SYNTHÈSE D ÉTUDE. Recrutement des profils universitaires : Perceptions, stéréotypes et freins des managers et des RH de grandes entreprises



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Transcription:

SYNTHÈSE D ÉTUDE Recrutement des profils universitaires : Perceptions, stéréotypes et freins des managers et des RH de grandes entreprises Accès de tous à l emploi - Avril 2013

Comité de rédaction : Patricia Charrier, Thomas Gauduin, Caroline Lassalle Saint-Jean, Katia Marembert Rédaction : Katia Marembert et Thomas Gauduin Avril 2013 2

SOMMAIRE Introduction p. 4 Les résultats de l étude : 1. La vision des RH et managers sur l Université et les étudiants p.5 L Université vue par les professionnels de l entreprise La perception des profils universitaires par les professionnels 2. Les pratiques de recrutement p.8 Le sourcing des candidats Les profils recherchés par les managers et le top management La sélection des profils Les tests de sélection 3. Le poids de la culture interne p.10 Le lien entre RH et Managers L Intégration des recrues et l évolution de carrière Le positionnement du top management Le lien «Université et Diversité» Pour mieux comprendre les stéréotypes : quelques références à la psychologie sociale p.12 Conclusion p.14 3

INTRODUCTION Selon une étude menée en 2012 par l IMS*, 76% des entreprises mènent actuellement des actions avec les universités. Un taux en constante évolution qui confirme le rapprochement opéré entre les entreprises et les universités. Cependant, la part des recrutements de profils universitaires reste minoritaire, notamment dans les grandes entreprises. Méconnaissance de l Université et de son fonctionnement, complexité du système universitaire, autocensure des étudiants de l Université vis-à-vis des grandes entreprises sont autant de freins qui expliquent cette situation. A travers cette étude, nous avons souhaité explorer un de ces aspects : les perceptions, freins et stéréotypes des RH et Managers sur les profils universitaires. Il semble en effet essentiel d identifier et de lever ces éventuels freins et stéréotypes au sein des entreprises afin de favoriser la diversité académique. Pour ce faire, IMS-Entreprendre pour la Cité a mené une étude auprès de 90 managers et RH de 6 grandes entreprises, membres du réseau IMS. Cette étude s appuie sur la réalisation d entretiens de groupes (focus groupe) menées dans les 6 grandes entreprises partenaires : ACCENTURE, BOUYGUES TELECOM, GIE AXA, HENKEL, L OREAL et la SOCIETE GENERALE. L objectif de l étude est la mise en lumière des perceptions convergentes sur les profils universitaires. Elle n a pas vocation à être représentative de toutes les entreprises. Elle vise à apporter des premiers constats sur cette question complexe pour permettre, par la suite, la déconstruction des stéréotypes et l optimisation des actions menées par les entreprises en faveur de l embauche d étudiants de l université. Cette synthèse de l étude reprend les propos tenus par les managers et les RH. * Etude «Etat des lieux des partenariats Entreprises et Universités» Avril 2012 4

1. La vision des RH et des Managers sur l Université et les étudiants L Université vue par les professionnels Selon les professionnels, l Université est ouverte, abordable», c est «un lieu de réflexion et de libres penseurs». «Les universités sont nombreuses avec une profusion de tout». Il y règne «une totale liberté, c est un foutoir». «Théorique et académique, l Université est un lieu de recherche déconnecté de l entreprise». Après les grandes écoles et les autres filières sélectives, «c est une 3 ème case vers laquelle les étudiants se dirigent car il n y a pas de sélection.» Trois points sont particulièrement mis en exergue par les professionnels : Le manque de professionnalisation - Un reproche récurrent quand à la posture des enseignants et des responsables de Masters : «A l Université, on forme, puis on lâche dans le vent» «Les écoles sont plus proactives, alors que les universités ne viennent pas vers nous» - Un questionnement sur les missions de l Université (transmission du savoir ou préparation des étudiants à un emploi?) - Une mauvaise ou une absence de connaissance des entreprises et des métiers par les enseignants Des améliorations nécessaires au niveau des stages et de l alternance Les professionnels soulignent : - Pour les stages, l inadéquation des périodes et des durées - Pour l alternance, un calendrier de recherche décalé par rapport aux campagnes de recrutement des entreprises - De plus, certains professionnels interrogés méconnaissent l existence de stages à l Université 5

La problématique de lisibilité et de visibilité des formations - L intitulé des formations mais également leur fort degré de spécialisation ne permettant pas de repérer les compétences acquises. - Les intitulés des formations varient selon les universités, ce qui ne permet pas de repérer facilement les formations similaires. - Le peu de classements existants sur les formations universitaires «C est un maquis les Masters en France, pour les écoles on a en tête les rangs 1/2/3 mais les Masters, il y en a 25 par université» Le profil type de l étudiant universitaire Les stéréotypes positifs - La capacité d adaptation : des étudiants «plus souples», «plus ouverts» et «plus adaptables». Ils accepteraient plus facilement les changements et l imprévu. - La créativité : des étudiants «plus créatifs» et «plus inventifs» dans leur travail. Ils auraient plus de recul pour être disponibles aux nouvelles idées. - L état d esprit : des étudiants «moins arrogants», «moins hautains» et «plus proches de la réalité». Ils seraient par exemple «moins complexés» qu un profil école à l idée de faire un début de carrière ou un stage dans une PME. - La ténacité : des étudiants «plus débrouillards», «plus tenaces» et «travailleurs». Chaque étudiant déterminant son parcours, les meilleurs seraient les plus méritants et les plus persévérants in fine, car ils auraient vécu une forte sélection. Les stéréotypes négatifs - L accompagnement : des étudiants «moins accompagnés», «moins encadrés», «moins bien préparés», ce qui entraînerait un manque de confiance en leurs compétences ainsi qu une ambition moindre. - L expérience professionnelle : des étudiants «moins bien formés sur l aspect terrain» car moins de stages sont prévus, moins «plug and play» et «moins business oriented». - Les compétences techniques : l anglais, l informatique et les chiffres seraient moins maîtrisés. - Le manque de réseau : un réseau des anciens et une implication associative moins développés que dans une école selon les professionnels. Ce qui entraînerait de «l individualisme» et «un manque d esprit d équipe». 6

- L organisation de l Université : des étudiants «moins contrôlés» et plus «filous». - L absence de sélection : des étudiants «moins bons» car ils n ont pas fait de classes préparatoires et qu il n y a pas eu de sélection à l entrée de l université, selon les professionnels. - L aspect politique : des étudiants «plus politisés» ce qui expliquerait qu ils sont «plus imprévisibles». Cela pourrait affecter leur intégration. - Le parcours universitaire : Un parcours qui semble «moins cohérent», avec «moins de ligne directrice». Quelques propos nuancés (pas d unanimité) tenus par les RH : - Des formations plus spécialisées à l Université que dans les Ecoles - Une diversité des profils - Des étudiants moins formatés - Des étudiants «moins chers» 7

2. Les pratiques de recrutement Le sourcing des candidats Concernant les stages et l alternance, les périodes de recherche ainsi que les rythmes et les durées ne sont pas adaptés à l entreprise selon les RH et les managers. Cette inadéquation des calendriers pénalise les étudiants issus de l Université. Concernant les emplois, les entreprises font très souvent appel à leur vivier interne (anciens stagiaires et alternants) pour pourvoir les postes vacants. Cette pratique entraîne un cercle vicieux porteur de fortes inégalités d opportunités, car dans de nombreuses entreprises, les stagiaires et alternants sont majoritairement issus d écoles. Les profils recherchés par les managers et le top management La demande émanant du top management est souvent claire : «Recrutez les meilleurs». Une demande souvent assimilée à une orientation du recrutement vers les profils «écoles». Les RH soulignent que certains managers continuent à préciser l école recherchée dans les profils de poste. D autre part, les offres sont parfois diffusées uniquement à des écoles ciblées dans un premier temps. Une deuxième pratique semble également largement répandue : les mots clés utilisés, les compétences décrites ainsi que certaines formulations décourageraient les étudiants de l Université qui s autocensurent. Les RH ressentent une très grande pression interne concernant la sélection des profils et le recrutement, une pression d autant plus marquée en période de crise. Ils ont le sentiment de ne pas bénéficier d une marge de manœuvre. Paradoxalement, les managers sont unanimes sur leur ouverture concernant les profils. Ils n ont pas le sentiment d exercer indirectement une pression. De plus, ils considèrent que ce sont les RH qui s autocensurent (non-présentation de certains profils). 8

La sélection des candidats et la présentation des profils aux managers Les RH et les managers s accordent à dire qu ils reçoivent davantage de CV de candidats issus d écoles que d universités. La sélection s opère dès les premiers filtres (modules de candidatures en ligne). Un premier désavantage peut apparaître ici pour les étudiants de l université (mots clés absents, nom de l Université). Il y a également un filtre interne opéré par les RH qui ont tendance à regarder en premier un profil école et à le mettre en valeur lors des présentations des profils. Certains RH manquent d arguments pour valoriser les profils universitaires. Ils ont ainsi «capitulé» devant les demandes des Managers orientées écoles. Afin de limiter le «risque», ils recrutent des profils identiques à ceux des managers (clonage) ou ils font appel à la cooptation. D autres recentrent la question notamment sur la richesse des parcours et des expériences et se réfèrent à la politique diversité de l entreprise, ou capitalisent sur le lien de confiance établi avec le manager. Certains s appuient également sur les tests et mises en situation pratique pour objectiver la sélection. Les tests de sélection (cas pratiques, assessment centers,...) et l entretien de recrutement De façon générale, les RH et managers reconnaissent que les tests sont très sélectifs et induisent un décalage entre les étudiants issus de l Université et des écoles. Les étudiants de l université y sont moins bien préparés et ne connaissent pas les attentes de l entreprise. Cette situation reconnue unanimement génère un questionnement important sur la pertinence de ces tests pour les profils universitaires. Certains managers estiment également ne pas être assez «armés» pour mener des entretiens avec des profils universitaires. La grille d entretien traditionnelle leur semble en décalage et ils attendent une aide pour mieux questionner ces étudiants. 9

3. Le poids de la culture interne Le lien entre les managers et les RH Bien que les managers soient unanimes sur leur ouverture à tout type de profil, les RH ressentent une forte pression interne par rapport à la réussite des recrutements qui les pousseraient à s autocensurer sur la présentation de profils. Pour les RH, les managers sont dans la reproduction sociale, ils cherchent des recrues qui leur ressemblent. La diversité des profils est une notion difficile car il est plus facile pour les managers de recruter quelqu un qui a «le même profil culturel et la même formation». Il ne s agit pas d un rejet des profils universitaires mais d une préférence pour les profils issus des écoles et surtout de leurs écoles. Ils ne veulent pas prendre de «risque» en recrutant un profil qui ne serait pas opérationnel immédiatement et qui risquerait d avoir du mal à s adapter. Les managers, quant à eux, estiment qu ils ne sont jamais sollicités par les RH pour participer à des actions dans les universités et changer leur regard sur cet univers. Ils reconnaissent cependant l exigence de leurs attentes au niveau du recrutement. Ils sont conscients et reconnaissants du travail effectué par les RH, ils accordent une grande importance à leurs relations. D autre part, ils estiment que la mission des RH est d avoir un rôle de questionnement auprès des managers. Ils doivent également être convaincus de la valeur des profils universitaires pour convaincre les managers. Enfin, actuellement, les RH et les managers estiment ne pas avoir assez d éléments pour faire évoluer leur perception, à la fois pour améliorer leur connaissance du milieu universitaire ainsi que des compétences des étudiants issus de l Université. L intégration et l évolution des recrues Des freins persistent au quotidien lors de l intégration et de l évolution de carrière. Le diplôme reste un élément de référence, y compris pour la mobilité interne et ce, quel que soit l ancienneté de la personne au sein de l entreprise. «On nous dit parfois tel collaborateur «c est un HEC». «Même au bout de 20 ans il le met encore sur son cv ou il rédige encore des mails avec son adresse d il y a 10 ans @edhec.com». 10

Le positionnement du top management sur ses questions La diversité des profils académiques n est pas incarnée et/ou soutenue par la Direction, selon une grande partie des managers et RH interrogés. Il existe une survalorisation des écoles au plus haut niveau de l entreprise. Cependant les participants ont aussi clairement exprimé la volonté de leurs entreprises d appliquer une politique de diversité globale. «Il y a un engagement du comité de direction sur la diversité, tout le monde en RH a fait la formation diversité, on essaye de briefer les managers pour les entretiens de recrutement. Il y a une volonté de la Direction». Le lien entre Université et Diversité Un constat : le lien entre la diversité et l origine académique n est pas toujours bien compris par les managers. La non-discrimination s appuie sur les 19 critères posés par la Loi (sexe, âge, origine, ). L origine académique ne faisant pas partie de ces critères, les managers éprouvent, par conséquent, des difficultés à la positionner plus largement dans la politique diversité de l entreprise. Ils évoquent ainsi le lien entre l Université et l origine sociale, mais peinent à l expliciter et surtout, à envisager sa corrélation avec la politique diversité de leur entreprise. 11

POUR ALLER PLUS LOIN Pour mieux comprendre la notion de stéréotype : quelques références à la psychologie sociale «Les stéréotypes sont des croyances partagées ou non sur les caractéristiques personnelles, traits de personnalité et/ou comportements d un groupe de personnes.» Leyens, Yzerbyt & Schadron, 1996 Un stéréotype peut être positif ou négatif et n est pas systématiquement faux. Il peut être personnel ou partagé (par exemple dans l entreprise). Les stéréotypes ont une place centrale dans les phénomènes de discrimination et d autocensure et peuvent avoir un impact sur le recrutement, l intégration et l évolution dans le cadre de notre étude. Les phénomènes entrant en jeu dans la construction des stéréotypes - L attention sélective : lorsque j ai un stéréotype, je retiens mieux tout ce qui confirme ce stéréotype (j occulte les autres caractéristiques de la personne) - Le principe d accentuation : «eux» sont tous pareils alors que «nous», nous sommes différents (catégorisation entre «mon groupe d appartenance» et les «autres groupes») - Le choix de relations privilégiées : je m entends souvent mieux avec ceux qui ont les mêmes stéréotypes que moi - L autoréalisation : tout le monde rencontre un jour une personne qui illustre parfaitement le stéréotype que l on a sur une catégorie de personne. Cela a pour effet de renforcer le stéréotype. - L effet Pygmalion : ceux qui font l objet d un stéréotype le reprennent à leur compte. Ils adoptent inconsciemment des comportements qui confirment le stéréotype. Mais également, une peur (du groupe minoritaire «les universitaires») qui se caractérise par : - La Méfiance : Je sais que la personne ne va pas convenir (croyance qu on sera trompé) - La Défiance : J ai peur que la personne ne convienne pas (crainte d être trompé) 12

La reproduction sociale : clonage et cooptation Il s agit d un phénomène sociologique qui conduit à la transmission des positions sociales et des façons d'agir ou de penser, d'une génération à une autre, dans une certaine proportion, du fait d'une faible mobilité sociale. En matière d'embauche, par exemple, la reproduction sociale se manifeste par la tendance qu'ont les recruteurs à privilégier les profils qui leur sont proches en matière de formation (clonage), de sexe ou d'origine sociale. De même, la cooptation ou l'activation de réseaux de connaissance génèrent de la reproduction sociale. Les écoles bénéficient d une forte confiance institutionnelle auprès des professionnels (connaissance de leur fonctionnement, réputation) ainsi que d une forte confiance relationnelle (effet réseau). Cette confiance se perpétue dans l entreprise. 13

CONCLUSION Cette étude portant sur la thématique des perceptions et des stéréotypes des RH et Managers sur les profils universitaires, a permis de mettre en perspective un certains nombre de perceptions et stéréotypes persistants et pouvant nuire au recrutement et à l intégration de profils universitaires en entreprise. Ceux-ci sont générés à la fois par les représentations existantes sur l Université et ses étudiants dans la Société, et ceci depuis des années. La méconnaissance du système universitaire mais également la perception de l Université comme une organisation complexe contribuent également à ce phénomène. Plus particulièrement et surtout, l étude met en évidence l importance des phénomènes de clonage et de reproduction sociale dans l Entreprise et ceci particulièrement en période de crise. Au-delà du développement de partenariats avec des universités, il est donc essentiel de s appuyer sur ces constats pour agir auprès des RH et managers sur la question des stéréotypes en outillant notamment les RH, en multipliant les occasions de rencontres avec les enseignants et les étudiants, en adaptant les grilles d entretiens,... D autre part, ces enseignements doivent être mis en perspective avec les stéréotypes côté Universités et étudiants afin d identifier et de lever les stéréotypes croisés. Dans la continuité de cette étude, l IMS propose une fiche outil-argumentaire à destination des RH et responsables diversité pour avancer concrètement et réalise une étude sur les compétences et aptitudes des étudiants issus de l Université. A découvrir rapidement! 14

IMS-Entreprendre pour la Cité Créée en 1986, IMS-Entreprendre pour la Cité regroupe 230 entreprises engagées dans des démarches de Responsabilité Sociétale. Centre d échanges, d innovation et d expertise, sa mission est d accompagner l engagement sociétal des entreprises, notamment dans les domaines de l accès à l emploi et de la diversité, de l égalité des chances dans l éducation, des partenariats solidaires et du développement de business inclusifs. Pour agir avec les entreprises au plus près de leurs enjeux locaux, l IMS est présente à Paris et en région, avec une vingtaine d implantations. Entreprises & Universités : une thématique développée à l IMS depuis 2008 L IMS travaille sur la thématique des relations entreprises/universités en incitant ses entreprises à développer des partenariats avec les universités. Au programme : un accompagnement des entreprises, des groupes de travail, des études et publications ainsi que des actions concrètes. L'IMS a lancé en septembre 2011, le premier site dédié à l'insertion professionnelle des étudiants de l'université : www.talentsunivercite.com. 15

IMS-Entreprendre pour la Cité 141, avenue de Clichy 75017 Paris Tel : 0143875252 www.imsentreprendre.com 16