Infections urinaires nosocomiales Dr Laurent HOCQUELOUX CHR d Orléans La Source "... le début de l'utilisation courante des sondes urinaires est parfois suivi d'une fièvre rémittente qui se termine souvent par la mort... Il est important qu'une telle fièvre, survenant au milieu d'une apparente santé en raison semblet-il d'une si petite cause, et qui conduit souvent (comme cela est certainement le cas) à une issue fatale, soit bien et largement connue..." Sir Andrew Clark- Lancet 1883 Rappels anatomiques Epidémiologie Enquête 1996-2001 (CCLIN-Ouest) : prévalence 2.7%, soit 40 % des infections acquises à l hôpital 3/4 des «infections»restent asymptomatiques Pas de sur-mortalité réelle, si l on tient compte des co-morbidités Fréquence du sondage Infections sur sonde U Prévalence globale de 10% (CTIN) : réanimation 57 % chirurgie 18 % médecine 8 % moyen séj. 8 % long séjour 3 % 17 % des sondes sont infectées 80% des IUN sont sur sonde sonde à demeure : RR d IUN x 14 C est pour un sondage 1
Epidémiologie IU au 1er rang des infections acquises à l hôpital E. coli reste prédominant Grande disparité des souches par comparaison aux IU communautaires Fréquence élevée de souches résistantes aux ATB Un rôle croissant des levures Facteurs de risque des IUN sur DM invasifs Facteur de risque OR Cathétérisation > 6jrs 5,1 6,8 Sexe féminin 2,5 3,7 Mise en place du cathéter hors du BO 2,0 5,3 Service d urologie 2,0 4,0 Autres sites infectés 2,3 2,4 Diabète 2,2 2,3 Dénutrition 2,4 Insuffisance rénale 2,1 2,6 Sac de drainage au dessus du niveau de la vessie 1,9 Le vrai problème de santé publique : réservoir de BMR D où: Réduire la transmission Réduire la pression de sélection Infections urinaires nosocomiales de l adulte Conférence de consensus co-organisée par la SPILF et l AFU 27 novembre 2002 - Paris Avec sociétés partenaires : SFHH, SFAR, SRLF Infections de l appareil urinaires nosocomiales de l adulte Conférence de consensus co-organisée par la SPILF et l AFU Version 2007 Le titre change «APPAREIL U.» On ne parle plus de bactériurie asympto mais de COLONISATION Force des recommandations A : il est fortement recommandé de faire B : il est recommandé de faire C : il est possible de faire ou de ne pas faire. D : il est recommandé de ne pas faire E : il est fortement recommandé de ne pas faire Niveau I : au moins un essai randomisé de bonne qualité, Niveau II : au moins un essai non randomisé, ou une étude cas / témoins Niveau III : opinion d expert, expérience clinique,étude descriptive, consensus professionnel 2
Question I : Définitions, physiopathologie, diagnostic biologique et épidémiologique des IUN. Question II : Qui traiter, quand et comment traiter? Question III : Les points débattus : Question I : Physiopathologie Mécanismes naturels de défense Inhibiteurs de l adhésion bactérienne Réponses inflammatoire et immunitaire Exfoliation des cellules urothéliales infectées Facteurs de promotion des IUN : sondes et autres dispositifs Altération des moyens naturels de défense Perturbation du transit urinaire Production d un biofilm manuportage Mesures de prévention Physiopathologie Définitions : Mécanismes d acquisition en présence de sonde : endoluminal : «système ouvert»+++, extraluminal : 2/3 des cas à la mise en place : faute d asepsie voie lymphatique ou hématogène Cas particuliers : IU suite à cystoscopie, KT sus-pubiens, lithotritie, étuis péniens, chez diabétique L arbre urinaire est stérile (sauf urètre distal) Colonisation = présence de micro-organisme(s) sans manifestation clinique = bactériurie asymptomatique (terme à abandonner) Une IU : 1. Au moins un des signes suivants : fièvre (>38 ), impériosité mictionnelle, pollakiurie, brûlures ou douleur, en l absence d autre cause infectieuse ou non... 2. une uro-culture positive Une IUN est acquise dans une structure de soins ou reliée à la prise en charge d un patient. (66% des IUN sont endogènes) Recueil des urines: Diagnostic biologique ECBU «recueillir l urine vésicale en évitant toute contamination lors de la miction par la flore commensale qui colonise l urètre et la région périnéale» (la ponction sus-pubienne est considérée comme la méthode la plus fiable ) 3
Diagnostic biologique : ECBU Recueil des urines: Patient non sondé : toilette locale préalable au savon, 2nd jet Sujet incontinent ou handicapé H : collecteur pénien, stérile ou «propre», F : sonde de petit calibre ou recueil par un soignant avec toilette préalable Porteur de sonde ne par rompre le caractère clos du collecteur prélèvement à partir du site de ponction ECBU Conditions de conservation et de transport des urines: noter l heure du prélèvement l urine ne doit pas séjourner plus de 2 h à T ambiante conservation à +4 C pendant 24 h il est possible d utiliser des systèmes de transport stabilisateurs utilisant Ac.borique en conditionnement stérile unitaire : conservation de 24 à 48 h à T ambiante ECBU Interprétation Bactériurie (ou candidurie) considérée si > à 10 3 ufc/ml = limite de quantification par la méthode usuelle, la leucocyturie n a pas d intérêt chez le patient sondé. Patient symptomatique sans sonde : IU si bactériurie >10 3 ufc/ml et leucocyturie >10 4 / ml Usage de la bandelette L intérêt majeur de la bandelette est sa praticabilité et sa valeur prédictive négative (VPN) > 95% chez le patient non sondé Pas de dépistage de colonisation chez patient sondé (EII) Question II : Qui traiter? Toutes les IUN bactériennes doivent être traitées (A) La colonisation ne doit pas être traitée par ATB (A I) valable quelque soit le micro-organisme (même Candida) Le traitement de la colonisation peut être justifié : neutropénique, immunodéprimés.. (A) Situation pré-op : chir. et explorations urologiques avec mise en place de prothèses (BII) Patients porteurs de prothèse articulaire, vasculaire ou cardiaque (CIII) Épidémie à BMR dans une unité hospitalière (CIII) Quand et comment traiter? S assurer de la perméabilité des voies urinaires et lutter contre le résidu mictionnel (A III) : obstruction, malformation, calcul? Identifier le MO responsable et connaître sa sensibilité usuelle aux ATB (A II) 4
Déterminer la durée du traitement (A II) IU sans atteinte parenchymateuse : < 7 jours Pyélonéphrite ou orchi-épididymite : 10 à 14 jours Prostatite aiguë : 21 jours Assurer une diurèse suffisante consensus pour un volume de 1,5l/24h pas d intérêt d une hyperdiurèse (E II) Si IU : retirer ou changer la sonde urinaire (A II) Question III : Généralités sur les mesures de Prévention Indications et durée du Sondage Vésical sont limitées au maximum et évaluées chaque jour (AII) indications valides : obstruction urinaire, chirurgie des voies urogénitales, cause médicale nécessitant la mesure de la diurèse, prévention de la macération et de l infection d escarre sacrée chez le patient alité... Sonde enlevée dès qu elle n est plus nécessaire Mesures de prévention chez le patient sondé Le principe du système clos doit impérativement être mis en place (AII) Pose de la sonde à demeure avec asepsie : désinfection des mains, G stériles, matériel stérile (CIII) impact + de la pose au BO (expérience + ambiance chirurgicale?) Toilette quotidienne effectuée avec un savon doux médical (BII) lors de la toilette après chaque selle en cas de souillure Les systèmes de sondage (sonde - sac collecteur) pré-scellés doivent être préférés et retenus de manière plus systématique lors des achats de ce type de dispositif médical. Platt - 1983 90 80 70 60 Taux 50 Clos d'incidence cumule Ouvert 40 (%) 30 20 10 0 1 2 3 4 5 6 7 Jours après sondage Mesures de prévention chez le patient sondé Sac de recueil en position déclive (BIII) Changement routinier et programmé de la sonde n est pas préconisé (D III) Lavage- irrigation n est pas préconisé (E II) Cathéters enduits d ATB n ont pas fait preuve de leur efficacité (E I) Cathéters imprégnés d argent n ont pas fait preuve de leur efficacité (D III) 5
Alternatives au sondage à demeure Cathéter sus pubien en alternative au sondage au long court n a pas montré sa supériorité (D III) Étui pénien préférable si médicalement possible (B III) Sondage intermittent préférable en alternative au sondage à demeure (CIII) Échographie sus-pubienne préférable au sondage pour mesurer le résidu vésical (B III) Spécificité chez le patient avec vessie neurologique Autosondage propre préféré à l hétérosondage (BII) risque augmente au delà de 3 autosondages/j risque augmente si volume > 400 ml fréq. de l autosondage > ou = à 4 fois/j Les sondes auto ou pré lubrifiées peuvent être utilisées pour l auto sondage (B III) La désinfection du méat avant l autosondage n est pas nécessaire (D III) Le jus de canneberge, l acide ascorbique sont susceptibles de prévenir les IU (C III) / acidification des urines Précautions standards dans la prévention des IUN Un isolement géographique est recommandé pour les patients sondés, infectés ou colonisés (A II) la désinfection des mains par frictions hydroalcoolique est fortement préconisée (A II) Promouvoir la désinfection des mains par un programme de formation continue (A II) Le port permanent de gants sans changement entre les malades est à proscrire (E II) La mise en place d un programme de surveillance et de prévention efficace (B II) Critères res de qualité de la pose (% conformité) - Audit CCLIN SO CIBLE Sonde fixée Position déclive Asepsie rigoureuse Port de gants Lavage antiseptique Antisepsie méat Toilette périnéale complète Lavage simple Vérification prescription 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Taux d'iun 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 Evolution décennale des IUN sur sonde au CHU Lyon-Sud 39 26 Drainage clos protocole 18 SAD Relances périodiques 14 IDE référentes film HCL trousse 1982-83 1984-85 1986-87 1992 6
Conclusions Recommandations assorties de niveau de preuve niveau de force de la recommandation Nombreux gestes recommandés dans les protocoles actuels doivent être révisés et actualisés Importance : d une formation d un programme de surveillance et de prévention efficace 7