes : Tribunal de grande instance, Cour d appel, Cour de cassation. Ces décisions, notamment celles du Conseil d État, font souvent jurisprudence. C est-à-dire qu elles engagent les autres tribunaux à statuer dans le même sens pour des affaires similaires. Cependant, ces décisions n engagent pas l administration fiscale qui peut maintenir ses positions et ne présagent donc en rien de ses décisions futures. 35 - La doctrine administrative La doctrine administrative est l ensemble des commentaires que l administration produit en vue de l application des textes fiscaux, ainsi que des instructions adressées aux agents. Cette doctrine n a, comme la jurisprudence, pas de valeur officielle sauf dans un cas. En effet, l article L. 80, du livre des procédures fiscales précise : «Il ne sera procédé à aucun rehaussement d impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l administration est un différend sur l interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s il est démontré que l interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l époque, formellement admise par l administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l interprétation que l administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu elle n avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l impôt et aux pénalités fiscales.» En conséquence, pour toutes les règles relatives à l assiette, le contribuable peut opposer à l administration sa propre doctrine, en cas de changement donnant lieu à des poursuites du contribuable pour l imposition passée. Cette doctrine peut toujours être retournée contre l administration, même si celle-ci était illégale et interprétait mal les textes. 4 l organisation de l administration fiscale 41 - L organisation des services centraux : la Direction générale des finances publiques La Direction générale des finances publiques (DGFiP ou DGFP) est une administration publique française qui dépend du ministère du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la Réforme de l État. Elle est issue de la fusion des administrations de la Direction générale des impôts (DGI) et de la Direction générale de la comptabilité publique (DGCP). Elle reprend les compétences des deux anciennes directions : elle s occupe de la gestion des finances publiques en France, tant en matière de dépenses que de recettes. La nouvelle direction reprend les attributions de la DGI en matière de fiscalité, et leur adjoint la compétence de la DGCP en matière de recouvrement, qui assurait notamment, le recouvrement d une partie des recettes publiques : - impôt sur le revenu, - taxes foncières, - taxe d habitation, - taxe professionnelle, - amendes, - recettes locales diverses (régies : cantines scolaires, piscines, etc.). Au côté du service des impôts des entreprises s ajoute désormais le service des impôts des particuliers. Chaque catégorie de contribuable dispose alors d un interlocuteur unique. Là où ils coexistent, la réforme se traduira donc par une fusion des services fiscaux et des trésoreries. 42 - L organisation départementale Le niveau départemental comporte : - la direction des services fiscaux chargée de l établissement et du contrôle des impôts, - la trésorerie générale qui est chargée du recouvrement des impôts. 10 Chapitre 1 - Introduction générale au droit fiscal

43 - L organisation au niveau communal 1 - Le centre des impôts ou le service des impôts aux particuliers C est le service chargé de calculer et de contrôler l impôt sur le revenu, la taxe d habitation et la redevance audiovisuelle, les taxes foncières, la contribution économique territoriale et les taxes sur le chiffre d affaires. Il est également chargé de contrôler l impôt sur la fortune (ISF) et les droits de succession et de donation. Le contribuable qui souhaite obtenir des informations, notamment sur le calcul, les abattements, les réductions ou les exonérations relatifs à ces impôts, présenter une réclamation ou se procurer des formulaires, doit s adresser à ce service. 2 - Le service des impôts des entreprises (SIE) Ce service remplace les recettes des impôts. C est auprès de ce service que les contribuables doivent : déposer les déclarations de succession, faire enregistrer les donations et payer les droits correspondants, déclarer et régler les impôts indirects, notamment la TVA, déposer leur déclaration ISF et acquitter cet impôt, faire enregistrer les actes non soumis à publicité foncière, c est-à-dire ne portant pas sur des ventes d immeubles, et le cas échéant, de meubles, acheter des timbres fiscaux. C est également auprès de ce service que les entreprises payent leurs impôts (impôt sur les sociétés, taxe sur les salaires,...). 3 - La Trésorerie (ou perception) Elle est chargée de l encaissement de l impôt sur le revenu, de la taxe d habitation et des taxes foncières. Le contribuable doit s adresser à ce service pour tout ce qui concerne le paiement de ces impôts, notamment lorsqu il souhaite obtenir des délais de paiement. 4 - Le centre des impôts fonciers C est auprès de ce service que les contribuables peuvent obtenir : des renseignements sur la valeur locative servant de base au calcul des impôts locaux (taxe d habitation, taxes foncières), des informations sur les caractéristiques des parcelles et des extraits ou des plans cadastraux, des formulaires pour déclarer de nouvelles constructions ou des additions de construction. 5 - La conservation des hypothèques C est auprès de ce service que les contribuables : doivent faire enregistrer les actes soumis à publicité foncière (c est-à-dire portant sur des ventes d immeubles et, le cas échéant, de meubles) et payer les droits correspondants, peuvent obtenir tous renseignements sur la situation juridique des immeubles (propriétés, servitudes,...). 5 éléments de techniques fiscales 51 - L assiette de l impôt Déterminer l assiette de l impôt consiste à rechercher et à évaluer la matière imposable. Cette évaluation peut être forfaitaire (régimes micros, valeur locative...) soit réel, par le dépôt d une déclaration à l administration, déclaration déposée par le contribuable ou par un tiers. 52 - La liquidation Il s agit, au cours de cette deuxième phase, de calculer l impôt grâce au taux de l impôt. Il existe plusieurs catégories de taux : - le taux spécifique qui est fixé par unité de quantité (ex. : alcool, tabac, essence), - le taux proportionnel qui est un pourcentage fixe (TVA par exemple), - le taux progressif qui augmente lorsque l assiette augmente (barème IR, ISF). NB : le taux marginal d imposition est le taux de la dernière tranche du barème (c est le plus élevé). 53 - Le recouvrement C est la procédure de paiement, il en existe trois : - La procédure ordonnée : avis d imposition que l on reçoit (impôts locaux). - La procédure spontanée : IS + TVA, on doit connaître la date limite de paiement et payer à cette date. - Le paiement par une tierce personne : des tiers peuvent payer des impôts pour le compte du contribuable à l État (ex. : prélèvement à la source par un banquier). Ces trois étapes de la procédure d imposition peuvent être dissociées ou jointes si elles interviennent en même temps. Chapitre 1 - Introduction générale au droit fiscal 11

Exercices d applications Exos 15 Application 1 Les sources du droit fiscal M. Perez est gérant d une société de conseils et de services informatiques à Toulouse. Il souhaite créer une autre société à Santander en Espagne. Ses différentes activités seront taxées à la TVA au taux de 16 %. Les bénéfices réalisés en Espagne seront rapatriés en France. 1 - Comment a été fixé le taux de TVA en France? 2 - De quelle façon ce taux de TVA pourrait-il être modifié? 3 - quel texte sera applicable aux bénéfices réalisés par la société créée en Espagne par M. Perez? 15 Application 2 Classification des impôts On vous communique le document suivant : Les recettes fiscales nettes dans la LFI pour 2011 : en milliards d euros Taxe sur la valeur ajoutée 136,6 Impôt sur le revenu 58,4 Impôt sur les sociétés 46,2 Taxe intérieure sur les produits pétroliers 14,1 Autres recettes fiscales 17,6 Total 272,9 1 - Indiquez l impôt qui procure le plus de recettes fiscales à l État. 2 - quelle est la proportion des impôts sur la consommation dans le total des recettes fiscales? 3 - Complétez le tableau suivant : Impôts Perçus au profit de (État ou collectivités locales) Impôt direct ou indirect Classification économique (Impôt sur le revenu, le patrimoine ou la dépense) TVA Impôt sur les sociétés Taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) Impôt de solidarité sur la fortune Taxe foncière 12 Chapitre 1 - Introduction générale au droit fiscal

10 Application 3 L organisation de l administration fiscale M. Gilibert doit payer 14 120 d impôt sur le revenu, 8 640 d impôt de solidarité sur la fortune et son entreprise 4 250 de TVA. En outre, l administration fiscale réclame 9 600 de majoration d impôt sur le revenu, en considérant que certaines sommes figurant sur ses relevés bancaires n ont pas été déclarées. 1 - qui doit encaisser les impôts dus par M. Gilibert et son entreprise? 2 - Comment contester la décision de l administration fiscale? 3 - quel est le tribunal compétent? Y a-t-il des voies de recours? 20 Application 4 Recherche documentaire - Méthodologie Gagner en précision en utilisant le Code général des impôts. Trouvez et interprétez l article 4 (A. B. et Bis) du CGI. 15 Application 5 Synthèse M. Ledoin est directeur financier de la société Batilogis, filiale d un grand groupe de BTP. Il possède des actions de la société Batilogis et a touché 8 402 de dividendes. Il a hérité de ses parents au cours de l année et l administration fiscale lui réclame la somme de 12 000. Il a réglé 22 de taxe intérieure sur les produits pétroliers en faisant le plein de carburant. M. Ledoin est propriétaire de son appartement et a réglé une taxe de 1 850. Au cours de l année N, il a touché un salaire de 78 000. La société Batilogis va créer une société en Grèce. M. Vatopoulos, salarié de la société Batilogis, a accepté de devenir salarié de la nouvelle société et de partir travailler en Grèce où il possède de nombreuses attaches. 1 - Relevez les différents impôts concernés par les opérations indiquées et procédez à leur classement : - impôt réel, ou impôt personnel, - impôt direct ou impôt indirect, - impôt progressif ou impôt proportionnel. 2 - Indiquez, parmi ces impôts, ceux payés par voie de rôle et ceux payés spontanément. 3 - Comment sera imposé M. Vatopoulos? En Grèce? En France? Chapitre 1 - Introduction générale au droit fiscal 13

Contrôle de connaissances 1 Les cotisations salariales pour le régime de retraite général constituent un impôt. 2 Le pouvoir exécutif peut établir ou lever de nouveaux impôts. 3 Liquider l impôt signifie régler l impôt au service compétent. 4 Le règlement de la taxe habitation doit être adressé au centre des impôts. 5 La CSG est un impôt à taux progressif. 6 La redevance rémunère un service rendu. 7 La TVA est réglée auprès du service des impôts des entreprises (SIE). 8 Le tribunal de grande instance est compétent en matière de droit d enregistrement sur les mutations d immeuble. 9 L impôt sur le revenu et la TIPP sont acquittés par voie de rôle. Un impôt réel prend en compte la situation personnelle du contribuable. Répondez par VRAI ou FAUX aux affirmations précédentes en donnant toutes les explications nécessaires. 14 Chapitre 1 - Introduction générale au droit fiscal