BOURSE DE Le supermarché de produits dérivés Photo : Spyros Bourboulis 12 Depuis le 27 mars dernier, la Bourse de Montréal est le seul marché d options au Canada, avec un total de 141 catégories d options inscrites à sa cote. On y transige aussi des contrats à terme sur les obligations du gouvernement du Canada, des contrats à terme sur des acceptations bancaires de trois mois et des contrats à terme sur l indice S&P/TSE 60. À quoi peuvent servir ces produits dérivés? «Essentiellement à protéger les investisseurs», affirme André Forcier, représentant principal, produits dérivés, à la Bourse de Montréal. Par exemple, si le portefeuille d actions de votre client contient les titres de grande capitalisation qu on trouve dans l indice S&P/TSE 60 et qu on prévoit une baisse importante du marché, votre client pourrait choisir de vendre ses actions afin d engranger des profits ou de limiter les pertes. Mais cet exercice est lourd (il
MONTRÉAL RONALD MACKENZIE On ne transige plus que des produits dérivés à la Bourse de Montréal. Comment vos clients peuvent-ils en profiter? faut s assurer que chaque ordre a été exécuté) et coûteux (chaque transaction entraîne des commissions). «Il est plus simple d acheter des options de vente sur l indice, ou encore de vendre un contrat à terme», dit M. Forcier. Si effectivement le marché se corrige, le cours des actions baissera, certes, mais en contrepartie votre client fera de l argent avec son contrat à terme ou ses options (voir l encadré «Les options comme police d assurance»). Et il possédera encore ses actions, ce qui est très avantageux si elles rapportent des dividendes. C est ce qu on appelle le transfert de risque. «Le propriétaire d une voiture de 20 000 $ n hésitera pas à payer André Forcier, représentant principal, produits dérivés, à la Bourse de Montréal Photo : Sonia Jam MAI 2000 13
chaque année une prime de 800 $ afin d assurer son véhicule, même s il n a jamais eu d accident. Il sait que, en cas de sinistre, sa police couvre les réparations. Les investisseurs sérieux devraient faire la même chose avec leurs placements», estime André Forcier. Multiplier les stratégies De plus en plus d investisseurs, surtout institutionnels pour l instant, reconnaissent l utilité des options et des contrats à terme. L augmentation notable des volumes de transactions à la Bourse de Montréal en fait foi. Il faut dire que l utilisation de produits dérivés multiplie les stratégies de gestion. Par l effet de levier qu ils procurent, les produits dérivés peuvent bonifier le rendement d un portefeuille, car, dans le cas des options sur actions par exemple, chaque contrat porte sur un lot de 100 actions. Il est donc possible de prendre des positions sur des centaines, voire des milliers d actions à une fraction du coût de ces actions. NOMBRE DE CONTRATS NÉGOCIÉS Année Options Contrats à terme 1994 609 872 3 427 691 1996 758 252 3 523 637 1998 1 441 904 8 685 078 Les options d achat (calls) sur actions permettent de : Bénéficier d un mouvement à la hausse du cours des actions; Déterminer un prix d achat éventuel des actions sousjacentes aux options; Protéger une vente à découvert d actions sous-jacentes. De la même manière, on peut acheter des options de vente (puts) dans le but de : Profiter d un mouvement à la baisse du cours des actions; Protéger le portefeuille contre une baisse des cours. LES OPTIONS COMME POLICE D ASSURANCE L exemple fictif suivant montre comment, avec des options de vente, on peut protéger un portefeuille dans un marché baissier. Le 1 er mars dernier, vous avez acheté 1 000 actions de ABC à 26 $ chacune. Au 1 er juin, les actions se transigeaient à 32 $. Afin de protéger le gain, vous achetez 10 options de vente (puts) dont le prix d exercice est de 32 $ et qui expirent en août. Chaque option vous coûte 1,60 $ pour un total de 1 600 $. De cette manière, vous vous assurez de pouvoir vendre le titre à 32 $ jusqu à l échéance (août), peu importe l ampleur de la baisse. Et si le titre baisse jusqu à son niveau d origine de 26 $, le rendement sera de près de 16 % grâce aux options de vente, contre 0 % sans l utilisation de celles-ci. Période d'investissement Stratégies actions options de vente 1 er mars: le titre ABC vaut 26 $ Achat de 1 000 ABC @ 26 $ = 26 000 $ 1 er juin: le titre ABC vaut 32 $ Achat de 10 options de vente ABC, août 32, $ @ 1 60 $ = 1 600$ 19 août (expiration) le titre: Vente de 1 000 ABC @ 26 $ = 26 000 $ Vente de 10 options de vente ABC, le ABC vaut 26 $ août 32, $ @ 6 $ = 6 000 $ Résultats partiels Gain : 0 $ Rendement : 0 % Gain : 4 400 $ Rendement : 275 % Total Investissement total : 27 600 $ (26 000 $ + 1 600 $) Gain net : 4 400 $ Rendement : 15,94 % Source : Bourse de Montréal Et si le titre avait monté au lieu de baisser? Cette stratégie aurait quand même permis de réaliser un gain à partir du moment où le cours aurait dépassé 33,60 $, soit le prix d exercice plus la prime payée. Cette prime, c est le coût de la «police d assurance» qui vous protège contre les mouvements indésirables du titre. Ce transfert de risque entre les participants doit donc être rémunéré, et ce prix correspond à la prime de l option. OBJECTIF CONSEILLER 14
Cela peut aller bien plus loin. En effet, votre client peut vendre des options à découvert (short), procéder à des «opérations mixtes verticales» à la hausse comme à la baisse, et acheter simultanément des options d achat et des options de vente afin de profiter de la fluctuation du cours d une action. On l a vu, les contrats à terme peuvent servir à protéger un portefeuille d actions, mais on peut les utiliser pour couvrir des emprunts et des placements à terme, améliorer la gestion de trésorerie, faire des échanges (swaps) de taux d intérêt, effectuer des négociations entre marchés, etc. Luc Bertrand, président et chef de la direction de la Bourse de Montréal Savoir où l on s en va Évidemment, on ne peut pas parler des produits dérivés sans mentionner le risque qui les caractérise. Qui ne se souvient pas de la spectaculaire faillite de la banque Barings d Angleterre, en 1995? Un cambiste de la Barings, Nick Leeson, avait coulé cette vénérable institution en spéculant, à l aide de contrats à terme, sur l augmentation de l indice boursier japonais. Mal lui en prit, l indice avait plutôt chuté Or, cet événement malheureux masque la réalité des choses. Chaque jour, des millions de contrats à terme se transigent sans anicroche partout dans le monde. «Le conseiller doit bien connaître les mécanismes qui régissent les contrats à terme, dit André Forcier. Il doit notamment s assurer que la quantité de contrats qu il achète ou vend correspond aux objectifs de placements de son client.» Un marché liquide, transparent et international Afin de favoriser la négociation des produits dérivés, la Bourse de Montréal maintient un marché ordonné et efficace. Le marché est liquide, c est-à-dire que les ordres sont exécutés rapidement, même quand les cours fluctuent beaucoup. La Bourse de Montréal fournit de façon continue des cotations de prix en temps réel et diffuse immédiatement l information sur les prix, ce qui facilite le choix du moment pour les décisions de positionnement. De son côté, la Corporation canadienne de compensation des produits dérivés (CCCPD) assure la compensation de toutes les transactions. Chaque jour, elle fait un appel de marge à ses membres qui ont des positions ouvertes sur contrats à terme. Tous les comptes déficitaires doivent alors être renfloués, ce qui élimine les risques de crédit. Par ailleurs, la CCCPD voit à ce que chaque contrat transigé mette en présence un acheteur et un vendeur. Les contrats à terme sont standardisés, de sorte que les clients n ont pas à demander constamment à leur courtier quelles sont les caractéristiques du contrat qu ils désirent acheter ou vendre. La Bourse de Montréal s est donné le 13 mars dernier un nouveau président et chef de la direction. Il s agit de Luc Bertrand, qui siège également au Comité des gouverneurs de la Bourse de Montréal. Luc Bertrand affiche une solide feuille de route. Diplômé en philosophie de l Université d Ottawa, il œuvre dans le domaine des valeurs mobilières depuis 21 ans. Avant d être nommé grand patron de la Bourse de Montréal, il a occupé le poste de vice-président et directeur général au sein du groupe des ventes institutionnelles à la Financière Banque Nationale, et a également été premier vice-président et administrateur délégué (Québec) de la firme Corporation Deacon Capital. En 1985, il a co-fondé la maison de courtage Pollitt, Bertrand. Par ailleurs, Luc Bertrand est membre du Comité des gouverneurs du Fonds canadien de protection des épargnants, directeur de l Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, gouverneur de l Institut canadien des valeurs mobilières, ainsi que membre du Comité conjoint de l industrie des valeurs mobilières. MAI 2000 15
APPELLATIONS CONTRÔLÉES Les symboles boursiers n ont plus de secret pour vous. Mais connaissez-vous ceux des produits dérivés transigés à la Bourse de Montréal? En voici la nomenclature. BAX Contrat à terme sur acceptation bancaire canadienne de 3 mois CGB Contrat à terme sur obligations du gouvernement du Canada de 10 ans CGF Contrat à terme sur obligations du gouvernement du Canada de 5 ans LSX, Options à long terme (leaps) WSX, sur l indice S&P/TSE 60 ZSX OGB Option sur contrat à terme sur obligations du gouvernement du Canada de 10 ans SXF Contrat à terme sur l indice S&P/TSE 60 SXO Option sur l indice S&P/TSE 60 WIU, Options à long terme (leaps) sur ZIU les parts i60s XIU Option sur les parts i60s Depuis septembre dernier, la Bourse de Montréal est membre de Globex Alliance, un réseau international qui compte dans ses rangs : La Chicago Mercantile Exchange (États-Unis). On y négocie des contrats à terme et des options sur les produits agricoles, les devises, les taux d intérêt et les indices boursiers. ParisBourse (France), où sont transigés des contrats à terme et des options sur les taux d intérêt, les produits agricoles, les actions et les indices boursiers. La Singapore International Monetary Exchange (Singapour), centre de négociation de contrats à terme et d options sur les taux d intérêt, les indices boursiers et l énergie. La Borsa de Mercadorias & Futuros (Brésil), où l on échange des contrats à terme et des options sur les taux d intérêt, les taux de change, les indices boursiers et les produits agricoles. Par ce partenariat, la Bourse de Montréal espère élargir significativement sa clientèle en créant un lien mondial donnant accès aux contrats à terme les plus négociés à la grandeur de la planète, et ce, à partir d une même plateforme de négociation électronique. Le saviez-vous? Il est possible de transiger des options d achat dans un REER, mais pas des options de vente. En effet, seuls sont admissibles à un REER les placements qui servent «à acquérir une action», peut-on lire dans le bulletin d'interprétation IT-320R publié par Revenu Canada. Or, comme les options de vente ne sont pas prévues à cette fin, elles sont donc exclues. Cela signifie que, du Brésil ou de Singapour par exemple, un courtier peut transiger des contrats à terme vendus ici à Montréal. Et, à l inverse, un courtier installé à Montréal peut acheter et vendre des options françaises ou américaines sur les taux d intérêt. Cette interconnexion des parquets est rendue possible grâce au système de négociation NSC, mis au point par ParisBourse. Ce système, utilisé par les cinq membres de Globex Alliance, offre une «plate-forme de négociation électronique» qui permet notamment d exécuter des transactions durant les heures européennes d affaires. On peut y acheminer des ordres portant jusqu à 500 contrats à terme. Faire connaître les produits dérivés Dans le but de bien faire connaître le mode de fonctionnement des options et des contrats à terme, la Bourse de Montréal organisera sous peu des rencontres avec les maisons de courtage. Des conférences en région sont aussi prévues. Par ailleurs, au moment de mettre sous presse, elle mettait au point un cédérom interactif qui permettra à l utilisateur d apprendre à son rythme toutes les possibilités qu offrent les options et les contrats à terme. Pour l heure, la Bourse de Montréal donne des cours de perfectionnement sur les produits dérivés. On peut s y procurer également le Guide des options et stratégies d investissement, une excellente initiation au marché des options. Pour plus d informations, communiquez avec la Bourse de Montréal au (514) 871-3558 ou au 1 800 361-5353, poste 558. Vous pouvez aussi taper www.bdm.org OBJECTIF CONSEILLER 16