ETUDE EN BREF Décembre 2009 L immobilier de bureaux en Europe Le constat en 2008-2009 Les perspectives 2010-2011 Pour les investisseurs, l Europe de l immobilier de bureaux n est pas celle qui est délimitée par les accords politiques (les 27) ou monétaires (la zone euro). Le champ de cette étude comprend douze pays qui constituent autant de marchés, chacun avec ses caractéristiques propres. La crise apparue en 2007, d abord financière puis économique, a touché tous ces pays. Mais la façon dont chaque marché traverse cette période de turbulences dépend, à la fois, de son état de santé antérieur et du comportement de son économie nationale. Des similitudes apparaissent donc dans les évolutions enregistrées au cours de l année 2008 et de la première partie de 2009, mais elles s accompagnent de particularités locales fortes. 2008-2009 : de la crise financière à la crise économique Schématiquement, l année 2008 peut être divisée en deux parties inégales, la faillite de Lehman Brothers provoquant une rupture brutale. Jusqu au 15 septembre, l indécision domine, que ce soit sur les perspectives économiques ou la tenue des marchés financiers et la question n est toujours pas tranchée de savoir quel est le péril le plus redoutable : les conséquences de la crise des subprimes ou la hausse des cours du pétrole. Début juillet, la Banque centrale européenne (BCE) procède à une ultime remontée de son taux de refinancement à 4,25 %, qui suscite des réactions très vives. La défaillance de Lehman Brothers tranche le débat. A partir de ce moment, la question ne se pose plus de savoir si l Europe va entrer en stagflation ou en récession. Ce sera la récession et elle sera mondiale. Les entreprises suspendent les décisions d investissement et freinent les nouvelles commandes, les marchés boursiers plongent. Les investisseurs se ruent sur les valeurs refuges, obligations d Etat en tête. Alors que les finances publiques se dégradent partout très vite, sous le double effet de recettes fiscales en forte baisse et de dépenses en hausse, cette recherche effrénée de la sécurité permet aux Etats de placer sans peine leurs titres d emprunt. Ainsi, les taux à long terme accompagnent la décrue des taux à court terme. Les marchés accordent toutefois un traitement différencié à chaque Etat : certains ont abordé la crise avec des déficits maîtrisés et semblent en mesure de redresser assez vite la situation (exemple de l Allemagne), alors que d autres avaient déjà au départ des comptes très dégradés (Italie) ou font face à une détérioration de leur économie particulièrement grave (Espagne). Il en résulte un creusement des écarts sur les taux à long terme à l intérieur même de la zone euro. Sur les marchés boursiers, un point bas est touché au début de mars 2009. Dans les mois qui suivent, les statistiques montrent que les mesures exceptionnelles prises par les banques centrales et les plans de relance décidés par les gouvernements atteignent leur objectif. La chute de l activité ralentit et la zone euro retrouve même une variation positive de son PIB à partir du troisième trimestre 2009. Après avoir systématiquement abaissé leurs prévisions à chacune de leurs publications, les principales institutions internationales (FMI, OCDE, etc.) refont le chemin en sens inverse.
L immobilier de bureaux en Europe Les données économiques de base Principales données économiques Population au 1 er janvier 2009 Chômage en 2008 Inflation en 2008 en millions en % en % Allemagne 82,0 7,7 2,8 Belgique 10,8 7,9 4,5 Danemark 5,5 5,9 3,6 Espagne 45,8 18,9 4,1 Finlande 5,3 8,7 3,9 France 64,4 9,9 3,2 Irlande 4,5 12,5 3,1 Italie 60,1-3,5 Norvège 4,8 3,0 3,4 Pays-Bas 16,5 3,5 2,2 Royaume-Uni 61,6 7,8 3,6 Suède 9,2 9,4 3,3 Source : Eurostat Croissance du PIB en %, par rapport à l année précédente Tri décroissant sur 2009 2006 2007 2008 2009* 2010* 6 4 2 0-2 -4-6 -8-10 France Espagne Danemark Norvège Pays-Bas Belgique Royaume-Uni Suède Italie Filande Allemagne Irlande * projections Source : Eurostat 2
Les indicateurs de marché La taille des parcs de bureaux : continuité 25 Parc de bureaux au 4 e trimestre 2008 en millions de m 2 20 15 10 5 19,5 19,3 16,7 16,4 14,2 14,0 12,3 12,1 11,8 11,711,0 10,3 8,5 8,1 7,1 5,4 4,6 3,3 3,2 2,2 1,9 0 Central London Munich Berlin Central Paris Madrid Hambourg Bruxelles Rome Milan Francfort Stockholm Copenhague Oslo Helsinki Amsterdam Barcelone Lyon Dublin Gothenburg Marseille Malmö *Paris et Croissant Ouest y compris La Défense Sources : Jones Lang LaSalle, CB Richard Ellis et DREIF/ORIE Le classement des métropoles européennes selon la taille de leur parc de bureaux s inscrit dans une grande continuité. Les chiffres enregistrés au quatrième 2008 montrent cependant que la deuxième ville, Munich, se rapproche très vite de la première, Londres. L écart n est plus que de 200 000 m² alors qu il atteignait encore 1,4 million de m² deux ans plus tôt. Un autre changement notable est intervenu pendant cette période : Milan, qui talonnait Francfort, a fini par passer devant. Enfin, l intégration des pays nordiques dans le champ de notre étude conduit à des modifications non négligeables : Stockholm, Copenhague, Oslo et Helsinki viennent s intercaler entre Francfort et Amsterdam. A noter. Il convient de rappeler les contours de cet indicateur. Ainsi, les dimensions relatives des parcs de bureaux dépendent d un certain nombre de conventions comme, par exemple, la délimitation du centre des affaires de Paris (des mètres carrés créés à l Est dans un souci de rééquilibrage de l activité en Ile-de-France n apparaissent pas dans ces statistiques). De plus, la dimension du parc ne donne aucune indication sur son âge et sa qualité. Enfin, pour un investisseur, la liquidité d un marché est une notion très importante qui n a pas un rapport direct avec la taille. L offre disponible et la demande placée : Paris atypique Demande placée en 2008, offre disponible et taux d écoulement au 31/12/2008 en milliers de m² et en % Demande placée Offre immédiatement disponible Taux d'écoulement 2 000 1 800 1 600 1 400 1 200 1 000 800 600 400 200 0 Central London Madrid 181% 80% 72% 79% 48% 47% 55% 34% 41% 32% 21% Paris Munich Hambourg 3 Francfort Bruxelles Berlin Barcelone Amsterdam Lyon 42% 64% 30% 44% Dublin Milan Aix/Marseille Rome 200% 180% 160% 140% 120% 100% 80% 60% 40% 20% 0% Sources : CB Richard Ellis, GIE Immostat, Jones Lang LaSalle, Knight Frank
L immobilier de bureaux en Europe L année 2008 marque un net tassement du marché. Le taux d écoulement, rapport entre la demande placée et l offre immédiatement disponible, est en repli. Il n est supérieur à 100 % que sur un seul marché : Paris (à titre de comparaison, cinq villes étaient concernées en 2006 dans une étude limitée à huit pays). Le cas de Paris paraît d ailleurs très nettement atypique : La demande placée y a reculé fortement (des chiffres plus élevés n ont été observés qu à Madrid et Aix-Marseille), mais l offre immédiatement disponible y a reculé aussi, et dans des proportions qu on ne retrouve nulle part : 33 %, contre 16 % à Milan, 9 % à Francfort, 8 % à Amsterdam, 8 % à Berlin, 5 % à Bruxelles, tandis qu elle continuait à progresser ailleurs ou restait stable à Hambourg. Le taux d écoulement s est encore élevé à 80 % à Londres, 79 % à Lyon, 72 % à Barcelone et 64 % à Rome. Mais la majorité des taux se situe entre 30 % et 45 %, avec un point bas à Amsterdam (21 %). L offre immédiatement disponible, si l on agrège toutes les marchés étudiés, est en hausse sur l année 2008 de 6 %, mais ce chiffre global, nous l avons vu, recouvre des réalités locales fort différentes : à l opposé de Paris, Barcelone a fait progresser son offre de 79 %, Dublin et Aix-Marseille de 62 %. C est en Espagne et en Irlande que les croissances les plus rapides ont été enregistrées, ce qui ne surprend pas dans la mesure où ce sont les deux pays les plus exposés à la crise. Cela illustre le dynamisme économique et immobilier de ces pays au moment où les mises en chantier ont été décidées. Les marchés de ces deux pays ont d ailleurs évolué différemment en 2008 : alors que la demande placée a reculé de 48,2 % à Madrid et de 11,1 % à Barcelone, elle a encore progressé de 16,8 % à Dublin. Sur l ensemble des marchés étudiés, la tendance est à la baisse. Les taux de vacance : dégradation Taux de vacance des Bureaux en % Copenhague Paris QCA Oslo Lyon Aarhus Helsinki Milan QCA Marseille Hambourg Barcelone Berlin Central London Munich (banlieue) Gothenburg Stockholm Madrid Malmö Amsterdam Francfort (banlieue) Dublin 2,8 4,1 4,4 4,7 4,9 5,5 6,1 6,6 6,8 7,6 7,8 8,3 8,5 9,0 9,0 9,3 10,0 11,8 13,5 2008 2007 15,8 0 5 10 15 20 Sources : BNP Paribas Real Estate, CB Richard Ellis, Jones Lang LaSalle, Knight Frank On estime généralement qu un taux de vacance inférieur ou proche de 5 % est satisfaisant et ne fait qu exprimer un degré normal de rotation. Plus un marché se rapproche de 10 %, plus il convient de s interroger sur son fonctionnement 4
et la raison de la hausse du taux de vacance. Au-delà de 10 %, le problème risque fort de ne plus être conjoncturel et le marché paraît fondamentalement déséquilibré. Le seuil d alerte prévu par cette grille de lecture est franchi par plusieurs marchés européens : Amsterdam, Francfort et Dublin, qui envoyaient déjà les signaux les plus inquiétants alors que l immobilier de bureaux était globalement en bonne santé en Europe de l Ouest, ont atteint des taux de vacance trop élevés pour laisser présager un retour rapide à meilleure fortune, à 15,8 % à Dublin, 13,5 % à Francfort et 11,8 % à Amsterdam. A l opposé, Copenhague enregistre un taux très faible, 2,8 %, qui peut peser sur la mobilité des entreprises. Le taux modeste de 4,1 % à Paris reflète l étroitesse du marché des bureaux de qualité dans le quartier central des affaires et la faiblesse de l offre immédiate par rapport à la demande placée dans les années de bonne conjoncture. Une dégradation particulièrement rapide est constatée dans la majorité des cas, tout particulièrement dans les zones touchées par la crise financière et économique comme Londres, Madrid ou Dublin. Plusieurs villes, néanmoins, ont réussi à améliorer leur taux de vacance entre 2007 et 2008 ; c est notamment le cas de Copenhague, Lyon, Helsinki. Les loyers «prime» (1) : fléchissement Indice des loyers «prime» des bureaux dans 15 villes européennes * Evolution annuelle 25% 20% 15% 10% 5% 0% -5% -10% 21% 15% 10% 8% 6% 3% 3,4% 2% 2% -2% -3% -5% -5% 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 200 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0 * Amsterdam, Barcelone, Berlin, Bruxelles, Dublin, Francfort, Hambourg, Londres La City, Lyon, Madrid, Marseille, Milan, Munich, Paris QCA, Rome Source : DTZ Research Les loyers «prime» ont atteint des sommets en 2000-2001 mais ils ont ensuite reculé jusqu à 2003-2004. Ils ont ensuite retrouvé une courbe ascendante jusqu au franchissement des records antérieurs en 2006 et 2007, avant de commencer à fléchir en 2008. Une moyenne de quinze villes européennes donne ainsi une ultime hausse très vigoureuse de 10 % en 2007 avant une baisse de 3 % en 2008. (1) - Loyers «prime» : il s agit des loyers correspondant à des biens d excellente qualité, offrant la meilleure localisation et les meilleures prestations. 5
L immobilier de bureaux en Europe Gothenburg Marseille Copenhague Lyon Berlin Bruxelles Helsinki Hamburg Barcelona Amsterdam Munich Stockholm Rome Oslo Madrid Frankfurt Milan Dublin London City Paris QCA Echelle des loyers «prime» des bureaux en 2008 en /m²/an 212 (-15%) 215 (+2%) 242 (-15%) 250 (-4%) 270 (-2%) 275 (-4%) 290 (+4%) 300 (-4%) 312 (-10%) 340 (+3%) 372 (-9%) 377 (-21%) 390 (+0%) 410 (-28%) 420 (-9%) 420 (-13%) 500 (+0%) 538 (-13%) 588 (-19%) 780 (-5%) 0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 Source : DTZ Research Dublin figure incontestablement en bonne place parmi les marchés les plus turbulents. Un point haut historique a été enregistré au deuxième trimestre 2008, avant une rechute qui marque un retour en arrière de quatre ans au deuxième trimestre 2009. En Espagne, le marché de Barcelone s est hissé lui aussi à des niveaux records en 2007, avant de voir les loyers «prime» du quartier d affaires retomber au premier trimestre 2009 en dessous du niveau atteint en 2006. A Madrid, le marché avait été encore plus exubérant, avec un creux plus marqué en 2003-2004 et une hausse exceptionnellement forte entre 2006 et 2007. Au premier trimestre 2009 dans le quartier d affaires, les loyers «prime» sont restés audessus du niveau atteint en 2006. Le marché de Londres a effectué un parcours également accidenté, mais au profil très différent : dans la City, les loyers «prime» n ont jamais retrouvé leur niveau record des années 2000-2001 et le choc financier les a ramenés en 2008 en dessous du niveau de 2006, mais toujours très haut placés sur l échelle européenne. En Italie, la courbe des loyers «prime» se distingue nettement de tous les exemples précédents. Après une période de creux au milieu des années 90, les années 2000 et 2001 n ont constitué qu une étape dans une phase de hausse qui s est prolongée jusqu en 2006 à Rome et jusqu en 2007 à Milan. Quant au marché allemand, il frappe par son extrême diversité. Aucune des courbes de loyers «prime» ne présente le même profil : records en 2000-2001 à Berlin, puis calme plat ; montée lente et progressive à Munich, avec un creux au milieu de la décennie et une pause en 2008 ; record en 2000 à Francfort, puis très fort ajustement et rattrapage partiel interrompu en 2008 ; à Hambourg, creux beaucoup plus accentué qu ailleurs en 2003 et 2004 et remontée poursuivie jusqu en 2008. A noter. Les différentes sources ne donnent pas exactement les mêmes informations pour chacun des marchés en 2008, les unes continuant à indiquer des hausses là où d autres font état de baisses. Outre les différences de méthodologie, ces écarts traduisent la nervosité du marché à la fin de l année. Si l on considère que la baisse des loyers n a fait que s amorcer en 2008, il n est pas étonnant qu elle n ait pas été perçue de la même manière 6
par tous les observateurs. On devrait trouver une plus grande homogénéité des données pour l année 2009, avec des indicateurs chiffrés toujours différents selon les sources, mais allant tous dans la même direction. Les taux de rendements : forte remontée Taux de rendement «prime» des bureaux observés à fin 2007 et fin 2008 en % 2007 2008 évolution Aix/Marseille 5,50 6,85 +25% Amsterdam 4,50 6,30 +40% Barcelone 4,50 5,75 +28% Berlin 4,55 5,30 +16% Bruxelles 5,25 5,95 +13% Dusseldorf 4,75 5,30 +12% Francfort 4,55 5,15 +13% Hambourg 4,55 5,10 +12% Central London* 5,00 6,00 +20% Lyon 5,60 6,60 +18% Madrid 4,75 5,75 +21% Manchester 4,80 6,00 +25% Munich 4,70 5,00 +6% Central Paris** 4,25 5,65 +33% Source : BNP Paribas Real Estate *Central London : ancien périmètre de Central London plus les quartiers de Southbank, Hammersmith et King s Cross **Central Paris : l Ile-de-France sans la Deuxième Couronne Les rendements calculés à partir des loyers «prime» se sont fortement tendus en 2008 dans toutes les grandes métropoles, avec des taux de progression particulièrement forts dans certaines métropoles : 40 % à Amsterdam et 33 % à Paris. D un point de vue purement arithmétique, ces tensions sur les rendements ne font que traduire une baisse des valeurs vénales plus forte que celle des loyers de référence. Mais ces mouvements ne font eux-mêmes que refléter la tendance des investisseurs à exiger une prime de risque plus élevée qu au cours de la période précédente. La baisse des rendements était normale sur des marchés dont la tenue pouvait légitimement inspirer confiance aux investisseurs, mais les études des années antérieures avaient montré qu on était sans doute allé un peu loin sur cette voie. Les primes demandées ne reflétaient plus la véritable géographie des risques. Ainsi, un rendement de 3,5 % à Dublin en 2006 pouvait paraître exprimer une confiance excessive dans l évolution future du marché. Dans le même temps, le rendement «prime» des bureaux à Bruxelles s élevait à 5,85 %. Or, si une ville du continent paraît protégée des soubresauts de la conjoncture mondiale, c est bien la capitale de l Union européenne, qui offre une des meilleures visibilités qui soient en matière de demande de bureaux. L échelle des risques va se trouver brutalement corrigée par la crise financière et économique, comme les chiffres de 2008 en donnent un premier aperçu. 7
L immobilier de bureaux en Europe Les variations enregistrées montrent une tendance générale à une remontée des rendements au-dessus de 5 %, avec une demande de prime de risque plus faible en Allemagne qu ailleurs. C est d ailleurs Munich qui enregistre la hausse la plus modeste. Investissement en bureaux : net repli 10 000 9 000 8 000 7 000 6 000 5 000 4 000 3 000 2 000 1 000 0 8 572 (-69%) 6 882 (-57%) Central London* Central Paris* 3 106 (+65%) Madrid Montants investis en bureaux en 2008 en millions d euros Total : 25 088 millions d'euros (-26% par rapport à 2007) 1 060 950 892 778 723 712 (-84%) 431 (-48%) 373 353 (-76%) (-47%) 140 (-40%) (-86%) (-20%) (-84%) (-67%)(-55%) Francfort Bruxelles Hambourg Amsterdam 108 (+7%) Source : BNP Paribas Real Estate *Central London : ancien périmètre de Central London plus les quartiers de Southbank, Hammersmith et King s Cross **Central Paris : l Ile-de-France sans la Deuxième Couronne Barcelone Munich Lyon Berlin Manchester Aix-Marseille Lille En apparence, rien n a changé et la hiérarchie est respectée : Londres et Paris ont continué à bénéficier, en 2008, d investissements en bureaux dépassant de très loin ceux qui ont été effectués à Madrid, Francfort, Bruxelles, etc. Mais, quand on regarde les montants engagés, le retournement de conjoncture apparaît très nettement. Le recul est très net au niveau le plus global, sur l ensemble des investissements en immobilier d entreprise en Europe : de 244,1 milliards d euros en 2007, le total est revenu à 112,5 milliards, soit un niveau intermédiaire entre les années 2002 et 2003. Il faut toutefois rappeler que les montants enregistrés en 2006 et 2007 étaient d une ampleur exceptionnelle. Il y a bien eu une chute, mais en partant de très haut. Par ailleurs, la part de l investissement en immobilier d entreprise consacrée aux bureaux n a pratiquement pas fléchi. Elle représente toujours la moitié du total. Le recul des montants investis atteint une ampleur spectaculaire sur certains marchés, notamment en Allemagne : 86 % à Munich, 84 % à Francfort et Berlin, 76 % à Hambourg. Les deux grandes métropoles anglaises viennent ensuite, avec des replis de 69 % pour Londres et 67 % pour Manchester, devant Madrid (- 65 %) et Paris (- 57 %). Certes, Lille enregistre une évolution positive de 7 % ; mais, plus un marché est étroit, plus le comportement d un nombre restreint d opérateurs a un impact. Si la tendance générale est bien au reflux de l investissement, le recul a été plus marqué en ce qui concerne les investissements transfrontaliers que les investissements nationaux, ce qui est habituel en période de crise : quand l horizon s obscurcit, la tendance au repli sur soi s impose toujours. 8
Les prévisions pour 2010-2011 Les prévisions pour 2010 et 2011 demeurent, dans l ensemble, modestes, surtout dans les pays qui avaient connu avant la crise les marchés immobiliers les plus flamboyants. Si la santé financière des banques s améliore, le crédit reste rare, sous le double effet d une prudence accrue des prêteurs et du ralentissement de la demande. Enfin, la situation de l emploi devrait continuer à se détériorer en Europe, au moins jusqu au milieu de l année 2010. Moins d emploi, cela implique un moindre besoin de surfaces de bureaux Démographie. La population des pays d Europe de l Ouest progresse à un rythme modeste, à l exception notable de l Allemagne où elle commence à décliner après avoir touché un pic en 2003. Dans la plupart des cas, l accroissement s explique davantage par un solde migratoire positif que par l excédent naturel des naissances sur les décès ; c est notamment le cas en Espagne et, dans une moindre mesure, en Italie. La question se pose toutefois de savoir si, du fait de la crise, des pays comme l Irlande continueront à exercer le même pouvoir d attraction qu au cours des années précédentes. Les démographes se demandent également si la France, qui bénéficie d une natalité plus forte que la moyenne européenne, ne va pas connaître une ou deux années moins favorables du fait de la récession économique, ainsi que l étude des crises passées peut le laisser présager. Inflation. Le pouvoir d achat des Européens a bénéficié, en 2009, du recul des prix du pétrole par rapport aux sommets enregistrés en juillet 2008. Pendant plusieurs mois, la zone euro a enregistré en 2009 une baisse des prix exprimée en glissement sur douze mois. Cet effet de base (la référence à des niveaux très élevés enregistrés douze mois plus tôt) ne joue plus : pour le mois de novembre 2009, Eurostat a signalé le retour à la hausse des prix. Mais on ne peut parler d un retour de l inflation. En effet, pour l inflation sousjacente (hors prix volatils de l énergie et de l alimentation), la tendance est au ralentissement, du fait de la mollesse de la conjoncture. Selon les prévisions de la BCE, la hausse des prix à la consommation ne devrait pas excéder 1,3 % en 2010 et 1, 4 % en 2011 dans la zone euro. Comme de coutume, le Royaume- Uni devrait enregistrer des chiffres un peu supérieurs. Taux monétaires. Après avoir fortement baissé au quatrième trimestre 2008 et encore au premier trimestre 2009, les taux à long terme sont restés contenus. Les écarts entre pays ne sont pas négligeables : de 3,3 % en moyenne en 2009 en Allemagne selon les prévisions de l OCDE à 5,2 % en Irlande, en passant par 3,7 % en France et 4 % en Espagne. Conjugués à des chiffres d inflation eux-mêmes différents (pour reprendre les estimations 2009 des pays cités : 0,2 % pour l Allemagne, - 1,7 % pour l Irlande, 0,1 % pour la France et -0,4 % pour l Espagne), ils conduisent à des taux à long terme réels (moins l inflation) significativement divergents : de 3,1 % pour l Allemagne à 6,9 % pour l Irlande. Ces chiffres contribuent à expliquer les différences de comportement des marchés immobiliers. Chômage. La tendance générale à la baisse progressive du chômage s est interrompue en 2008. La remontée a été particulièrement rapide et spectaculaire en Espagne et en Irlande. La Norvège et les Pays-Bas se distinguent par des taux restés très modérés. Croissance. Les prévisions de croissance ont été significativement révisées au cours des derniers mois. L OCDE, selon les chiffres publiés en novembre 2009, crédite les douze pays retenus pour cette étude d une augmentation de leur PIB en 2010, avec deux exceptions significatives : l Irlande, qui aurait enregistré une chute de 7,5 % en 2009, serait encore en repli de 2,3 % en 2010 et l Espagne reculerait encore de 0,3 %. La Suède retrouverait dès 2010 un rythme de croissance de 2 %, devant l Allemagne et la France, toutes deux à 1,4 %. Néanmoins, le problème majeur des prochaines années va être la 9
L immobilier de bureaux en Europe recherche de nouveaux moteurs de croissance, face à une consommation contrainte (chômage élevé, salaires stagnants) et à des Etats soucieux de stabiliser les finances publiques. Pour les pays les plus touchés par la crise, cela implique la mise au point de nouveaux modèles économiques : c est vrai pour l Espagne, trop dépendante du secteur immobilier et de la demande intérieure, qui va devoir développer une offre de produits et de services plus compétitive au niveau international ; c est vrai aussi pour l Irlande, qui doit digérer une croissance très rapide au cours des années précédentes et ajuster ses salaires et ses prix. D une façon générale, la volonté de tous les pays industriels de profiter du dynamisme vite retrouvé de la zone Asie-Pacifique laisse présager des politiques commerciales agressives qui impliquent un contrôle encore resserré de tous les coûts (salaires, frais généraux). Horloge des valeurs locatives : Lyon Istanbul Horloge des loyers des bureaux au 4 e trimestre 2008 Amsterdam, Budapest Dusseldorf, Edinbourg, Francfort, Hambourg, Lisbonne Luxembourg, Munich, Paris, Rome, Pragues, Berlin, Stutgart, Vienne Hausse ralentie Bucharest, Helsinki, Milan Madrid, St Petersbourg Barcelone, Dublin, Oslo, Kiev, Moscou, Stockholm Baisse Bruxelles, Londres (City) Londres (West End), Varsovie Hausse Baisse ralentie Horloge des loyers des bureaux au 2 e trimestre 2009 Source : Jones Lang LaSalle Hausse ralentie Hausse Stutgart Dusseldorf, Rome Budapest, Luxembourg Lisbonne, Pragues Amsterdam, Hambourg Barcelone, Milan, Munich Francfort, Helsinki, Lyon, Baisse Berlin, Dublin Paris Baisse ralentie Londres, Moscou Kiev Varsovie Source : Jones Lang LaSalle 10
L évolution de l horloge des valeurs locatives est très significative : entre le quatrième trimestre 2008 et le deuxième trimestre 2009, beaucoup de villes ont basculé brusquement de la zone de hausse ralentie à celle de baisse. Ceci montre bien que les horloges de ce type présentent un grand intérêt (voir d un simple coup d œil à quel moment du cycle se situent les principaux marchés) et un danger : le temps mis à passer d une partie à l autre du cadran n est pas homogène. A la différence d une véritable horloge, il peut se rétrécir ou s allonger. En l occurrence, entre la fin 2008 et le début 2009, les aiguilles de l horloge ont avancé à un rythme accéléré. L ajustement des rendements à la situation réelle du marché de chaque ville devrait se poursuivre. Ainsi, à Dublin, celui des bureaux «prime» est passé de 3,5 % en 2006 à 4,8 % au deuxième trimestre 2008 puis à 7,5 % au deuxième trimestre 2009. Ce processus d ajustement des rendements devrait constituer un signal positif pour les investisseurs, qui se sont montrés très prudents depuis 2008. Toute la question est de savoir à quel moment il arrivera à son terme. Gérard Horny Senior Advisor, IEIF 11
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