Les Flux Financiers Illicites et la Question des Transferts nets de Ressources en Provenance de l Afrique, 1980-2009



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Transcription:

Les Flux Financiers Illicites et la Question des Transferts nets de Ressources en Provenance de l Afrique, 1980-2009 Rapport Conjoint Banque Africaine de Développement ET Global Financial Integrity Mai 2013

Résumé Exécutif Ce rapport analyse le volume et la structure des flux de capitaux enregistrés ou non enregistrés en direction et en provenance de l Afrique et ses différentes régions et pays sur la période 1980-2009. Il fournit également les principales tendances des transferts de ressources, mais ne fournit pas une analyse des raisons de ces flux. Une analyse plus poussée sur la dynamique des flux nécessite des études pays approfondies. Dans le cadre de ce rapport, les flux de capitaux enregistrés sont les transactions financières et non financières enregistrées dans la balance de paiement, tandis que les flux de capitaux non enregistrés renvoient trivialement à la fuite des capitaux. Le rapport suppose que les flux de capitaux non enregistrés sont illicites par nature et font référence aux transferts d argent gagnés via la corruption, les pots de vin, l évasion fiscale, les activités criminelles et de contrebande. Pareillement, les fonds légaux gagnés suite à des activités légales, mais transférées à l extérieur en violation de la règlementation sur le contrôle de change deviennent illégaux. De manière spécifique, les transferts nets enregistrés (NRecT) sont totalement issus des transactions enregistrées dans la balance des paiements. La version restreinte de cette mesure, NRecT Narrow est simplement égale au solde du compte financier, tandis que la mesure large, NRecT Broad est égale au solde du compte financier plus la somme des transferts courant nets et des transferts nets en capital. Les transferts de ressources net (NRT) sont calculés comme la différence entre NRecT et les flux financiers illicites (IFF), qui ont également deux déclinaisons, normalisée (conservative) et non-normalisée (robuste). Par conséquent, il existe quatre mesures alternatives de NRT, correspondant à la version des transferts enregistrés et à la sortie des capitaux illicites. Ces concepts sont importants car ils permettent la comparaison des NRecT et la sortie non enregistrée des capitaux illicites. Les résultats montrent que l Afrique était un créditeur net du monde avec une valeur des transferts net allant jusqu à 1,4 billion de dollars US sur la période 1980-2009, ajusté à l inflation. S il existe de brèves périodes au début des années 1980 et 1990 durant lesquelles l Afrique recevait de faible transferts nets de ressources en provenance du reste du monde, le continent a été un net pourvoyeur des ressources au monde avec une valeur estimée des NRT variant entre 597 milliards de dollars US et 1,4 billion en fonction de la définition utilisée pour les transferts (NRect, restreint ou large, IFF, normalisé ou non normalisé). L évaluation la plus optimiste des NRT (ou la plus faible valeur négative des NRT soit 597 milliards de dollars US) implique une définition large des transferts enregistrés nets de la sortie des flux illicites estimés de manière Les Flux Financiers illicites et la Question des Transferts nets de Ressources en Provenance de l Afrique, 1980-2009 1

conservative (Broad NRTNorm), tandis que le scénario le plus pessimiste (transferts négatifs évalués à 1,4 billion de dollars US) implique une définition des transferts enregistrés nets de la sortie des capitaux illicites (Narrow NRTNon-Norm). Si nous focalisons l attention sur les transferts enregistrés, c est-à-dire que nous ne prenons pas en compte les fuites de capitaux illicites, nous trouvons que selon la mesure restreinte NRecT, il y a eu une nette entrée des capitaux en Afrique sur la période 1980-1999 et un léger renversement des sorties nettes sur la période 2000-2009. La mesure restreinte des NRecT montre que les pays Africains ont reçus des ressources allant jusqu à 2,3% du PIB dans les années 1980 et juste en dessous d 1% du PIB dans les années 1990. Cependant le continent est devenu un net prêteur des ressources au reste du monde sur la décennie qui s achève en 2009. Ce léger retournement d une situation de bénéficiaire net au cours des deux premières décennies à une situation de pourvoyeur net au cours de la dernière décennie est principalement due aux sorties de capitaux associées à une accumulation des réserves, traduisant le désir des pays Africains de se auto prémunir contre la crise financière. Les sorties de capitaux en provenance de l Afrique au cours de la décennie écoulée n étaient pas équitablement distribuées à travers les régions. Ils étaient largement dominés par des sorties de capitaux en provenance de l Afrique du Nord. En considérant la période 2000-2009 uniquement, un équivalent de 30,4 milliards de dollars US est sorti de l Afrique, avec 83% de ce montant provenant de l Afrique du Nord. Au sein de l Afrique Sub-Saharienne, les résultats relatifs à la mesure large des NRecT sont contrastés. L Afrique de l Ouest et l Afrique Centrale ont observé des fuites de capitaux qui ont inondé les autres régions au cours de la décennie qui s achève en 2009. Les pertes en transferts net (selon la mesure restreinte des NRecT) des régions d Afrique centrale et de l Ouest sont principalement expliquées par les sorties liées au remboursement des crédits et au crédit de commerce plutôt que par l accumulation des réserves. La distribution des gains et des pertes entre pays africains est asymétrique, induisant une perte nette de transferts en provenance de l Afrique. Le top five des pays qui ont bénéficié des transferts (NRecT Narrow) sur la période 1980-2009 sont respectivement l Afrique du Sud, le Soudan, la Tunisie, le Maroc et la Côte d Ivoire, tandis que l Algérie, la Lybie, le Botswana et l Egypte ont connu des pertes en transferts. Le volume des pertes enregistrées par ces cinq derniers pays dépassent les gains enregistrés par les premiers. La mesure large des transferts enregistrés (NRecT Broad), altère le développement de long terme des transferts nets enregistrés du fait de l impact des transferts courants et des transferts en capital (ce qui inclut principalement les envois de fonds de la diaspora et les remises de dettes). Sur la base de la mesure large, les transferts en direction de l Afrique (NRecT Broad), ont augmenté en moyenne annuelle de 27 milliards de dollars US au cours des décennies 1980 et 1990 avant de régresser à 8,7 milliards de dollars US en moyenne annuelle sur la décennie 2000. La mesure large ne montre pas que l Afrique est passée d une position de débiteur net à 2 Banque Africaine de Développement and Global Financial Integrity

une situation de créditeur net du monde au cours de la décennie 2000, principalement du fait des transferts courants et en capital tels que les transferts des migrants, les annulations de dette, des déductions fiscales et autres transferts non financiers qui génèrent cet effet compensateur. Selon la mesure large des transferts, toutes les régions de l Afrique-Sub-saharienne ont reçu des ressources sur une base nette à travers les trois décennies avec des gains plus élevés pour les régions d Afrique de l Ouest et du Centre. L Afrique de l Ouest et l Afrique centrale sont celles qui ont reçu le plus de ressources sur les trois décennies écoulées. En pourcentage du PIB, ces ressources sont passées de 5,2% en moyenne annuelle au courant des années 1980 à 5,7% durant la décennie 1990 pour baisser à 2,3% sur la dernière décennie. Les transferts enregistrés étaient principalement tirés par les transferts des migrants et les annulations de dettes plutôt que par les investissements directs étrangers. Les dotations initiales en ressources des pays jouent un rôle important lorsque les transferts sont mesurés sur une base large. Par exemple, les pays non exportateurs de carburant devancent les pays exportateurs en termes d attraction des transferts nets mesurés sur une base large. Les remises de dettes ont aussi aidé les pays à faible revenus à capter une partie de ces ressources. Les pays pauvres très endettés (PPTE) ont observé une légère augmentation des transferts au cours des trois décennies. En moyenne annuelle ajusté de l inflation, les transferts net en direction des pays PPTE sont passés de 14 milliards de dollars US dans les années 1980 à 14,3 milliards dans les années 1990, avant de connaître un bond pour atteindre 20,8 milliards au cours de la décennie 2000. Les pays d Afrique du Nord sont en tête de peloton des bénéficiaires net des transferts au sens de la mesure large des transferts nets enregistrés. L Egypte, le Maroc, la Tunisie, le Kenya et le Ghana forment la tête de liste des bénéficiaires des transferts nets sur la période 1980-2009, tandis que la Lybie, l Algérie, le Botswana et l Angola forment le top 5 des perdant nets. Les flux financiers illicites (IFFs) ont constitué la force motrice de la sortie massive du continent Africain de ressources variant entre 1,2 billion et 1,3 billion de dollars US, après ajustement à l inflation. Les flux illicites de capitaux ont connu un accroissement plus rapide que les transferts nets. Cela est vrai, même en prenant en compte les rentrées de capitaux provenant des transferts nets enregistrés sur une base large. Les sorties illicites de capitaux sont issus principalement de l Afrique Sub-saharienne, notamment de l Afrique de l Ouest et de l Afrique Centrale. Les sorties illicites de capitaux en provenance de l Afrique Sub-saharienne dépassent ceux issus de l Afrique du Nord d un facteur supérieur à deux en termes nominal, tandis qu en termes réels, trois régions : l Afrique de l Ouest et l Afrique centrale, avec 494 milliards (37 pour-cent), l Afrique du Nord avec 415,6 milliards (31 pourcent), et l Afrique australe avec 370 milliards (27 pour-cent)- représentent 95% du montant total cumulé des flux illicites de capitaux en provenance de l Afrique sur une période de trente ans (Voir Graphique 4 et Table 1). Les Flux Financiers illicites et la Question des Transferts nets de Ressources en Provenance de l Afrique, 1980-2009 3

En termes de volume des flux financiers illicites, le Nigeria, l Egypte et l Afrique du Sud tirent le haut du classement. En Afrique de l Ouest et en Afrique centrale, les sorties de capitaux illicites sont par ordre d importance l apanage du Nigeria, de la République du Congo et de la côte d Ivoire, tandis que les sorties de capitaux illicites en Afrique du Nord sont principalement dominées par l Egypte, l Algérie et la Lybie respectivement. En Afrique Australe, les sorties de capitaux sont principalement dominées par l Afrique du Sud, l Ile Maurice et l Angola. L étude s achève en proposant des recommandations de politique économiques qui sont relatives à (i) des initiatives pour restreindre l absorption des flux financiers illicites, (ii) aux politiques visant à limiter la sortie des flux financiers illicites en provenance de l Afrique, (iii) des politiques pour booster les transferts nets enregistrés via l amélioration de l environnement des affaires. Afin d assurer une plus grande efficacité, il est impératif qu il y ait un alignement des politiques entre les pays Africains et les pays absorbeurs en vue de solutionner le problème des flux financiers illicites. Dans le but de juguler l absorption des flux financiers illicites, les initiatives politiques suivantes sont proposées : Promouvoir la transparence du système financier : Les banques et les structures financières offshore (OFCs) devraient être astreintes à fournir régulièrement à la Banque des Règlements Internationaux (BRI) des données détaillées sur les dépôts par secteur, leur maturité, ainsi que le pays d origine des déposants. Plus encore, la BRI devrait être autorisée à rendre public les données bancaires issues de différentes sources et par pays de destination. Subséquemment, l absence de transparence des informations sur la possession des bénéficiaires, d entreprises, de fonds ou autres entités juridiques devrait être abordée. Les lois locales régissant le fonctionnement des institutions financières devraient être renforcées de manière à rendre illégal le fait d ouvrir un compte sans connaissance des personnes physiques possédant lesdits comptes (ie le propriétaire(s) réel(s)). Mettre sur pieds des accords d échange automatique des informations fiscales : L évasion fiscale est au cœur de la finance de l ombre et constitue une composante significative des flux financiers illicites. Une manière de solutionner le problème de l évasion fiscale est pour les pays Africains de signer des accords d échange automatique des informations (AEI) avec les pays de destination de l évasion fiscale. Ces accords d échange automatique des informations devraient s accompagner d un accord annexe sur l évasion fiscale, qui précise clairement la capacité des pays à évaluer les impôts et contrôler leur conformité aux règles internationales, rendant difficile tant pour les individus que pour les entités le déplacement des revenus d un pays à un autre. En relation avec les politiques qui visent à réduire le mouvement des flux illicites de capitaux en provenance de l Afrique, les initiatives de politique sont adaptées en fonction des pays riches en ressources et des pays pauvres en ressources, et incluent les recommandations suivantes : Dans les pays riches en ressources, le secteur des ressources naturelles est généralement la principale source des flux financiers illicites. Ces pays manquent souvent des structures 4 Banque Africaine de Développement and Global Financial Integrity

de bonne gouvernance qui permettent aux citoyens de contrôler le montant et l usage des ressources issues du secteur des ressources naturelles. Ces pays doivent promouvoir la transparence et la responsabilité au travers du renforcement des organisations de la société civile et l implémentation des procédures budgétaires transparentes telles que l initiative sur la transparence budgétaire (Open Budget Initiative), l initiative collaborative sur la réforme budgétaire en Afrique (Collaborative Africa BUDGET Reform Initiative (CABRI)) et l initiative sur la transparence des industries extractives (EITI). Les pays devraient également voir au-delà de l EITI et s assurer que les politiques sont mises en place pour faciliter une plus grande transparence sur toute la chaine de valeur de la ressource. Plus encore, les compagnies multinationales opérant sur le continent Africain devraient être contraintes de publier un rapport financier annuel qui inclut explicitement leurs activités en Afrique. Dans les pays pauvres en ressources, les flux financiers illicites proviennent essentiellement de la mauvaise évaluation du prix des biens échangés par des compagnies de différentes tailles. Cette activité est une forme de blanchiment d argent ou d évasion fiscale. Ces pays doivent insister sur le renforcement des institutions légales, les lois anti corruption et donner plus de pouvoir aux agences de régulation afin qu elles exercent une surveillance adéquate. En particulier : Entreprendre des réformes fiscales pour élargir la base d imposition. Une réforme fiscale applicable pour l ensemble des contribuables est non seulement juste, mais assure également une plus grande adhésion au lieu d une prolifération de taxes indirectes qui sont difficiles à gérer, coûteux à administrer et ont en soit un germe d incitation à l évasion. Créer une autorité nationale de régulation et de gestion des approvisionnements publics pour assurer une plus grande transparence et responsabilité dans le processus de passation des marchés. Les règles et procédures des contrats gouvernementaux sur appels d offre doivent être aussi transparentes que les informations relatives aux contrats accordés. Les pays Africains devraient s inspirer des meilleurs exemples à l échelle internationale en ce qui concerne les marchés publics afin de maximiser les bénéfices de l Etat. Réformer les procédures douanières de manière à limiter la mauvaise évaluation des prix des marchandises. Ceci implique la suppression des exemptions de douane ad hoc, une rationalisation des procédures de dédouanement et de contrôle des documents, et une informatisation efficace des procédures de collecte et de paiement afin de rendre les procédures moins encombrantes et plus efficientes. De manière additionnelle, un renforcement des capacités et des formations sont nécessaires pour détecter une surfacturation/sous facturation des biens entrant/sortant du pays. Renforcer les initiatives de lutte contre le blanchiment d argent et les rendre exécutoires. Au courant de la décennie écoulée, les pays Africains ont mis sur pieds des programmes de lutte contre le blanchiment d argent en vertu desquels les institutions financières sont astreintes à dénoncer toute transaction suspicieuse aux autorités concernées. Cependant, il est nécessaire de renforcer la capacité de ces autorités à initier des actions judiciaires sur la base de ces dénonciations. Les Flux Financiers illicites et la Question des Transferts nets de Ressources en Provenance de l Afrique, 1980-2009 5

Les politiques à même de booster les transferts nets enregistrés, via l amélioration du climat des affaires impliquent des mesures qui vont de l amélioration de la stabilité politique et économique du pays à des mesures d incitation liées à l amélioration des infrastructures, la rationalisation de la fiscalité des entreprises et au renforcement de la gouvernance. 6 Banque Africaine de Développement and Global Financial Integrity

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Banque Africaine de Développement 15 Avenue du Ghana P.O. Box 323-1002 Tunis-Belvedère, Tunisia Global Financial Integrity 1100 17th Street, NW, Suite 505 Washington, DC 20036 USA