Étude nationale sur les comportements violents chez les schizophrenes

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Transcription:

Gaud MA DCEM4 Étude nationale sur les comportements violents chez les schizophrenes J Swanson et al article original, The archives general of psychiatry, mai 2006

Pour le grand public, les maladies mentales sont associées à la violence: 61% des américains pensent qu il est vraisemblable qu un schizophrène agresse une autre personne 48% des français pensent que les schizophrènes sont dangereux pour les autres En réalité moins de 1 homicide sur 20 serait lié à la maladie mentale.

Objectifs de l etudel Étudier: Prévalence des comportements violents chez les schizophrènes Rechercher parmi plusieurs facteurs cliniques ou autres ceux qui sont fortement associés aux comportements violents

Malades Données de CATIE (Clinical Antipsychotic Trials of Intervention Effectiveness)(national institue of mental health, US) Étude nationale coût/efficacité des antipsychotiques Essai randomisé 01/01/01 au 04/12/04 Différents centres Reflet population US: villes/campagne, états Patients hospitalisés ou vus en consultation

Criteres d inclusion/exclusiond Inclusion 18-65 ans Critères Δg DSM IV Traitement oral possible Ttt optimal (efficacité/tolérance) Capacité de choisir de participer à l essai

Exclusion 1er épisode Tbe schizo affectif Retard mental ou autre tbe cognitif Refus de ts les ttt proposés ou ATCD de résistance au ttt Grossesse, allaitement Tbe somatique grave IdM dans les 6 derniers mois, IC, TdR, TdC 1460 patients sélectionnés sur 1894

Variables mesurees Évaluation des comportements violents Mac Arthur Community Violence interview Violence mineure Agression sans arme, pas de blessure engendrée Violence majeure Utilisation d une arme dangereuse, victime blessée, ou agression sexuelle Violence sans distinction Informations apportées par le patient ou par ses proches

Autres variables analysées Contact social (Duke social support scale) Tbe du comportement dans l enfance Sévérité de la maladie (clinical global impression scale) Symptômes dépressifs (Calgary dépression scale for schizophrenia) Reconnaissance de la maladie et de la nécessité du ttt (insight and ttt attitudes questionnaire) Prise de substance et dépendance (échelles, bio)

The positive and negative psychotic syndroms scale (PANSS) Symptômes positifs Délire, hallucinations, désorganisation, persécution, hostilité, grandeur, excitation Symptômes négatifs Émoussement des affects, retrait social, difficulté d accès à abstraction, pensée stéréotypée, manque de spontanéité, tbe du cours de la pensée

Résultats Caractéristiques générales de l échantillon étudié Âge moyen : 40,5 ans 74,3% hommes 6,8% travaillent 77,6% vivent à domicile, 13,8% dans une résidence non restrictive, 4,8% dans une résidence modérément restrictive, 3,8% sans logement 1er ttt antipsychotique il y a en moyenne plus de 16 ans

Caractéristiques cliniques PANSS moyen: 75 (30 à 210) Symptômes positifs: 18 (7 à 49) Symptômes négatifs: 20 Tbe minimal à léger Calgary scale: 4,6 (0 à 27) Symptômes dépressifs absents à légers 35,7%: abus d une subst ou dépendance 27,2%: hospitalisation ou une décompensation récente

Prevalence de la violence 80,9%: pas de violence 15,5%: violence mineure seule 3,6%: violence majeure 19,1%: violence sans distinction dans les 6 mois précédant l analyse.

Violence mineure Probabilité plus importante si Jeune Femme Sous groupe de femmes jeunes+dépendance à une substance +arrestation récente Vivent plus fréquemment avec la famille Activité professionnelle réduite Demeurant dans une résidence très restrictive Demeurant avec sa famille ou des proches Arrestation récente Abus de substance ou dépendance Symptômes positifs

Violence majeure Association significative avec: Age jeune Tbe du comportement dans l enfance ATCD d arrestation Symptômes dépressifs Dépendance à une substance Significatif quand analyse bivariable Non significatif quand analyse de plusieurs variables (ex: tbe comportement dans enfance, symptômes psychotiques) Donc probablement effet indirect des substances

Score PANSS supérieur à la moyenne pour les symptômes positifs augmente le risque de violence majeure, score PANSS supérieur à la moyenne pour les symptômes négatifs le diminue Est ce que association de la violence avec les symptômes positifs est liée à une relative absence de symptômes négatifs?

10 9 8 %with serious violence in 6 mo 7 6 5 4 3 2 1 0 Negative: High high low low Positive: low high low high PANSS Score

Symptomes psychotiques et violence majeure Symptômes positifs: 5 symptômes sur les 7 de l échelle augmentent significativement le risque de violence majeure Hostilité (pr 1pt, 1,65) Persécution, méfiance (OR = 1,46) Hallucinations (OR = 1,43) Grandeur (OR = 1,31) Excitation(OR = 1,30) Désorganisation et délire ne sont pas associés significativement. Délire + persécution augmentent significativement le risque

Symptômes négatifs: 5 symptômes sur les 7 diminuent significativement le risque de violence majeure Trouble du cours de la pensée Retrait social Émoussement des affects Pauvreté des relations Difficulté d abstraction

Discussion Patients sélectionnés: Comparaison avec les patients sélectionnés dans une autre étude aux états unis (schizophrenia care and assessment program) Similaires pour age, sexe, niveau scolaire, nb patients récemment hospitalisés PANSS plus élevé dans CATIE (75 vs 71) Pas de biais de sélection Prévalence de la violence concorde avec les résultats des études précédentes (19,1 vs 15,3%)

Association violence et symptômes positifs Appelbaum (MacArthur violence risk assessment study): pas d augmentation du risque par le délire Symptôme d une maladie chronique, donc isolement social plus important et dc moins «d opportunité» de comportement violent. En accord avec cette hypothèse: risque plus important si vie en famille, diminué avec les symptômes négatifs

Limites de l étude Ne montre qu une association statistique entre 2 facteurs mais ne démontre pas le lien de cause à effet Basée sur les informations rapportées par le patient (risque de sous estimation des comportements violents) ou ses proches (informations peu précises) Échantillon peut-être peu représentatif: pas de patients résistants au ttt, ni de patients dont c est le premier épisode.

Taux de violence supérieur à celui de la population générale Majoré par : FdR identiques à ceux de la population générale La consommation de drogues ou d alcool La précarité Age (jeune) ATCD de comportement violent Autres FdR Symptômes positifs (sd d influence, persécution, hallucinations) Non observance

Conclusion de l etudel Risque de violence significativement augmenté par les symptômes positifs d où l importance d un ttt adapté et de l adhésion du patient à ce ttt D autres facteurs, non cliniques, sont à prendre en compte (ex:age jeune, retrait social ) Donc PEC le patient dans son ensemble et dans son environnement