L énergie en Amérique latine

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1 L énergie en Amérique latine Sébastien Velut Université de Paris 3 Sorbonne Nouvelle Institut des hautes études d Amérique latine Sebastien.velut@univ-paris3.fr ECOLE ENERGiES ROSCOFF 29 MARS 2010

2 Plan de la présentation Les approches géographiques de l énergie Heurs et malheurs de l intégration latino américaine par l énergie. La stratégie énergétique du Brésil Les configurations locales : l exemple du Nord ouest de l Argentine et du Nord du Chili.

3 Les approches géographiques de l énergie On s intéresse aux relations entre énergie et espace terrestre, ou territoire. On est à la jonction Un système technique de production et de distribution De contraintes et de solutions technico-économiques D usages socialement différenciés De mécanismes de prises de décision à différentes échelles. Finalement les systèmes énergétiques sont spatialement (régionalement) différenciées avec des conséquences différentes sur les territoires qu ils sont desservent.

4 «Une joule est une joule?» Une joule est une notion scientifique, pas une catégorie sociale. Pour l usager les usages ne sont pas facilement substituables les uns aux autres : question des capacités de conversion. Le prix de la joule est loin d être homogène en fonction du vecteur énergétique employé. Les Etats, les entreprises et les régions ne disposent pas des mêmes joules ni des moyens de les mobiliser. Les systèmes énergétiques ont une forte inertie historique.

5 La place des territoires Les sources énergétiques sont très différents d un territoire à un autre, à commencer par les sources d énergie primaire privilégiées. Les dotations énergétiques des territoires sont variées, même si on ne les utilise pas toujours au mieux. Les réseaux techniques créent des solidarités de fait entre les territoires qu ils connectent (plaques de régulation). Les processus de décision se font à l échelle des territoires (régions, Etats, grands ensembles supra nationaux). Le caractère stratégique indispensable des ressources énergétique les place immédiatement dans le champ géopolitique en interne et à l international. Même par rapport à des enjeux globaux comme les changements environnementaux planétaires, les causes, les effets et les solutions se déclinent à l échelle des territoires.

6 Les flux pétroliers mondiaux

7 Energie solaire reçue

8 Des solidarités de fait, des vulnérabilités créées.

9 Les enjeux pour les «Pays du Sud» Le développement requiert en première approche un accroissement de la consommation d énergie. Les inégalités sociales et spatiales sont aussi des inégalités d accès à l énergie. Les ressources énergétiques existantes ne sont pas toujours faciles à mobiliser. Le différentiel technologique par rapport aux pays du Nord. La question des technologies adaptées (maîtrise technique, coûts d investissement, opérabilité, adéquation aux conditions locales). Trouver le modèle d organisation adapté des industries énergétiques, entre indépendance et efficacité.

10 Consommations énergétiques TPES M Tep Population 2010 millions PIB / hab 2008) ($ courants Tep / hab Argentine 74,7 41, ,80 Brésil 228,1 200, ,14 Chili 27,8 17, ,62 Equateur 12,3 14, ,86 Pérou 15,9 29, ,53 Venezuela 81,4 28, ,82 Mexique 170,4 112, ,50

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14 Heurs et malheurs de l intégration continentale

15 L accroissement des consommations

16 Consommation d énergie primaire

17 Les réserves de pétrole en Amérique latine Mexique Res Gb 14,8 Prod Mbd 3824 Cons- Mbd 1896 Argentine 2, Brésil 11, Colombie 1, Ecuador 5, Pérou 0, Trinidad & Tobago 1, Venezuela 77, Autres 1, Total 116, ,9 6634,7

18 Les réserves de gaz naturel en Amérique latine Réserves G M3 Mexique ,9 Argentine ,1 Bolivie ,9 Brésil ,9 Trinidad & Tobago ,3 Venezuela ,5 Autres ,3 Production G m3 Total ,8

19 Les choix stratégiques des années 1990 Intégration par le gaz techniquement plus facile. Intégration par des investissements privés plus rapide et moins coûteux pour les Etats. Basculement des systèmes énergétiques sur le gaz plus propre, plus abondant, plus difficile à exporter. L intégration énergétique comme fondement des intégrations continentales

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23 Les limites de l intégration par le gaz Une intégration partielle. Pas de garantie d approvisionnement Conflits géopolitiques pour le contrôle et le passage des flux gaziers. Conflit entre la Bolivie et le Brésil sur le prix du gaz bolivien Conflit entre l Argentine et le Chili. Conflit entre le Chili et la Bolivie «pas une molécule de gaz» En 2007 proposition du président Chavez de construire le «gazoduc du Sud» entre le Venezuela et le Brésil

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25 Limitations des exportations de gaz argentin

26 Quelles solutions? Plus d intégration par d autres moyens : électricité, gazoduc du Sud? La multiplication des possibilités d importation (et d exportation!) : terminaux gaziers récepteurs en cours de construction au Chili, prévus en Argentine, d exportation au Pérou et au Vénézuela (?). Le développement de nouvelles ressources? Bio carburants, nouvelles zones de production d hydrocarbures, relance des programmes nucléaires. Donc des stratégies nationales voire régionales

27 Intégration électrique? Elle est incomplète, les échanges sont marginaux. Les systèmes électriques sont différents. Les grands barrages ont permis des interconnexions mais leur gestion est problématique

28 Le barrage de Yacireta

29 De nouveaux terminaux gaziers

30 La stratégie énergétique du Brésil

31 Les stratégies nationales : Le Brésil Stratégie de puissance à l échelle continentale dont l énergie fait partie. Mise en valeur des ressources disponibles sur le territoires brésilien. Développement de chaînes productives spécifiques. Apparition ou consolidation de nouveaux espaces producteurs d énergie et d innovations technologiques. Une stratégie qui privilégie les grandes régions de consommation São Paulo. Problème de la cohérence de la position internationale du Brésil. Un système énergétique qui reste fragile (black out de novembre à São Paulo).

32 Les biocarburants : une histoire Proalcool, 1975, programme national pour répondre aux prix élevés de l essence Instituts de technologie, recherches intégrées Nouveaux processus de distilleries, équipementiers locaux Années 2000 usage intégral de la canne Régulation du secteur électrique (= possibilité de vente des excédents de la cogénération) 2003 : véhicules flex fuel (moteurs polycarburants) 2005 : demande mondiale d éthanol Fixation des prix pour orienter les consommateurs

33 Une puissance mondiale Brésil, premier producteur mondial de canne à sucre, de sucre et d alcool 8 millions d ha (1% de la surface totale), nouvelles variétés 4 millions de travailleurs modernise sa filière sucrière en parallèle avec la croissance d une filière agro-énergétique pour répondre au défi de l utilisation de combustibles moins polluants : 370 usines sucre/éthanol, 50% dans l Etat de São Paulo

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35 Le développement pétrolier Consolidation d un géant de l énergie, la compagnie nationale Petrobras Exploitation des gisements off shore au large de Rio Consolidation de la ville de Rio de Janeiro comme base du développement pétrolier du Brésil, réactivation économique de la ville, création de centres de recherche. Prise de participation en Amérique latine et dans le reste du monde.

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39 Petrobras : plan stratégique

40 Les questions Le Brésil qui s affiche comme puissance verte peut il soutenir la poursuite de la production off shore et celui du développement des bio carburants? L énergie produite renforce avant tout São Paulo et la région centrale, foyer de consommation industrielle et d implantation des grandes entreprises. Que penser de l option nucléaire? Peut on améliorer l accès à l énergie des populations vulnérables?

41 Le Nord Ouest argentin

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43 Les enjeux régionaux Une des régions productrices d énergie en Argentine : Réseaux consolidés : Hydrocarbures (Pétrole, gaz), En cours de développement : éthanol de canne à sucre, biodiesel de soja A développer : solaire. Une région charnière entre Argentine, Chili, Bolivie et Paraguay, mais insuffisamment reliée au reste de l Argentine. Conflit latent entre développement de l exploitation industrielle des ressources énergétiques et logiques de conservation des ressources naturelles. Les politiques régionales appuient l extension de l exploitation et multiplient simultanément les dispositifs de protection des ressources naturelles. L existence d ONG environnementalistes puissantes dont certaines se positionnent comme médiateurs dans les conflits sur l exploitation des ressources.

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45 Une multiplicité d acteurs multi niveaux aux compétences dysharmoniques Les compagnies et les acteurs économiques Production et distribution. Elles intègrent pour la plupart un management des ressources naturelles nécessaires à leur production en liaison avec les ONG environnementalistes et les Provinces. L Etat Privatisation (1992) gouvernement par la productions de normes (Priorités de distribution, politiques tarifaires, ) négociations avec les compagnies sur l implantation et l exploitation. Parallèlement implication dans la contrôle des ressources naturelles (Parcs) loi sur les agrocarburants. Appui à la recherche et à l innovation par l université nationale de Salta. Les Provinces propriétaires des ressources, en charge du contrôle de la production (secrétariat à la production). Création de la REMSA (1986) Mais également participation à la protection des ressources naturelles (initiatives directes : aires protégées) ou participation à des opérations nationales (Parcs) ou internationales (MAB) Appui aux programmes de recherche en matière d énergies renouvelables

46 Les grands organismes internationaux (Ex: UNESCO, FFEM, ) réserves de biosphères, ou corridors écologiques Soutien aux programmes d accès à l énergie pour les populations isolées autant d espaces de négociation et de création de consensus; Les ONG Défenseurs du patrimoine naturel et des populations indigènes Traductions des normes internationales en matière de protection naturelle Leadership de programme internationaux (MAB, Corridors écologiques) Médiation avec les grandes compagnies en vue de parvenir à des compromis Promoteurs d alternatives économiques à l énergie (Tourisme, énergies renouvelables, ) Les municipalités et communautés locales Promouvoir l accès à l énergie des populations Porte parole des populations en cas de conflits Médiation entre Province et communautés locales Implication dans les programmes touristiques et de protection Des compétences formelles sans moyens (financiers, techniques )

47 Quatre sources de conflit L environnement Conflits autour de l exploitation des ressources et de l installation des réseaux avec des populations locales qui prétendent en bénéficier. Rôle des ONG locales et internationales aboutissant à l agrandissement des espaces protégés. Le foncier L accès au foncier est surtout problématique pour l extension des cultures énergétiques et la réalisation des réseaux. Les relations sociales et le travail Formes de gestion de la main d œuvre dans les grandes entreprises pétrolières et sucrières. Précarité sociale et pauvreté. L instabilité politique à différents niveaux. Politiques publiques imprévisibles (tarification, royalties). Absence de visibilité à moyen terme.

48 Les régulations territoriales Dispositifs de coordination entre acteurs privés et publics pour construire des normes et des objectifs partagés. Création d une compagnie par la province pour réalisee des infrastructures pour le développement territorial (zones isolées, solaire, agro carburants). Formes de régulation croisée entre gouvernements locaux et grandes compagnies. Extension négociées des aires protégées privilégiant des modèles négociés plutôt que de protection stricte (Réserve de biosphère). Rôle d ONG territorialisées dans la médiation des conflits.

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50 Les difficultés de coordination Les changements de la politique nationale déstabilisent l ensemble du système. Les provinces productrices d énergie ne sont pas coordonnées entre elles. Les formes sectorielles d organisation et d action restent dominantes par rapport aux formes territoriales de coordination. La faiblesse des régulations s expriment par la dominance des logiques de conflit. Les modifications de l emploi déstructurent les territoires.

51 Des formes instables d organisation Les règles du jeu ne sont pas fixées mais évolutives. Le pouvoir de modifier les règles de fonctionnement au sein des surfaces de régulation est une ressource stratégique essentielle. Les enjeux environnementaux notamment liés aux GES sont encore faiblement pris en compte par les acteurs privés. L action de la société civile porte principalement sur les aspects environnementaux. Les conflits qui en découlent reçoivent généralement des solutions locales et provisoires.

52 Les choix énergétiques sont des choix socio politiques autant que des choix technico économiques. Les solutions mises en œuvre ne sont pas nécessairement optimales Les critères géopolitiques pèsent lourds Des systèmes de décision multin niveaux affectent très concrètement les territoires et leurs possibilités de développement.

53 Merci