Intervention de la vice-présidente, Micheline Claes, lors de la conférence Isabel du 27 février 2008 Remplissant de multiples fonctions et pièce maîtresse en comptabilité et en fiscalité, la facture intéresse d évidence les experts-comptables et les conseils fiscaux. La facture est un des supports d échange d informations entre l acheteur et le vendeur ; au sein de l organisation de l acheteur, elle traduit quels services ou livraisons ont eu lieu, qui les a effectués, qui les a reçus et quand. La facture fait également preuve, au même titre que la correspondance des parties, notamment quant aux obligations de l acheteur et du vendeur : quant à l exécution du paiement, quant à la matérialisation de la créance. Last but not least, c est aussi un justificatif fiscal, au regard de la TVA, puisque la déductibilité et le débit de la TVA correspondent aux montants portés en compte depuis les éléments correspondants dans les factures reçues ou émises. Outre son caractère probatoire, la facture apparaît donc comme un élément essentiel dans le cadre des relations commerciales et fiscales des entreprises. Régulièrement confrontés à ce document il est vrai, encore souvent en version papier dans le cadre de l exercice de notre rôle de conseiller privilégié des entreprises, la problématique de la dématérialisation des factures, parfois imposée par certains clients ou destinataires, nous interpelle au premier chef. La profession a bien perçu les enjeux et a souhaité participer au débat et faire entendre sa voix sur la façon dont la facture électronique rencontre ces obligations à la fois opérationnelles et légales. Difficile d œuvrer au déploiement de solutions de dématérialisation des factures sans avoir bien assimilé ce que concrètement cela veut dire, notamment par rapport aux contraintes fixées par l Administration fiscale, notamment en matière de contrôle, eu égard, entre autres, à la notion de pièces justificatives et celle d original.
La notion comptable actuelle de «pièce justificative», telle qu elle ressort de la lecture conjointe des articles 4 et 6 de la loi du 17 juillet 1975, revêt une dimension totalement différente en matière de facturation électronique. A cet égard, une modification de la législation sera sans doute nécessaire ; la Commission des Normes comptables a, à plusieurs reprises, été interrogée sur ce point. Cette étude s inscrit dans le cadre du programme de travail de la Commission des Normes comptables prévu dans les prochains mois. L IEC et Isabel sont les membres fondateurs groupe de travail commun «e-invoice Bridging» que nous avons constitué. Ce groupe de travail a terminé une première phase de réflexions qui aboutiront d ici fin juin à la rédaction d un cahier des charges spécifique. Nous avons le plaisir de vous annoncer que d autres acteurs importants du terrain ont déjà déclaré leur enthousiasme et confirmé supporter cette initiative, notamment l organisation BASA et Certipost. L IEC et Isabel s inscrivent dans la démarche souhaitée par la Commission européenne de simplification administrative des entreprises, Il s agit donc de quantifier et de qualifier les flux d informations dans le but d identifier l ensemble des charges associées au traitement des factures et ainsi les optimiser. L objectif souhaité est de dégager les avantages mutuels du client, de son conseiller qui traite toutes les pièces, et donc les flux induits par ces pièces, dans une perspective de maîtrise et de suivi des coûts/performance et de positionnement dans une situation «gagnant-gagnant». En matière de réduction de coûts, la facturation électronique ne manque pas d arguments. La raison première en est certainement les économies qu elle génère. Ce n'est, en effet, guère un secret pour personne que les processus de facturation par voies classiques reviennent cher aux entreprises lorsque celles-ci additionnent les coûts : frais administratifs, ressources humaines, affranchissement des envois. Si rapidité, sécurisation et fiabilisation des informations financières, et gains de productivité sont à l évidence des moteurs forts de développement, ils sont encore renforcés lorsque les
factures électroniques sont compatibles avec les logiciels ERP et les prologiciels génèrent une comptabilisation automatique des écritures, voire transitent par des plates-formes sécurisées, qui combinent réception, archivage et paiement en ligne, le tout avec un minimum d investissement et un maximum de simplicité, tout en bénéficiant d une approbation officielle de la TVA. Une telle approche intégrée permet de visualiser, gérer et payer ses factures depuis son programme d Internet banking. Parmi les caractéristiques avantageuses de la facturation électronique, les modalités de comptabilisation automatique des écritures qu elle autorise ont logiquement focalisé notre attention et balisé notre réflexion commune avec Isabel. Devant la prolifération de développements de logiciels liés à la facturation et à la comptabilité on en compte aujourd hui plus de 190, il nous a paru opportun de mettre en place un groupe de travail, dont l IEC et ISABEL sont les membres fondateurs, en vue de produire un modèle de traitement en tous points conforme aux principes comptables et aux règles et lois en vigueur. Baptisée «e-invoice Bridging», cette réflexion devrait aboutir, fin juin, à la diffusion d un fascicule pratique à l intention des professionnels comptables et fiscaux et des éditeurs de logiciels comptables et de solutions de facturation électronique. Cet outil de travail traitera des bonnes pratiques en matière d intégration des factures électroniques dans la comptabilité. Dans un esprit de dialogue constructif, la volonté de l IEC a été d exprimer et de cadrer les besoins de la profession plutôt que de composer, bon gré mal gré, avec les solutions délivrées et imposées par le marché. Si elle est techniquement au point, la facture électronique pose encore un grand problème en raison du nombre de formats différents à gérer à l émission ou à la réception : cette multitude de formats électroniques engendre des coûts plus importants que la formule papier. En conservant cette approche «multiformat», l objectif recherché de simplification administrative n est certainement pas atteint. Mais également si l intégration dans un système comptable dépend
d une interface propriétaire et/ou si la captivité entre un logiciel ou un système d exploitation de l archivage ne garantit pas, pendant toute la durée de conservation, la totale réutilisabilité par un autre logiciel sur un autre système d exploitation. Concrètement, la démarche de l IEC a été de mettre son expertise au service des entreprises et de leurs conseillers et s inscrit dans le même esprit d échanges constructifs que nous entretenons également avec le SPF Finances dans le cadre du développement et de l évaluation des applications déclaratives électroniques. Les délivrables du groupe de travail peuvent être regroupés en deux volets principaux. Le premier modélise les flux de la facture électronique, de l émetteur jusque chez le récepteur, et décrit les responsabilités de chaque intervenant, avec une attention toute particulière aux besoins du professionnel qu est l expert-comptable. Le deuxième volet modélise les donnés échangées et décrit le standard de la facture électronique. Là aussi, une attention toute particulière a été donnée aux besoins du professionnel. C est la qu est introduit le concept du «jeton comptable». Un complément d information indispensable pour la génération de l écriture comptable. Ma présence, ce jour, témoigne de l intérêt que nous portons à la dématérialisation des procédures et des documents. Ce faisant, j entends donner un signal fort du souci de la profession d être, par son expertise et son expérience, pleinement présente dans l évolution de notre environnement professionnel et des attentes des entreprises en termes de procédures et de documents dématérialisés. La tenue de comptes se réduisant aux seules opérations d inventaire, le professionnel comptable et fiscal va devoir adapter son office à l éventail des nouveaux services possibles et développer une approche différente appuyée par les nouvelles technologies de l information et de la communication.
La gestion d informations de façon de plus en plus dématérialisée, mais sécurisée, fiable sans interruption, sans perdre de données, en interaction avec les autres systèmes d information de l entreprise et de ses différents partenaires, reste une problématique de professionnels spécialisés travaillant dans un esprit positif de partage de connaissance et d expérience multidisciplinaires. Je vous remercie.