MODÈLE ALM : APPORT DE LA LOGIQUE FLOUE DANS LA MODÉLISATION DES COMPORTEMENTS 1 Le 27 Septembre 2013 Sandrine Mouret Sylvain Detroulleau
INTRODUCTION (1/2) Solvabilité II : valorisation du bilan selon le principe de la «juste valeur» : Actifs : en valeur de marché Passifs : vision «Best Estimate» Le Best Estimate : Représente la valeur actualisée des cash flows futurs de l assureur ( Prestation, Frais, ) Repose sur des hypothèses réalistes et non nécessairement prudentes (vision 50/50). Dans les sociétés d assurance vie commercialisant des contrats d épargne, un modèle ALM (Gestion Actif/Passif) est souvent nécessaire afin de capter l ensemble des interactions entre l actif et le passif Pour valoriser le passif en «Best Estimate», le modèle ALM doit tenir compte des incertitudes liées : Aux comportements des assurés (rachats, décès,...) Aux actions futures du management (politique de taux servis, allocation d actif, ) 2
INTRODUCTION (2/2) Bien que relevant d un enjeu important dans la détermination du Best Estimate, les lois comportementales soulèvent des difficultés sur leur calibrage, leur modélisation et plus largement leur justification. Objectif : trouver une modélisation proche de la réalité Le raisonnement humain Attitude devant un feu tricolore SI le feu est rouge SI ma vitesse est élevée ET SI le feu est proche ALORS je freine fort. Pour résoudre des problèmes complexes, les être humains utilisent des données approximatives de par une connaissance imparfaite de l environnement qui les entoure. Leurs raisonnements se basent sur des critères plus qualitatifs que quantitatifs. è La logique floue en permettant de modéliser les imprécisions et les incertitudes du raisonnement humain, apparait alors comme alternative de modélisation des comportements 3
SOMMAIRE Le modèle ALM Interactions Actif/Passif Fonctionnement du modèle ALM Lois comportementales Modélisation des rachats conjoncturels par la Logique floue Méthodologie de la logique floue Sensibilités des rachats conjoncturels Modélisation de la politique de taux servis par la Logique floue Analyses des résultats 4
LE MODÈLE ALM 5 Calcul du Best Estimate d une compagnie d assurance vie fictive : - Interactions Actif/Passif - Fonctionnement du modèle ALM - Lois comportementales
LES INTERACTIONS ACTIF/PASSIF Options et garanties des contrats épargnes : interactions entre l actif et le passif Le taux minimum garantie (TMG) Allocation d actifs La participation aux bénéfices (PB) Interactions Réalisation de plus-values L option de rachat Politique de taux servis Les techniques de simulations sont préférées pour évaluer le coût des options et garanties 6
FONCTIONNEMENT DU MODÈLE ALM Modèle ALM Données Paramètres Portefeuille d Actifs Rachats, Décès Sortie Générateur de scénarios économiques Scénario i Model points Passif Bilan d ouverture Allocation d actifs Politique de taux servis Projection dans le temps Actualisation Cash-Flows Best Estimate Feront l objet d une modélisation par la logique floue 7
LOIS COMPORTEMENTALES : RACHATS Rachats structurels (RS) Liés à la structure du portefeuille Estimés à partir de l historique de l assureur Rachats conjoncturels (RC) Liés à la conjoncture économique et à la performance de l assureur Absence de données. Modélisés traditionnellement à partir d une loi proposée par l ACP Limites de la «loi ACP» : Absence d éléments permettant la justification du calibrage Suppose les assurés rationnels Repose sur un seul critère : l écart de taux servis Une loi pour tous 8
LOIS COMPORTEMENTALES : MOTIFS DES RACHATS CONJONCTURELS D autres facteurs peuvent expliquer le comportement des assurés en matière de rachats conjoncturels L âge de l assuré Les jeunes sont peu réactifs et disposent d un encours faible, ils seront moins sensibles à l écart entre le taux servi et le taux concurrent L ancienneté Les assurés dont l ancienneté est élevée ont une meilleure connaissance du marché Les assurés dont l ancienneté est faible ne bénéficieront pas d abattement fiscal en cas de rachat L inertie des assurés Un assuré ne rachète pas nécessairement son contrat si l assureur lui sert un taux moins avantageux que la concurrence mais si cela fait plusieurs années qu il lui propose des taux moins attractifs Frais d acquisition Pénalité de rachat 9
LOIS COMPORTEMENTALES : ACTION DU MANAGEMENT Les actions du management dans les modèles ALM sont traditionnellement transposées sous la forme de fonctions statiques ou sous la forme de problèmes d optimisations sous contraintes Exemples d actions du management dans notre modèle : Objectif de taux servis servir le taux concurrent Allocation d actif 70% d obligation, 10% d action, 15% d immobilier et 5% de monétaire Limites : Le management n est pas impliqué dans la modélisation Modélisation pouvant devenir complexe Les simplifications usuelles ne sont pas réalistes Alternative possible Ø Modélisation des comportements par la théorie de la logique floue 10
MODÉLISATION DES RACHATS CONJONCTURELS PAR LA LOGIQUE FLOUE 11 Méthodologie de la logique floue - Pré-requis et définitions - Le raisonnement en logique floue * La fuzzification * L inférence floue * La défuzzification Sensibilités des rachats conjoncturels
MÉTHODOLOGIE DE LA LOGIQUE FLOUE 12
PRÉREQUIS ET DÉFINITIONS Limites de la théorie classique des ensembles : La taille d un individu (moyen, grand?) è Nécessité de créer des ensembles flous Variables et ensembles flous Une variable linguistique correspond à un triplet (X,U,R) : X = la variable (ex: la taille) U = univers du discours = valeurs prises par la variable (ex: mètre ) R = ensemble de sous-ensemble flous (ex: petit, moyen, grand) Un ensemble flou A est caractérisé par sa fonction d appartenance : x X; µ ( x) [0,1] A Opérateurs flous Opérateurs de Zadeh Intersection : ET Réunion : OU µ ( x) = MIN( µ ( x), ( x)) A B A µ B µ ( x) = MAX( µ ( x), ( x)) A B A µ B 13
LE RAISONNEMENT EN LOGIQUE FLOUE Entrées Fuzzification Passage du quantitatif au qualitatif Inférence floue Simulation du raisonnement humain Défuzzification Prise de décisions Sorties Valeurs numériques Domaine flou Valeurs numériques 14
ETAPE 1 : FUZZIFICATION La fuzzification est l étape qui permet de passer du monde réel au monde flou. Méthode : Déterminer les variables floues d entrée et de sortie du modèle Déterminer pour chacune de ces variables leurs ensembles flous associés Déterminer la fonction d appartenance de chacun de ces ensembles flous Dans le cadre des rachats conjoncturels: Variables Ensembles flous Entrées Sor0e Ecart de rendement Ancienneté du contrat Age de l'assuré Taux de rachat Fortement néga,f Faiblement néga,f Proche de 0 Faiblement posi,f Fortement posi,f Faible Moyenne Importante Jeune- Adulte Adulte Retraité Très néga,f Néga,f Proche de 0 Posi,f Très posi,f Univers du discours [- 6%; 4%] [0 ans; 40 ans] [18 ans; 100 ans] [- 5%; 20%] 15
è Les fonctions d appartenance des variables d entrée et de sortie Les fonctions d appartenance sont déterminées à l aide de jugements d experts et d intuitions Remarque : Les fonctions choisies sont linéaires par morceaux en vue de simplifier les calculs futurs mais il est possible d utiliser d autre formes de fonctions d appartenance : hyperboliques, normales, 16
ETAPE 2 : INFÉRENCES FLOUES (1/4) Déterminer la matrice de décisions Etablir l ensemble des règles de décisions possibles pour un individu SI prémisse 1 ET prémisse 2 ALORS conclusion Liens logiques : ET è chaque variable influence conjointement la décision Calibrage de la matrice Expertise Argumentation soutenue Matrice de décisions pour les rachats conjoncturels : Taux de rachat Ancienneté du contrat & Age de l'assuré Faible Moyenne Importante Ecart de rendements Jeune- Adulte Adulte Retraité Jeune- Adulte Adulte Retraité Jeune- Adulte Adulte Retraité Fortement néga,f Proche de 0 Posi,f Posi,f Posi,f Posi,f Posi,f Posi,f Très posi,f Posi,f Faiblement néga,f Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Posi,f Proche de 0 Proche de 0 Posi,f Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Faiblement posi,f Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Proche de 0 Néga,f Proche de 0 Proche de 0 Néga,f Proche de 0 Fortement posi,f Proche de 0 Néga,f Néga,f Néga,f Néga,f Néga,f Néga,f Très néga,f Néga,f 17 Encours faible et faibles connaissances du marché è Pas réactifs Encours important et désire de s assurer une bonne retraite è Très réactifs
Exemple : x 0 = (Ecart de rendements -1.7%; Ancienneté 3.5 ans; Age 61 ans) Remarque : Pour chaque combinaison d entrée, plusieurs règles de décisions peuvent être déclenchées. D après la forme des fonctions d appartenance, on peut prendre en compte jusqu à 8 règles de décisions Ecart des rendements Ancienneté du contrat Age de l'assuré Ensembles flous Y_rdmt Ensembles flous Y_ancien Ensembles flous Y_age Fortement néga,f 0,40 Faible 0,75 Jeune- Adulte 0,00 Faiblement néga,f 0,60 Moyenne 0,25 Adulte 0,86 Proche de 0 0,00 Importante 0,00 Retraité 0,14 Faiblement posi,f 0,00 Fortement posi,f 0,00 Il y a donc 8 règles de décisions à prendre en compte : Règles Ecart de rendement ET Ancienneté ET Age de l'assuré ALORS Rachat R1 Fortement néga,f ET Faible ET Adulte ALORS Posi,f R2 Fortement néga,f ET Moyenne ET Adulte ALORS Posi,f R3 Fortement néga,f ET Faible ET Retraité ALORS Posi,f R4 Fortement néga,f ET Moyenne ET Retraité ALORS Posi,f R5 Faiblement néga,f ET Faible ET Adulte ALORS Proche de 0 R6 Faiblement néga,f ET Moyenne ET Adulte ALORS Posi,f R7 Faiblement néga,f ET Faible ET Retraité ALORS Proche de 0 R8 Faiblement néga,f ET Moyenne ET Retraité ALORS Proche de 0 18 Conclusions déterminées à l aide de la matrice de décisions
ETAPE 2 : INFÉRENCES FLOUES (2/4) ( x 0 ) Définir le degré d activation de la règle R : Déterminer la véracité des propositions de chacune des règles floues Niveau de vérité des propositions è MINIMUM entre les degrés d appartenance µ R Pour R1 : Règles Ecart de rendement MIN Ancienneté MIN Age de l'assuré Degré d'ac:va:on Rachat R1 0,40 MIN 0,75 MIN 0,86 0,40 Posi,f µ R ( x 0 ) = 40% 1 19
ETAPE 2 : INFÉRENCES FLOUES (3/4) Implication : Préciser la conclusion par rapport au niveau de vérité de la proposition è Evaluer la fonction d appartenance de la conclusion de la règle R Pour R1: Méthode Mamdani ' µ conclusion ( y) = MINy( µ R( x0), µ R conclusion R ( y)) µ PositifR 1 ( y) ' µ Positif R1 ( y) 1,20 1,00 0,80 0,60 0,40 Implication 1,20 1,00 0,80 0,60 0,40 0,20 0,00-5% 0% 5% 10% 15% 20% 0,20 0,00-5,00% 0,00% 5,00% 10,00% 15,00% 20,00% 20
ETAPE 2 : INFÉRENCES FLOUES (4/4) Agrégation des conclusions Caractériser la décision floue Les fonctions d appartenance des conclusions de chaque règle floue sont reliées par un «OU» logique è un «MAX» en logique floue µ FINALE ( y) ' = MAX ( µ ( y)); 1 i y conclusion Ri N Agrégation 21
ETAPE 3 : DÉFUZZIFICATION Cette étape permet de repasser dans l univers réel pour prendre une décision Deux méthodes de défuzzification : Méthode du centre de gravité (COG) : x G xµ ( x) dx i i= 0 = = n µ ( x) dx n x µ ( x ) i= 0 µ ( x ) i i Méthode de la moyenne des maxima (MM) : x MM N x xdx i= = dx N = 0 i è Prise de décision réelle 22
SENSIBILITÉS DES RACHATS CONJONCTURELS 23
Les différentes méthodes de défuzzification Résultats proches des préconisations de l ACP Résultats plus stables avec la défuzzification par centre de gravité Cohérence avec la matrice de décisions Evolution de la réactivité des individus retranscrite dans les résultats 24
Impacts des changements dans la matrice de décisions Hypothèse : La connaissance joue un rôle plus important que l encours sur la réactivité des jeunes adultes d ancienneté importante Remarque : une seule colonne à changer dans notre matrice de décisions Impact de la matrice de décisions immédiat et important 25
MODÉLISATION DE LA POLITIQUE DE TAUX SERVIS PAR LA LOGIQUE FLOUE 26
CARACTÉRISTIQUES RETENUES POUR LA POLITIQUE DE TAUX SERVIS Variables et ensembles flous Variables Ensembles flous Univers de discours Entrées Sor0e PPE Produits financiers Ra:o de solvabilité Poli:que de taux servis Faible Faibles Passable Peu concurrente Convenable Appréciables Bon Concurrente Elevée Elevés Très bon Très concurrente [0%, 4%] [20%, 130%] [100%, 400%] [85%, 120%] La matrice de décisions Poli:que de taux servi Produits financiers &PPE Faibles Appréciables Importants Solvabilité (ra:o MSR) Faible Convenable Forte Faible Convenable Forte Faible Convenable Forte Passable Bon Très bon Peu concurrente Peu concurrente Peu concurrente Peu concurrente Peu concurrente Peu concurrente Peu Peu Peu Concurrente Concurrente Concurrente Concurrente concurrente concurrente concurrente Peu concurrente Concurrente Concurrente Concurrente Concurrente Concurrente Très concurrente Concurrente Concurrente Concurrente Très concurrente Concurrente Très concurrente Très concurrente 27
SENSIBILITÉS DU MANAGEMENT ACTION Toutes les décisions prises lors du calibrage de la matrice de décisions se retranscrivent dans les résultats 28
29 ANALYSES DES RÉSULTATS
APPORTS DE LA LOGIQUE FLOUE Rachats conjoncturels Ecart : 0,09% des fonds propres Les résultats obtenus avec notre matrice de décisions sont comparables aux résultats obtenus avec la courbe de rachats «ACP» La vision plus fine du management est au global en adéquation avec la vision ACP Ø La logique floue : Permet de justifier et d argumenter l utilisation de la fonction ACP Apporte une méthodologie de calibrage 30
APPORTS DE LA LOGIQUE FLOUE +3,79% +5,45% -5,24% Société A : moyenne d âge = 47 ans Société R : moyenne d âge = 65 ans Société J : moyenne d âge = 20 ans Société A : scénario central Société B : scénario «réactif» Ø La logique floue permet une modélisation individuelle du comportement de rachat Ø Méthodologie directement applicable sur des portefeuilles atypiques Ø La matrice de décisions est un outil pertinent pour modifier/ajuster le comportement de certaines classes d assurés 31
APPORTS DE LA LOGIQUE FLOUE Politique de taux servis Ecart : 3,2% des fonds propres Meilleure gestion du taux servi par rapport à notre modèle standard Ø Réels apports de la logique floue: Niveau d optimisation flexible Etablie un lien concret entre la politique du management et sa modélisation Force le management à prendre position Le module logique floue se positionne comme un outil d aide à la décision intéressant 32
CONCLUSION Logique innovante et cadre conceptuel mathématique rigoureux pour traduire les expertises Apporte des justifications sur un problème où les données sont insuffisantes Justification du calibrage et généralisations des courbes de rachats conjoncturels proposées par l ACP Fournie un lien concret entre la politique du management et sa modélisation Limites : Sources d erreurs difficiles à identifier Résultats sensibles aux fonctions d appartenances et aux univers de discours Recommandations d utilisation : Justifications du calibrage de la matrice de décisions contrôlées par le régulateur Comprendre ses assurés : questionnaire de souscription, analyses des causes de rachats, Axes de développement possibles Allocation d actif, politique d extériorisation des PVL, Outil d aide à la décision au sein de l ORSA 33
MERCI DE VOTRE ATTENTION QUESTIONS/REPONSES Contacts : Sandrine.Mouret@fr.ey.com 34 Sylvain.Detroulleau@optimindwinter.com