La distribution multicanal



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Transcription:

Les opérateurs traditionnels s emparent du multicanal La distribution multicanal Réalité, enjeux et perspectives F L O R E N C E C I O M E I Consultante, fondatrice d ADhoc Tourisme [florence.ciomei@club-internet.fr] (1) Ce terme est utilisé ici pour caractériser les opérateurs traditionnels du tourisme, par opposition aux pure players qui commercialisent leurs produits et services exclusivement sur internet. (2) Se dit d un opérateur dont les activités de commercialisation et de distribution sont exclusivement limitées au web. (3) Se dit d une entreprise traditionnelle, ayant ajouté des activités en ligne (click) à son modèle classique (mortar) (source : Journal du net). (4) Par opposition à click and mortar, se dit d un pure player, ayant ajouté des canaux de distribution physiques (mortar) à son modèle tout internet (click) (source : Journal du net). L e développement du commerce électronique a profondément changé la donne en matière de commercialisation et de distribution de produits touristiques. Internet a favorisé l apparition de nombreux nouveaux acteurs et changé la cartographie de l offre de produits touristiques, l environnement concurrentiel, ainsi que les rapports entre les acteurs de l offre et de la demande. Le paysage de l industrie du tourisme s en est trouvé modifié. La montée en puissance du tourisme en ligne et l arrivée de nouveaux acteurs ont radicalement transformé les stratégies de distribution des opérateurs touristiques offline (1). Ceuxci ont d abord élargi leur capacité à vendre en ajoutant le web marchand à leurs canaux de distribution traditionnels. Puis ils ont commencé à rechercher un équilibre optimal entre approche directe (BtoC) et indirecte (BtoB) en combinant les canaux. C est ainsi que sont apparues les politiques de distribution multicanal, qui consistent à commercialiser simultanément des produits et services par le biais de plusieurs canaux de distribution, en tenant compte de leur potentiel commercial et de leur rentabilité. Dans ce contexte, les opérateurs s interrogent sur la place pertinente qu ils doivent réserver à chaque canal compte tenu de la complexité de leur offre, de leur position concurrentielle, de leurs moyens techniques, humains et financiers, et doivent réaliser des arbitrages : quel montant de chiffre d affaires supplémentaire attendre de chaque canal et à quel coût? L apparition plus récente des modèles de distribution multicanal dans l univers des pure players (2), principalement par le biais de partenariats signés avec des réseaux d agences physiques, atteste plus que jamais leur pertinence et les perspectives de développement que ces nouveaux modèles peuvent offrir. Elle met également en lumière les nouveaux enjeux auxquels sont confrontés l ensemble des opérateurs de la distribution de produits touristiques, qu ils soient click and mortar (3) ou mortar and click (4). Confrontés aux évolutions des comportements des consommateurs, les opérateurs du tourisme (hébergeurs, producteurs, distributeurs) doivent aujourd hui : 44 Distribution touristique Décembre 2010 CAHIER ESPACES 107

FLORENCE CIOMEI La distribution multicanal. Réalité, enjeux et perspectives acquérir une connaissance approfondie du client, c est-à-dire connaître ses besoins, ses attentes, comprendre comment, de son point de vue, les canaux de distribution à sa disposition interagissent et se complètent, quelle place il accorde à chacun d eux au cours de son processus d achat, etc. identifier et développer des passerelles, des synergies entre les canaux de distribution, de telle sorte que chaque canal vienne améliorer l efficience de l autre. De cette façon, ils pourront construire un système de distribution global, capable de donner une réponse adaptée au client, au moment opportun. Désormais, le consommateur se place clairement au cœur des stratégies de distribution multicanal : il en est la pierre angulaire. LE TOURISME EN LIGNE POINT DE DÉPART DU DÉVELOPPEMENT DES STRATÉGIES MULTICANAL Le boom de l e-tourisme En Europe comme en France, l impact d internet sur les marchés du tourisme ne cesse de croître. Depuis 2006, l e-tourisme a connu un développement rapide, de plusieurs points par an. Fin 2009, il représentait 32 % du marché européen (contre 28 % en 2008). Désormais, la vente de prestations touristiques via internet représente près du tiers en moyenne du marché européen global (5). En France, le taux de pénétration de l e-tourisme se situe actuellement au niveau de la moyenne européenne, et atteint environ 30 %. Le chiffre d affaires de l e-tourisme en France a été multiplié par 12 entre 2001 et fin 2008. Hors voyages d affaires, il représentait 6,57 milliards d euros en 2008, contre 545 millions en 2001 (6). D après le 6 e Baromètre Févad-Médiamétrie sur les comportements d achat des internautes, les ventes en ligne ont franchi en France un nouveau cap en 2009 avec plus de 25 millions de cyberacheteurs et atteint un chiffre d affaires de 25 milliards d euros. Les voyages sont devenus la catégorie de biens et services la plus achetée sur internet. Ainsi, au cours du premier semestre 2010, 58 % des internautes interrogés ont déclaré avoir acheté sur le web des prestations touristiques : billetterie, séjours, hôtellerie etc. Enfin, selon les spécialistes, le développement de l e-tourisme devrait se poursuivre dans les prochaines années. En 2009, dans un contexte de tassement général de la demande, la réservation de voyages en ligne a progressé de 7 % (7), boostée par les avantages très importants dont elle jouit aux yeux des consommateurs : large choix d offres, tarifs attractifs que l on peut comparer en temps réel, information détaillée et dynamique (photos, vidéos), etc. Par ailleurs, le taux d équipement des foyers en informatique et connexion internet ne cesse de croître. La France compte aujourd hui 36,2 millions d utilisateurs d internet, ce qui représente 70 % de la population de plus de 15 ans. La marge de progression du nombre d internautes français est donc encore de 30 % environ (8). Enfin, les freins à l achat en ligne sont en net recul (9). Les internautes sont de plus en plus nombreux à avoir confiance dans le web pour effectuer leurs achats. Évolution du contexte concurrentiel et modification des processus de distribution Internet a favorisé l apparition de nombreux nouveaux acteurs : compagnies low cost, agences de voyages et tour-opérateurs en ligne, guides de voyages numériques, sites (5) PHOCUSWRIGHT ET PRICEWATERHOUSE- COOPERS, Étude E-travel Leisure, décembre 2009. (6) BENCHMARK GROUP, E-tourisme : évolution du marché français en chiffres, Journal du Net, 20/07/2009 ; BENCHMARK GROUP, France : le marché du tourisme en ligne, Journal du Net, 25/05/2010. (7) Selon le panel ice 30 de la Févad (Fédération du e-commerce et de la vente à distance), le tourisme en ligne jouit d une croissance des ventes de 12 % au quatrième trimestre 2009, portant à 7 % la croissance sur l année 2009. Le panel ice 30 est composé de 37 des principaux sites marchands représentant 41 % des ventes sur internet en France, dont une dizaine de sites dans le domaine du voyage. (8) 7 e Baromètre Opodo - Raffour Interactif, juin 2010. (9) 6 e Baromètre Févad - Médiamétrie, chapitre sur les comportements multicanaux des consommateurs, juin 2010. CAHIER ESPACES 107 Décembre 2010 Distribution touristique 45

Les opérateurs traditionnels s emparent du multicanal d avis de consommateurs, agrégateurs et comparateurs d offres, réseaux sociaux, sites communautaires, etc. Ils ont non seulement modifié la cartographie de l offre de produits touristiques, l environnement concurrentiel, mais également les rapports qui existaient entre les acteurs de l offre et de la demande (cf. schéma 1). Dans ce contexte, les métiers du tourisme se sont décloisonnés et les rôles quelque peu brouillés. Les fournisseurs et les producteurs purs sont devenus leurs propres distributeurs. Ils ont mis à profit le développement de l e-commerce pour approcher le consommateur en direct. De leur côté, les réseaux physiques d agences souffrent du développement de la réservation en ligne et tentent de s adapter à cette nouvelle donne en lançant eux aussi leurs sites marchands. STRATÉGIES DE DISTRIBUTION MULTICANAL UN MODÈLE QUI SE GÉNÉRALISE D ABORD CHEZ LES OPÉRATEURS OFFLINE Ainsi, dès le milieu des années 1990, être présent sur internet est apparu comme une nécessité pour les opérateurs du tourisme offline, sous peine de risquer d être exclu du jeu de la concurrence et mis en marge du marché. En allant sur le web, les opérateurs touristiques offline se sont dotés d un canal de vente supplémentaire et y ont vu l opportunité : à la fois d augmenter leurs ventes et leur chiffre d affaires en s ouvrant à une demande plus large et notamment à l international ; de lutter efficacement et durablement contre la concurrence des nouveaux acteurs de l offre ; d améliorer leur rentabilité en développant leurs ventes directes, et ce à moindre coût, grâce à Schéma 1 LA CHAînE DE DIStRIbutIon 1 2 3 4 5 Prestataires Producteurs de voyages Distributeurs Infomédiaires Moteurs de recherche Réseaux physiques Compagnies aériennes traditionnelles Hôtels Loueurs de voitures Compagnies ferroviaires Consolidateurs Tour-opérateurs Agences de voyages traditionnelles Nouveaux acteurs Compagnies aériennes low cost Agences de voyages exclusivement en ligne Sites d information (guides de voyages, avis de voyageurs ) Comparateurs Moteurs de voyages Google Bing Source : PwC Analyses, e-travel Leisure. Fasten your seatbelts. 46 Distribution touristique Décembre 2010 CAHIER ESPACES 107

FLORENCE CIOMEI La distribution multicanal. Réalité, enjeux et perspectives la dématérialisation des processus d achat et de vente (10). Ceux-ci ont ajouté le web marchand à leurs canaux de distribution traditionnels : réseaux physiques d agences, call centers, GDS (11) etc., et fait évoluer leur stratégie vers des modèles de type click and mortar, tout en combinant de manière croissante approches directe (BtoC) et indirecte (BtoB). Les transformations à l œuvre sur le marché de la distribution de produits touristiques ont encouragé l ensemble des opérateurs à élargir leur capacité à vendre. En conséquence, le multicanal s est progressivement généralisé à l ensemble de la profession et devient aujourd hui la règle. Pour autant, les stratégies de distribution multiple (12) recouvrent des réalités très différentes d un opérateur à l autre. Dans l hôtellerie, par exemple, le développement de la réservation en ligne a modifié durablement les règles du jeu, opéré de profonds changements dans les stratégies de distribution, ainsi que dans les politiques d optimisation des ventes et du chiffre d affaires. De nombreux acteurs interviennent aujourd hui sur ce marché de l hôtellerie en ligne : les hôteliers indépendants et chaînes hôtelières via leurs sites propres ou par le biais des agences de voyages en ligne, les comparateurs de prix et autres métamoteurs de recherche (13). Les hôteliers, qu ils soient indépendant ou chaîne intégrée, ont mis en place, à leur rythme et à leur mesure, des stratégies combinant le web à leurs canaux originels de distribution. Voici décryptée la stratégie de quelques opérateurs. Chez Séjours du Sud, groupe indépendant de résidences hôtelières, la stratégie de distribution définie par les dirigeants repose sur un modèle de vente à la nuitée, et la recherche d un équilibre de rentabilité construit à partir d une gestion dynamique des disponibilités et des prix ainsi que de la prise en compte d un seuil d occupation susceptible de générer un surcoût d exploitation. Pour ce faire, le groupe a développé un modèle multicanal qui donne la priorité aux canaux électroniques : son site web et des partenariats btob avec des agences de voyages et tour-opérateurs en ligne. Ils lui permettent d accéder à un vaste potentiel de demande, et d ajuster l inventaire d appartements disponibles à la vente et les tarifs en temps réel, en respectant une logique de parité tarifaire entre chacun d eux. Par ailleurs, la constitution d une véritable base de données devrait permettre à l avenir de consolider la relation aux clients existants en mettant en place des offres et services ciblés, qui favoriseront le développement des ventes directes, les réservations multiples et le cross selling (14) entre résidences. Séjours du sud envisage également de se lancer dans l internet mobile avec son propre site de réservations (15). Chez Best Western en 2001, les réservations des hôtels en France étaient réalisées à 46% par téléphone, 39 % via les GDS et 15 % sur le site internet. Fin 2009, 49,7 % des ventes de la centrale de réservation étaient issues d internet, dont 80 % effectuées en direct et 20% par le biais de sites partenaires tels que Hotels.de, orbitz, travelocity etc. Au fil des années, la part du téléphone dans les réservations centralisées de la chaîne a considérablement diminué pour se situer autour de 17 % en 2009. Cet effondrement du canal téléphone au profit du web a sonné le glas de trois des cinq call centers dont disposait best Western dans le monde. La part des GDS quant à elle est restée relativement stable autour de 32,5 % des ventes de la centrale de réservation en 2009. Malgré les partenariats noués avec certains acteurs de l e-tourisme, la volonté affichée par la chaîne est claire : développer ses ventes directes en ligne et réaliser 60 % de son chiffre d affaires sur internet dans les deux à trois prochaines années, et ainsi améliorer la rentabilité de la coopérative et contribuer plus activement encore à celle des hôteliers qui y sont affiliés (16). (10) Selon Pricewaterhouse Coopers, les coûts de distribution via internet sont 60 % moins élevés que ceux des canaux offline pour un producteur de voyages. Source : E-travel leisure : fasten your seatbelts, décembre 2009. (11) global distribution systems : systèmes informatiques émanant des compagnies aériennes et utilisés par les agents de voyages pour effectuer des réservations d avion, de train, d hôtel, de voiture. Les principaux GDS sont Amadeus, Galileo et Sabre. Source : Jacques Bessières, Le tourisme, industrie pionnière du commerce électronique, dans Nouvelles technologies, coll. Cahier Espaces n 50, Éditions Espaces tourisme & loisirs, février 1997. (12) Autre terme utilisé pour caractériser une stratégie de distribution de type multicanal. (13) Un métamoteur de recherche est un outil de recherche qui envoie des requêtes utilisateur à plusieurs autres moteurs de recherche et/ou bases de données et qui en agrège les résultats pour les présenter en une seule liste. (14) Le cross selling, ou ventes croisées, désigne une technique commerciale permettant de proposer au client d un site, intéressé par un produit, un ensemble d autres produits complémentaires. Source : Journal du Net. (15) Entretien réalisé avec Serge Salique, président de Séjours du Sud, et Sébastien Robert, directeur des opérations du groupe, 27/04/2010. (16) Interview de Stéphane GAUTHIER (Best Western France) Les hôteliers doivent être moins dépendants des intermédiaires, Journal du net, 30/03/2010 ; Stéphane GAUTHIER, La stratégie de distribution de Best CAHIER ESPACES 107 Décembre 2010 Distribution touristique 47

Les opérateurs traditionnels s emparent du multicanal Western, La Distribution touristique, coll. Cahiers Espaces n 71, Éditions Espaces tourisme & loisirs, décembre 2001. (17) Interview de Romain ROULLEAU (Accor), Nous voulons réaliser 25 % de nos ventes en ligne d ici 2012, Journal du net. 7/10/2009. Chez Accor, les ventes réalisées via les sites de la chaîne dépassaient 15 % des ventes totales à la fin 2009. Après la réservation directe aux hôtels (par téléphone ou sur place), par laquelle est encore réalisée plus de la moitié des ventes, internet est le deuxième canal utilisé pour les réservations (17). Avec le lancement de son nouveau site portail www.accorhotels.com, le groupe s est fixé comme objectif de réaliser 25 % de ses réservations directes via internet à l horizon 2012. Dans une interview accordée au Journal du net en octobre 2009, Romain Roulleau, directeur délégué aux ventes directes, indiquait à propos des sites de réservations hôtelières : Ils sont d une certaine manière des concurrents d accorhotels.com. Mais nous les considérons plutôt comme des partenaires importants, car ils nous apportent des ventes complémentaires. Il s agit clairement d un canal de vente que nous ne souhaitons pas négliger. Une désintermédiation variable suivant les situations Ces exemples illustrent des situations d entreprise et des choix en termes de distribution plutôt différents. Il apparaît clair qu en fonction de leur taille, de leur organisation, de leur notoriété, de leur situation concurrentielle, de la nature de leurs produits, de leur mix de clientèle et bien sûr de leurs moyens financiers et humains, que chacune d elle a réalisé des arbitrages spécifiques entre les différents canaux de distribution à sa disposition. Ainsi, l importance accordée aux réservations issues des agences de voyages en ligne n est pas la même si l on considère le groupe indépendant Séjours du Sud et les chaînes hôtelières best Western et Accor. Le premier préfère compter sur leur puissance et la visibilité qu elles donnent à ses produits, les secondes cherchent plutôt un apport complémentaire de réservations mais orientent en priorité le flux des demandes vers leurs propres sites de réservation en ligne. En effet, fortes de leur position concurrentielle, les chaînes misent aujourd hui sur la désintermédiation progressive de la réservation hôtelière. Cette tendance, qui s affirme aux États-unis et au Royaume-uni notamment, devrait progresser en France dans les prochaines années. bien que différent, le modèle de distribution respectif de ces différents opérateurs repose à l évidence sur la recherche d un équilibre optimal entre les canaux disponibles, tenant compte de leur spécificité, de leur potentiel et de leur rentabilité. Pour eux, les enjeux sont clairs : maîtriser les stocks et les tarifs, et développer le chiffre d affaires et les marges. STRATÉGIES DE DISTRIBUTION MULTICANAL UN MODÈLE QUI SE DÉVELOPPE DÉSORMAIS CHEZ LES PURE PLAYERS Modèle généralisé aux opérateurs offline avec le développement d internet, l intérêt des stratégies de distribution multiple ne se dément pas. Elles gagnent d ailleurs peu à peu l univers des pure players. En effet, ces derniers doivent aujourd hui faire face à la concurrence de leurs propres fournisseurs, qui consacrent beaucoup d efforts au développement de leurs réservations en ligne et leur imposent un modèle de parité tarifaire. Ils pourraient également se trouver fragilisés à l avenir par les métamoteurs, si ceux-ci venaient à intégrer des interfaces marchandes à leurs sites plutôt que de rediriger l internaute vers le site de l un ou l autre de ses partenaires. Par ailleurs, tout comme les opérateurs historiques du tourisme, ils sont peu à peu confrontés à une nouvelle espèce de consommateurs, adeptes de l achat en mode multicanal. En réponse à ses évolutions, certains pure players ont commencé à développer des stratégies multicanal. Selon les cas, ils ont ouvert leurs propres agences (Promovacances), signé 48 Distribution touristique Décembre 2010 CAHIER ESPACES 107

FLORENCE CIOMEI La distribution multicanal. Réalité, enjeux et perspectives des partenariats avec des réseaux physiques et créé leurs call centers (Lastminute, travelfactory), ou développé des partenariats en marque blanche (18) à destination d autres producteurs et distributeurs (Expedia, travelhorizon etc.). Le nouveau business model de Travelfactory tour-opérateur créé en 1999 par Yariv Abehsera, travelfactory se positionne au départ sur le marché des étudiants. Avec l arrivée d olivier Abergel, travelfactory se développe progressivement sur le marché grand public en lançant tout d abord le portail www.travelski.com, ouvert en 2005, et plus récemment les sites www.declicfrance.com et www.espanaclic.com. Après avoir mené pendant plusieurs années un développement orienté strictement sur le web, le groupe a récemment amorcé un virage stratégique en optant pour un modèle multicanal mixant BtoB et BtoC. Afin d acquérir une présence forte en BtoB, le tour-opérateur a mis en place des offres spécifiques à destination d autres producteurs et distributeurs. Ainsi, en mai 2008, travelfactory est devenu partenaire en marque blanche de Lastminute.com. L agence en ligne lui a délégué la totalité de la production de ses séjours en France et au ski ainsi que de ses séjours bien-être. Les équipes travelfactory gèrent donc, depuis cette date, la production et l animation des pages location de vacances, ski et thalasso bien-être du site Lastminute.com en France. Puis, en juin 2009, le groupe a conçu une offre exclusive ski pour Carrefour Voyages, qui a été distribuée dans l ensemble des points de vente du leader français de la grande distribution. Enfin, en 2009, travelfactory s est rapproché des agences de voyages physiques et a signé un partenariat en direct avec le réseau volontaire Selectour. Ce tournant marque la fin d une stratégie 100 % web. Selon Yariv Abehsera, il existe en effet un frein à l utilisation du web pour la réservation d un certain type de séjours. L utilisateur a besoin d être rassuré, et en cela, les agences de voyages sont un formidable relais du web, une source de business complémentaire de proximité. Elles nous offrent l opportunité d un point de contact réel avec les clients (19). Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c est le lancement du site Declicfrance en mai 2009 qui a permis à travelfactory et ses dirigeants de comprendre qu ils devaient s adjoindre un relais de commercialisation physique, afin de capter les clients dont les paniers moyens dépassaient 2 500 à 3 000. Selon Yariv Abehsera, plus que le prix, le facteur déterminant pour ces clients est le besoin d être conseillé et rassuré dans le choix d une destination, d un mode d hébergement, d une formule de séjour ou encore d un prestataire. C est notamment le cas des familles, cible privilégiée de ce spécialiste de la destination France. En effet, même muni d un module de recherche très précis et comprenant un grand nombre de critères, un site web ne pourra jamais rivaliser avec le contact humain en agence de voyages, car les combinaisons de variables de choix sont infinies. Ainsi, plus les critères prévalant à l achat sont nombreux et complexes, plus le montant du séjour est élevé, plus le choix est impliquant, et plus les notions de conseil et de réassurance deviennent des facteurs déterminants dans le processus d achat. tandis qu internet offre des possibilités inégalées d évaluation des offres et des produits, l agence de voyages et le call center interviennent pour compléter les informations trouvées sur internet, lever les dernières réticences et incarner le producteur, la marque dans un rapport humain, direct, et qui rassure. (18) Se dit d une solution ou d un produit cédé ou loué à une entreprise sur lequel cette dernière peut apposer sa propre marque et donc en revendiquer la paternité auprès de ses clients Source : Journal du Net. (19) Sources : Entretien réalisé avec Yariv Abehsera le 24/04/2010 ; communiqués de presse de la société Travelfactory ; articles Tourmag, Les pure players n auront jamais 100 % des clients (14/10/2009) et Destination France. Travelfactory signe un partenariat avec Selectour (23/06/2009). CAHIER ESPACES 107 Décembre 2010 Distribution touristique 49

Les opérateurs traditionnels s emparent du multicanal LE CONSOMMATEUR MULTICANAL : PIERRE ANGULAIRE DES STRATÉGIES DE DISTRIBUTION (20) Étude E-travel leisure de PhocusWright et Pricecaterhouse Coopers, décembre 2009. Nouveaux comportements des e-touristes Le consommateur multicanal est une réalité complexe à laquelle sont confrontés l ensemble des opérateurs du tourisme, qu ils soient de type click and mortar ou pure player. Celui-ci multiplie ses contacts avec l entreprise et mobilise plusieurs canaux au cours de son processus d achat, attribuant à chacun d eux la réalisation d une ou plusieurs étapes. Ainsi, 65 % des internautes utilisent le web comme première source d information pour préparer leur voyage : ils cherchent des informations sur les destinations, les hébergements, comparent les prix, recherchent les bonnes affaires, consultent les avis laissés par les consommateurs sur les sites dédiés, les sites communautaires, les blogs et les forums En revanche, ils ne sont que 28 % à se rendre sur internet pour acheter leur voyage en ligne (20). De même, les acheteurs qui se rendent en agences de voyages se renseignent avant sur le web. Selon Raffour Interactif, leur premier réflexe est d aller consulter internet (91 % le font en 2009 contre 82 % en 2008), viennent ensuite les conseils de proches : amis, collègues de travail et famille. Schéma 2 usage D IntERnEt DAnS LA PRÉPARAtIon DES VoYAGES En FRAnCE (réponses : toujours et souvent ) Comparer les prix 60 % Chercher des informations sur les destinations 58 % Regarder les photos 57 % Trouver des informations sur les hébergements 56 % Trouver des bonnes affaires 55 % Choisir une destination 54 % Lire des magazines 33 % Acheter un voyage 28 % 0 % 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % Source : Étude PhocusWright PWC, décembre 2009 (repris par le Journal du net dans son dossier Le poids de l e-tourisme en Europe, 04/01/2010. 50 Distribution touristique Décembre 2010 CAHIER ESPACES 107

FLORENCE CIOMEI La distribution multicanal. Réalité, enjeux et perspectives Il en va de même de ceux qui concrétisent leur achat auprès d un call center. Cette tendance a toutes les chances de se développer dans les prochaines années, compte tenu d une part du nombre croissant d internautes, et d autre part de la généralisation des stratégies de distribution multicanal qui encouragent les clients à adopter ce type de comportement. Par ailleurs, le développement continu de l e-tourisme, et plus particulièrement en période de crise, ne doit pas conduire à minimiser ou encore à occulter cette tendance de fond au comportement multicanal (cf. schéma 2). Nouvelles stratégies de distribution multicanal Pour atteindre leurs objectifs de vente, les opérateurs du tourisme, quels qu ils soient, doivent comprendre comment les différents canaux qu ils utilisent pour distribuer leurs produits interagissent et se complètent. En effet, la réussite d une stratégie multicanal ne réside pas tant dans le nombre de canaux déployés que dans la bonne coordination des canaux entre eux. La nécessaire diversification des canaux de distribution et la définition d une combinaison pertinente des canaux entre eux. C est là le premier enjeu pour les opérateurs. Pour les pure players en particulier, il s agit de définir le bon équilibre entre vente en ligne et canal physique. Comme travelfactory, Lastminute.com, après son rapprochement avec le réseau indépendant Jancarthier, a signé en 2009 un partenariat majeur avec Selectour. Ainsi, depuis mai 2009, les clients des 550 agences Selectour ont accès à l ensemble de l offre de Lastminute, et à l inverse, les clients de l agence en ligne peuvent se rendre chez Selectour afin de recueillir des conseils d un agent de voyages et concrétiser leur achat (21). En faisant évoluer leur modèle de distribution, ces pure players apportent une réponse aux besoins de conseil et de réassurance des consommateurs, et obtiennent en retour un effet positif sur leur image de marque. Cela leur permet aussi de capter de nouvelles cibles de clientèle, d améliorer le panier moyen de leurs ventes, et enfin d accroître leur capacité à vendre, puisqu ils sont présents à chaque étape du processus de réservation. L optimisation de leur stratégie de distribution en combinant les canaux et en jouant sur les moments opportuns pour utiliser chacun. Le deuxième enjeu pour les opérateurs est d améliorer la performance globale de leur distribution grâce à la mise en place de passerelles pertinentes entre les canaux d une part, et l utilisation de chaque canal au meilleur moment du cycle d achat client d autre part. Les systèmes de call back (rappel automatique) par exemple, véritables services d assistance à la commande, représentent des services supplémentaires pour le client. Dans le même temps, ils permettent à l entreprise de conserver son client dans le système de distribution, d être présente à chaque moment clé du processus d achat (dans le cas présent, à l occasion de l acte d achat afin d aider à la finalisation de la commande). De ce fait, les systèmes de call back apparaissent clairement comme des leviers de la performance commerciale. Les études réalisées aussi bien que les exemples présentés précédemment montrent que l utilisation de tel ou tel canal dépend à la fois du contexte et de la nature de la demande, ainsi que des avantages attribués par le consommateur à chacun des canaux à sa disposition. Ainsi, selon les cas, il privilégiera : le web pour la recherche d informations, la mise en place d un référentiel d appréciation et de choix ou encore parce qu il permet de faire ses achats sans se déplacer, de profiter (21) Source : BENCHMARK GROUP, Lastminute et Selectour officialisent leur partenariat, Journal du net, 27/05/2009. CAHIER ESPACES 107 Décembre 2010 Distribution touristique 51

Les opérateurs traditionnels s emparent du multicanal (22) Le point de vente, étape cruciale du parcours client, Emarketing.fr, 08/06/2009. (23) ROI : return on investment : mesure de la rentabilité par comparaison des gains générés et des coûts engagés. de promotions et de bonnes affaires, etc. ; ou bien le contact avec un centre d appels, pour les demandes urgentes, pour confirmer et préciser une information trouvée sur internet ou encore pour effectuer une réclamation; ou encore le contact physique avec l entreprise par le biais de l agence de voyages, notamment si l achat est impliquant et, par conséquent, le besoin de conseil et de réassurance important. Parfois même, il mobilisera successivement ou conjointement tous les canaux à sa disposition et passera de l un à l autre selon une logique et une séquence qui lui sont propres. Le consommateur a désormais mûri son utilisation des canaux de distribution. Il a progressivement développé et mis en œuvre un système expert complexe dont tous les opérateurs du tourisme doivent aujourd hui comprendre les rouages. L importance pour les opérateurs d avoir une connaissance approfondie du consommateur. En premier lieu, les opérateurs ont intérêt à connaître ses habitudes et souhaits de consommation, ainsi que ses critères objectifs d achat (budget/prix, fréquence des départs, destination souhaitée, etc.). Sur ce point, les bases de données marketing sont un outil primordial. L enjeu réside non seulement dans la création de ces bases de données, mais également dans leur mise en commun et leur centralisation, de manière à ce que tous les canaux contribuent à les enrichir et puissent utiliser les informations collectées. Le fait qu un client ne soit pas identifié et reconnu d un canal à l autre est en contradiction avec le choix d une stratégie multicanal et peut donc s avérer pénalisant pour l opérateur concerné. Les bases de données marketing, lorsqu elles sont mutualisées entre les canaux, sont autant de passerelles qui participent à l efficience de chaque canal pris individuellement et à la stratégie de distribution dans son ensemble. outre les impératifs financiers et les contraintes techniques, l existence d une base de données commune à tous les canaux dépend du degré d intégration de ces derniers. Il sera à l évidence plus facile d y parvenir pour une marque intégrée verticalement, mixant production et distribution au travers de ses propres points de vente. Le web, s il est bien exploité, peut en tous cas contribuer largement à l amélioration de la connaissance du client et du prospect. L autre élément que les opérateurs ont intérêt à connaître, c est le ou les parcours d achat du consommateur. Le parcours client se définit comme l ensemble des phases de contacts et d interactions entre le client et l entreprise. La prise en compte du parcours client est extrêmement importante, car l expérience positive ou négative du client avec l opérateur s élabore grâce aux différents contacts qu il est amené à établir avec lui par le biais des différents canaux de vente et de distribution : force de vente, agences, centres d appels, site internet (22). Le parcours client permet d identifier et de comprendre la nature, la fréquence, la séquence des interactions entretenues avec l opérateur, ses produits et sa marque, puis, d évaluer les écarts entre les attentes du client et les réponses qui y sont apportées. La bonne prise en compte des parcours clients aboutit à l amélioration de la qualité et de l efficacité commerciale des contacts client et contribue au RoI (23) des stratégies de distribution multicanale. Au final, une connaissance fine du client permet de déterminer les axes de développement prioritaires, d apprécier les synergies et les gisements d amélioration possibles au plan de: l offre, et notamment en termes de cohérence, d adéquation aux attentes, de différen- 52 Distribution touristique Décembre 2010 CAHIER ESPACES 107

FLORENCE CIOMEI La distribution multicanal. Réalité, enjeux et perspectives ciation ou d homogénéisation en fonction de la cible et/ou du canal ; la coordination des actions commerciales et marketing ; l organisation interne à l entreprise et l évolution éventuelle de ses process de travail. t t Les stratégies multicanal s affirment aujourd hui comme le modèle de distribution pour les opérateurs touristiques, ce que montrent bien les études réalisées, les chiffres, ou l actualité récente. Elles sont complexes mais plus que jamais pertinentes et riches de promesses. Ce sont des stratégies gagnant-gagnant : à la fois sources de satisfaction pour le client, et porteuses de valeur pour l entreprise en termes d offre et d image de marque, d efficience et de rentabilité. toutefois, une question reste posée : comment construire un modèle souple et flexible, capable d intégrer rapidement et sans heurts les éventuelles évolutions du secteur et des comportements d achat? Les évolutions techniques, les bases de données marketing, la connaissance des parcours clients suffisent-elles à régler cette question ou bien faudrait-il aller plus loin : adapter l organisation de l entreprise, repenser le rôle, les missions, le métier des acteurs des canaux privilégiant l interaction humaine : force de ventes, agences, centre d appels? une démarche progressive et maîtrisée qui combinerait anticipation, accompagnement et formation peut vraisemblablement y contribuer. m CAHIER ESPACES 107 Décembre 2010 Distribution touristique 53