Université Victor Segalen Bordeaux 2, 2008



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Université Victor Segalen Bordeaux 2, 2008 Contenu du dossier Énoncé. Article à analyser. Corrigé. Article avec texte surligné. Énoncé Université Victor Segalen Bordeaux 2 UFR des Sciences Médicales 1 DCEM3 Séminaire de lecture critique d article 31 janvier 2008 Exercice préparé par : Pr. Rachid Salmi 1) A partir du contenu de l article ci-joint, construisez le résumé tel que les auteurs auraient pu l écrire : votre résumé doit être structuré et ne doit pas dépasser 250 mots. 2) Répondez aux questions suivantes : Q1. Quel est l objectif de l étude. Commentez sa formulation. Q2. Quel est le schéma d étude? Ce schéma d étude est-il adapté à la question posée? Q3. Commentez la manière dont les auteurs définissent la population des femmes incluses dans l étude? Q4. Quelle est la validité du recueil des données des variables principales? Justifiez votre réponse. Q5. Commentez les effectifs inclus par les auteurs. Q6. Quel est l intérêt du tableau 1? En quoi aurait-il pu être mieux présenté? Q7. Page 104, dans la section 3.2, les auteurs indiquent : «La durée de la première phase du travail n est pas liée à la survenue d une lésion périnéale stade 3 ou 4 (333,4 versus 281,1 minutes, p = 0,085) alors que la deuxième phase du travail est plus longue chez les femmes présentant une lésion sphinctérienne (68 versus 48 minutes, p = 0,037).» Êtes-vous d accord avec cette interprétation des résultats? Justifiez votre réponse. Q8. Commentez l utilisation des références dans cet article. UFR Médicale 1, Enseignement de lecture critique d article, page 1 de 1

Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 Article original La primiparité est-elle le seul facteur de risque des lésions du sphincter anal en cours d accouchement? Is primiparity, the only risk factor for type 3 and 4 perineal injury, during delivery? A. Barbier a, O. Poujade b, R. Fay c, O. Thiébaugeorges a, M. Levardon b, B. Deval a, * a Service de gynécologie obstétrique, maternité universitaire de Nancy, 10, rue du Docteur-Heydenreich, 54000 Nancy, France b Service de gynécologie obstétrique, hôpital Beaujon, 100, boulevard du Général-Leclerc, 92110 Clichy, France c Centre d investigation clinique, département d épidémiologie, 54200 Toul, France Reçu le 28 août 2006 ; accepté le 9 décembre 2006 Disponible sur internet le 07 février 2007 http://france.elsevier.com/direct/gyobfe/ Résumé Objectif. La primiparité est un facteur de risque reconnu de lésions obstétricales. Le but de notre étude a été d identifier, suivant une étude observationnelle transversale, d autres facteurs de risque cliniques de lésions périnéales sévères en cours d accouchement. Patientes et méthodes. Deux groupes ont été comparés : le groupe A ou groupe d étude (n = 63) correspondant aux patientes ayant eu une lésion périnéale sévère (type 3 ou 4) durant leur accouchement. Le groupe B ou groupe témoin (n = 67), correspondant aux patientes ayant accouché sans lésion périnéale durant la même période. L appariement a été effectué en fonction de la date d accouchement. Ainsi, ont été comparés les paramètres cliniques suivants : âge maternel, origine ethnique, poids maternel, IMC (Index de masse corporelle), parité, type d analgésie, âge gestationnel, terme, durée de la première et de la deuxième phase du travail, poids fœtal, mode d extraction instrumentale, type d instrument utilisé. Ont été également comparés les facteurs suivants : obésité maternelle, macrosomie foetale, dépassement de terme, première ou deuxième phase prolongée, existence d une difficulté aux épaules, type d instrument utilisé, existence d une variété postérieure, réalisation d une épisiotomie médiolatérale et quantité totale d ocytocine utilisée en cours de travail. Résultats. La primiparité est retrouvée comme étant un facteur de risque de lésions périnéales sévères en cours d accouchement (71 versus 43 %, p = 0,001). Mais, d autres facteurs lui sont associés : le poids maternel de même que l IMC (67 versus 63 kg, p = 0,036 ; 25,6 versus 23,4, p = 0,003), la durée de la deuxième phase de travail (68 versus 48 min, p = 0,037) et la variété postérieure de la présentation (32 versus 4 %, p < 0,001). L association à une dystocie des épaules est à la limite de la significativité (6 versus 0 %, p = 0,052). L extraction instrumentale est significativement associée à la survenue de lésions périnéales sévères, tous instruments confondus (44 versus 1 %, p < 0,001) ou indépendamment : forceps de Tarnier (14 versus 1 %, p = 0,003), forceps de Suzor (16 versus 0 %, p = 0,0005) ou spatules de Thierry (14 versus 0%, p = 0,0005). L épisiotomie médiolatérale n apparaît pas isolément comme facteur de risque de lésions périnéales. En revanche, son association à une extraction instrumentale constitue un risque fort (43 versus 1 %, p < 0,0001). Les paramètres fœtaux, l âge maternel, l obésité, l âge gestationnel, le dépassement de terme, l anesthésie et la dose d ocytocine ne sont pas considérés comme facteurs de risques. Discussion et conclusion. La primiparité n est pas un facteur isolé de lésions périnéales sévères. Les autres facteurs de risque retrouvés sont l extraction instrumentale, la variété postérieure de la présentation, l épisiotomie médiolatérale lorsqu elle est associée à une extraction instrumentale. 2007 Publié par Elsevier Masson SAS. Abstract Objective. Primiparity has been identified as the main risk factor of type 3 and 4 perineal injuries The purpose of our study, according to a population-based observational study, was to identify other clinical risk factors for lesions during vaginal delivery. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : bruno.deval@wanadoo.fr (B. Deval). 1297-9589/$ - see front matter 2007 Publié par Elsevier Masson SAS. doi:10.1016/j.gyobfe.2006.12.017

102 A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 Patients and methods. Two groups have been compared. Group A or study group (n=63) was defined as parturients with three or fourdegree perineal tears. Group B or control group (n=67) included women who delivered vaginally without any perineal lesion during the same period. Characteristics of the population were compared: maternal age, race, maternal weight, BMI (Body Mass Index), parity, mode of anaesthesia, gestational age, post maturity, length of labor, fetal weight, mode of delivery (assisted or not). Specific characteristics were also compared, obesity, shoulder dystocia, type of presentation, episiotomy and dose of ocytocin. Results. Primiparity was significantly associated with higher frequency of sphincter lacerations (71 vs 43%, p = 0.001). The patients of group A were with significantly higher weight than the patients of control group (67 vs 63 kg, p = 0.036). Futhermore the BMI was different in the two groups (25,6 vs 23,4, p = 0.003). There was a significant difference according to the length of the second part of labor (68 vs 48 min, p = 0.037) and the posterior variety (32 vs 4%, p < 0.001). The occurrence of shoulder dystocia was only just significant (6 vs 0%, p = 0.052). Assisted-extraction is highly associated with perineal injuries (44 vs 1%, p < 0.001). Futhermore the instrument has been concerned by the difference: Tarnier s forceps-assisted extraction (14 vs 1%, p = 0.003), Suzor s forceps-assisted extraction (16 vs 0%, p = 0.0005), Thierry s spatula-assisted extraction (14 vs 0%, p = 0,0005). The association forceps and episiotomy has been found with higher frequency of perineal injury (43 vs 1%, p < 0,0001). There were no difference between the 2 groups according fetal characteristics, type of analgesia, maternal age, gestational age, post-maturity or dose of ocytocin. Discussion and conclusion. Primiparity is not the only risk factor of perineal injuries. Other risk factors have been found: assistedextraction, occiput posterior fetal head position, and association episiotomy and assisted-extraction. Black origin seems to be protective. 2007 Publié par Elsevier Masson SAS. Mots clés : Lésions périnéales sévères ; Facteurs de risque Keywords: Severe perineal tears; Risk factors 1. Introduction Les lésions du sphincter anal ou déchirures périnéales sévères (types 3 et 4) du per-partum sont rares. Elles surviennent dans 1,7 à 7,3 % [1 6] des accouchements par voie basse. La prise en charge de ces lésions, en particulier leur prévention, est depuis toujours une préoccupation majeure des obstétriciens et sages-femmes. En effet, de telles déchirures ont des conséquences néfastes à court et long terme, tant en terme de douleurs périnéales que sur le plan de la continence urinaire et anale ultérieure. Cela sous-entend une parfaite connaissance des facteurs de risque, pouvant conduire à la survenue de telles lésions et des situations, parmi l étendue des pratiques obstétricales actuelles, pouvant y amener. La primiparité est, pour la plupart des auteurs, retrouvée comme facteur de risque essentiel et indépendant de lésion du sphincter anal en cours d accouchement. D autres facteurs sont retrouvés dans la littérature. Les facteurs maternels : ils incluent primiparité et périnée fragile, œdématié, cicatriciel ou hypoplasique. Les facteurs fœtaux : macrosomie, présentations occipitosacrées ou, de la face et les expulsions rapides. Les facteurs opératoires incluent : extractions instrumentales, manœuvres obstétricales et épisiotomie médiane. Le but de notre étude est de définir les facteurs de risques de lésions périnéales sévères retrouvées à partir d une cohorte de 63 patientes, comparées à 67 patientes indemnes de lésions suivant une étude observationnelle transversale. 2. Patientes et méthodes Soixante-trois patientes ayant présenté une déchirure périnéale obstétricale sévère ont été comparées à 67 patientes indemnes de lésion suivant une étude observationnelle transversale. Cette étude porte sur la période de mai 1998 à mai 2003 à la maternité de l hôpital Beaujon (APHP, France) soit 9639 accouchements. Dans un premier temps, ont été définis : le groupe d étude, correspondant aux patientes ayant eu une lésion périnéale de type 3 ou 4 lors de leur accouchement et un groupe témoin, correspondant aux femmes ayant accouché dans la même période sans lésion périnéale, l appariement étant effectué pour un accouchement dans la même période. Ont été exclues les césariennes (n = 1740), les sièges (n = 51), les grossesses gémellaires (n = 78), seules les grossesses de plus de 37 SA ont été incluses. Nous avons défini, la déchirure périnéale complète ou du troisième degré comme une lésion périnéale associant une rupture du sphincter externe de l anus à une ou plusieurs déchirures périnéales simples. Le toucher rectal s assurant de l intégrité de la cloison rectovaginale. Dans les déchirures complètes compliquées ou du quatrième degré, la paroi rectale est rompue réalisant un cloaque entre le vagin et le rectum. La réparation des déchirures périnéales a dans tous les cas comporté un premier temps d exposition et d évaluation des lésions à traiter, ces réparations ayant été effectuées sous anesthésie locorégionale ou générale. La réparation des lésions du troisième degré a intéressé dans un premier temps la suture du sphincter strié anal mettant bord à bord les deux berges par deux points en U à l aide d un fil à résorption lente, les temps suivants étant ceux de toute périnéorraphie réalisée après épisiotomie. La réparation des déchirures du quatrième degré a débuté par la suture de la paroi digestive par des points séparés au fil tressé à résorption lente noués dans la lumière digestive. Il s agit d une suture de type digestif, prenant la paroi rectale et anale, en ayant soin de bien charger la musculeuse, les points devant être rapprochés, afin que la paroi soit étanche. Les temps ultérieurs sont ceux d une lésion du troisième degré. Cette réparation est toujours conduite sous antibioprophylaxie. Les soins postopératoires associent une toilette périnéale biquotidienne à l aide d une solution antiseptique à une toilette périnéale après chaque miction et chaque selle. Il a été prescrit

A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 103 des laxatifs lubrifiants ou osmotiques et un régime sans résidu. Une rééducation périnéale a été systématiquement prescrite à la visite postnatale [7]. Durant l étude, les données concernant la patiente, le déroulement du travail, l expulsion et les caractéristiques de la continence dans le post-partum immédiat ont été recueillies (Tableau 1). Les données collectées concernant la patiente ; ont été l âge, l origine géographique, la gestité, la parité, l indice de masse corporelle (IMC) et l existence d une obésité définie par un IMC > 30 kg/m 2. Les critères d évaluation du travail ont été l âge gestationnel à l accouchement, le déclenchement spontané ou non, la durée de la première et de la deuxième phase du travail, le type d analgésie et la dose totale d ocytocine utilisée. Nous avons défini la première phase du travail par la période allant de l entrée en travail (existence de contractions régulières, efficaces, intéressant tout l utérus associées à la dilatation cervicale) à la dilatation cervicale complète (effacement et dilatation complète). La seconde partie du travail par la descente du mobile fœtal dans l excavation pelvienne jusqu à l expulsion. Ont été recueillies les données de biométrie fœtale soit le périmètre crânien, le diamètre bipariétal, le poids fœtal et la macrosomie fœtale étant définie par un poids fœtal supérieur à 4000 g. Concernant l extraction, ont été recueillis les paramètres suivants : l extraction instrumentale, le type d instrument utilisé (forceps de Tarnier, de Suzor, spatules de Thierry), la réalisation d une épisiotomie médiolatérale, la variété postérieure ou antérieure lors du dégagement et une éventuelle difficulté Tableau 1 Caractéristiques et comparaisons des patientes avec et sans déchirure périnéale sévère Caractéristiques Groupe A Groupe B p (n = 63) (n = 67) Âge maternel moyen (années) 29,2 ± 4,6 29,7 ± 5,5 0,59 Origine ethnique noire 25 (40 %) 42 (63 %) < 0,001* Poids maternel moyen (kg) 67 ± 13 63 ± 12 0,036* BMI 25,6 ± 4,3 23,4 ± 4,3 0,003* Obésité maternelle 9 (14 %) 5 (8 %) 0,21 Primiparité 45 (71 %) 29 (43 %) 0,001* Accouchement avec anesthésie 56 (89 %) 54 (81 %) 0,19 Péridurale 54 (86 %) 51 (76 %) 0,17 Âge gestationnel moyen (SA) 39,9 ± 1,3 40,6 ± 1,3 0,60 Terme dépassé (> 41,4 semaines) 7 (11 %) 10 (15 %) 0,52 Durée moyenne 1 re phase (h) 5,6 ± 3,2 4,7 ± 2,2 0,085 Durée moyenne 2 e phase (min) 68 ± 64 48 ± 44 0,037* Deuxième phase >120 min 14 (22 %) 7 (10 %) 0,068 Poids fœtal moyen (kg) 3,38 ± 0,46 3,39 ± 0,48 0,93 Périmètre crânien (cm) 34,7 ± 1,6 34,6 ± 1,4 0,65 Diamètre bipariétal (mm) 94 ± 4 94 ± 3 0,60 Macrosomie 7 (11 %) 6 (9 %) 0,68 Extraction instrumentale 28 (44 %) 1 (1 %) < 0,001* Forceps de Tarnier 9(14 %) 1 (1 %) 0,003* Forceps de Suzor 10 (16 %) 0 < 0,001* Spatules de Thierry 9(14 %) 0 < 0,001* Variété postérieure 20 (32 %) 3 (4 %) < 0,001* Difficulté aux épaules 4 (6 %) 0 0,052 Épisiotomie seule 23 (37 %) 34 (51 %) 0,10 Épisiotomie +forceps 27 (43 %) 1 (1 %) < 0,001* Ocytocine (UI) 14,8 ± 11,5 14,0 ± 12,6 0,79 * p < 0,05 : seuil de significativité. aux épaules. Il a été noté, pour le groupe étudié, le grade de la lésion périnéale. Après vérification de la normalité des distributions, les moyennes dans les deux groupes ont été comparées par le test t de Student. La comparaison des fréquences a été effectuée par le test du Chi 2 ou, lorsque les conditions de validité de ce dernier n étaient pas remplies, par le test exact de Fisher. Faute d un nombre suffisant de patientes, les techniques d évaluation des facteurs de risque plus performantes comme la régression logistique n ont pu être employées dans des conditions de validité acceptables. 3. Résultats 3.1. Caractéristiques de la population (Tableau 1) Le groupe d étude est composé de 63 patientes de 29,2 ans en moyenne avec un écart-type à 5,51 et des extrêmes entre 17 et 42 ans. Ces femmes sont dans 32 % d origine blanche, dans 40 % d origine noire et dans 28 % d une autre origine. Le poids moyen est de 67 kg avec un écart-type à 12,91 et des extrêmes allant de 38 à 114 kg. La taille moyenne est de 162 cm. L IMC moyen est 25,6 et la proportion d obèses de 14 %. Il y a 71 % de primipares, l âge gestationnel moyen est de 39,9 semaines d aménorrhée (SA) avec une proportion de terme dépassé de 11 %. Concernant le travail, la dose moyenne d ocytocine est de 14,8 UI avec un écart-type à 11,47 et des extrêmes allant de 1 à 38 UI. La première phase du travail dure en moyenne 333,4 minutes et la seconde 68 minutes avec un pourcentage de deuxième phase de plus de 120 minutes de 22 %. Les paramètres fœtaux montrent 32 % de variété postérieure, un poids moyen de naissance de 3381,4 g, 11 % d enfants macrosomes et quatre cas de difficultés aux épaules soit 6 %. L accouchement a eu lieu dans 89 % des cas avec une analgésie, dont 86 % de péridurales. Il y a eu 28 cas d extractions instrumentales (44 %), toujours réalisées avec une épisiotomie. Le groupe témoin est composé de 67 patientes de 29,7 ans en moyenne avec un écart-type à 4,63 et des extrêmes entre 19 et 38 ans. Ces femmes sont dans 33 % d origine blanche, dans 63 % d origine noire et dans 4 % d une autre origine. Le poids moyen est de 63 kg avec un écart-type à 11,50 et des extrêmes allant de 42 à 102 kg. La taille moyenne est de 163,9 cm. L IMC moyen est 23,4 et la proportion d obèses de 8 %. Il y a 43 % de primipares, l âge gestationnel moyen est de 40 SA avec une proportion de terme dépassé de 15 %. Concernant le travail, la dose moyenne d ocytocine est de 14 UI avec un écart-type à 12,57 et des extrêmes allant de 1 à 57 UI. La première phase du travail dure en moyenne 283,1 minutes et la seconde 48 minutes avec un pourcentage de deuxième phase de plus de 120 minutes de 10 %. Les paramètres fœtaux montrent 4 % de variété postérieure, un poids moyen de naissance de 3388,8 g, 9 % d enfants macrosomes et l absence de difficulté aux épaules. L accouchement a eu lieu dans 81 % des cas avec une analgésie, dont 76 % de péridurales. Il y a eu un cas

104 A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 d extraction instrumentale (1 %). Le pourcentage d épisiotomie est de 52 %. L étude concernant les caractéristiques maternelles montre que l âge des patientes est comparable dans les deux groupes (29,2 versus 29,7 ans). En revanche, les patientes présentant une lésion sphinctérienne ont un poids et un BMI (body mass index) supérieurs à celui des patientes du groupe témoin (respectivement 67 versus 63 kg, p = 0,036 et 25,6 versus 23,4, p = 0,003), l obésité (IMC > 30) n étant pas un facteur significatif dans notre étude (14 versus 8 %, p = 0,21). Les lésions sévères surviennent significativement moins souvent chez les femmes de race noire (40 versus 63 %, p = 0,0005). Les paramètres concernant la grossesse montrent que seule la primiparité est significativement associée une augmentation de la fréquence des lésions (71 versus 43 %, p = 0,001). En revanche, la durée de gestation (39,9 versus 40 SA, p = 0,6) ou le dépassement de terme (11 vs 15 %, p = 0,52) ne sont pas associés à une augmentation de la fréquence des lésions. 3.2. Caractéristiques du travail, du mode d accouchement et du mobile fœtal (Tableau 1) Concernant le déroulement du travail, il n y a pas d association entre le type d anesthésie durant le travail et l expulsion, qu il s agisse d un travail sans ou avec analgésie (89 versus 81 %, p = 0,19) ou du type d anesthésie locorégionale (86 versus 71 % d anesthésie péridurale, p = 0,17) et la survenue d une lésion périnéale sévère. De même, la dose totale d ocytocine utilisée est comparable dans les deux groupes (14,8 versus 14 UI, p = 0,79). La durée de la première phase du travail n est pas liée à la survenue d une lésion périnéale stade 3 ou 4 (333,4 versus 281,1 minutes, p = 0,085) alors que la deuxième phase du travail est plus longue chez les femmes présentant une lésion sphinctérienne (68 versus 48 minutes, p = 0,037). Lorsque l on prend en compte le fait d avoir une deuxième phase longue (> 120 minutes), la différence est à la limite de la significativité (66 versus 45 %, p = 0,068). En revanche, il existe une association avec certains paramètres du mode d accouchement : la variété postérieure de la présentation est très significativement associée à une lésion périnéale de type 3 (32 versus 4 %, p < 0,001) alors que la survenue d une difficulté aux épaules est à la limite de la significativité (6 versus 0 %, p = 0,052). L extraction instrumentale est très significativement associée à la survenue de lésions périnéales sévères : tous instruments confondus (44 versus 1 %, p < 0,001) ou indépendamment : forceps de Tarnier (14 versus 1 %, p = 0,003), forceps de Suzor (16 versus 0 %, p = 0,0005) ou spatules de Thierry (14 versus 0 %, p = 0,0005). La réalisation d une épisiotomie n a pas d incidence sur la survenue d une lésion (37 versus 51 %, p = 0,10) alors qu il y en a une si on l associe à une extraction instrumentale (43 versus 1 %, p < 0,0001). Il n y a pas de différence significative entre les deux groupes concernant le poids de naissance (3381,4 versus 3388,8, p = 0,93), l existence d une macrosomie (11 versus 9 %, p = 0,68), le périmètre crânien (347 mm versus 346 mm, p = 0,65) ou le diamètre bipariétal (938 versus 941 mm, p = 0,6). Les paramètres fœtaux ne sont donc pas associés à une augmentation de la survenue de lésions périnéales sévères dans notre série. 4. Discussion Les facteurs de risque associés à la survenue d une lésion périnéale de grade 3 ou 4 retrouvés dans notre série sont en plus de la primiparité : le poids maternel, l IMC, une deuxième phase de travail supérieure à 120 minutes, la variété postérieure de la présentation, l extraction instrumentale quel que soit l instrument utilisé et la difficulté aux épaules. Les résultats des principales études sont résumés dans le Tableau 2 : primiparité, poids de naissance supérieur à 4000 g, extraction instrumentale et réalisation d une épisiotomie médiane sont significativement associés à une augmentation de la survenue de lésion du troisième ou quatrième degré. La primiparité est pour la plupart des auteurs un facteur de risque indépendant de lésion sphinctérienne [13]. Dans notre série, il y avait 60,8 % de lésions chez les primipares contre 32,1 % chez les multipares (p = 0,001). Pour Handa [2], Zetterstrom [3] et Eason [10], il s agit même du facteur le plus pourvoyeur. Hudelist et al. ne retrouvent pas ce paramètre, après analyse de 5377 accouchements par voie basse dont 46 avec rupture sphinctérienne. Seuls le poids de naissance et l utilisation de forceps ont été retrouvés facteurs de risque indépendants [14]. En effet, l extraction instrumentale est, dans de nombreuses publications, un facteur de risque de lésion périnéale. Dans notre série, 44 % des patientes ayant eu une extraction instrumentale ont eu une lésion périnéale de grade 3 ou 4, comparées à 1 % chez les patientes indemnes. La plupart des auteurs s accorde à dire que les ruptures sphinctériennes surviennent plus fréquemment lors de l utilisation de forceps que lors de l utilisation d une ventouse. L extraction instrumentale par forceps est le premier facteur de risque dans les études de Fenner [9], Goldberg [11], Benifla [12], Hudelist [14] et Christianson [5]. Seuls Handa et al. [2] montrent une supériorité du facteur ventouse en comparaison au facteur forceps (OR 2,30 versus 1,45). D autres auteurs ne mettent pas en évidence la responsabilité de la ventouse dans la survenue de lésions sévères (Zetterstrom [3], Mac Arthur [8] et Sultan [15]). Dans notre série, nous montrons que le risque est associé au forceps de Tarnier mais aussi au forceps de Suzor et aux spatules de Thierry; la ventouse n étant pas utilisée à la maternité de Beaujon, elle n a pas pu être intégrée dans les paramètres étudiés. Nous n avons pas retrouvé de bibliographie concernant les risques respectifs liés à ces instruments. Si l extraction instrumentale en tant que telle n est pas à remettre en cause et nécessite donc une précaution toute particulière lors de la pose de l indication et lors de sa réalisation, ces dernières données doivent être discutées en fonction des habitudes de chaque équipe. En effet, il n est pas toujours précisé dans les publications quel instrument est préférentiellement utilisé, chaque école d obstétrique ayant ses

A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 105 Tableau 2 Comparaison des données des principales publications concernant les facteurs de risque de lésion périnéale Forceps OR Ventouse OR Primiparité OR Macrosomie OR Épisiotomie Âge maternel OR médiane OR Handa [2] 1,45 [1,37 1,42] 2,30 [2,21 2,40] 0,15 [0,14 0,15] 2,17 [2,07 2,27] NP NP Zetterstrom [3] NP NP 9,8 [3,6 26,2] 1,3 [1,1,1,6] 5,5 [1,4 18,7] NP Mac Arthur [8] 1,94 [1,30 2,89] NS NP NS NS Oui Fenner [9] 4,75 [3,43 6,57] 3,51 [2,64 4,66] NP 2,19 [1,61 2,99] 2,24 [1,81 2,77] NP Eason [10] 12,3 [3 50,4] 7,4 [1,9 28,5] 39,2 [5,4 282,5] NS 9,6 [3,2 28,5] NP Goldberg [11] 3,71 [3,39 4,05] 1,86 [1,64 2,10] NP 1,94 [1,21 3,09] 3,09 [2,66 3,59] NP Benifla [12) 11,9 [4,8 33,3] NP 8,8 [1 78,3] NP NP NP Hudelist [13] 5,62 [2,16 14,62] NP NS NS NP NS Christianson [5] 10,8 [5,2 22,3] NP 10 [3 33,3] NP 2,5 [1 6] NP habitudes, ce qui peut induire un biais dans l interprétation des résultats. L influence de l origine ethnique est très discutée : Handa et al. [2], dans une étude portant sur deux millions de naissance, montrent une incidence accrue de lésions périnéales au-delà du deuxième degré chez les femmes d origine indienne et philippine. De même, Mac Arthur et al. [8] notent une association significative avec une origine ethnique indienne. Pour Goldberg et al. [11], l origine asiatique est associée à une augmentation de l incidence des déchirures périnéales sévères. Comme nous le retrouvons dans notre étude, Wu et al. [16], dans une publication portant sur 393 patientes, montrent une augmentation du risque relatif par quatre lors d un dégagement céphalique en variété occipitosacrée. Enfin, différentes publications rapportent un risque accru avec un âge maternel élevé (Mac Arthur [8], Angioli [17]). Nos résultats concernant l épisiotomie sont en accord avec les données de la littérature [18]. Cette dernière suggère un effet protecteur de l épisiotomie médiolatérale et un risque accru de lésion sphinctérienne associé à l épisiotomie médiane. En France, la pratique de l épisiotomie médiane reste isolée, à l inverse des pays anglo-saxons. Ces résultats diffèrent de ceux de Handa et al. [2] qui montrent que l épisiotomie médiane a un effet protecteur sur la survenue des lésions du troisème degré mais augmente celle du quatrième degré. Selon Fenner et al. [9], l épisiotomie médiane cause trois fois plus de lésion sphinctérienne qu une épisiotomie médiolatérale, tandis que Coats et al. [19] trouvent une extension vers des lésions du troisième ou quatrième degré dans 11,6 % des cas lors de la réalisation d une épisiotomie médiane contre 2 % pour une épisiotomie médiolatérale. Poen et al. [20] montrent un odds ratio protecteur à 0,6 en faveur de l épisiotomie médiolatérale. L effet protecteur de l épisiotomie médiolatérale n a toutefois pas été clairement démontré dans des études randomisées comportant de larges séries et comparant l absence d épisiotomie à la réalisation d une épisiotomie médiane ou médiolatérale. Par ailleurs, nos résultats concernant l association épisiotomie forceps sont en accord avec les données de la littérature : il existe une augmentation du risque lors d une extraction instrumentale avec épisiotomie alors que l épisiotomie aurait un effet protecteur. C est également ce que démontrent Dandolu et al. [4] à propos d une cohorte de 258 507 accouchements voie basse dont 18 888 avec lésions sévères. Les lésions sphinctériennes secondaires à l accouchement sont visibles dans le post-partum immédiat. Benifla et al. [12] montrent que 45 % des patientes présentant une incontinence anale de novo avaient un défect sphinctérien diagnostiqué échographiquement. Kammerer et al. [21] constatent qu à six semaines post-partum, la fréquence de rupture sphinctérienne, tant au niveau du sphincter externe qu interne, est significativement supérieure chez les femmes ayant présenté une lésion sévère. Sultan et al. [15], dans une étude prospective portant sur 202 patientes, montrent que 35 % des primipares avaient un défect sphinctérien à six semaines, qui persistait dans 28 % des cas à six mois. Différents auteurs ont étudié le rôle possible d une atteinte du nerf pudendal. Sultan et al. [22], dans une étude portant sur 50 patientes ayant présenté une lésion du troisième degré comparées aux 8553 autres patientes ayant accouché pendant la même période, rapportent que les latences motrices terminales du nerf pudendal n étaient pas significativement différentes dans les deux groupes et que, en conséquence, l incontinence anale pouvait davantage être rapportée à la rupture sphinctérienne qu à une lésion pudendale. Tetzschner et al. [23], quant à eux, montrent que l incontinence anale est associée à un allongement des latences motrices terminales du nerf honteux. Il semble qu il puisse, dans certains cas, y avoir une responsabilité au moins partielle d une atteinte pudendale. Concernant l analyse statistique réalisée dans notre étude, nous aurions souhaité pouvoir caractériser les facteurs de risque de lésion périnéale sévère par régression logistique en calculant les odds ratios associés. Cependant, la précision de la méthode est conditionnée non seulement par le nombre d événements (suffisant dans notre série), mais aussi par le nombre de patientes exposées au risque (ou non exposées si le nombre de celles-ci est le plus faible) dans chacun des deux groupes présence et absence de lésion. L examen des données montre que dans la plupart des cas, ce nombre est inférieur à 10. En dessous de dix sujets exposés ou non exposés dans l un des deux groupes, le calcul fournit des intervalles de confiance excessivement importants traduisant l imprécision de l estimation. Dans ces conditions, il n est pas légitime de recourir à la régression logistique. Par souci d homogénéité, nous avons donc décidé d exclure cette méthode de l analyse. Par ailleurs, il est difficile, compte tenu de notre série, d effectuer un classement des facteurs de risque par ordre d importance compte tenu de l imprécision de certaines estimations.

106 A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 Cependant, cette étude comporte des limites qu il faut souligner. En effet, il s agit d une étude rétrospective dans laquelle les groupes ont été appariés uniquement sur l existence ou non de lésions périnéales sévères. Par ailleurs, ni les causes ni les praticiens des extractions instrumentales n ont été individualisés et la mesure des corps périnéaux n a pas été effectuée. Enfin, les positions maternelles, l expression utérine, le massage périnéal, non plus que la recherche de lésions occultes n ont été relevés. 5. Conclusion Les résultats de notre étude sont en accord avec les données actuelles de la littérature : primiparité, surcharge pondérale, deuxième phase de travail prolongée, extraction instrumentale, variété postérieure de la présentation, difficulté aux épaules sont des facteurs de risque de survenue de lésions périnéales du troisième ou quatrième degré. L accouchement par voie basse reste néanmoins la voie la plus sûre et la plus économique d accouchement. S il est certain qu il est difficile d éviter toutes les lésions périnéales sévères, la connaissance de ces facteurs de risque et leur prise en compte lors des conduites à tenir obstétricales devraient conduire à une réduction de leur survenue. Il est indispensable d insister sur la prise en charge des femmes ayant présenté une lésion périnéale sévère tant sur le plan de la rééducation sphinctérienne du post-partum que sur le suivi à long terme. De cette surveillance rapprochée dépend leur continence ultérieure et, le cas échéant, leur devenir obstétrical. Références [1] Fornell EK, Berg G, Hallbook O, Matthiesen LS, Sjodahl R. Clinical consequences of anal sphincter rupture during vaginal delivery. J Am Coll Surg 1996;183(6):553 8. [2] Handa VL, Danielsen BH, Gilbert WM. Obstetric anal sphincter lacerations. Obstet Gynecol 2001;98(2):225 30. [3] Zetterstrom J, Lopez A, Anzen B, Norman M, Holmstrom B, Mellgren A. Anal sphincter tears at vaginal delivery: risk factors and clinical outcome of primary repair. Obstet Gynecol 1999;94(1):21 8. [4] Dandolu V, Chatwani A, Harmanli O, Floro C, Gaughan JP, Hernandez E. Risk factors for obstetrical anal sphincter lacerations. Int Urogynecol J Pelvic Floor Dysfunct 2005;16(4):304 7. [5] Christianson LM, Bovbjerg VE, McDavitt EC, Hullfish KL. Risk factors for perineal injury during delivery. Am J Obstet Gynecol 2003;189(1): 255 60. [6] Harkin R, Fitzpatrick M, O Connell PR, O Herlihy C. Anal sphincter disruption at vaginal delivery: is recurrence predictable? Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 2003;109(2):149 52. [7] Dupuis O. [How I perform 3rd and 4th degree obstetric analsphincter lacerations repair]. Gynecol Obstet Fertil 2004;32(4):340 2. [8] MacArthur C, Glazener CM, Wilson PD, Herbison GP, Gee H, Lang GD, et al. Obstetric practice and faecal incontinence three months after delivery. BJOG 2001;108(7):678 83. [9] Fenner DE, Genberg B, Brahma P, Marek L, DeLancey JO. Fecal and urinary incontinence after vaginal delivery with anal sphincter disruption in an obstetrics unit in the United States. Am J Obstet Gynecol 2003;189 (6):1543 9 (discussion 9-50). [10] Eason E, Labrecque M, Marcoux S, Mondor M. Anal incontinence after childbirth. CMAJ 2002;166(3):326 30. [11] Goldberg J, Hyslop T, Tolosa JE, Sultana C. Racial differences in severe perineal lacerations after vaginal delivery. Am J Obstet Gynecol 2003; 188(4):1063 7. [12] Benifla JL, Abramowitz L, Sobhani I, Ganansia R, Darai E, Mignon M, et al. [Postpartum sphincter rupture and anal incontinence: prospective study with 259 patients]. Gynecol Obstet Fertil 2000;28(1):15 22. [13] Dupuis O, Madelenat P, Rudigoz RC. [Fecal and urinary incontinence after delivery: risk factors and prevention]. Gynecol Obstet Fertil 2004; 32(6):540 8. [14] Hudelist G, Gelle n J, Singer C, Ruecklinger E, Czerwenka K, Kandolf O, et al. Factors predicting severe perineal trauma during childbirth: role of forceps delivery routinely combined with mediolateral episiotomy. Am J Obstet Gynecol 2005;192(3):875 81. [15] Sultan AH, Kamm MA, Hudson CN, Thomas JM, Bartram CI. Analsphincter disruption during vaginal delivery. N Engl J Med 1993;329 (26):1905 11. [16] Wu JM, Williams KS, Hundley AF, Connolly A, Visco AG. Occiput posterior fetal head position increases the risk of anal sphincter injury in vacuum-assisted deliveries. Am J Obstet Gynecol 2005;193(2):525 8 (discussion 8-9). [17] Angioli R, Gomez-Marin O, Cantuaria G, O Sullivan MJ. Severe perineal lacerations during vaginal delivery: the University of Miami experience. Am J Obstet Gynecol 2000;182(5):1083 5. [18] Bretones S, Mellier G. Episiotomy: the pros and the cons. Gynecol Obstet Fertil 2001;29:632 5. [19] Coats PM, Chan KK, Wilkins M, Beard RJ. A comparison between midline and mediolateral episiotomies. Br J Obstet Gynaecol 1980;87(5): 408 12. [20] Poen AC, Felt-Bersma RJ, Dekker GA, Deville W, Cuesta MA, Meuwissen SG. Third degree obstetric perineal tears: risk factors and the preventive role of mediolateral episiotomy. Br J Obstet Gynaecol 1997;104(5): 563 6. [21] Kammerer-Doak DN, Wesol AB, Rogers RG, Dominguez CE, Dorin MH. A prospective cohort study of women after primary repair of obstetric anal sphincter laceration. Am J Obstet Gynecol 1999;181 (6):1317 22 (discussion 22-3). [22] Sultan AH, Kamm MA, Hudson CN, Bartram CI. Third degree obstetric anal sphincter tears: risk factors and outcome of primary repair. BMJ 1994;308(6933):887 91. [23] Tetzschner T, Sorensen M, Lose G, Christiansen J. Anal and urinary incontinence in women with obstetric anal sphincter rupture. Br J Obstet Gynaecol 1996;103(10):1034 40.

Université Victor Segalen Bordeaux 2, 2008 Université Victor Segalen Bordeaux 2 UFR des Sciences Médicales 1 DCEM3 Séminaire de lecture critique d article 31 janvier 2008 Exercice préparé par : Pr. Rachid Salmi Corrigé 1) A partir du contenu de l article, construisez le résumé tel que les auteurs auraient pu l écrire : votre résumé doit être structuré et ne doit pas dépasser 250 mots. Extraits pour le résumé (417 mots) cf. parties surlignées dans le document joint. Définir les facteurs de risques de lésions périnéales sévères retrouvées à partir d une cohorte de 63 patientes, comparées à 67 patientes indemnes de lésions suivant une étude observationnelle transversale. Déchirure périnéale obstétricale sévère mai 1998 à mai 2003 à la maternité. Patientes ayant eu une lésion périnéale de type 3 ou 4 lors de leur accouchement. Groupe témoin, correspondant aux femmes ayant accouché dans la même période sans lésion périnéale. Exclues les césariennes, les sièges, les grossesses gémellaires. Les grossesses de plus de 37 SA. Lésion périnéale associant une rupture du sphincter externe de l anus à une ou plusieurs déchirures périnéales simples. Toucher rectal. Les données concernant la patiente, le déroulement du travail, l expulsion et les caractéristiques de la continence dans le post-partum immédiat ont été recueillies. Données de biométrie fœtale. Groupe A (n = 63) Groupe B (n = 67). Origine ethnique noire 25 (40 %) 42 (63 %) < 0,001. BMI 25,6 ± 4,3 23,4 ± 4,3 0,003. Primiparité 45 (71 %) 29 (43 %) 0,001. Durée moyenne 2e phase (min) 68 ± 64 48 ± 44 0,037. Extraction instrumentale 28 (44 %) 1 (1 %) < 0,001. Épisiotomie +forceps 27 (43 %) 1 (1 %) < 0,001. L âge des patientes est comparable dans les deux groupes (29,2 versus 29,7 ans). Poids et un BMI supérieurs à celui des patientes du groupe témoin. La primiparité est significativement associée une augmentation de la fréquence des lésions (71 versus 43 %, p = 0,001). La durée de la première phase du travail n est pas liée à la survenue d une lésion périnéale stade 3 ou 4 (333,4 versus 281,1 minutes, p = 0,085) alors que la deuxième phase du travail est plus longue chez les femmes présentant une lésion sphinctérienne (68 versus 48 minutes, p = 0,037). La variété postérieure de la présentation est très significativement associée à une lésion périnéale de type 3 (32 versus 4 %, p < 0,001) L extraction instrumentale est très significativement associée à la survenue de lésions périnéales sévères : tous instruments confondus (44 versus 1 %, p < 0,001). Les facteurs de risque associés à la survenue d une lésion périnéale de grade 3 ou 4 retrouvés dans notre série sont en plus de la primiparité : le poids maternel, l IMC, une deuxième phase de travail supérieure à 120 minutes, la variété postérieure de la présentation, l extraction instrumentale quel que soit l instrument utilisé et la difficulté aux épaules. Les résultats de notre étude sont en accord avec les données actuelles de la littérature. UFR Médicale 1, Enseignement de lecture critique d article, page 1 de 4

Université Victor Segalen Bordeaux 2, 2008 Premier résumé proposé (300 mots) Objectifs : Définir les facteurs de risques de lésions périnéales sévères à partir d une cohorte de 63 patientes et de 67 patientes indemnes de lésions. Méthodes : Nous avons inclus de mai 1998 à mai 2003 à la maternité des patientes ayant eu une déchirure périnéale de type 3 ou 4, avec rupture du sphincter externe de l anus, et des femmes ayant accouché sans lésion dans la même période. Ont été exclues les césariennes, les sièges, les grossesses gémellaires. Les données concernant la patiente, le travail, l expulsion ont été recueillies. Résultats : L âge des patientes est comparable dans les deux groupes ; l origine ethnique noire est plus fréquente chez les témoins : 25 (40 %), 42 (63 %) < 0,001. Le poids et le BMI sont supérieurs chez les patientes ayant une déchirure. Primiparité 45 (71 %) 29 (43 %) 0,001. La durée moyenne de la 2e phase est différente : 68 min ± 64 48 ± 44 p = 0,037, ainsi que l extraction instrumentale 28 (44 %) 1 (1 %) p < 0,001. La primiparité est significativement associée une augmentation de la fréquence des lésions (71 versus 43 %, p = 0,001). La deuxième phase du travail est plus longue chez les femmes présentant une lésion sphinctérienne (68 versus 48 minutes, p = 0,037). La variété postérieure de la présentation est très significativement associée à une lésion périnéale de type 3. L extraction instrumentale est très significativement associée à la survenue de lésions périnéales. Conclusion : Les facteurs de risque associés à la survenue d une lésion périnéale de grade 3 ou 4 sont en plus de la primiparité : le poids maternel, l IMC, une deuxième phase de travail supérieure à 120 minutes, la variété postérieure de la présentation, l extraction instrumentale quel que soit l instrument utilisé et la difficulté aux épaules. Résumé final (237 mots) Objectifs : Définir les facteurs de risques de lésions périnéales sévères retrouvées à partir d une cohorte de 63 patientes, comparées à 67 patientes indemnes de lésions. Méthodes : Nous avons inclus de mai 1998 à mai 2003 à la maternité des patientes ayant eu une déchirure périnéale de type 3 ou 4, avec rupture du sphincter externe de l anus, et des femmes ayant accouché dans la même période sans lésion périnéale. Les données concernant la patiente, le déroulement du travail, l expulsion et les caractéristiques de la continence dans le post-partum immédiat ont été recueillies. Résultats : L âge est comparable dans les deux groupes ; l origine ethnique noire est plus fréquente chez les témoins. Le poids et le BMI sont supérieurs chez les patientes ayant une déchirure. La primiparité est significativement associée à une augmentation de la fréquence des lésions (71 versus 43 %, p = 0,001). La deuxième phase du travail est plus longue chez les femmes présentant une lésion sphinctérienne (68 versus 48 minutes, p = 0,037). La variété postérieure de la présentation et l extraction instrumentale sont significativement associées à la survenue de lésions périnéales. Conclusion : Les facteurs de risque associés à la survenue d une lésion périnéale sont en plus de la primiparité : le poids maternel, l IMC, une deuxième phase de travail supérieure à 120 minutes, la variété postérieure de la présentation, l extraction instrumentale quel que soit l instrument utilisé et la difficulté aux épaules. UFR Médicale 1, Enseignement de lecture critique d article, page 2 de 4

Université Victor Segalen Bordeaux 2, 2008 2) Répondez aux questions suivantes : Q1. Quel est l objectif de l étude. Commentez sa formulation. L objectif de l étude était de définir les facteurs de risques de lésions périnéales sévères retrouvées à partir d une cohorte de 63 patientes, comparées à 67 patientes indemnes de lésions suivant une étude observationnelle transversale. Bien qu assez complet, cet objectif n est pas très bien formulé car, d une part, il ne reflète pas correctement le fait que les auteurs veulent savoir s il y a d autres facteurs que la prématurité et, d autre part, parce que les effectifs étudiés ne doivent pas apparaître dans un objectif. Remarque : le titre est un meilleur reflet de la vraie question posée par les auteurs. Q2. Quel est le schéma d étude? Ce schéma d étude est-il adapté à la question posée? Selon les auteurs, il s agit d une étude transversale, observée à partir d une cohorte. En fait, il s agit d une étude cas-témoins, puisque les auteurs sélectionnent d une part un groupe de femmes ayant une lésion périnéale (cas) et les comparent à des femmes n ayant pas de lésion périnéale (témoins) et qu ils étudient la fréquence de facteurs de risques dans les deux groupes. Ce schéma d étude est parfaitement adapté à l étude des facteurs de risques. Q3. Commentez la manière dont les auteurs définissent la population des femmes incluses dans l étude? Les auteurs décrivent bien les critères d inclusion et d exclusion, en discutant les caractéristiques de personnes, de lieu et de temps. Pour les cas, les auteurs définissent correctement les caractéristiques des lésions. En revanche, les modalités pratiques de sélection ne sont pas décrites. Q4. Quelle est la validité du recueil des données des variables principales? Justifiez votre réponse. Page 104, les auteurs indiquent que les données ont été recueillies, sans donner de précision sur les modalités de recueil. Les données recueillies sont listées et quelques rares définitions sont fournies. Les sources ne sont pas données (dossier? cahier d observation?). On ne sait pas non plus si les observateurs étaient en insu du groupe d appartenance des femmes et s ils utilisaient des outils standards. Néanmoins, les données principales de l étude, notamment la notion de prématurité et la durée de travail, sont des informations recueillies en routine et l on peut donc penser que le recueil de ces données est valide. Q5. Commentez les effectifs inclus par les auteurs. Les auteurs disent eux-mêmes que ces effectifs sont insuffisants (page 103, avant le 3). Ils précisent dans la discussion que c est surtout la fréquence de certains facteurs qui est insuffisante. Les auteurs n ont pas fait de calcul de la taille d échantillon. Les effectifs sont par ailleurs différents entre les deux groupes (63 et 67) et l on ne sait pas si cette différence est liée à des données manquantes. Q6. Quel est l intérêt du tableau 1? En quoi aurait-il pu être mieux présenté? Ce tableau est très informatif car il permet de comparer les deux groupes de patientes. Cette comparaison porte d une part sur les caractéristiques socio-biographiques et cliniques des patientes et, d autre par, sur les principaux facteurs de risques étudiés. Le tableau aurait pu être mieux présenté en regroupant les variables quantitatives (moyennes et écarts-types) d une part et les variables qualitatives (nombres et pourcentages) d autre part ; les groupes A et B et l abréviation BMI auraient pu être définies. UFR Médicale 1, Enseignement de lecture critique d article, page 3 de 4

Université Victor Segalen Bordeaux 2, 2008 Q7. Page 104, dans la section 3.2, les auteurs indiquent : «La durée de la première phase du travail n est pas liée à la survenue d une lésion périnéale stade 3 ou 4 (333,4 versus 281,1 minutes, p = 0,085) alors que la deuxième phase du travail est plus longue chez les femmes présentant une lésion sphinctérienne (68 versus 48 minutes, p = 0,037).» Êtes-vous d accord avec cette interprétation des résultats? Justifiez votre réponse. Formellement, les auteurs ont raison car leur interprétation des résultats repose essentiellement/exclusivement sur la signification statistique des différences (p = 0,085, non significative = pas liée pour les auteurs ; p = 0,037, significative = liée). Cependant, les auteurs manquent le fait que la différence de la première phase de travail (environ 50 minutes) est plus importante que la différence de la deuxième phase (20 minutes). La durée est donc liée à la survenue d une lésion périnéale dans les deux phases du travail, mais seule la deuxième association est statistiquement significative. Remarque : il s agit ici de bien faire la différence entre signification statistique et signification clinique. Q8. Commentez l utilisation des références dans cet article. De nombreuses phrases de l introduction ne font pas appel à des références. Les références couvrent une littérature accessible (uniquement des revues) et récente (les articles les plus récents datant de 2005). La présentation respecte les normes habituelles des revues. UFR Médicale 1, Enseignement de lecture critique d article, page 4 de 4

Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 Article original La primiparité est-elle le seul facteur de risque des lésions du sphincter anal en cours d accouchement? Is primiparity, the only risk factor for type 3 and 4 perineal injury, during delivery? A. Barbier a, O. Poujade b, R. Fay c, O. Thiébaugeorges a, M. Levardon b, B. Deval a, * a Service de gynécologie obstétrique, maternité universitaire de Nancy, 10, rue du Docteur-Heydenreich, 54000 Nancy, France b Service de gynécologie obstétrique, hôpital Beaujon, 100, boulevard du Général-Leclerc, 92110 Clichy, France c Centre d investigation clinique, département d épidémiologie, 54200 Toul, France Reçu le 28 août 2006 ; accepté le 9 décembre 2006 Disponible sur internet le 07 février 2007 http://france.elsevier.com/direct/gyobfe/ Résumé Objectif. La primiparité est un facteur de risque reconnu de lésions obstétricales. Le but de notre étude a été d identifier, suivant une étude observationnelle transversale, d autres facteurs de risque cliniques de lésions périnéales sévères en cours d accouchement. Patientes et méthodes. Deux groupes ont été comparés : le groupe A ou groupe d étude (n = 63) correspondant aux patientes ayant eu une lésion périnéale sévère (type 3 ou 4) durant leur accouchement. Le groupe B ou groupe témoin (n = 67), correspondant aux patientes ayant accouché sans lésion périnéale durant la même période. L appariement a été effectué en fonction de la date d accouchement. Ainsi, ont été comparés les paramètres cliniques suivants : âge maternel, origine ethnique, poids maternel, IMC (Index de masse corporelle), parité, type d analgésie, âge gestationnel, terme, durée de la première et de la deuxième phase du travail, poids fœtal, mode d extraction instrumentale, type d instrument utilisé. Ont été également comparés les facteurs suivants : obésité maternelle, macrosomie foetale, dépassement de terme, première ou deuxième phase prolongée, existence d une difficulté aux épaules, type d instrument utilisé, existence d une variété postérieure, réalisation d une épisiotomie médiolatérale et quantité totale d ocytocine utilisée en cours de travail. Résultats. La primiparité est retrouvée comme étant un facteur de risque de lésions périnéales sévères en cours d accouchement (71 versus 43 %, p = 0,001). Mais, d autres facteurs lui sont associés : le poids maternel de même que l IMC (67 versus 63 kg, p = 0,036 ; 25,6 versus 23,4, p = 0,003), la durée de la deuxième phase de travail (68 versus 48 min, p = 0,037) et la variété postérieure de la présentation (32 versus 4 %, p < 0,001). L association à une dystocie des épaules est à la limite de la significativité (6 versus 0 %, p = 0,052). L extraction instrumentale est significativement associée à la survenue de lésions périnéales sévères, tous instruments confondus (44 versus 1 %, p < 0,001) ou indépendamment : forceps de Tarnier (14 versus 1 %, p = 0,003), forceps de Suzor (16 versus 0 %, p = 0,0005) ou spatules de Thierry (14 versus 0%, p = 0,0005). L épisiotomie médiolatérale n apparaît pas isolément comme facteur de risque de lésions périnéales. En revanche, son association à une extraction instrumentale constitue un risque fort (43 versus 1 %, p < 0,0001). Les paramètres fœtaux, l âge maternel, l obésité, l âge gestationnel, le dépassement de terme, l anesthésie et la dose d ocytocine ne sont pas considérés comme facteurs de risques. Discussion et conclusion. La primiparité n est pas un facteur isolé de lésions périnéales sévères. Les autres facteurs de risque retrouvés sont l extraction instrumentale, la variété postérieure de la présentation, l épisiotomie médiolatérale lorsqu elle est associée à une extraction instrumentale. 2007 Publié par Elsevier Masson SAS. Abstract Objective. Primiparity has been identified as the main risk factor of type 3 and 4 perineal injuries The purpose of our study, according to a population-based observational study, was to identify other clinical risk factors for lesions during vaginal delivery. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : bruno.deval@wanadoo.fr (B. Deval). 1297-9589/$ - see front matter 2007 Publié par Elsevier Masson SAS. doi:10.1016/j.gyobfe.2006.12.017

102 A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 Patients and methods. Two groups have been compared. Group A or study group (n=63) was defined as parturients with three or fourdegree perineal tears. Group B or control group (n=67) included women who delivered vaginally without any perineal lesion during the same period. Characteristics of the population were compared: maternal age, race, maternal weight, BMI (Body Mass Index), parity, mode of anaesthesia, gestational age, post maturity, length of labor, fetal weight, mode of delivery (assisted or not). Specific characteristics were also compared, obesity, shoulder dystocia, type of presentation, episiotomy and dose of ocytocin. Results. Primiparity was significantly associated with higher frequency of sphincter lacerations (71 vs 43%, p = 0.001). The patients of group A were with significantly higher weight than the patients of control group (67 vs 63 kg, p = 0.036). Futhermore the BMI was different in the two groups (25,6 vs 23,4, p = 0.003). There was a significant difference according to the length of the second part of labor (68 vs 48 min, p = 0.037) and the posterior variety (32 vs 4%, p < 0.001). The occurrence of shoulder dystocia was only just significant (6 vs 0%, p = 0.052). Assisted-extraction is highly associated with perineal injuries (44 vs 1%, p < 0.001). Futhermore the instrument has been concerned by the difference: Tarnier s forceps-assisted extraction (14 vs 1%, p = 0.003), Suzor s forceps-assisted extraction (16 vs 0%, p = 0.0005), Thierry s spatula-assisted extraction (14 vs 0%, p = 0,0005). The association forceps and episiotomy has been found with higher frequency of perineal injury (43 vs 1%, p < 0,0001). There were no difference between the 2 groups according fetal characteristics, type of analgesia, maternal age, gestational age, post-maturity or dose of ocytocin. Discussion and conclusion. Primiparity is not the only risk factor of perineal injuries. Other risk factors have been found: assistedextraction, occiput posterior fetal head position, and association episiotomy and assisted-extraction. Black origin seems to be protective. 2007 Publié par Elsevier Masson SAS. Mots clés : Lésions périnéales sévères ; Facteurs de risque Keywords: Severe perineal tears; Risk factors 1. Introduction Les lésions du sphincter anal ou déchirures périnéales sévères (types 3 et 4) du per-partum sont rares. Elles surviennent dans 1,7 à 7,3 % [1 6] des accouchements par voie basse. La prise en charge de ces lésions, en particulier leur prévention, est depuis toujours une préoccupation majeure des obstétriciens et sages-femmes. En effet, de telles déchirures ont des conséquences néfastes à court et long terme, tant en terme de douleurs périnéales que sur le plan de la continence urinaire et anale ultérieure. Cela sous-entend une parfaite connaissance des facteurs de risque, pouvant conduire à la survenue de telles lésions et des situations, parmi l étendue des pratiques obstétricales actuelles, pouvant y amener. La primiparité est, pour la plupart des auteurs, retrouvée comme facteur de risque essentiel et indépendant de lésion du sphincter anal en cours d accouchement. D autres facteurs sont retrouvés dans la littérature. Les facteurs maternels : ils incluent primiparité et périnée fragile, œdématié, cicatriciel ou hypoplasique. Les facteurs fœtaux : macrosomie, présentations occipitosacrées ou, de la face et les expulsions rapides. Les facteurs opératoires incluent : extractions instrumentales, manœuvres obstétricales et épisiotomie médiane. Le but de notre étude est de définir les facteurs de risques de lésions périnéales sévères retrouvées à partir d une cohorte de 63 patientes, comparées à 67 patientes indemnes de lésions suivant une étude observationnelle transversale. 2. Patientes et méthodes Soixante-trois patientes ayant présenté une déchirure périnéale obstétricale sévère ont été comparées à 67 patientes indemnes de lésion suivant une étude observationnelle transversale. Cette étude porte sur la période de mai 1998 à mai 2003 à la maternité de l hôpital Beaujon (APHP, France) soit 9639 accouchements. Dans un premier temps, ont été définis : le groupe d étude, correspondant aux patientes ayant eu une lésion périnéale de type 3 ou 4 lors de leur accouchement et un groupe témoin, correspondant aux femmes ayant accouché dans la même période sans lésion périnéale, l appariement étant effectué pour un accouchement dans la même période. Ont été exclues les césariennes (n = 1740), les sièges (n = 51), les grossesses gémellaires (n = 78), seules les grossesses de plus de 37 SA ont été incluses. Nous avons défini, la déchirure périnéale complète ou du troisième degré comme une lésion périnéale associant une rupture du sphincter externe de l anus à une ou plusieurs déchirures périnéales simples. Le toucher rectal s assurant de l intégrité de la cloison rectovaginale. Dans les déchirures complètes compliquées ou du quatrième degré, la paroi rectale est rompue réalisant un cloaque entre le vagin et le rectum. La réparation des déchirures périnéales a dans tous les cas comporté un premier temps d exposition et d évaluation des lésions à traiter, ces réparations ayant été effectuées sous anesthésie locorégionale ou générale. La réparation des lésions du troisième degré a intéressé dans un premier temps la suture du sphincter strié anal mettant bord à bord les deux berges par deux points en U à l aide d un fil à résorption lente, les temps suivants étant ceux de toute périnéorraphie réalisée après épisiotomie. La réparation des déchirures du quatrième degré a débuté par la suture de la paroi digestive par des points séparés au fil tressé à résorption lente noués dans la lumière digestive. Il s agit d une suture de type digestif, prenant la paroi rectale et anale, en ayant soin de bien charger la musculeuse, les points devant être rapprochés, afin que la paroi soit étanche. Les temps ultérieurs sont ceux d une lésion du troisième degré. Cette réparation est toujours conduite sous antibioprophylaxie. Les soins postopératoires associent une toilette périnéale biquotidienne à l aide d une solution antiseptique à une toilette périnéale après chaque miction et chaque selle. Il a été prescrit

A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 103 des laxatifs lubrifiants ou osmotiques et un régime sans résidu. Une rééducation périnéale a été systématiquement prescrite à la visite postnatale [7]. Durant l étude, les données concernant la patiente, le déroulement du travail, l expulsion et les caractéristiques de la continence dans le post-partum immédiat ont été recueillies (Tableau 1). Les données collectées concernant la patiente ; ont été l âge, l origine géographique, la gestité, la parité, l indice de masse corporelle (IMC) et l existence d une obésité définie par un IMC > 30 kg/m 2. Les critères d évaluation du travail ont été l âge gestationnel à l accouchement, le déclenchement spontané ou non, la durée de la première et de la deuxième phase du travail, le type d analgésie et la dose totale d ocytocine utilisée. Nous avons défini la première phase du travail par la période allant de l entrée en travail (existence de contractions régulières, efficaces, intéressant tout l utérus associées à la dilatation cervicale) à la dilatation cervicale complète (effacement et dilatation complète). La seconde partie du travail par la descente du mobile fœtal dans l excavation pelvienne jusqu à l expulsion. Ont été recueillies les données de biométrie fœtale soit le périmètre crânien, le diamètre bipariétal, le poids fœtal et la macrosomie fœtale étant définie par un poids fœtal supérieur à 4000 g. Concernant l extraction, ont été recueillis les paramètres suivants : l extraction instrumentale, le type d instrument utilisé (forceps de Tarnier, de Suzor, spatules de Thierry), la réalisation d une épisiotomie médiolatérale, la variété postérieure ou antérieure lors du dégagement et une éventuelle difficulté Tableau 1 Caractéristiques et comparaisons des patientes avec et sans déchirure périnéale sévère Caractéristiques Groupe A Groupe B p (n = 63) (n = 67) Âge maternel moyen (années) 29,2 ± 4,6 29,7 ± 5,5 0,59 Origine ethnique noire 25 (40 %) 42 (63 %) < 0,001* Poids maternel moyen (kg) 67 ± 13 63 ± 12 0,036* BMI 25,6 ± 4,3 23,4 ± 4,3 0,003* Obésité maternelle 9 (14 %) 5 (8 %) 0,21 Primiparité 45 (71 %) 29 (43 %) 0,001* Accouchement avec anesthésie 56 (89 %) 54 (81 %) 0,19 Péridurale 54 (86 %) 51 (76 %) 0,17 Âge gestationnel moyen (SA) 39,9 ± 1,3 40,6 ± 1,3 0,60 Terme dépassé (> 41,4 semaines) 7 (11 %) 10 (15 %) 0,52 Durée moyenne 1 re phase (h) 5,6 ± 3,2 4,7 ± 2,2 0,085 Durée moyenne 2 e phase (min) 68 ± 64 48 ± 44 0,037* Deuxième phase >120 min 14 (22 %) 7 (10 %) 0,068 Poids fœtal moyen (kg) 3,38 ± 0,46 3,39 ± 0,48 0,93 Périmètre crânien (cm) 34,7 ± 1,6 34,6 ± 1,4 0,65 Diamètre bipariétal (mm) 94 ± 4 94 ± 3 0,60 Macrosomie 7 (11 %) 6 (9 %) 0,68 Extraction instrumentale 28 (44 %) 1 (1 %) < 0,001* Forceps de Tarnier 9(14 %) 1 (1 %) 0,003* Forceps de Suzor 10 (16 %) 0 < 0,001* Spatules de Thierry 9(14 %) 0 < 0,001* Variété postérieure 20 (32 %) 3 (4 %) < 0,001* Difficulté aux épaules 4 (6 %) 0 0,052 Épisiotomie seule 23 (37 %) 34 (51 %) 0,10 Épisiotomie +forceps 27 (43 %) 1 (1 %) < 0,001* Ocytocine (UI) 14,8 ± 11,5 14,0 ± 12,6 0,79 * p < 0,05 : seuil de significativité. aux épaules. Il a été noté, pour le groupe étudié, le grade de la lésion périnéale. Après vérification de la normalité des distributions, les moyennes dans les deux groupes ont été comparées par le test t de Student. La comparaison des fréquences a été effectuée par le test du Chi 2 ou, lorsque les conditions de validité de ce dernier n étaient pas remplies, par le test exact de Fisher. Faute d un nombre suffisant de patientes, les techniques d évaluation des facteurs de risque plus performantes comme la régression logistique n ont pu être employées dans des conditions de validité acceptables. 3. Résultats 3.1. Caractéristiques de la population (Tableau 1) Le groupe d étude est composé de 63 patientes de 29,2 ans en moyenne avec un écart-type à 5,51 et des extrêmes entre 17 et 42 ans. Ces femmes sont dans 32 % d origine blanche, dans 40 % d origine noire et dans 28 % d une autre origine. Le poids moyen est de 67 kg avec un écart-type à 12,91 et des extrêmes allant de 38 à 114 kg. La taille moyenne est de 162 cm. L IMC moyen est 25,6 et la proportion d obèses de 14 %. Il y a 71 % de primipares, l âge gestationnel moyen est de 39,9 semaines d aménorrhée (SA) avec une proportion de terme dépassé de 11 %. Concernant le travail, la dose moyenne d ocytocine est de 14,8 UI avec un écart-type à 11,47 et des extrêmes allant de 1 à 38 UI. La première phase du travail dure en moyenne 333,4 minutes et la seconde 68 minutes avec un pourcentage de deuxième phase de plus de 120 minutes de 22 %. Les paramètres fœtaux montrent 32 % de variété postérieure, un poids moyen de naissance de 3381,4 g, 11 % d enfants macrosomes et quatre cas de difficultés aux épaules soit 6 %. L accouchement a eu lieu dans 89 % des cas avec une analgésie, dont 86 % de péridurales. Il y a eu 28 cas d extractions instrumentales (44 %), toujours réalisées avec une épisiotomie. Le groupe témoin est composé de 67 patientes de 29,7 ans en moyenne avec un écart-type à 4,63 et des extrêmes entre 19 et 38 ans. Ces femmes sont dans 33 % d origine blanche, dans 63 % d origine noire et dans 4 % d une autre origine. Le poids moyen est de 63 kg avec un écart-type à 11,50 et des extrêmes allant de 42 à 102 kg. La taille moyenne est de 163,9 cm. L IMC moyen est 23,4 et la proportion d obèses de 8 %. Il y a 43 % de primipares, l âge gestationnel moyen est de 40 SA avec une proportion de terme dépassé de 15 %. Concernant le travail, la dose moyenne d ocytocine est de 14 UI avec un écart-type à 12,57 et des extrêmes allant de 1 à 57 UI. La première phase du travail dure en moyenne 283,1 minutes et la seconde 48 minutes avec un pourcentage de deuxième phase de plus de 120 minutes de 10 %. Les paramètres fœtaux montrent 4 % de variété postérieure, un poids moyen de naissance de 3388,8 g, 9 % d enfants macrosomes et l absence de difficulté aux épaules. L accouchement a eu lieu dans 81 % des cas avec une analgésie, dont 76 % de péridurales. Il y a eu un cas

104 A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 d extraction instrumentale (1 %). Le pourcentage d épisiotomie est de 52 %. L étude concernant les caractéristiques maternelles montre que l âge des patientes est comparable dans les deux groupes (29,2 versus 29,7 ans). En revanche, les patientes présentant une lésion sphinctérienne ont un poids et un BMI (body mass index) supérieurs à celui des patientes du groupe témoin (respectivement 67 versus 63 kg, p = 0,036 et 25,6 versus 23,4, p = 0,003), l obésité (IMC > 30) n étant pas un facteur significatif dans notre étude (14 versus 8 %, p = 0,21). Les lésions sévères surviennent significativement moins souvent chez les femmes de race noire (40 versus 63 %, p = 0,0005). Les paramètres concernant la grossesse montrent que seule la primiparité est significativement associée une augmentation de la fréquence des lésions (71 versus 43 %, p = 0,001). En revanche, la durée de gestation (39,9 versus 40 SA, p = 0,6) ou le dépassement de terme (11 vs 15 %, p = 0,52) ne sont pas associés à une augmentation de la fréquence des lésions. 3.2. Caractéristiques du travail, du mode d accouchement et du mobile fœtal (Tableau 1) Concernant le déroulement du travail, il n y a pas d association entre le type d anesthésie durant le travail et l expulsion, qu il s agisse d un travail sans ou avec analgésie (89 versus 81 %, p = 0,19) ou du type d anesthésie locorégionale (86 versus 71 % d anesthésie péridurale, p = 0,17) et la survenue d une lésion périnéale sévère. De même, la dose totale d ocytocine utilisée est comparable dans les deux groupes (14,8 versus 14 UI, p = 0,79). La durée de la première phase du travail n est pas liée à la survenue d une lésion périnéale stade 3 ou 4 (333,4 versus 281,1 minutes, p = 0,085) alors que la deuxième phase du travail est plus longue chez les femmes présentant une lésion sphinctérienne (68 versus 48 minutes, p = 0,037). Lorsque l on prend en compte le fait d avoir une deuxième phase longue (> 120 minutes), la différence est à la limite de la significativité (66 versus 45 %, p = 0,068). En revanche, il existe une association avec certains paramètres du mode d accouchement : la variété postérieure de la présentation est très significativement associée à une lésion périnéale de type 3 (32 versus 4 %, p < 0,001) alors que la survenue d une difficulté aux épaules est à la limite de la significativité (6 versus 0 %, p = 0,052). L extraction instrumentale est très significativement associée à la survenue de lésions périnéales sévères : tous instruments confondus (44 versus 1 %, p < 0,001) ou indépendamment : forceps de Tarnier (14 versus 1 %, p = 0,003), forceps de Suzor (16 versus 0 %, p = 0,0005) ou spatules de Thierry (14 versus 0 %, p = 0,0005). La réalisation d une épisiotomie n a pas d incidence sur la survenue d une lésion (37 versus 51 %, p = 0,10) alors qu il y en a une si on l associe à une extraction instrumentale (43 versus 1 %, p < 0,0001). Il n y a pas de différence significative entre les deux groupes concernant le poids de naissance (3381,4 versus 3388,8, p = 0,93), l existence d une macrosomie (11 versus 9 %, p = 0,68), le périmètre crânien (347 mm versus 346 mm, p = 0,65) ou le diamètre bipariétal (938 versus 941 mm, p = 0,6). Les paramètres fœtaux ne sont donc pas associés à une augmentation de la survenue de lésions périnéales sévères dans notre série. 4. Discussion Les facteurs de risque associés à la survenue d une lésion périnéale de grade 3 ou 4 retrouvés dans notre série sont en plus de la primiparité : le poids maternel, l IMC, une deuxième phase de travail supérieure à 120 minutes, la variété postérieure de la présentation, l extraction instrumentale quel que soit l instrument utilisé et la difficulté aux épaules. Les résultats des principales études sont résumés dans le Tableau 2 : primiparité, poids de naissance supérieur à 4000 g, extraction instrumentale et réalisation d une épisiotomie médiane sont significativement associés à une augmentation de la survenue de lésion du troisième ou quatrième degré. La primiparité est pour la plupart des auteurs un facteur de risque indépendant de lésion sphinctérienne [13]. Dans notre série, il y avait 60,8 % de lésions chez les primipares contre 32,1 % chez les multipares (p = 0,001). Pour Handa [2], Zetterstrom [3] et Eason [10], il s agit même du facteur le plus pourvoyeur. Hudelist et al. ne retrouvent pas ce paramètre, après analyse de 5377 accouchements par voie basse dont 46 avec rupture sphinctérienne. Seuls le poids de naissance et l utilisation de forceps ont été retrouvés facteurs de risque indépendants [14]. En effet, l extraction instrumentale est, dans de nombreuses publications, un facteur de risque de lésion périnéale. Dans notre série, 44 % des patientes ayant eu une extraction instrumentale ont eu une lésion périnéale de grade 3 ou 4, comparées à 1 % chez les patientes indemnes. La plupart des auteurs s accorde à dire que les ruptures sphinctériennes surviennent plus fréquemment lors de l utilisation de forceps que lors de l utilisation d une ventouse. L extraction instrumentale par forceps est le premier facteur de risque dans les études de Fenner [9], Goldberg [11], Benifla [12], Hudelist [14] et Christianson [5]. Seuls Handa et al. [2] montrent une supériorité du facteur ventouse en comparaison au facteur forceps (OR 2,30 versus 1,45). D autres auteurs ne mettent pas en évidence la responsabilité de la ventouse dans la survenue de lésions sévères (Zetterstrom [3], Mac Arthur [8] et Sultan [15]). Dans notre série, nous montrons que le risque est associé au forceps de Tarnier mais aussi au forceps de Suzor et aux spatules de Thierry; la ventouse n étant pas utilisée à la maternité de Beaujon, elle n a pas pu être intégrée dans les paramètres étudiés. Nous n avons pas retrouvé de bibliographie concernant les risques respectifs liés à ces instruments. Si l extraction instrumentale en tant que telle n est pas à remettre en cause et nécessite donc une précaution toute particulière lors de la pose de l indication et lors de sa réalisation, ces dernières données doivent être discutées en fonction des habitudes de chaque équipe. En effet, il n est pas toujours précisé dans les publications quel instrument est préférentiellement utilisé, chaque école d obstétrique ayant ses

A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 105 Tableau 2 Comparaison des données des principales publications concernant les facteurs de risque de lésion périnéale Forceps OR Ventouse OR Primiparité OR Macrosomie OR Épisiotomie Âge maternel OR médiane OR Handa [2] 1,45 [1,37 1,42] 2,30 [2,21 2,40] 0,15 [0,14 0,15] 2,17 [2,07 2,27] NP NP Zetterstrom [3] NP NP 9,8 [3,6 26,2] 1,3 [1,1,1,6] 5,5 [1,4 18,7] NP Mac Arthur [8] 1,94 [1,30 2,89] NS NP NS NS Oui Fenner [9] 4,75 [3,43 6,57] 3,51 [2,64 4,66] NP 2,19 [1,61 2,99] 2,24 [1,81 2,77] NP Eason [10] 12,3 [3 50,4] 7,4 [1,9 28,5] 39,2 [5,4 282,5] NS 9,6 [3,2 28,5] NP Goldberg [11] 3,71 [3,39 4,05] 1,86 [1,64 2,10] NP 1,94 [1,21 3,09] 3,09 [2,66 3,59] NP Benifla [12) 11,9 [4,8 33,3] NP 8,8 [1 78,3] NP NP NP Hudelist [13] 5,62 [2,16 14,62] NP NS NS NP NS Christianson [5] 10,8 [5,2 22,3] NP 10 [3 33,3] NP 2,5 [1 6] NP habitudes, ce qui peut induire un biais dans l interprétation des résultats. L influence de l origine ethnique est très discutée : Handa et al. [2], dans une étude portant sur deux millions de naissance, montrent une incidence accrue de lésions périnéales au-delà du deuxième degré chez les femmes d origine indienne et philippine. De même, Mac Arthur et al. [8] notent une association significative avec une origine ethnique indienne. Pour Goldberg et al. [11], l origine asiatique est associée à une augmentation de l incidence des déchirures périnéales sévères. Comme nous le retrouvons dans notre étude, Wu et al. [16], dans une publication portant sur 393 patientes, montrent une augmentation du risque relatif par quatre lors d un dégagement céphalique en variété occipitosacrée. Enfin, différentes publications rapportent un risque accru avec un âge maternel élevé (Mac Arthur [8], Angioli [17]). Nos résultats concernant l épisiotomie sont en accord avec les données de la littérature [18]. Cette dernière suggère un effet protecteur de l épisiotomie médiolatérale et un risque accru de lésion sphinctérienne associé à l épisiotomie médiane. En France, la pratique de l épisiotomie médiane reste isolée, à l inverse des pays anglo-saxons. Ces résultats diffèrent de ceux de Handa et al. [2] qui montrent que l épisiotomie médiane a un effet protecteur sur la survenue des lésions du troisème degré mais augmente celle du quatrième degré. Selon Fenner et al. [9], l épisiotomie médiane cause trois fois plus de lésion sphinctérienne qu une épisiotomie médiolatérale, tandis que Coats et al. [19] trouvent une extension vers des lésions du troisième ou quatrième degré dans 11,6 % des cas lors de la réalisation d une épisiotomie médiane contre 2 % pour une épisiotomie médiolatérale. Poen et al. [20] montrent un odds ratio protecteur à 0,6 en faveur de l épisiotomie médiolatérale. L effet protecteur de l épisiotomie médiolatérale n a toutefois pas été clairement démontré dans des études randomisées comportant de larges séries et comparant l absence d épisiotomie à la réalisation d une épisiotomie médiane ou médiolatérale. Par ailleurs, nos résultats concernant l association épisiotomie forceps sont en accord avec les données de la littérature : il existe une augmentation du risque lors d une extraction instrumentale avec épisiotomie alors que l épisiotomie aurait un effet protecteur. C est également ce que démontrent Dandolu et al. [4] à propos d une cohorte de 258 507 accouchements voie basse dont 18 888 avec lésions sévères. Les lésions sphinctériennes secondaires à l accouchement sont visibles dans le post-partum immédiat. Benifla et al. [12] montrent que 45 % des patientes présentant une incontinence anale de novo avaient un défect sphinctérien diagnostiqué échographiquement. Kammerer et al. [21] constatent qu à six semaines post-partum, la fréquence de rupture sphinctérienne, tant au niveau du sphincter externe qu interne, est significativement supérieure chez les femmes ayant présenté une lésion sévère. Sultan et al. [15], dans une étude prospective portant sur 202 patientes, montrent que 35 % des primipares avaient un défect sphinctérien à six semaines, qui persistait dans 28 % des cas à six mois. Différents auteurs ont étudié le rôle possible d une atteinte du nerf pudendal. Sultan et al. [22], dans une étude portant sur 50 patientes ayant présenté une lésion du troisième degré comparées aux 8553 autres patientes ayant accouché pendant la même période, rapportent que les latences motrices terminales du nerf pudendal n étaient pas significativement différentes dans les deux groupes et que, en conséquence, l incontinence anale pouvait davantage être rapportée à la rupture sphinctérienne qu à une lésion pudendale. Tetzschner et al. [23], quant à eux, montrent que l incontinence anale est associée à un allongement des latences motrices terminales du nerf honteux. Il semble qu il puisse, dans certains cas, y avoir une responsabilité au moins partielle d une atteinte pudendale. Concernant l analyse statistique réalisée dans notre étude, nous aurions souhaité pouvoir caractériser les facteurs de risque de lésion périnéale sévère par régression logistique en calculant les odds ratios associés. Cependant, la précision de la méthode est conditionnée non seulement par le nombre d événements (suffisant dans notre série), mais aussi par le nombre de patientes exposées au risque (ou non exposées si le nombre de celles-ci est le plus faible) dans chacun des deux groupes présence et absence de lésion. L examen des données montre que dans la plupart des cas, ce nombre est inférieur à 10. En dessous de dix sujets exposés ou non exposés dans l un des deux groupes, le calcul fournit des intervalles de confiance excessivement importants traduisant l imprécision de l estimation. Dans ces conditions, il n est pas légitime de recourir à la régression logistique. Par souci d homogénéité, nous avons donc décidé d exclure cette méthode de l analyse. Par ailleurs, il est difficile, compte tenu de notre série, d effectuer un classement des facteurs de risque par ordre d importance compte tenu de l imprécision de certaines estimations.

106 A. Barbier et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 35 (2007) 101 106 Cependant, cette étude comporte des limites qu il faut souligner. En effet, il s agit d une étude rétrospective dans laquelle les groupes ont été appariés uniquement sur l existence ou non de lésions périnéales sévères. Par ailleurs, ni les causes ni les praticiens des extractions instrumentales n ont été individualisés et la mesure des corps périnéaux n a pas été effectuée. Enfin, les positions maternelles, l expression utérine, le massage périnéal, non plus que la recherche de lésions occultes n ont été relevés. 5. Conclusion Les résultats de notre étude sont en accord avec les données actuelles de la littérature : primiparité, surcharge pondérale, deuxième phase de travail prolongée, extraction instrumentale, variété postérieure de la présentation, difficulté aux épaules sont des facteurs de risque de survenue de lésions périnéales du troisième ou quatrième degré. L accouchement par voie basse reste néanmoins la voie la plus sûre et la plus économique d accouchement. S il est certain qu il est difficile d éviter toutes les lésions périnéales sévères, la connaissance de ces facteurs de risque et leur prise en compte lors des conduites à tenir obstétricales devraient conduire à une réduction de leur survenue. Il est indispensable d insister sur la prise en charge des femmes ayant présenté une lésion périnéale sévère tant sur le plan de la rééducation sphinctérienne du post-partum que sur le suivi à long terme. De cette surveillance rapprochée dépend leur continence ultérieure et, le cas échéant, leur devenir obstétrical. Références [1] Fornell EK, Berg G, Hallbook O, Matthiesen LS, Sjodahl R. Clinical consequences of anal sphincter rupture during vaginal delivery. J Am Coll Surg 1996;183(6):553 8. [2] Handa VL, Danielsen BH, Gilbert WM. Obstetric anal sphincter lacerations. Obstet Gynecol 2001;98(2):225 30. 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