ACTUALITE PATRIMONIALE Janvier Mars 2013 1
SOMMAIRE Actualité patrimoniale et juridique p. 3 Le gage du contrat d assurance-vie suspendant la désignation du bénéficiaire fait entrer le capital dans la succession (BOI-ENR-DMTG- 10-10-20-20) L administration modifie le calcul de la quote-part de frais et charges en cas de plus-value de cession de titres de participation (BOI-IS- BASE-20-10-10-20130212 et BOI-IS-GPE-20-20-60-20130212) Projet de loi et Réforme p. 5 Assujettissement des œuvres d art à l ISF (Proposition de loi n 795) Suisse : augmentation des impôts pour les résidents étrangers Jurisprudences p. 5 Précisions sur la détermination du domicile fiscal (CE, 9 ème s.-sect., 26 décembre 2012, n 336674) Démembrement de propriété et bénéfices non distribués (Cass., ch. Com., 18 décembre 2012, n 11-27745) Une instruction non reprise dans la base Bofip doit être regardée comme rapportée (CE 27 février 2013 n 357537) Réponses ministérielles p. 7 Pacte Dutreil : les conséquences de la renonciation de l usufruitier à ses droits de vote (Réponse ministérielle, Marie-Hélène Des Esgaulx, 17 janvier 2013) Précisions sur l applicabilité de l Exit tax aux contrats d assurance-vie détenus par une société civile (Réponse ministérielle, Daphna Poznanski- Benhamou, 22 janvier 2013) 2
Dernière Minute p. 9 La mise en place de la taxe européenne sur les transactions financières se précise Projet de loi de Finances 2014 : la création d un nouveau contrat d assurance-vie (Rapport sur l épargne des députés Karine Berger et Dominique Lefebvre) 3
ACTUALITE PATRIMONIALE ET JURIDIQUE LE GAGE DU CONTRAT D ASSURANCE-VIE SUSPENDANT LA DESIGNATION DU BENEFICIAIRE FAIT ENTRER LE CAPITAL DANS LA SUCCESSION (BOI-ENR- DMTG-10-10-20-20) L administration fiscale a intégré dans ses commentaires les conclusions d un arrêt de la Cour de cassation du 9 février 2012 (Cass., 2 ème civ., 9 février 2012, pourvoi n 11-12109) aux termes desquelles la suspension de la désignation du bénéficiaire du contrat d assurance-vie, par l avenant de mise en gage, équivaut à une absence de désignation de bénéficiaire pendant la durée de cette suspension. La Cour de cassation statuait en effet ainsi : «Par suite du gage et pendant la durée de la suspension de la désignation des bénéficiaires, l administration fiscale est en droit d opposer aux héritières [ ] les dispositions de l article L 132-11 du Code des assurances selon lequel lorsque l assurance en cas de décès a été conclue sans désignation d un bénéficiaire, le capital ou la rente garantis font partie du patrimoine ou de la succession du contractant». Dès lors, le capital est réintégré à l actif successoral et soumis aux droits de successions. L ADMINISTRATION MODIFIE LE CALCUL DE LA QUOTE PART DE FRAIS ET CHARGES EN CAS DE PLUS-VALUES SUR TITRES DE PARTICIPATION (BOI-IS- BASE-20-10-10-20130212 ET BOI-IS-GPE-20-20-60-20130212) Les plus-values sur titres de participation sont exonérées d impôt sur les sociétés à la double condition que les titres représentent au moins 5% du capital de la participation, et que la durée de détention soit au moins égale à 2 ans. Les entreprises qui réalisent des plus-values répondant à ces critères doivent cependant réintégrer dans leur résultat imposable une quote-part pour frais et charges. L article 22 de la loi de Finances pour 2013 avait porté le taux de cette quote-part de frais et charge réintégrée de 10% à 12%. Le 12 février dernier, l administration a pris en compte ces 4
modifications dans le cadre de la mise à jour BOFIP. Désormais, le montant à réintégrer dans l assiette imposable est calculé sur le montant brut des plus-values de cession à long terme de titres de participation de l exercice, et non plus sur le montant net de ces mêmes plus-values. PROJET DE LOI ET REFORME ASSUJETTISSEMENT DES ŒUVRES D ART A L ISF (Proposition de loi n 795) Aux termes de l article 885 I du CGI, les objets d antiquité, d art ou de collection ne sont pas compris dans les bases d imposition à l impôt de solidarité sur la fortune. Il s agit notamment des tapis et tapisseries, tableaux, peinture et dessins à la main, gravures, estampes et lithographies originales. Le député UMP des côtes d Armor, Marc Le Fur, récidive en déposant une proposition de loi le 13 mars 2013 visant à assujettir les œuvres d art à l ISF. En effet, deux ans plus tôt, ce dernier avait proposé avec d autres députés un projet de loi en ce sens pour plus de justice fiscale. SUISSE : AUGMENTATION DES IMPOTS POUR LES RESIDENTS ETRANGERS L administration a confirmé avoir rapporté, depuis le 12 septembre dernier, sa doctrine permettant aux résidents soumis au forfait suisse de se protéger contre la double imposition en matière d impôt sur le revenu et la fortune (BOI-INT-CVB-CHE-10-10 du 26 décembre 2012 n 70). Désormais, concernant les revenus perçus à compter de 2013, seul le droit français est compétent. Cette mesure touche les expatriés fiscaux qui continuent à avoir une activité professionnelle en France ou à y toucher des dividendes, mais qui n y payaient pas d impôt car domiciliés fiscalement en Suisse. Un projet de nouvelle convention fiscale franco-suisse portant sur les droits de succession a été paraphé en août 2012. S'il est adopté, il changera radicalement la donne, et sera a priori applicables aux décès intervenant après le 1 er janvier 2014. 5
Ainsi, sous l empire des nouvelles dispositions, la succession d une personne résident fiscal suisse sera imposée en France si ses héritiers ou légataires sont résidents fiscaux français au moment du décès, et ce depuis au moins 6 ans au cours des 10 années précédant le décès. La Convention franco-suisse de 1953 posait le principe de l imposition de la succession dans l Etat de résidence du défunt au jour du décès. Par exception, les biens immobiliers étaient imposés dans le lieu de situation de l immeuble. Or, la Convention n assimilait pas les parts de sociétés immobilières à des biens immobiliers. L exception pouvait donc aisément être contournée afin de bénéficier de l impôt suisse. Cela ne sera désormais plus possible. L avenant prévoit en effet de redéfinir la notion de bien immobilier pour y inclure les parts de sociétés à prépondérance immobilière, et de ce fait, attribuer leur imposition à l Etat de situation de l immeuble. En outre, le risque de double imposition était écarté par l exonération des droits de succession dans l un des Etats, dès lors que l imposition était attribuée à l autre Etat contractant. Les nouvelles dispositions prévoient de modifier cette méthode en la remplaçant par celle de l imputation. Dès lors, l impôt acquitté dans l un des Etats contractant est pris en compte pour le calcul de l impôt dû dans l autre Etat. Cette méthode revient en pratique à retenir l impôt le plus élevé, c est-à-dire l impôt français. JURISPRUDENCES PRECISIONS SUR LA DETERMINATION DU DOMICILE FISCAL Pour de nombreux contribuables, le critère déterminant du domicile fiscal est celui de la durée de séjour. Or, comme le Conseil d Etat vient de le rappeler dans un récent arrêt, ce critère reste subsidiaire quant à la notion de foyer fiscal. Ainsi, après avoir relevé que les requérants recevaient et acceptaient du courrier dans leur logement situé en France, qu ils étaient inscrit en France sur une liste électorale, qu ils étaient abonnés en France à des services d eaux et d électricité enregistrant des consommations et que leurs relevés de comptes français faisaient apparaître des dépenses effectuées en France, le Conseil d Etat statue : «les requérants ne sauraient utilement faire valoir que la durée de leur séjour en France au cours des années considérées ne pouvait les faire regarder comme ayant eu en France le lieu de leur séjour principal dès lors que la cour ne s est pas fondée, pour établir leur domiciliation fiscale en France, sur ce critère, subsidiaire, [ ] mais sur le critère prioritaire du foyer». CE, 9 ème s.-sect., 26 décembre 2012, n 336674 6
DEMEMBREMENT DE PROPRIETE ET BENEFICES NON DISTRIBUES Dans cette affaire, des parents détenaient l usufruit de la majorité des parts d une société civile, et avaient vocation à percevoir ensemble 95% des bénéfices distribués, leurs enfants détenant la nue-propriété de ces mêmes parts. Par décision d assemblée générale, les associés ont voté à l unanimité, pour une durée de 5 ans, une répartition des bénéfices à proportion de 17% pour les parents et 30.5% pour chacun des enfants. L administration fiscale a alors considéré qu en renonçant à 61% de leurs droits à distribution des bénéfices au profit de leurs enfants, les parents avaient consenti une donation indirecte à leur profit et a assujetti ces derniers aux droits de mutation à titre gratuit. La Cour de cassation rejette la requalification de l administration fiscale au motif que «les bénéfices réalisés par une société ne participent de la nature des fruits que lors de leur attribution sous forme de dividendes, lesquels n ont pas d existence juridique avant la constatation de l existence de sommes distribuables par l organe social compétent et la détermination de la part attribuée à chaque associé, de sorte que M. et Mme X, n ayant été titulaires d aucun droit, fut-il affecté d un terme suspensif, sur les dividendes attribués à leurs enfants, soumis à l imposition litigieuse, n ont pu consentir aucune donation ayant ces dividendes pour objet». Cass., Ch. Com., 18 décembre 2012, n 11-27745 UNE INSTRUCTION NON REPRISE DANS LA BASE BOFIP DOIT ETRE REGARDEE COMME RAPPORTEE L administration fiscale a réuni dans une base documentaire, accessible en ligne, l ensemble de ses commentaires portant sur les dispositions fiscales en vigueur. Baptisée «Bulletin officiel des finances publiques Impôts», elle se substitue, depuis le 12 septembre 2012, à tous les autres fonds documentaires, et notamment au «Bulletin officiel des impôts». En pratique, les nouveaux commentaires sont directement intégrés dans une base consolidée. Dans un arrêt du 27 février 2013 (n 357537), le Conseil d Etat confirme qu une doctrine non reprise dans la base Bofip est inapplicable à compter du 12 septembre 2012. Lors d un recours pour excès de pouvoir, il atteste qu une instruction non reprise dans cette base doit être regardée comme annulée. Cependant, un avis de la Haute Juridiction Administrative en date du 8 mars 2013 7
(n 353782) indique que le contribuable peut se prévaloir de cette même interprétation exprimée sur un autre support doctrinal. REPONSES MINISTERIELLES PACTE DUTREIL : LES CONSEQUENCES DE LA RENONCIATION DE L USUFRUITIER A SES DROITS DE VOTE Le 17 janvier dernier, le gouvernement a précisé les conséquences de la renonciation de l usufruitier à ses droits de vote en présence d un pacte Dutreil. Dans le cadre d un pacte Dutreil, il est en effet possible de bénéficier de l exonération partielle en cas de donation consentie avec réserve d usufruit dès lors que les droits de vote de l usufruitier sont limités par les statuts aux seules décisions concernant l affectation des bénéfices. La sénatrice Marie-Hélène Des Esgaulx avait sur ce point posé la question de savoir ce qu il en était de l exonération partielle lorsque l usufruitier renonçait à l intégralité de ses droits de vote au bénéfice du donataire. Le gouvernement a ainsi indiqué que cette renonciation «ne fait pas obstacle à l application du régime de faveur [ ] sous réserve toutefois que cette renonciation figure dans les statuts». Réponse ministérielle, Marie-Hélène Des Esgaulx, 17 janvier 2013. PRECISIONS SUR L APPLICABILITE DE L EXIT TAX AUX CONTRATS D ASSURANCE-VIE DETENUS PAR DES SOCIETES CIVILES L article 167 bis du Code général des impôts exclut explicitement du champ d application de l Exit tax les actions de SICAV. D autre part, dans ses commentaires sur le dispositif, l administration a exclu les parts de FCP du domaine d imposition des plus-values latentes à l occasion du transfert de domicile fiscal hors de France (BOI-RPPM-PVBMI-50-10-10-20 n 20). 8
Ainsi, les parts ou actions d'opcvm (Sicav, FCP) détenues directement par le contribuable transférant son domicile fiscal hors de France sont exclues du champ d'application du dispositif. Il en est de même, en raison de leur nature, des contrats d'assurance-vie ou de capitalisation détenus par le contribuable. En vue de traiter à parité les contribuables selon qu'ils détiennent des parts ou actions d'opcvm ou des contrats d'assurance-vie ou de capitalisation directement ou via une société interposée, il est admis d'exclure du champ d'application du dispositif d'«exit tax» prévu à l'article 167 bis du CGI les titres de sociétés civiles de portefeuille dont l'actif est exclusivement constitué de parts ou actions d'opcvm et/ou de contrats de capitalisation ou d'assurance-vie. Réponse ministérielle, Daphna Poznanski-Benhamou, 22 janvier 2013. DERNIERE MINUTE LA MISE EN PLACE DE LA TAXE EUROPEENNE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIERES SE PRECISE Pour mémoire, le 8 mars 2011, le Parlement européen invitait la Commission et le Conseil à œuvrer en faveur de l adoption d une taxe sur les transactions financières au niveau européen. La taxe serait ainsi prélevée sur toutes les transactions sur instruments financiers entre institutions financières lorsqu au moins l une des parties à la transaction se situe dans l Union européenne. L achat ou la vente d actions ou d obligations serait taxé à un taux minimal de 0.1% et la conclusion de contrats dérivés à un taux minimal de 0.01%. La Commission proposait de rendre effective cette taxe dès le 1 er janvier 2014 et qu elle se substituerait à tout système de taxation équivalent déjà applicable ou qui serait appliqué entre temps dans l Union européenne. Le 23 octobre dernier, la Commission concluait que toutes les conditions juridiques étaient réunies et que les 10 Etats (dont la France) qui souhaitaient l introduire devaient y être autorisés. Depuis le 16 janvier dernier c est chose faite : les Etats membres qui en ont l intention ont reçu feu vert sans équivoque des députés européens. Le texte adopté souligne que l objectif final est la mise en place d une taxe sur les transactions financières au niveau mondial. Il reste désormais au Conseil 9
statuant à la majorité qualifiée à approuver la coopération renforcée, ce qui devrait être chose faite dans les prochaines semaines. PROJET DE LOI DE FINANCES 2014 : LA CREATION D UN NOUVEAU CONTRAT D ASSURANCE-VIE Le rapport Berger-Lefebvre recommande la création d un nouveau contrat d assurance-vie. Il serait question d un contrat «hybride» alliant les contrats mono-supports (fonds euros et sécurité) et multi-supports (unités de compte et risque accru). «En contrepartie d une garantie en capital qui offre un rendement minimal supérieur à celui des contrats en euros, les possibilités de retrait seraient moins faciles». Or, les contrats d assurance-vie sont avantageux parce qu ils permettent de soustraire des fonds à tout moment. Le rapport ne devrait pas conduire à un remaniement conséquent du régime fiscal de l assurancevie, d autant que François Hollande et Pierre Moscovici ont promis de ne pas y toucher Rapport sur l épargne des députés Karine Berger et Dominique Lefebvre 10