0.1. LES GRECQUES 1 Simulations des Grecques : iavin vs Différences finies Christophe Chorro Ce petit document vise à illustrer de manière numérique les techniques présentées lors du mini cours sur le calcul de iavin dispensé dans le cadre du Master MMMEF de l Université Paris 1. Ce n est pas un rappel de cours!!! Nous nous bornerons au cadre très simple (et donc réducteur) de Black et Scholes, le but étant de donner une première approche intuitive des phénomènes. Les simulations proposées ici ont été réalisées en C++ ( vous pouvez aussi utiliser le logiciel gratuit scilab mais le temps de calcul n est vraiment pas le même). Dans le modèle de Black et Scholes, la dynamique de l actif risqué est donnée par l EDS suivante ds t = bs t dt + σs t db t (1) de condition initiale S 0 = x 0 > 0. Cette EDS a une unique solution donnée par le Brownien géométrique S t = x 0 e (b 1 2 σ2 )t+σb t. (2) Concernant l actif sans risque, nous le supposerons associé au taux d intérêt continu et constant r. Dans la suite du document nous nous placerons sous l unique probabilité risque neutre ce qui revient tout simplement à considérer que b = r. 0.1 Les Grecques 0.1.1 Définition Les Grecques sont des indicateurs qui mesurent la sensibilité de la prime (i.e du prix) d une option par rapport à un paramètre donné (le cours du sous-jacent, le temps, la volatilité). Leur importance pratique est très grande. Si h est un actif contingent (caractérisé uniquement par son payoff), nous savons que son prix à t est de la forme F (t, S t ). Définition 0.1.1 On appelle grecques les quantités suivantes : mesure la sensibilité du prix par rapport au sous jacent t (S t ) = F x (t, S t) (3)
2 Γ mesure la sensibilité du delta par rapport au sous jacent Γ t (S t ) = 2 F x 2 (t, S t) (4) Θ mesure la sensibilité du prix par rapport au temps Θ t (S t ) = F t (t, S t) (5) ρ mesure la sensibilité du prix par rapport au taux d intérêt ρ t (S t ) = F r (t, S t) (6) vega (qui n est pas une lettre grecque!!!) mesure la sensibilité du prix par rapport à la volatilité vega t (S t ) = F σ (t, S t). (7) Exemple 0.1.1 Dans le cas du call et du put (de strike K et d échéance T ) les valeurs des grecques à t = 0 sont données par le tableau suivant : Call Put où N(d 1 ) > 0 N( d 1 ) < 0 Γ 1 xσ T N (d 1 ) > 0 1 xσ T N (d 1 ) > 0 Θ xσ 2 T N (d 1 ) Kre rt N(d 2 ) < 0 xσ 2 T N (d 1 ) + Kre rt (N(d 2 ) 1)?? ρ T Ke rt N(d 2 ) > 0 T Ke rt (N(d 2 ) 1) < 0 vega x T N (d 1 ) > 0 x T N (d 1 ) > 0 d 1 (x) = log( x σ2 ) + (r + )T K 2 σ T et où N est la fonction de répartition d une N (0, 1). et d 2 (x) = log( x σ2 ) + (r )T K 2 σ T (8) Notons que dans ce cas particulier, une fois que les paramètres du modèle sont calés, pour calculer explicitement les grecques il suffit de pouvoir calculer la fonction de répartition d une gaussienne N. Ceci ne peut se faire de manière exacte, il existe des approximations numériques bien connues pour ce problème. On peut, par ailleurs, utiliser la fonction cdfnor de scilab ou la fonction erf en C++. Nous nous limiterons dans la suite aux cas du delta et du gamma (et donc aussi du véga...).
0.2. CALCUL PRATIQUE DES GRECQUES PAR SIMULATION MONTE CARLO3 0.2 Calcul pratique des grecques par simulation Monte Carlo 0.2.1 Cas où le payoff est le la forme h = f(s T ) On veut évaluer de manière numérique F (t, x) = e r(t t) E [ f(st x t) ], t (x) = F x (t, x) et Γ t(x) = 2 F (t, x) x2 où (S x t ) est le MB géométrique vérifiant S x 0 = x. Pour le prix F (t, x), on utilise une méthode de Monte Carlo classique car on sait simuler très simplement (il suffit de simuler des gaussiennes indépendantes) un échantillon de (ST x t ). Pour les deux autres quantités qui sont les dérivés de la première, une méthode classique est d utiliser un schéma de différence finie i.e d utiliser les approximations suivantes t (x) F (t, x + h) F (t, x h) 2h F (t, x + h) + F (t, x h) 2F (t, x) Γ t (x) h 2 où h est suffisamment petit et où F (t, x + h), F (t, x h) et F (t, x) sont calculés par méthode de Monte Carlo. Problème pour les grecques (contrairement au prix) : Deux facteurs d approximation (MC + différence finie) et donc d erreur En pratique le choix de h n est pas si évident que cela : le prendre trop grand entraîne une mauvaise approximation des dérivées (i.e un grand biais), le prendre trop petit fait souvent exploser violemment la variance de l estimateur (i.e augmente sa volatilité) et donc la qualité des simulations Monte Carlo (cf remarque ci-dessous). Remarque 0.2.1 Pour le cas du delta, deux choix s offrent à nous pour le calcul de l approximation par différence finie. Nous devons en effet évaluer par Monte Carlo les deux espérances F (t, x h) et F (t, x + h). Nous pouvons a) Utiliser deux N échantillons indépendants de ST x t et F (t, x + h), dans ce cas, on montre que pour évaluer F (t, x h)
4 V ar ( F (t,x+h) F (t,x h) 2h ) ( = 1 V ar(f(s x+h )) T t 4h 2 N + V ar(f(sx h)) T t N ) 1 2Nh 2 V ar ( f(s x T t )). b) Utiliser un seul N échantillon de ST x t pour simuler à la fois F (t, x h) et F (t, x + h), dans ce cas, on montre que lorsque f est régulière V ar ( F (t,x+h) F (t,x h) 2h ) = 1 N V ar ( f(s x+h T t ) f(sx h T t ) 2h 1 N V ar ( f (S x T t )). Une approche alternative pour le calcul des grecques est la méthode des poids. Sa mise en place technique dans le cadre d un modèle financier général nécessite les techniques du calcul de iavin qui ont été abordées en cours. Cependant, sous la dynamique Black-Scholes, la régularité de la densité gaussienne permet d obtenir ces résultats par une simple et classique IPP. Cette IPP n est plus possible pour les modèles plus complexes, on utilise alors les formules de type IPP induites par la dualité entre l opérateur de dérivation au sens de iavin et l intégrale de Skorohod. Dans Black et Scholes, nous savons que lorsque h = f(s T ), le prix F (t, S t ) est parfaitement déterminé par + F (t, x) = e r(t t) f(xe (r 1 2 σ2 )(T t)+σy T t 1 ) e y2 2 dy. 2π Nous avons alors le résultat suivant : ) Proposition 0.2.1 On a [ t (x) = e r(t t) E W T t xσ(t t) f(sx T t) ] (9) et [( Γ t (x) = e r(t t) E WT t x 2 σ(t t) + W ) ] T 2 t (T t) f(s x (σ(t t)x) 2 T t) (10) où (S x t ) est (sous la proba risque neutre P ) le MB géométrique tel que S x 0 = x et (W t ) le MB standard. Preuve : On se limite à la démonstration de (9), la méthode étant identique pour (10). Nous allons supposer que f CK 1 (R, R), le cas général se traitant par approximation.
0.2. CALCUL PRATIQUE DES GRECQUES PAR SIMULATION MONTE CARLO5 D après le théorème de dérivation sous le signe somme, on a + t (x) = e r(t t) 1 x f(xe(r 2 σ2 )(T t)+σy T t 1 ) e y2 2 dy. } {{ } 2π g(x,y) Or Ainsi par IPP, t (x) = t) e r(t xσ T t g x (x, y) = 1 xσ T t + g (x, y). y f(xe (r 1 2 σ2 )(T t)+σy T t y ) e y2 2 dy. 2π Sous P, ds x t = rs x t dt + σs x t dw t donc ainsi, S x t = xe (r 1 2 σ2 )t+σw t, [ ] t (x) = e r(t t) E W T t xσ(t t) f(sx T t). Ainsi, dans Black et Scholes les grecques peuvent être calculées sans recours au schéma de différence finie. Avantages : Un seul facteur d approximation (MC) et donc d erreur Technique qui ne dépend pas du Payoff (le poids est indépendant de f). 0.2.2 Cas du delta pour les options asiatiques simples Contrairement aux options simples (call, put, digitale, corridor) où des formules fermées sont disponibles et où les procédures numériques servent donc uniquement à contrôler les méthodes, le calcul numérique des grecques pour les options asiatiques est d une nécessité absolue (pas de formulation explicite) même dans Black et Scholes. ( ) T On considère ici que le payoff est donné par f. 0 Sx s ds La proposition suivante (dont le démonstration a été donnée en cours) fait intervenir le calcul de iavin :
6 Proposition 0.2.2 On a [ ( T 0 (x) = e rt x E f 0 ) ( T [ T Ss x 0 ds Sx s ds W T T 0 ssx s ds σ + 0 s2 S x s ds T 0 ssx s ds ] 1 )] (11) où (S x t ) est (sous la proba risque neutre P ) le MB géométrique tel que S x 0 = x et (W t ) le MB standard. Remarque 0.2.2 Pour calculer 0 (x) à partir de la formule précédente, il faut simuler des intégrales du type T 0 sn Ss x ds. Ne connaissant pas la loi de T 0 sn Ss x ds, on peut utiliser pour cela l approximation suivante qui fait intervenir les sommes de Riemann : 1 0 s n S x s ds 1 M M k=1 avec M grand (mais pas trop). Reste à simuler le vecteur (xe (r 1 2 σ2 ) k M +σb km ) ( ) n k S x k M M 0<k<M+1 et donc le vecteur gaussien centré (B k ) dont la matrice de covariance est parfaitement M spécifiée. 0.3 Simulations 0.3.1 Cas d un call et d un put européen On prend x = 100, K = 100, σ = 0, 15, r = 0, 05, T = 1.
0.3. SIMULATIONS 7 Delta Call 0,67 0,665 0,66 delta 0,655 Valeur Theo:0,6584855 0,65 0,645 0,64 Nbre de Simulations (10E4) Gamma Call 0,0255 0,025 0,0245 Gamma 0,024 Valeur theo 0,0244688 0,0235 0,023 0,0225 Nbre simulations(10e4)
8 Delta Put -0,334-0,337 delta -0,34-0,343 Valeur Theo -0,3415145-0,346-0,349 Nbre simulations (10E4) Gamma Put 0,026 0,0255 0,025 gamma 0,0245 0,024 Valeur Theo 0,0244688 0,0235 0,023 0,0225 Nbre simulations (10E4)
0.3. SIMULATIONS 9 Il n est pas très étonnant de voir que dans le cas du call la méthode des différence finie est sensiblement plus précise que la méthode des poids. Ceci est dû au fait que dans la cas du call le payoff est une fonction régulière. Pour comparer les vitesses de de convergence des estimateurs nous introduisons la définition suivante (penser au TCL...) Définition 0.3.1 On dit q un estimateur E 1 converge x fois plus vite que E 2 si la variance empirique de E 2 est égale à x fois celle de E 1 (on se base ici sur 20000 simulations). Pour le call et le put on obtient les résultats suivants : Call Ratio des Variances (/ iavin) 0.134 Γ 0.132 Put Ratio des Variances (/ iavin) 0.30 Γ 1.32 Les choses se passent un peu mieux pour le put que pour le call. Ceci s explique par le fait que dans le cas du call (et non du put) la taille du poids peut exploser. 0.3.2 Cas d une option digitale Une option digitale est caractérisée par son payoff 1 S x T >K min irrégulier en K min. Il est facile (exo) de montrer que dans ce cas F (0, x) = e rt KN(d), 0 (x) = e rt xσ T n(d) et Γ 0 (x) = ( e rt x 2 σ 2 T n(d) d + σ ) T où n est la densité d une N (0, 1) et où d = log( x )+(r σ2 K min 2 )(T ) On prend x = 100, K = 100, σ = 0, 15, r = 0, 05, T = 1, K min = 95. σ T.
10 Delta Digitale 0,0221 0,0218 0,0215 Delta 0,0212 0,0209 Valeur Theo 0,0211279 0,0206 0,0203 0,02 Nbre simulations (10E4) Gamma Digitale -0,0005-0,0006-0,0007-0,0008 Gamma -0,0009-0,001-0,0011 Valeur Theo 0,001058-0,0012-0,0013-0,0014-0,0015 Nbre Simulations (10E4)
0.3. SIMULATIONS 11 Digitale Ratio des Variances (/ iavin) 5.31 Γ 2354 0.3.3 Cas d une option corridor Une option corridor e est caractérisée par son payoff 1 Kmax>S T x >K min fait la différence de deux digitales). (c est en On prend x = 100, K = 100, σ = 0, 15, r = 0, 05, T = 1, K min = 95, K max = 105. Delta Corridor -0,0032-0,0037 Delta -0,0042 Valeur Théo: -0,0041146-0,0047-0,0052 Nbre de simulation (10E4)
12 Gamma Corridor -0,0005 Gamma -0,001 Valeur Theo: -0,0009170-0,0015-0,002 Nbre de simulations (10E4) Corridor Ratio des Variances (/ iavin) 134 Γ 5785 0.3.4 Quelques remarques La méthode des poids donne de bien meilleurs résultats que les lorsque l irrégularité du payoff ou l ordre de dérivation augmente. En pratique les poids que nous trouvons sont des polynômes en W T. Ainsi la méthode des poids sera d autant meilleure que la maturité de l option est petite (petit poids). De plus La méthode des poids sera plus efficace dans le cas d un call que dans celui d un put. La méthode des poids est en fait une technique de réduction de variance. Elle se révélera encore plus efficace couplée aux techniques classiques (contrôle antithétique, variables de contrôle ou fonction d importance...).
0.3. SIMULATIONS 13 Technique de localisation : un exemple dans le cas du call Dans le cas du call, la technique des poids est peu efficace car le payoff est trop régulier et le poids trop gros. Une manière de l améliorer est de décomposer en une partie locale irrégulière et une partie régulière : f(s x T ) = Φ loc (S x T ) + Φ reg (S x T ). Pour le calcul des grecques, on appliquera la technique des poids sur la partie locale et sur la partie régullière une simple dérivation sous le signe somme (DSS) (ou la méthode si la DSS n est pas justifiée). Dans la cas du call, une manière de procéder est d écrire : (S x T K) + = (S x T K)1 K<S x T <K+d + (S x T K)1 S x T K+d et donc d obtenir en utilisant la méthode des poids pour le premier terme et une DSS justifiée pour le second la formule suivante [ ] 0 (x) = e rt E WT xσt (Sx T K)1 K<S x T <K+d + 1 [ x E ST x 1 S x T K+d]. On obtient alors les résultas numériques suivants qui ne sont pas spectaculaires car le choix de la fonction de localisation est ici très grossier. (Vous pouvez en exercice trouver d autres fonctions de régularisation et comparer les résultats numériques obtenus). Call Ratio des Variances (/ Loc (d = 2)) 1,79
14 Delta Call 0,67 0,665 0,66 delta 0,655 Valeur Theo:0,6584855 loc (d=5) Loc (d=2) Loc (d=55) 0,65 0,645 0,64 Nbre de Simulations (10E4) Le générateur de nombre aléatoire utilisé pour les simulations est un générateur congruentiel classique. Vous pouvez en exercice comparer dans un cas simple l impact d un tel choix en comparant les résultats avec ceux obtenus en utilisant la suite à discrépence faible de Van der Corput. 0.3.5 Cas d une option asiatique simple Le faire en exercice en utilisant la proposition 0.2.2