Traitement comptable de l emphytéose, de la superficie et de l usufruit dans les organisations du secteur non marchand Partie 1



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Transcription:

Traitement comptable de l emphytéose, de la superficie et de l usufruit dans les organisations du secteur non marchand Partie 1 Prof. Dr Johan Christiaens Professeur à l UGent Director Accounting Research Public Sector UG-EY Senior Manager Ernst & Young Prof. Dr Erik De Lembre Professeur extraordinaire à l UGent et la VLGMS Président honoraire d Ernst & Young Belgique Réviseur d entreprises honoraire et réviseur honoraire agréé par la CBFA Manuela Van den Berghe Consultante Ernst & Young Researcher Accounting Research Public Sector UG-EY Rosita Van Maele Associée Ernst & Young Réviseur d entreprises Nombre d organisations non marchandes exercent leurs activités dans des bâtiments dont elles ne sont pas propriétaires, mais qu elles occupent uniquement en vertu d un contrat d emphytéose. Les terrains et constructions en question n appartiennent dès lors pas à l organisation non marchande, mais bien à un organisme public ou semi-public, une province ou une commune, un ordre religieux, ou encore une ASBL patrimoniale. Par analogie, nombreuses sont les organisations non marchandes qui possèdent un droit de superficie, à savoir qui sont propriétaires d une construction érigée sur le terrain d un tiers dont elles ont l usufruit (c est-à-dire le droit d user et de jouir d un bien immobilier appartenant à autrui). Souvent, les contrats d utilisation prévoient une redevance annuelle (canon ou tribut), laquelle n est cependant pas proportionnelle à la valeur du droit réel et est même souvent purement symbolique. Les organisations considérées sont presque toujours constituées sous la forme d une ASBL et sont confrontées depuis le 1 er janvier 2006 à la réforme de la comptabilité des ASBL. La question se pose dès lors de savoir comment ces ASBL doivent comptabiliser ces droits réels qu elles détiennent souvent de longue date. La présente contribution est construite autour du traitement comptable de l emphytéose du point de vue de l emphytéote et du propriétaire, avant d aborder à la fin le droit de superficie et l usufruit. 8 2007/3

1. Définition de l emphytéose Le droit d emphytéose peut être défini comme «un droit réel, qui consiste à avoir la pleine jouissance d un immeuble appartenant à autrui, sous la condition de lui payer une redevance annuelle, soit en argent, soit en nature» (article 1 er, alinéa 1 er, de la loi sur le droit d emphytéose). L obligation de payer une redevance ou un canon (tribut), sur base périodique, constitue un pan essentiel du droit d emphytéose (article 1 er, alinéa 1 er, de la loi sur le droit d emphytéose). Les contrats d emphytéose établis en échange du paiement d une redevance unique ne sont pas contraires à la loi sur le droit d emphytéose, à condition que de tels contrats comprennent également une redevance «annuelle», même symbolique. Le contrat d emphytéose a une durée minimale de vingtsept ans et une durée maximale de nonante-neuf ans. Le caractère contraignant du règlement implique que l emphytéose qui a été accordée pour une durée inférieure à vingt-sept ans est considérée comme un contrat de bail, tandis que la durée d emphytéoses accordées pour une durée supérieure à nonante-neuf ans est simplement ramenée à la durée maximale légale, sans avoir pour effet la nullité de l emphytéose. L emphytéose s éteint à l expiration du délai convenu. Elle peut toutefois continuer d exister de fait après l expiration de ce délai avec l assentiment du propriétaire, qui peut y mettre fin à tout moment par révocation. Ceci n implique toutefois aucun renouvellement automatique et tacite du contrat d emphytéose. 2. Traitement comptable pour l emphytéote : acquisition Il importe de savoir si les droits emphytéotiques constituent une immobilisation, quelle valeur ils représentent, s ils peuvent être assimilés à un leasing et si des dettes doivent être enregistrées, etc. Différentes situations de départ sont commentées ci-après. Le traitement comptable variera en effet en fonction de la périodicité unique ou périodique et de l importance de la redevance très peu élevée, raisonnable ou très élevée. Dans tous les cas, une redevance peut être considérée comme raisonnable lorsqu elle est proportionnelle aux droits obtenus. Lorsqu il s agit d une redevance conforme au marché, on peut supposer qu elle est raisonnable. 2.1. Constitution d un droit d emphytéose en échange d une redevance unique a. Redevance raisonnable Parce qu il s agit d une redevance unique, il est question d une immobilisation d un autre type que la location- financement, à savoir «223. Autres droits réels sur immeubles» (arrêté royal du 19 décembre 2003 sur les ASBL) sans location-financement. On procédera ainsi à la passation des écritures comptables suivantes : 223X0 Autres droits réels sur des immeubles b. Redevance très peu élevée ou symbolique Lorsque la redevance unique à payer est très peu élevée ou symbolique, on se trouve dans le cas décrit au point 2.1.a., ci-dessus. La redevance doit être activée en tant qu autre droit réel sur immeubles : 223X0 Autres droits réels sur des immeubles Compte tenu du principe de matérialité, il sera toutefois parfois souhaitable de ne pas activer le montant, mais de le comptabiliser en tant que frais. Il peut ainsi arriver, par exemple, qu une institution de taille moyenne ne doive payer qu une somme unique de 5 euros pour une emphytéose sur un immeuble. Dans de tels cas, on procède à la passation des écritures comptables suivantes : 61 Services et biens divers c. Redevance très élevée Il peut exceptionnellement arriver que la redevance soit très élevée. Dans de tels cas, elle ne portera toutefois généralement pas seulement sur le contrat d emphytéose, mais elle constituera également une redevance pour d autres droits contractuels. Il faudra, dans ces cas, procéder à une scission entre le montant correspondant à une redevance raisonnable, telle 2007/3 9

que décrite au point 2.1.a., et le montant correspondant à la redevance des autres droits. Le montant qui correspond à une redevance raisonnable sera comptabilisé sous la rubrique «223. Autres droits réels sur immeubles» (arrêté royal du 19 décembre 2003 sur les ASBL) sans location-financement. On procédera à la passation des écritures comptables suivantes : 223X0 Autres droits réels sur des immeubles Le montant restant, qui correspond à la redevance des autres droits, devra être comptabilisé suivant la nature de ces droits. 2.2. Constitution d un droit d emphytéose en échange d une redevance périodique a. Redevance raisonnable Il sera souvent précisé que l emphytéote devra payer un canon ou tribut périodique, par exemple, annuel. Étant donné que l emphytéose se rapporte toujours à des immeubles, la location-financement mobilière ne joue plus aucun rôle en l espèce. Si l emphytéose répond aux conditions du leasing immobilier et droits similaires, elle sera traitée sur le plan comptable comme une location-financement, c est-à-dire avec la comptabilisation des droits d usage sous la rubrique «III.D.25. Location-financement et droits similaires», en face des dettes correspondantes. On procédera à la passation des écritures comptables suivantes : 25 Immobilisations détenues en location-financement et droits similaires @ 17 Dettes à plus d un an 42 Dettes à plus d un an échéant dans l année En cas de reconstitution intégrale du capital, les conditions de la location-financement et droits similaires ne sont pas remplies. Même si ce contrat est, juridiquement parlant, un contrat d emphytéose, il sera traité sur le plan comptable comme un contrat de bail. C est ce que l on appelle également un leasing opérationnel ou renting. Dans ce cas, le montant correspondant n est ni porté à l actif ni enregistré comme dette. Il convient, en premier lieu, toujours de vérifier si un contrat doit ou ne doit pas être qualifié de contrat de leasing sur le plan comptable. Le droit comptable belge (C. soc.) précise que la rubrique «III.D.25. Location-financement et droits similaires» des comptes annuels comprend ce qui suit : leasing immobilier : les droits d usage à long terme sur des immeubles bâtis dont l entreprise dispose en vertu de contrats d emphytéose, de superficie ou de conventions similaires, lorsque les redevances échelonnées dues en vertu du contrat couvrent, outre les intérêts et les charges de l opération, la reconstitution intégrale du capital investi par le donneur dans la construction ; et leasing mobilier : analogue, avec possibilité d option d achat qui représente 15 % au plus du capital. On procédera à la passation des écritures comptables suivantes : 61 Services et biens divers b. Redevance très peu élevée ou symbolique On pourrait alléguer que les contrats d emphytéose assortis d une redevance très peu élevée ou symbolique doivent être interprétés comme des droits similaires de locationfinancement combinés à un acquittement annuel de l annuité correspondante inhérente. Selon nous, il peut en effet s agir d un droit similaire de location-financement, mais cela doit alors ressortir du contrat grâce à une sorte d ave- 10 2007/3

nant dans lequel une part importante de l annuité est acquittée sur base annuelle. Dans ce cas, il s agit d un droit similaire de location-financement avec les écritures correspondantes complétées par la comptabilisation de l acquittement. En pratique, un tel contrat ne se présentera quasi jamais et il s agira presque toujours de contrats sans reconstitution du capital, dans le cadre desquels le traitement comptable se rattache au renting et n a rien à voir avec la location-financement. Cette dernière, probablement la situation de renting la plus courante, ne signifie pas que l existence de tels contrats ne connaît pas de reporting comptable. Il est clair qu ils doivent faire l objet d une annexe appropriée dans le rapport annuel. Ce point de vue est soutenu par les International Public Sector Accounting Standards (IPSAS), où l on utilise, selon l IPSAS 13 «Contrats de location», une approche substance over form présentant les caractéristiques suivantes en matière de location-financement: all risks and rewards of ownership are transferred to the lessee (= preneur de leasing); in return for a payment or series of payments: lease payments amounts to at least fair value of the leased asset; option to acquire title to the asset; lease should principally be non-cancellable. On procédera, sur base annuelle, à la passation des écritures comptables suivantes : 61 Services et biens divers Il convient en outre de mentionner le droit dans le compte d ordre «070. Droits d usage à long terme de terrains et constructions». c. Redevance très élevée Dans le cas où l emphytéote est redevable sur base périodique d une somme qui va de assez élevée à très élevée, le contrat comprend probablement davantage que le droit réel. Il est possible, par exemple, qu un fonds des constructions soit alimenté. Dans ce cas, il convient d éliminer les éléments qui sont repris dans le contrat en plus de l emphytéose, de sorte à ne conserver que la redevance emphytéotique. À condition que l on ait l intention de faire correspondre cette redevance avec la valeur en capital, il faut traiter cette somme comme un leasing immobilier. Le montant total à payer, tel que repris dans le contrat, sera alors scindé en un montant correspondant à la valeur en capital et un montant payable en échange d une autre forme de prestation de services. Si le but initial n était pas de faire au moins correspondre la redevance avec la valeur en capital mais d avoir tout simplement une redevance raisonnable, il faut scinder la totalité du montant en une redevance raisonnable et une somme correspondant à la redevance pour les autres droits. Dans les deux cas, le traitement comptable sera celui décrit au point 2.2.a. Lorsque la somme restante est, après élimination des éléments supplémentaires, très peu élevée, il faut procéder au traitement comptable tel que décrit au point 2.1.b. Exemple Imaginons que la redevance annuelle raisonnable pour un droit d emphytéose s élève à 1 000 EUR et qu elle s élèverait, en cas de reconstitution du capital, à 1 500 EUR. Lorsque la redevance annuelle réelle est de 1 200 EUR, par exemple, le montant doit être scindé en 1 000 EUR de redevance emphytéotique et 200 EUR de redevance pour les autres droits. Lorsque la redevance s élève à 1 800 EUR, il y a toutefois deux possibilités. Dans le premier cas, on peut scinder la redevance en 1 000 EUR de redevance emphytéotique en tant que redevance raisonnable pour les droits obtenus et 800 EUR de redevance pour les autres droits. Mais il peut également arriver que cette somme comprenne 1 500 EUR de redevance emphytéotique en vue de la reconstitution du capital conformément aux dispositions du contrat d emphytéose et 300 EUR de redevance pour les autres droits. En éliminant les droits supplémentaires et la redevance y afférente, on verra clairement dans quelle situation on se trouve. 2007/3 11

2.3. Synthèse Schématiquement, le traitement comptable de l emphytéose peut se résumer comme suit : Redevance Raisonnable Très peu élevée ou symbolique Unique 223 223 ou 61 en raison du principe de matérialité Périodique En tant que leasing : 25 @ 17 et 42 Sinon : 61 Très élevée Porter à l actif le montant correspondant à la redevance emphytéotique : 223 61 En tant que leasing : montant correspondant à la reconstitution du capital de l emphytéose : 25 @ 17 et 42 Si pas leasing : montant correspondant à la redevance raisonnable ou à une redevance très peu élevée : 61 Indépendamment du traitement comptable dans le bilan et/ou le compte de résultats pour chacun des cas précités, il est souhaitable de commenter les droits dans les comptes d ordre «07000. Droits d usage à long terme sur terrains et constructions» et «07001. Droits d usage à long terme sur terrains et constructions». Il est également recommandable de donner dans l annexe de plus amples explications sur le contexte et les modalités du contrat d emphytéose. L annexe peut ainsi préciser ce qui suit : «Dans le cadre de l exercice de ses activités, l ASBL X conclut le 1 er janvier 1986 un contrat d emphytéose d une durée de 50 ans avec l ASBL Y, en échange d une redevance annuelle de 1 000 EUR. Ce contrat d emphytéose porte sur les constructions situées rue de l Église 10 à 1000 Bruxelles. Ces immeubles sont utilisés, conformément aux statuts et au plan stratégique, en vue d exercer en permanence des activités d enseignement dans le cadre de l enseignement libre subventionné. L ASBL X a l intention d exercer ses activités de façon permanente, moyennant la prolongation du présent contrat d emphytéose et le renouvellement du contrat, en principe, à l expiration de celui-ci.» 3. Traitement comptable pour l emphytéote : évaluation En cas de redevance unique pour le droit réel, l évaluation est évidente : il s agit de la valeur d acquisition non encore amortie à laquelle l emphytéose est évaluée dans le bilan. Lorsque l on a affaire à une redevance périodique comprenant la reconstitution du capital et répondant aux conditions de la location-financement, l évaluation des composantes de l actif et du passif ressortira du contrat. Dans le cas de redevances périodiques indépendantes de droits similaires de location-financement, il est question de renting et les sommes sont, alors, également inscrites au compte de résultats sur base contractuelle et périodique. 4. Traitement comptable pour l emphytéote : autre traitement 4.1. Amortissements en cas d activation Le droit d emphytéose est toujours un droit temporaire, même s il se rapporte à des biens dont l usage n est en soi pas limité dans le temps (par exemple, des terrains). C est la raison pour laquelle la valeur d acquisition de ces biens doit être portée au compte de résultats selon un plan d amortissement approprié. La durée d amortissement sera égale à la durée du droit ou à la durée d utilisation économique de l immeuble, si cette durée d utilisation économique est plus courte : 63 Amortissements @ 22309 Amortissements actés sur autres droits réels sur im- meubles 4.2. Quid si l emphytéote érige lui-même des constructions sur le bien immeuble? Les constructions érigées par l emphytéote, et dont il est propriétaire jusqu à la fin de l emphytéose, doivent être inscrites au bilan et amorties sur la durée d utilisation économique normale de ces constructions, avec comme maximum la durée restante du droit d emphytéose. 1 Ces constructions sont comptabilisées sous «221. Constructions». 1 Avis 150/3, Bull. CNC, 19 juillet 1986. 12 2007/3

Que prévoit le contrat à la fin de la durée? Traitement comptable Cette obligation se traduit dans les écritures comptables suivantes : Les constructions restent en place et deviennent la propriété du propriétaire du terrain par incorporation à la fin du contrat. Les constructions doivent être démolies et le terrain doit être remis dans son état initial. La valeur ajoutée des constructions érigées ou des travaux de transformation effectués aux constructions sous emphytéose est compensée. Dans ce cas, les dispositions du contrat indiqueront comment la plus-value est déterminée (par exemple, par un estimateur agréé). 4.3. Fin du contrat d emphytéose Pas de comptabilisation spécifique ; les constructions bâties dans l intervalle ont déjà entièrement été amorties. L emphytéote constitue pendant la durée du contrat d emphytéose une provision pour couvrir ces frais à la fin du contrat. Cette opération se traduit par les écritures comptables suivantes : 63 Provisions pour risques et charges @ 16 Provisions et impôts différés. À la fin du contrat d emphytéose, l emphytéote a une créance sur le propriétaire. Ceci se traduit par les écritures comptables suivantes : 41 Autres créances @ 74 Autres produits d exploitation. Si le contrat prévoit pour l établissement du droit réel une obligation d achat ou de vente, cette obligation doit être actée dans les comptes d ordre des deux parties et mentionnée dans l annexe des comptes annuels. 050 Engagements d acquisition @ 051 Créanciers d engagements d acquisition 052 Débiteurs pour engagements de cession @ 053 Engagements de cession Dans certains cas, l ASBL a encore une option d achat ou de vente. Dans de tels cas, il convient d acter ce droit dans le compte d ordre «09. Droits et engagements divers». 5. Conclusion Nous avons dépeint dans cette contribution le traitement comptable d un contrat d emphytéose. Nous avons indiqué aussi bien pour la redevance unique que périodique quelles écritures comptables doivent être passées. Nous avons également tenu compte à cet égard de la hauteur de la redevance. Nous nous pencherons plus en détail, dans une prochaine contribution, sur le traitement comptable du contrat d emphytéose pour le propriétaire. Nous aborderons également d autres droits réels tels que le droit de superficie et l usufruit. Sources Christiaens, J., Special topic 5: Vruchtgebruik, opstalrecht, erfpacht, erfdienstbaarheid, Cursus Voortgezette Accountancy, Master Fiscaliteit UGent, 2002. À cette fin, les comptes «05. Engagements d acquisition et de cession d immobilisations» de la classe 0 du plan comptable général ont été subdivisés comme suit : De Lembre, E. et Podevijn, S., Boekhoudrechtelijke aspecten van vruchtgebruik, erfpacht, recht van opstal en soortgelijke constructies, Studiedag HIAF, 29 novembre 2001. 05 Engagements d acquisition et de cession d immobilisations 050 Engagements d acquisition 051 Créanciers d engagements d acquisition 052 Débiteurs pour engagements de cession 053 Engagements de cession 2007/3 13