TUMEURS DES GLANDES SALIVAIRES BONDUE Clémence CHU-Amiens Tuteur: Dr FOURQUET
PLAN 1. Généralités - Anatomie - Epidémiologie descriptive et analytique 2.Bilan initial 3.Anatomopathologie 4. Staging 5. Traitement Généralités Maladie localisée Récidive et maladie métastatique 6. Conclusion
1 GÉNÉRALITÉS
ANATOMIE Glandes salivaires principales (majeures) : - Glandes parotides (GP) - Glandes sous-mandibulaires (GSM) - Glandes sublinguales (GSL) Glandes salivaires accessoires (mineures) (GSA) : réparties dans la muqueuse VADS (surtout cavité buccale)
Division du nerf facial extra-crânien 2 lobes: superficiel (3/4)/profond (1/4)
3 RÉGIONS CRITIQUES Le bord inférieur de la parotide Région submandibulaire Lobe profond Lobe profond Espace para-pharyngé Espace ptérygo-maxillaire
De part et d autre du muscle mylo-hyoidien
DRAINAGE GANGLIONNAIRE DES GLANDES SALIVAIRES MAJEURES GP GSM GSL
EPIDEMIOLOGIE DESCRIPTIVE Incidence faible: 1/100 000 5% des tumeurs malignes des VADS Age moyen de survenue : 60 ans Sex ratio: 1 Evolution métastatique à distance: < 20 % (sauf pour les CAK) Localisation anatomique (tous types de tumeurs malignes ou bénignes) GP +++ (80 à 85%) > GSM > GSA > GSL On distingue également > 90% : tumeurs primitives des glandes salivaires (bénignes ou malignes) < 10% : métastases ganglionnaires intraglandulaires (GP +++) : lymphome, carcinome surtout cutané, mélanome Guzzo M et al. Crit Rev Oncol Hematol 2010
Malignité en fonction de la localisation Malignité GSL (90%) GSA (75%) GSM (45%) GP (25%) + la glande est petite le pronostic est bon D après Myers et al. 1996
EPIDÉMIOLOGIE ANALYTIQUE Peu de facteurs connus Radiations ionisantes (Hiroshima, Hodgkin, K de l enfant) Tabac (surtout pour les tumeurs bénignes de Warthin, pas clair pour les autres) Infections virales (VIH, EBV et carcinome lymphoépithélial, HPV controversé +++) Facteurs environnementaux et industriels (caoutchouc, coiffeurs, produits de beauté, les composés du Nickel) Chowdhry AK et al. Cancer 2015 Boukheris H et al. IJROBP 2013 De RU JA et al. B-ENT 2005
2. BILAN INITIAL
BILAN CLINIQUE Age, ATCD (cancer cutané +++), OMS Interrogatoire : date d apparition de la masse, évolutivité, douleur Examen cervico-facial et endobuccal (schéma daté et signé) Taille de la lésion, consistance, mobilité et fixité aux plans superficiels et profonds Extensions muqueuses Examen des paires craniennes +++ (VII, V, XII) Aires ganglionnaires cervicales Recherche d un Itif cutané Recherche de signes de malignité: - Atteinte paires craniennes (PF +++) - trismus -perméation cutanée Examen clinique général Bilan préthérapeutique : état buccodentaire et nutritionnel
BILAN PARACLINIQUE (1) Objectifs de l imagerie Rechercher des critères de malignité vs bénignité (valeur d orientation) Définir l extension intra vs extra glandulaire Evaluer l extension locale et aux structures de proximité Rechercher de métastases ganglionnaires et à distance
BILAN PARACLINIQUE(2) IRM cervico-faciale avec injection+++ : Examen de référence pré-opératoire Evalue l extension locale +++ (meilleur contraste dans les tissus mous) Recherche une infiltration des tissus mous adjacents et des espaces profonds de la face, une atteinte périneurale, une extension intracranienne Importance +++ dans la planification du geste chirurgical TDM cervico-thoracique avec IV Recherche atteinte osseuse corticale mandibulaire ou temporale associée Recherche de métastases ganglionnaires cervicales et thoracique Echographie Examen de débrouillage souvent fait en 1 ère intention (facilité d accès, faible cout) Interet pour guider les prélèvements Pas d interet pour la planification du geste d exérèse TEP-TDM au 18 FDG Pourrait avoir un interet en cas de tumeur maligne localement évoluée Pas d interet dans la discrimination tumeur maligne vs bénigne
IRM : Adénome pléomorphe de la parotide droite Aspect typique: bien limitée, contours lobulés Hyposignal T1 Hypersignal T2 Réhaussement homogène
IRM: Adénocarcinome de la parotide gauche La tumeur est de contours irréguliers, très invasive avec une infiltration du masséter en pondération T2 (B) et après injection (C) ; L hypo-intensité de signal en T2 est un argument supplémentaire pour la malignité
BILAN PARACLINIQUE(3) Confirmation histologique préopératoire indispensable avant tout geste d exérèse large pour une tumeur maligne Ponction cytologique à l aiguille fine échoguidée pour examen cytologique - Se = 73 à 93% - Sp= 85 à 98 % - Avantages : stratégie pré-thérapeutique définie, réduction possible du nombre d interventions chirurgicales, information du patient du risque possible de sacrifice du nerf facial et/ou de curage ganglionnaire - Inconvénients: Expérience du cytologiste, difficultés diagnostiques, FN et FP Chirurgie d exérèse avec Extemporanée : Standard Biopsie chirurgicale option si inextirpable, biopsie-exerèse pour tumeurs des GSA Fine-needle aspiration of the Salivary Glands, Zapanta et al.
3.ANATOMOPATHOLOGIE
OBJECTIFS ANATOMOPATHOLOGIQUES Diagnostic de néoplasie maligne versus bénigne Type histologique Grade histopronostique Qualité des marges de résection (classification UICC R) Invasion tumorale périneurale Emboles vasculaires Effraction de la capsule Envahissement des tissus mous adjacents Nb total de gg, taille et site exact, présence ou non de RC et d emboles lymphatiques Difficulté : groupe très hétérogène de tumeurs rares
CRITÈRES EN FAVEUR MALIGNITÉ Infiltration des tissus adjacents Invasion périneurale ou vasculaire Activité mitotique augmentée Pléomorphisme cytologique
Classification histologique de l OMS 2005 50% de l ensemble des tumeurs salivaires malignes 50% de l ensemble des tumeurs salivaires 24 types de tumeurs épithéliales malignes et 12 types de tumeurs épithéliales bénignes Tumours of the Salivary Glands, WHO, Lyon 2005. p. 209
GRADE HISTOPRONOSTIQUE DES TUMEURS MALIGNES PRIMITIVES DES GLANDES SALIVAIRES D APRES LES RECOMMANDATIONS DU REFCOR 2009 Pour les CAK l intérêt du grading est plus débattu Dillon PM et al. HN 2016
TUMEURS BÉNIGNES: ADENOME PLEOMORPHE 50 % des T. salivaires 60-70 % des T. parotidiennes Age: 30-50 ans Arrondie ferme ou plus molle, bosselée Récidives locales fréquentes en cas d énucléation simple (dans la parotide, une lobectomie parotidienne superficielle avec préservation du facial est recommandée) Transformation maligne < 5% Petites travées de cellules régulières épithéliales mêlées aux cellules myoépithéliales, de plus grande taille, au sein d un abondant stroma myxoïde et fibreux.
T U M E U R S M A L I G N E S : C A R C I N O M E A D E N O I D E K Y S T I QUE Surtout GSA (palais) 12 % des T. malignes Localement agressive Envahissement périnerveux +++ Nodule rouge ou bleuâtre, mal-limité avec zones kystiques Survie à 5 ans = 80-90% à 10 ans = 35% Récidives/Métastases tardives Carcinome adénoïde kystique. Prolifération faite de tubes de taille variable bordés par des cellules de petite taille.
4.STAGING
CLASSIFICATION TNM (2009) Pour les cancers des GP, GSM, GSL Les cancers des GSA sont stagés selon leur site anatomique d origine
STADIFICATION
5.TRAITEMENT
GENERALITES (1) Niveau de preuve faible : pas d essai randomisé Repose essentiellement sur des données rétrospectives et des expériences de centre La plupart des données publiées concernent la GP
GENERALITES (2) CHIRURGIE : EXERESE large +/- Curage Pierre angulaire du traitement Doit être R0 RADIOTHERAPIE : - Post-opératoire selon l extension, le grade, la qualité de l exérèse, les facteurs de risque de récidive. La RT post op pourrait améliorer à la fois le CL et la SG (données rétrospectives SEER, HR SG = 0.76 IC95% 0.65-0.89) - Exclusive si patients non-opérables, refusant la chirurgie, tumeurs non-résecables - Les grands principes sont communs avec les CE VADS (niveaux de dose, technique, volume) CHIMIOTHERAPIE : Indications (très) limitées Mahmood U et al. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 2011
MALADIE LOCALISEE
CHIRURGIE DE LA PAROTIDE Résection complète avec préservation NF +++ sauf si envahissement (un R1 sur le NF est acceptable, pas de résection «prophylactique» du NF pour être R0) Monitoring peropératoire du NF Parotidectomie partielle avec conservation NF (superficielle ou conservatrice) en cas de TB Parotidectomie totale avec conservation NF (sinon greffe nerveuse si possible) si possible en cas de TM Complications PF temporaire ou définitive Syndrome de Frey Hypoesthésie territoire nerf grand auriculaire Fistule salivaire Saignement/Hématome Syndrome de la première bouchée
CHIRURGIE(2) GSM Résection large en bloc par voie externe de la GSM en cas de tumeur maligne (+/- élargie aux tissus adjacents en fonction du bilan préopératoire) Difficultés : prox artère/veine faciale, branche mandibulaire du NF, nerf hypoglosse (XII) et lingual (V3), canal de Wharton GSL Résection large de la GSL, du plancher antérieur et de la GSM homolatérale (le canal de Wharton sera de toute façon enlevé) GSA Traitement en fonction du site atteint
(1) Armstrong 1992; (2) Coiffier 1996 CURAGE GANGLIONNAIRE N0 clinique et radiologique : Curage électif II, III, IV : -systématique OU - si haut risque de métastases occultes ( haut grade, taille, atteinte nerveuse et localisation) N+ Clinique ou radiologique: Curage homolatéral IB, II, III, IV, +/- V (accord d experts) Bilatéral si tumeur médiane Concerne IB +/- II III pour sous-mandibulaire et sublinguale Controverse N0 clinique et radiologique
RADIOTHERAPIE: INDICATIONS Tumeur primitive: -Lit opératoire: Taille de + 4 cm (pt3) Localisation GSM, GSL, GSA Grade élevé de malignité CAK Atteinte du n. facial Invasion péri-neurale, lymphatique, vasculaire pn+ RC+ R1 ou R2 54-60 Gy, 66 Gy si R1 ou Extension extracapsulaire -RT exclusive: Patient inopérable tumeur nonrésécable 66-70 Gy Recorad Servagi-Vernat et al.,radiotherapy of carcinoma of the salivary glands, Cancer Radiothérapie 2016
RADIOTHÉRAPIE: INDICATIONS (2) Aires ganglionnaires homolatérales: En situation post-opératoire: - 50 Gy si pn0-54-60 Gy si N+ - 66 Gy si RC En situation RXT exclusive: - Adénopathies envahies : 66-70 Gy - Aires ganglionnaires : 50 Gy -Irradiation bilatérale si dépassement de la ligne médiane, Adénopathies multiples
DÉFINITION DES VOLUMES En post-opératoire: - CTV lit opératoire et CTV ganglionnaire post-opératoire - CTV ganglionnaire prophylactique : Aires II, III, et IV si pn0 pour tumeur de plus de 4 cm, Grade élevé, R1, Tumeur récidivante - L aire IB est incluse si adp IIA et l aire IV en cas d adp dans aires IIB, III, ou IVB - En exclusif - GTV tumoral et GTV ganglionnaire + marge de 5 mm en tenant compte des barrières anatomiques.
TECHNIQUE La technique de RCMI doit être utilisée chaque fois que possible Différences avec les CE ORL Irradiation le + souvent unilatérale : la protonthérapie pourrait avoir un intérêt en cas de tumeur en place (diminution de la dose aux OAR) Romesser PB et al. Radiother Oncol 2016 Tumeur considérees comme peu radiosensibles : l escalade de dose via les particules lourdes pourrait avoir un interet Jensen AD et al. IJROBP 2015 Jensen AD et al. Radiat Oncol 2016
CHIMIOTHÉRAPIE Aucune indication de la chimiothérapie seule, que ce soit en traitement néoadjuvant ou adjuvant Pas de bénéfice en survie pour l ajout de la CT concomitante à la RT post opératoire (analyse rétrospective NCDB), essai phase II randomisée RTOG 1008 en cours Amini A et al. JAMA Otolaryngol Head Neck Surg 2016 Aucune donnée sur l ajout de CDDP concomitant à la RT en cas de tumeur en place (à proposer si CE)
RADIOTHÉRAPIE ET ADÉNOMES PLÉOMORPHES PAROTIDIENS RÉCIDIVANTS Récidives fréquentes Radiothérapie post-opératoire à discuter: - Envahissement du lobe profond - Existence de 3 récidives avec envahissement du lobe profond - Tumeur de + de 5 cm - Résection incomplète Pas d irradiation des aires ganglionnaires prophylactiques 50 Gy 2Gy/f Controversée Jardel et al., Radiation therapy for pleomorphic adenoma of the parotid. Cancer Radiotherapie 2014
MALADIE LOCALISEE : SYNTHESE
TUMEURS DE BAS GRADE T1a, T2a, N0
TUMEURS DE BAS GRADE T1a et T2a, N1 ou T1b à T4 quel que soit N
TUMEURS HAUT GRADE
RÉCIDIVE ET MALADIE METASTATIQUE
RÉCIDIVE ET MALADIE MÉTASTATIQUE Métastases à distance : poumon > foie > os Particularités : CAK avec métastases pulmonaires lentement évolutives et pouvant apparaitre jusqu à 20 ans après la PEC initiale Niveau de preuve encore + faible dans cette situation, aucun essai randomisé
CHIMIOTHERAPIE Dans le cadre d essais (Niveau de preuve D) Pas de preuve de l efficacité en situation métastatique Mono-chimiothérapie: 5-FU,Cisplatine:10-40% de réponse Paclitaxel, Carboplatine: Pas d efficacité Vinorelbine Combinaisons : Vinorelbine+ Platine Adriamycine +5-FU +Cisplatine : 30-60 % de réponse
CISPLATIN+VINORELBINE TREATMENT OF RECURRENT OR METASTATIC SALIVARY GLAND MALIGN ANCIES (RMSGM) A FIN AL REPORT ON 60 C ASES Airoldi et al., Am J Clin Oncol 2014 Résultats similaires en 1ere ligne si association selon schéma CAP ou VNB + Platine Dreyfuss et al.,cyclophosphamide, doxorubicin, and cisplatin combination chemotherapy for advanced carcinomas of salivary gland origin. Cancer. 1987;60: 2869 2872 Airoldi et al.,phase II randomized trial comparing vinorelbine versus vinorelbine plus cisplatin in patients with recurrent salivary gland malignancies.. Pas d efficacité en 2 e ligne/toxique Pas de phase III
6. CONCLUSION
TAKE HOME MESSAGES Tumeurs rares (REFCOR) Groupe de tumeurs hétérogènes Localisation anatomique Anatomopathologie (bénignes et malignes) Comportement biologique IRM pré-opératoire systématique Traitement standard des tumeurs malignes (faible niveau de preuve) Chir + RT adjuvante Essais cliniques
MERCI DE VOTRE ATTENTION