o.2 Éditorial Cher(e) Collègue, Cher(e) Ami(e), L actualité en hépatologie Juin 2004 >SUPPLÉMENT À LA LETTRE DU CREGG



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Transcription:

Juin 2004 o.2 ISSN : 1261-7458 L actualité en hépatologie >SUPPLÉMENT À LA LETTRE DU CREGG Éditorial Cher(e) Collègue, Cher(e) Ami(e), Notre souhait de vous faire partager notre enthousiasme en hépatologie reste intact et s est même trouvé renforcé grâce à votre participation nombreuse et active, en décembre dernier, au second forum consacré à des pathologies fréquemment rencontrées lors de nos consultations d hépatogastroentérologues : la stéatose et la surcharge en fer. Les orateurs ont eu la gentillesse de vous rédiger un résumé de leurs exposés qui ont fait l objet d un débat animé en présence d experts de renom. Des ateliers interactifs ont permis, l après-midi, d aborder les hépatites virales sur un versant plus pratique qu académique ; des cas cliniques ont été le support à une discussion ciblée sur des situations réalistes, rapportées ici. La commission réitère cette année sa mission de communication dans cette spécialité, auprès de ses collègues, par une approche des nouveautés cliniques et thérapeutiques. En effet, nous convenons qu il est difficile de se tenir informé dans tous les domaines de la gastroentérologie et, en particulier, de l hépatologie. Nous espérons compter sur vous cette année le vendredi 10 décembre à Paris, comme d habitude, la veille des avancées thérapeutiques en Secrétaire de rédaction : T. FONTANGES Comité de rédaction : M. ANTONI, F. BAILLY, S. BEORCHIA, M. BOURLIERE, Nathalie BOYER DARRIGRAND, Corinne CASTELNAU, J. DENIS, P. DENJEAN, P. HALFON, J.P. JACQUES, D. LUCIDARME, Catherine MATHIEU-CHANDELIER, D. OUZAN gastroentérologie organisées par les laboratoires ASTRAZENECA. Nous saluons maintenant la reconnaissance qui nous est faite de la part de nos collègues hospitaliers dans cette discipline puisque nous sommes représentés dans les différentes instances scientifiques (AFEF, fédération des pôles de références sur l hépatite C) et administratives (plan ministériel «hépatites 2002-2005» prolongé jusqu en 2007). La commission va vous proposer des enquêtes épidémiologiques qui permettront de connaître votre point de vue et votre attitude face à certaines pathologies. J espère que vous accepterez ce surcroît de travail qui est une façon de formaliser notre existence de praticiens libéraux. Nous développons le site spécifique de l hépatologie sur celui du CREGG, bon moyen de communiquer des nouveautés, des résumés de nos forums ; néanmoins, notre forum a l avantage de permettre un échange plus chaleureux entre professionnels qui ont des préoccupations proches mais que la géographie sépare. Enfin, nous sommes toujours contents d accueillir de nouveaux membres, ce qui permet de comparer les modes d exercice et d enrichir les débats au sein de notre discipline. Toute cette communication ne pourrait avoir lieu sans la participation «historique» et particulièrement efficace du laboratoire SCHERING-PLOUGH que nous remercions vivement. Thierry Fontanges ALN ÉDITIONS 127, RUE SAINT-DIZIER 54000 NANCY Cette lettre a été réalisée avec le soutien de Schering-Plough.

Foie et Obésité Un nouvel enjeu pour l hépatologie libérale Historique Le foie des obèses Conclusion Sylvain BEORCHIA (Lyon) Fer et Foie Physiologie et clinique du fer L hémochromatose Les surcharges en fer non hémochromatosiques Conclusion Patrick DELASALLE (Grasse) Cas cliniques : hépatite C Cas clinique n 1 Cas clinique n 2 Cas clinique n 3 Nathalie BOYER DARRIGRAND (Nanterre) Cas cliniques : hépatite B Cas clinique n 1 Cas clinique n 2 Cas clinique n 3 Denis OUZAN (Saint-Laurent-du-Var) Sommaire Réunions de la commission Hépato du CREGG en 2004 23-25 janvier 2004, La Clusaz : Symposium de réflexion et d analyse du 2 e forum libéral. Préparation du 3 e forum. 04 avril 2004, Paris, Journées Francophones de Pathologie Digestive : Réunion de synthèse des activités en cours de la commission : études prospectives épidémiologiques, place de la commission dans les sociétés savantes. L AFEF du 29/09 au 2/10 à Paris avec comme thème FMC : le foie dans les maladies générales et situations pratiques en hépatologie. 08-09 octobre 2004, Arcachon : Assemblée générale du CREGG. Le congrès américain d hépatologie (AASLD) du 29/10 au 2/11 à Boston. 10 décembre 2004, Paris : 3 e Forum en Hépatologie libérale. 2

Foie et Obésité Un nouvel enjeu pour l hépatologie libérale Sylvain BEORCHIA (Clinique de la Sauvegarde - Lyon) HISTORIQUE La communauté médicale ne s est intéressée que tardivement au foie des obèses. Plusieurs raisons banalisaient les anomalies biologiques de ces patients : la fréquence de la stéatose considérée comme une affection bénigne, l importance du facteur alcoolique dans nos sociétés modernes, la similitude des lésions histologiques avec celle de l hépatopathie alcoolique et la méconnaissance de l histoire naturelle du «foie gras des obèses». La prédominance des facteurs nutritionnels conduisait les malades vers l endocrinologue ou l interniste. Une véritable «épidémie» des obèses américains a été rapportée lors des études NHANES (National Heath and Nutritional Examination Survey) démontrant la prévalence de l obésité qui a vertigineusement augmenté chez les adultes de 13.4 en 1962 à 30.9 en 2000 [2,5,17]. On estime qu aux USA, 15 à 25 % de la population seraient porteurs d une stéatopathie non alcoolique (NAFLD des Anglo-Saxons) et 2 à 3 % d une stéatohépatite (NASH). Les progrès de l hépatologie ont également bouleversé notre connaissance du problème, donnant une certaine justification aux transplanteurs qui avaient déjà pressenti le dysfonctionnement primaire des foies stéatosiques. LE FOIE DES OBÈSES 1 - Quelques notions bariatiques 1-1. Deux paramètres fondamentaux régissent l approche médicale des surcharges pondérales, le degré et le type d obésité [9,12]. Le premier est exprimé par le BMI (Body Mass Index) ou IMC (Indice de Masse Corporelle), suivant la formule classique : P (poids en kg) / T 2 (taille en m 2 ) En France, la limite supérieure de l IMC est de 23.5 pour les femmes et 25 pour les hommes. On définit ainsi 4 stades : surpoids : IMC entre 25 et 29 ; obésité : IMC entre 30 et 35 ; obésité sévère : IMC > 35 ; obésité morbide : IMC > 40. Le type de l obésité définit la répartition androïde ou gynoïde des graisses. Il est exprimé par le rapport T (taille) / H (hanche). Le T/H varie selon le sexe : inférieur à 0.80 chez la femme et à 0.95 chez l homme. En France, la prévalence d un surpoids (IMC > 25) atteint 25 % des hommes et 18 % des femmes avec des disparités régionales, notamment en Alsace et en Ile-de-France. La prévalence de l obésité (IMC > 30) atteint 11.3 % chez l adulte et 10 % chez l enfant, suivant une courbe ascendante, similaire à celle des USA. Elle varie avec certains facteurs : hérédité (69 % des obèses ont un parent obèse) ; âge (60 % des hommes et 75 % des femmes ont plus de 50 ans) ; niveau social et culturel ; l ethnie avec une prédominance aux USA dans la population noire et hispanique [2,17]. 1-2. La consultation d un patient obèse comporte une approche globale indispensable pour apprécier ses multiples facteurs de risque [12]. Le risque cardiovasculaire est connu depuis de nombreuses années. Il conditionne le pronostic vital avec la gravité de l insuffisance coronarienne, de l HTA, de l artériopathie des formes androïdes et les complications veineuses des formes gynoïdes. Le risque respiratoire, hantise des anesthésistes, s apprécie simplement avec la recherche d une dyspnée d effort, due à une capacité vitale diminuée et s associe avec le risque neurologique sous-estimé de l apnée du sommeil. Le risque ostéo-articulaire handicape souvent la patiente obèse dans sa vie courante avec le cortège de lombarthrose, coxarthrose et gonarthrose évolutives après la ménopause. Les risques intercurrents, infectieux respiratoires, urinaires et cutanés, chirurgicaux (anesthésie et retard cicatrisation) et accessoirement obstétricaux, seront recherchés minutieusement. Le risque métabolique est également omniprésent, comportant la recherche d un diabète de type 2, d une hyperlipidémie souvent mixte, et enfin d une hyperuricémie responsable de crises de goutte ou de colique néphrétique. Le bilan biologique permet d évaluer la présence des facteurs de risque les plus fréquents. On rappellera les chiffres-clés anormaux concernant les lipides (cholestérol total > 5.20 mmol/l et fractions HDL/LD et triglycérides après 12 h de jeûne > 1.70 mmol/l), la glycémie à jeun > 7 mmol/l à 2 reprises et HbA1c sans oublier la créatininémie et un bilan hépatique minimal comportant transaminases, gamma-gt, ferritinémie. La recherche éventuelle d une cause favorisante à l obésité (hypothyroïdie, cushing, insulinome) sera discutée au cas par cas. Le risque hépatique, sous-évalué jusqu à ces dernières années, connaît un regain d intérêt dû à la sévérité des complications cirrhogènes tardives [5,14]. Il est associé au syndrome X dit «d insulinorésistance» caractérisé par au moins 3 des 5 anomalies suivantes [6,10] : répartition androïde du tissu adipeux (périmètre abdominal > 88 cm chez la femme et > 102 cm chez l homme) ; 3

pression artérielle > 130/85 mmhg ; glycémie à jeun > 6.1 mmol/l ; triglycéridémie > 1.7 mmol/l ; HDL-cholestérol bas (< 1.3 mmol/l chez la femme et < 1 mmol/l chez l homme). Ce syndrome qui ne comprend l IMC est, pour l hépatogastroentérologue, intimement associé à la stéatose hépatique, en particulier échographique. Il touche 50 % des personnes de 60-69 ans avec un risque cardiovasculaire 20 fois plus élevé qui doit être constamment présent à l esprit (schéma 1). L insulinorésistance est définie par une baisse de la capacité des tissus cibles (foie, muscle strié et tissu adipeux) à la réponse insulinique [6,10,12]. La stéatose hépatique est associée à une hyperinsulinémie qui répond au déclin de l insulinosensibilité, avant d aboutir à la défaillance des cellules bêta endocrines pancréatiques et au diabète de type 2. Elle se mesure par le clamp hyperinsulinique euglycémique, très sophistiqué et réservé aux études scientifiques. L index HOMA-IR est plus accessible ; il varie en fonction des valeurs de la glycémie et l insulinémie. Il est consultable sur : http://www.alfediam.org/pro/constantes.asp La mesure d un tour de taille pathologique ne requiert qu un simple mètre de couturière et se révèle aussi performante en pratique quotidienne! Adiposité abdominale (viscérale) Oxydation musculaire (Acides gras, glucose). Inflammat ammationmation. Risque lipidiqu pidique. Tr. Hémostas mostase. Microalbuminu lbuminurie SYNDROME POLYMÉTABOLIQUE Stéatose Risque CV 2 - Quelques notions physiopathologiques Comprendre le métabolisme hépatique des lipides, se faire une idée simple des mécanismes impliqués dans la stéatose et sa complication majeure : la stéatohépatite, nous permet une meilleure prise en charge clinique de l obésité pour expliquer à nos patients ce qui se passe dans leur foie. D après D. Larrey [9], 4 facteurs favorisent l accumulation des Acides Gras Libres (AGL) dans le foie : augmentation de la captation des acides gras libres d origine alimentaire ou provenant du tissu adipeux ; augmentation de leur synthèse endogène ; défaut d exportation sous forme liée (VLDL : Very Low Density Lipoprotein) ; et enfin : diminution de leur catabolisme mitochondrial. Les mitochondries sont, en effet, fondamentales pour produire de l énergie en oxydant les acides gras par deux systèmes, la bêta-oxydation et la phosphorylation oxydative (transformation d ADP en ATP). Tous les dysfonctionnements de ces systèmes métaboliques induisent une altération des fonctions hépatiques pouvant conduire à la stéatohépatite non alcoolique [13]. Deux étapes essentielles sont indispensables à son apparition [8] (schéma 2) : 1) la constitution de la stéatose par l hyperinsulinisme qui stimule la lipolyse à partir du tissu adipeux et perturbe le métabolisme hépatique des AG ; 2) la NASH résulte ainsi du stress oxydatif induit par un excès d espèces réactives de l O2 provenant de 2 sources (activation cytochrome P-450 et altération chaîne respiratoire) et, selon l étiologie, de l hyperproduction d endotoxines (pullulation microbienne intestinale). Le stress oxydatif, secondaire à un excès d espèces réactives de l O2 (surproduction et / ou déplétion en agents anti-oxydants) induit, lorsque les mécanismes de régulation sont dépassés, une peroxydation lipidique accrue déréglant la production énergétique mitochondriale, la libération de cytokines cytotoxiques et l expression du Fas ligand. Ces phénomènes sont à l origine de la mort hépatocytaire et des lésions cellulaires [16]. 4 SCHÉMA 1 1 Stéatose 2 insulinorésistance obésité diabète oxydation des acides gras peroxydation lipidique cytokines - fas-ligand stress oxydatif fer-alcool médicament SCHÉMA 2 Insulinorésistance stéatohépatite Endotoxines pullulation microbienne intestinale fibrose cirrhose cancer 3 - Quelques notions de clinique 3-1. Les symptômes digestifs qui amènent les patients à une consultation hépatologique sont, soit absents, soit non spécifiques (asthénie et dyspepsie, douleurs de l HCD). L examen clinique montre une hépatomégalie, parfois sensible, dans 75 % des cas. Les signes d insuffisance hépatocellulaire et/ou d HTP sont présents dans moins de 5 % des cas. On s attardera surtout à l appréciation de la surcharge pondérale de type androïde dont la prévalence varie de 40 à 100 %, sachant que 1/4 des obésités morbides ayant bénéficié d un PBH per opératoire lors d une chirurgie bariatique serait atteint de NASH en Amérique du Nord! Il ne faut cependant pas négliger la détection d une minime surcharge pondérale pouvant intervenir dans l approche étiologique d une cytolyse et d une augmentation des gamma GT [1,9,15,17]. 3-2. L interrogatoire élimine une consommation à risque d alcool, théoriquement inférieure à 20 g

d alcool pur par jour ; en réalité, moins de 21 doses / semaine chez l homme et 14 chez la femme. Le rôle de faibles doses d alcool sur l évolution des stéatoses reste inconnu. 3-3. La biologie hépatique montre des ALAT, parfois normales, oscillant entre 2 à 4 N, tandis que les ASAT sont en retrait, sauf en cas de cirrhose. Les gamma GT sont élevées jusqu à 10 N tandis que les phosphatases alcalines restent normales. Les données récentes concernant le Fibrotest semblent intéressantes et méritent encore d être évaluées à large échelle avant d être appliquées en pratique courante. Il en va de même de la transferrine désialylée pour affirmer un éthylisme sous-jacent. L hyperferritinémie est souvent modérée (jusqu à 1 000 ng/ml) et constitue un motif fréquent de consultation. Le coefficient de saturation de la transferrine, souvent normal, élimine l hémochromatose. S il est supérieur à 45 %, l exploration du gène HFE est indiquée [8]. Les anomalies du métabolisme glucidique (hyperglycémie/intolérance/diabète) s observent dans 20 à 75 % des cas. Enfin, la recherche d une hypertriglycéridémie isolée ou mixte termine le bilan biologique. Celui-ci s assurera de l absence des virus VIH, B et C, des auto-anticorps, voire d une baisse de l alpha 1 antitrypsine ou de la ceruléoplasmine. 3-4. L imagerie hépatique Les données de l échographie recherchent la stéatose donnant une hyperéchogénicité typique, si la stéatose histologique est supérieure à 30 % et s il n existe pas de fibrose sous-jacente posant ainsi le problème d une sensibilité et spécificité de cette donnée ; la recherche de signes indirects de cirrhose (dysmorphie du foie et HTP par écho Doppler du tronc porte) ; l échographie élimine également une pathologie des voies biliaires, notamment une lithiase vésiculaire ou cholédocienne dont la fréquence est accrue chez l obèse. La place d une imagerie complémentaire par scanner se discute en cas d image atypique et l intérêt de l IRM réside dans le diagnostic des surcharges en fer et le suivi des patients (dépistage CHC). L élastographie hépatique verra là un indéniable champ d application si les études en cours confirment son utilité dans la recherche d une fibrose hépatique. En définitive, le diagnostic de stéatose et / ou stéatohépatite regroupées sous le terme anglo-saxon de NAFLD (Non Alcool Fatty Liver Disease), est suspecté sur un contexte particulier, polymétabolique (syndrome d insulinorésistance) qui peut être discret, digestif (diverticulose jéjunale, résection étendue du grêle et chirurgie bariatique) et, enfin, médicamenteux (tableau 1). Néanmoins, à l heure actuelle, seul un tableau histologique superposable à celui de la MAF permet de caractériser cette affection. 3-5. La classification histologique de la NAFLD [7], élaborée en 2003, reprenant les critères de E.M. Brunt, a reçu un accueil favorable des pathologistes français et devrait servir de trame aux comptes rendus des PBH, comme c est le cas du score Métavir dans les hépatites chroniques (schéma 3). TABLEAU 1 : LES ÉTIOLOGIES DES NASH Causes métaboliques et nutritionnelles Principales : Obésité 70-75 % Diabète 40-50 % Hypertriglycéridémie 40-50 % Autres : Dénutrition prolongée Alimentation parentérale Courts-circuits digestifs Gastroplastie pour obésité morbide Résection étendue du grêle Causes non métaboliques Médicaments : Corticoïdes, méthotrexate, asparaginase, tamoxifène, amiodarone Perhexiline, nifédipine, diltiazem, chloroquine, hycanthone Agents toxiques : Huiles toxiques Diméthylformanide Divers : Lipodystrophie des membres a-bêta lypoprotéinémie Maladie de Weber Christian Diverticulose avec pullulation microbienne Les aspects typiques sont représentés par une stéatose macro et/ou microvésiculaire, gradée de 1 (< 33 %) à 3 (> 66 %), une inflammation lobulaire mixte (polynucléaire ou lymphocytaire) et des lésions dégénératives hépatocellulaires (ballonisation +/- nécrose), prédominant dans la zone centrolobulaire. La quantification de la fibrose est souvent associée au stade floride de la NASH. Les aspects atypiques concernent les lésions nécrotiques, lymphocytaires et une fibrose portale isolée, l association avec les lésions du VHC, une cirrhose inactive ou une surcharge en fer de distribution hépatocellulaire et küpfférienne [5,14]. Des facteurs indépendants de fibrose hépatique sévère sont rapportés chez les obèses américains (IMC > 30) avec un rapport ASAT/ALAT > 1 et la présence d un diabète. Chez les sujets européens (IMC > 25), l IMC > 28, les ALAT > 2 N, les TG > 1,7 umol/l semblent trois notions importantes à considérer avec, sur les deux continents, un âge supérieur à 50 ans [1,15]. Ces notions ont été remises en question lors de la dernière réunion de l AASLD. Sur 100 patients de la Mayo Clinic (Adams), après un suivi de 36 +/ 39 mois et l exclusion de 17 cirrhoses, on retrouve 5

COMMENT APPRÉCIER LA GRAVITÉ D UNE STÉATOPATHIE? Activité nécro-inflammatoire et extension de la fibrose Brunt EM Am J Gastroenterol 99. Classification de la NAFLD Hepatology 2003 Grade 0 = absence d activité Grade 1 = activité nécro-inflammatoire minime Grade 2 = activité nécro-inflammatoire modérée Grade 3 = activité nécro-inflammatoire sévère Stade 0 = absence de fibrose Stade 1 = fibrose centrolobulaire Stade 2 = fibrose centrolobulaire avec fibrose portale Stade 3 = fibrose en pont focale ou extensive Stade 4 = cirrhose +/- f ibrose périsinusoïdale résiduelle SCHÉMA 3 55 % de lésions stables, 29 % d aggravation (> 1 grade de fibrose selon Brunt) et 16 % de régression. Aucune variable clinique ou biologique prédictive d une évolution fibrosante n est retrouvée et les lésions initiales les moins fibrosantes ont le plus grand potentiel d aggravation! L étude argentine (Alvarez) retrouve, sur 22 patients, une progression fibrosante de 32 % à 4,3 ans avec le rôle essentiel de l IMC, contre 10 % pour Saksena, sur 27 patients suivis 8 ans. D autres études prospectives, notamment européennes, nous apporteront des éléments importants pour discuter l indication de PBH chez nos patients. Celle-ci peut être proposée lorsque le diagnostic étiologique d une cytolyse reste incertain avec IMC > 25 ou si un diabète et un syndrome d insulinorésistance sont présents. De même, lorsqu une cytolyse > 1.5 N ne s améliore % Stéatose pas sous régime ; lorsqu une hyperlipidémie associée à une cytolyse nécessite un traitement curatif ; ou 12 lorsqu un patient stéatosique continue à prendre du poids après 50 ans et dans l évaluation d un traitement en cas de NASH fibrosante (intervalle entre 93 et 5 ans et selon histologie initiale?). Il s agit naturellement d indications théoriques et les endocrinologues sont plus restrictifs - 38 que % les hépatogastroentérologues 6 avec le risque de mésestimer le développement d une fibrose dont nous ne verrons les conséquences que quelques années plus tard Le développement 3 de marqueurs biologiques de fibrose ou de l élastographie devrait bientôt aider les cliniciens dans la pratique quotidienne. 6 indépendants de l âge et de l alcool. Dans l hépatite chronique C, la stéatose est viro-induite par le génotype 3 ; l obésité, le diabète et l hyperglycémie sont associés à plus de fibrose. Les obèses, indépendamment du génotype et d une cirrhose, ont 80 % de chance en moins de présenter une réponse virologique soutenue. EFFET DE LA PERTE DE 4 - Approche POIDS thérapeutique (-8%)( SUR LA STEATOSE HEPATIQUE ET L INSULINEMIE 4-1. L abord médical Les résultats de la prise en charge médicale sont globalement décevants avec une réduction pondérale Insulinémie de 5 % à 10 % du poids du corps initial en 6 mois, de qui base est mui/l rarement durable (www.afero.asso.fr et www. inpes.santé.fr) Les 20 mesures hygiéno-diététiques associent un exercice physique régulier, par exemple 60 mn de marche 5/7 jrs et régime hypocalorique progressif (< 1,6 kg/ semaine). 15 Leurs effets sont positifs sur les transaminases qui se normalisent, la stéatose et l insulinémie qui diminuent (graphique 1) mais la fibrose ne s améliore 10 que dans 50 % des cas. De plus, un amaigrissement rapide entraîne une aggravation de l inflammation portale et de la fibrose, voire une insuffisance 5 hépatique aiguë [3,4]. La liste des médicaments proposés dans le traitement des stéatohépatites est résumée dans le tableau 2 et 0 0 3-6. Les associations Avant morbidesaprès concernent surtout la MAF et les hépatites virales. Brièvement, dans repose actuellement sur la correction des troubles Avant Après métaboliques sous-jacents [3,4]. la maladie alcoolique du foie, la cirrhose des buveurs L emploi des hypolipémiants peut faire appel au excessifs obèses est supérieure à celle des non obèses TIIKKAINEN gemfibrozil M (Lipur Diabetes, ) 2003, à l atorvastatine 52: 703 (Tahor ), à consommation égale. L IMC et l hypertriglycéridémie sont des facteurs de risque de fibrose propre à ne pas sachant qu eux-mêmes ont un risque d hépatoxicité sous-évaluer.

EFFET DE LA PERTE DE DE POIDS ( 8 (-8 %) 8 %)% ) SUR SUR LA LA STEATOSE STÉATOSE HEPATIQUE HÉPATIQUE ET ET L INSULINÉMIE L INSULINEMIE % Stéatose S 12 9 6 3-38 % 20 15 10 0 0 Avant Après GRAPHIQUE 1 Insulinémie de base mui/l 5 Avant Après TIIKKAINEN M Diabetes, 2003;52:703 TABLEAU 2 : TRAITEMENTS PROPOSÉS DANS LES NASH 1 - Réduction pondérale progressive place de l Orlistat? 2 - Contrôle de l insulinorésistance et/ou du diabète Metformine Thiazoline-diones seules ou associées 3 - Correction d une hyperlipémie Gemfibrozil / Atorvastatine / Probucol? 4 - Phlébotomie en cas de surcharge ferrique 5 - Anti-oxydants Vitamine E / Bétaïne 6 - Cytoprotecteurs Acide ursodésoxycholique? La prescription de metformine est la base du traitement des troubles glycémiques et de l insulinorésistance (tableau 3). Une voie prometteuse est constituée par les thiazolines diones, nouvelle famille d antidiabétiques oraux (rosiglitazone, pioglitazone, ciglitazone). Ce sont des agonistes synthétiques de PPAR gamma (Peroxysome Proliferating Activating Receptor). Le récepteur PPAR gamma, exprimé dans le tissu adipeux et le foie, contrôle la transcription de gènes impliqués dans la sensibilité à l insuline, le métabolisme lipidique et les réactions inflammatoires. L AMM actuelle d Actos et Avandia implique l association avec la metformine utilisée à dose maximale mais la monothérapie est possible avec une prescription endocrinologique princeps. La faible prise de poids concomitante (3 / 4 kg) et l hépatotoxicité de la troglitazone, retirée du marché américain pour 18 cas d hépatite fulminante, doivent cependant inciter à la prudence. Parmi les «protecteurs hépatiques», l AUDC dont on attend le résultat d une vaste étude multicentrique américaine, paraît décevant sachant que l emploi du citrate de bétaïne, phénix ressurgi de ses cendres, et de la vitamine E anti-oxydante, n exposent pas à des effets secondaires. En conclusion, la plupart de ces traitements ont concerné de faibles effectifs de NASH, traitées en ouvert sur une durée médiane de 6 mois. L évaluation de ces études pilotes est souvent biologique mais aussi histologique sur les dernières publications. Les associations médicamenteuses et les études randomisées seront intéressantes suivant l exemple «Vit E et pioglitazone» évaluant l amélioration de l insulinorésistance. 4-2. Place de la chirurgie bariatique Après la polémique et les excès médiatiques qui ont secoué le monde médical, le rôle curatif de la chirur- TABLEAU 3 Auteur/année (réf) Traitement Nombre de malades Schéma d'étude Durée du traitement Tests hépatiques Histologie hépatique Caldwell Am J Gastroenterol 2001 Troglitazone (400 mg) 10 ouverte 6 mois Diminution des transaminases Amélioration nécrose, inflammation Marchesini Lancet 2001 Metformine (1500 mg) 20 ouverte 4 mois Diminution des transaminases non évaluée Sanyal Hepatology 2002 Pioglitazone (30 mg) +/ - vitamine E (400 mg) 21 randomisée 6 mois Diminution des ALAT dans les 2 groupes Amélioration stéatose et inflammation Satheesh Gastroenterology 2002 metformine 20 mg/kg/jr 25 ouverte 12 mois Diminution des transaminases non évaluée Neuschwander-tetri Hepatology 2003 Rosiglitazone (8 mg) 30 ouverte 11 mois Diminution des transaminases Amélioration stéatose, inflammation, fibrose Promrat Gastroenterology 2003 Pioglitazone (30 mg) 20 ouverte 11 mois Diminution des transaminases Amélioration stéatose, inflammation, fibrose 7

gie bariatique dans l obésité morbide fait progressivement son chemin, après la déception des ballons intragastriques. Cette chirurgie concerne les obésités morbides et résistantes aux traitements conventionnels ayant un BMI > 40 kg/m 2 ou un BMI > 35 kg/m 2 en cas de graves comorbidités associées [1]. Vingt mille (20 000) Français sur les 300 000 potentiels y ont eu recours! L évaluation préopératoire et la décision opératoire doivent être prises par une équipe multidisciplinaire incluant un psychiatre, un spécialiste en obésité, un anesthésiste en collaboration avec le médecin traitant. Cette chirurgie doit être pratiquée par un praticien expérimenté dans ce domaine et avec l aide d une équipe entraînée à l anesthésie-réanimation des sujets obèses. Différentes techniques sont disponibles suivant l expérience du chirurgien (schéma 4) utilisant, si possible, la voie cœlioscopique moins délabrante et mieux supportée : court-circuit biliopancréatique et court-circuit gastro-intestinal ou by pass gastrique qui ont la faveur des équipes américaines, gastroplastie verticale calibrée et cerclage gastrique ou anneau gastrique ajustable, techniques volontiers indiquées de prime abord par les chirurgiens européens. LES TECHNIQUES CHIRURGICALES L indication d anneau gastrique ajustable semble logique, mais non démontrée, en première intention : son effet est purement mécanique avec possibilité de moduler la perte de poids. On note l absence de carence nutritionnelle, sauf lors des vomissements secondaires persistants, et de NASH secondaire. Ses complications péri opératoires sont inférieures à 0.3 %. Ses complications à distance restent acceptables de 5 à 10 % ; elles sont liées au matériel et à la technique avec la dilatation de la poche gastrique supérieure ou la migration de l anneau. On note 80 % de bons résultats (perte de l excès poids > 50 %) si l IMC est compris entre 35 et 50. Ses contre-indications sont les troubles graves du comportement alimentaire (boulimie, syndrome du sirop d érable) et les troubles moteurs œsophagiens, ainsi que la cirrhose. Sur le plan hépatique, les autres interventions bariatiques posent plus de problèmes : les résultats de la gastroplastie chez 528 obèses montrent une diminution significative des ALAT, de la glycémie, des TG et de l insulinémie, une diminution de la stéatose (p < 0.001) mais une augmentation des lésions histologiques de NASH (p < 0.05). La dérivation gastrique est probablement plus vulnérante, tandis que le «by pass» jéjuno-iléal a été abandonné. Une réduction progressive du poids est préconisée pour éviter l aggravation des lésions hépatiques fibrosantes, et l anneau gastrique ajustable semble l intervention la plus adaptée pour éviter la cirrhose. L intérêt d une supplémentation en anti-oxydants devrait logiquement être évalué dans l indication hépatologique de NASH évolutive et fibrosante, résistante au traitement médical. CONCLUSION 8 Différentes interventions les plus pratiquées : A. Court-circuit bilio-pancréatique B. Court-circuit gastro-intestinal ou by pass gastrique C. Gastroplastie verticale calibrée D. Cerclage gastrique ou anneau gastrique ajustable. SCHÉMA 4 Il existe de nombreuses études non randomisées d interprétation difficile (ANAES) pour analyser les résultats de cette chirurgie dépendante d opérateurs plus ou moins entraînés. L étude SOS (Swedish Obese Subjects) prévue sur 10 ans compare 1 879 patients opérés colligés dans un registre national par rapport à un groupe témoin identique. Les résultats à 8 ans montrent une réduction pondérale stable ( 20 kg) alors que le poids des patients sous régime seul est en légère augmentation : 20 % du poids initial, pour le cerclage et la gastroplastie, 35 % pour le court-circuit gastrique. Les comorbidités (diabète, HTA) s améliorent spectaculairement avec un arrêt de tout traitement dans 50 % des cas [11]. La NASH n est pas spécifiquement liée à l obésité mais à l insulinorésistance, et la recherche d autres étiologies associées est importante. Elle nécessite une approche clinique pluridisciplinaire où la PBH reste le gold standard. Une meilleure identification des patients à risque de fibrose et le rôle de faibles doses d alcool nécessitent des études prospectives. Elle implique de futures stratégies thérapeutiques validées par des études contrôlées. Si «l ignorant affirme et le savant doute» disait Aristote, que fera l HGE libéral devant la pathologie hépatique de l obèse? Plusieurs notions s imposent : s intéresser tout d abord à la pathologie émergente des NASH ; s approprier les outils diagnostiques et thérapeutiques nécessaires ; travailler en équipe pluridisciplinaire ; et, enfin, intégrer les futurs essais cliniques. En effet, la «malbouffe» conduira bon nombre de patients chez les médecins qui sauront prendre en charge cette affection. L auteur adresse tous ses remerciements au Dr Vincent FRERING pour la relecture de l article, ainsi qu au Dr Michèle CHEVALLIER et au Pr Jacques BRINGER pour leurs conseils.

RÉFÉRENCES 1. ANAES. Service évaluation des technologies «Chirurgie de l obésité morbide de l adulte» mai 2000 2. Angulo P. Non-alcoholic fatty liver disease. N Engl J Med 2002; 346:1221-31 3. Angulo P., Lindor K. Treatment of non-alcoholic fatty liver: Present and emerging therapies. Sem Liver Dis 2001; 21:81-8 4. Cadranel J.-F. Stéato-hépatite non alcoolique : prise en charge thérapeutique. Gastroenterol Clin Biol 2003; 27:799-805 5. Caldwell S.H., Oelsner D.H., Iezzoni J.C., Hespenheide E.E., Battle E.H., Driscoll C.J. Cryptogenic cirrhosis: clinical characterization and risk factors for underlying disease. Hepatology 1999; 29:664-9 6. Chitturi S., Abeygunasekera S., Farell G.C., Holmes- Walker J., Hui J.M., Fung C., et al. NASH and insulin resistance: Insulin hypersecretion and specific association with the insulin resistance syndrome. Hepatology 2002; 35:373-9 7. Classification de la NAFLD. Hepatology 2003; 37: 1202-19 8. Deugnier Y., Moirand R. Hépatosidérose dysmétabolique et stéatose non alcoolique. Act Med Int Gastroenterologie 2000; 14:33-35 9. Larrey D. Stéato-hépatite non alcoolique : histoire naturelle et diagnostic. Gastroenterol Clin Biol 2003; 27: 793-795 10. Marchesini G., Brizi M., Tomassetti S., Bugianesi E., Lenzi M., et al. Non-alcoholic fatty liver disease: a feature of the metabolic syndrome. Diabetes 2001; 50: 1844-50 11. Narbro K., Agren G., Jonsson E., Naslund I., Sjostrom L., Peltonen M. Swedish Obese Subjects Intervention Study. Pharmaceutical costs in obese individuals: comparison with a randomly selected population sample and mog-term changes after conventional and surgical treatment: the SOS intervent study. Arch Intern Med 2002; 162:2061-9 12. Perlmuter L., Sélam J.-L., Collin de l Hortet G. Diabète et maladies métaboliques. Masson 4 e édition mars 2003 13. Pessayre D., Mansouri A., Fromenty B. Non alcoholic steatosis and steato-hepatitis V. Mitochondrial dysfunction in steato-hepatitis. Am J Physiol Gastrointest Liver Physiol 2002; 282:G193-9 14. Ratziu V., Bonyhay L., Di Martino V., Charlotte F., Cavallaro L., Sayegh-Tainturier M.H., et al. Survival, liver failure, and hepatocellular carcinoma in obesityrelated cryptogenic cirrhosis. Hepatology 2002; 35: 1485-93 15. Ratziu V., Bonyhay L., Charlotte F., Poynard T. Stéatohépatite non alcoolique. 1. Aspects cliniques. Hepato-Gastro 2002; 9:191-8 16. Ratziu V., Fromenty B., Poynard T. 2. Aspects physiopathologiques. Hepato-Gastro 2002; 9: 199-207 17. Reid A.E. Non alcoholic steatohepatitis. Gastroenterology 2002; 121:710-23 Réunions importantes L AFEF du 29/09 au 2/10 à Paris avec comme thème FMC : le foie dans les maladies générales et situations pratiques en hépatologie. Le congrès américain d hépatologie (AASLD) du 29/10 au 02/11 à Boston. 9

Fer et Foie Patrick DELASALLE (Grasse) I - PHYSIOLOGIE ET CLINIQUE DU FER Le fer est un oligoélément indispensable à la vie. Il a une place importante dans notre spécialité, les déficits en fer sont plutôt du domaine de la gastroentérologie ; les surcharges : de l hépatologie. 1) Comment se répartit le fer dans l organisme? Un organisme normal contient en moyenne 4 grammes de fer dont 1 gramme dans le foie stocké à 95 % sous forme de ferritine ; l hémoglobine (donc le sang) 2.5 g, soit la plus grande partie. La seule régulation physiologique connue possible est une variation de l absorption, seuls 10 % du fer sont absorbés : soit 1 mg par jour équilibrant les pertes quotidiennes de 1 mg. 3) Comment est absorbé le fer? Le fer alimentaire est absorbé par les entérocytes matures, présents au sommet de la villosité duodénale. Après réduction du Fe 3+ en Fe 2+ par Dcytb, une réductase membranaire, le fer est successivement transporté à l intérieur des entérocytes par le transporteur DMT1, transféré à la membrane basolatérale et transporté à travers celle-ci grâce à un deuxième transporteur membranaire, la ferroportine1. Il est ensuite oxydé en Fe 3+ par l héphaestine, une ferroxydase membranaire cuivre dépendante et, une fois dans la circulation sanguine, il se lie à la transferrine. DMT1 ferroportine 1 Réductase, Dcytb Ferroxydase, héphaestine 1 - Absorption du fer 2) L hepcidine : hormone de régulation de l absorption du fer? La régulation de l absorption du fer est probablement d origine hormonale, récemment un candidat sérieux a été proposé : l hepcidine. L hepcidine est un polypeptide antimicrobien expliquant son augmentation de production en cas de syndrome inflammatoire. La production est effectuée au niveau du foie. Une augmentation de production de l hepcidine se produit en cas d inflammation ou de surcharge en fer entraînant une baisse d absorption 10 du fer et une entrée du fer dans les macrophages ; à l inverse, en cas de régime pauvre en fer, d anémie, d hypoxie ou sous l effet de l alcool, le fer est libéré des macrophages et l absorption du fer augmente. L hepcidine ou un agoniste pourrait, dans un avenir proche, être utilisé en thérapeutique pour son effet hyposidérémiant dans les surcharges en fer secondaires (maladies hématologiques), ou devenir le futur traitement de l hémochromatose. Les antagonistes de l hepcidine pourraient être utiles dans les anémies inflammatoires.

Anémie Hypoxie Régime pauvre en fer Alcool Inflammation Surcharge en fer macrophage 2 - Hepcidine : hormone de régulation du fer 4) Quelle est la toxicité du fer? En excès, le fer est toxique car il réagit fortement avec l oxygène en produisant des radicaux libres susceptibles d induire des lésions tissulaires. C est pourquoi, les organismes ont développé différents systèmes pour éviter toutes formes libres du fer, en particulier, la ferritine : protéine cytoplasmique de stockage du fer qui peut lier jusqu à 4 500 atomes de fer et la transferrine : protéine de transport du fer plasmatique qui lie deux atomes de fer. Les excès de fer, d autre part, modulent l expression des gènes cellulaires. La fibrose hépatique, suivie d une cirrhose et d un hépatocarcinome, est la conséquence des excès de fer la plus connue. L incidence des cancers extradigestifs est aussi augmentée ainsi que l accroissement des maladies cardiovasculaires, mais ce dernier point est controversé. 5) Comment explorer le statut martial d un patient? Les trois dosages à demander en routine permettant d explorer le statut martial sont : le fer sérique, la transferrine et la ferritine. Ces dosages permettent de calculer le coefficient de saturation. Capacité totale de fixation (µmol/l) = transferrine (g/l) 25. Coefficient de saturation (%) = fer sérique (µmol/l) / capacité totale de fixation (µmol/l). Coeff. de saturation = Fer sérique (µmol/l) Cap tot. fix. 6) Comment rechercher une surcharge en fer? En cas de suspicion de surcharge en fer, on effectuera un examen clinique et des dosages sanguins : NFS ALAT ASAT CRP fer sérique saturation de la transferrine et ferritinémie. On éliminera les augmentations du fer sérique et / (ou) de la saturation de la transferrine sans surcharge en fer par cytolyses (foie, muscle, hématies) ou diminution de la transferrine (insuffisance hépatocellulaire, syndrome néphrotique). On éliminera les augmentations de la ferritine sans surcharge en fer par cytolyse ou augmentation de la synthèse de la ferritine : activation macrophagique syndrome inflammatoire+++, etc. alcoolisme chronique+++ tumeurs syndrome hyperferritinémie-cataracte Alcool Cytolyse Ferritine sanguine Fer Protéine coquille d œuf Activation macrophagique macrophage 4 - Les principales étiologies de l augmentation de la ferritine 7) Comment mesurer la surcharge en fer? La méthode de référence reste la ponction biopsie hépatique avec mesure sur foie sec. Pour un foie normal n < 36 µmol/g foie sec et le rapport (concentration hépatique de fer) CHF/âge < 2. La quantification peut se faire facilement actuellement par IRM après réglage de l appareil, en 2 à 3 séquences en écho de gradient, le calcul est effectué, soit avec un logiciel, soit sur le site Internet de Yves Gandon : http://www.radio.univ-rennes1.fr Les clichés ci-après sont issus de ce site. Carence Fer sérique Capacité latente Etat physiologique Capacité totale de fixation Surcharge Foie normal Surcharge marquée chf = 120µmol/g Faible surcharge chf = 50µmol/g Surcharge importante chf = 350µmol/g 3 - Mode de calcul du coefficient de saturation et évolution en fonction de l état martial 5 - Mesure de la surcharge ferrique par IRM 11

II - L HÉMOCHROMATOSE Une augmentation de la ferritine associée à une augmentation du coefficient de saturation et une homozygotie C282Y permettent d affirmer le diagnostic d hémochromatose. On estime à 180 000, les personnes atteintes en France entraînant 2 000 décès par an, 170 000 ignoreraient leur diagnostic! L hémochromatose répond aux critères de l OMS concernant les maladies nécessitant un dépistage. La mutation du gène HFE entraîne la formation d une protéine HFE mutée modifiant la programmation effectuée au niveau de la crypte des entérocytes ; cette programmation aberrante explique l hyperabsorption du fer au niveau de l apex des entérocytes. 12 Programmation Programmation aberrante Transporteur DMT1 Fe Lumière duodénale crypte RTf Transporteur DMT1 Fe Lumière duodénale crypte RTf Entérocyte Protéine HFE Entérocyte Protéine HFE Apex Absorption Maturation entérocytaire Apex Hyperabsorption Maturation entérocytaire 6 - Maturation aberrante des entérocytes secondaire à la protéine HFE mutée L histoire naturelle de l hémochromatose comporte 3 phases : un stade 0 de latence où seule l homozygotie génétique est retrouvée ; le stade 1 des anomalies biologiques avec l augmentation du fer sérique puis du coefficient de saturation suivi de la ferritine ; et le stade 2 des signes cliniques stade tardif de diagnostic à un âge moyen de 50 ans. Stade 0 : Expression génétique Stade 1 : Expression biologique Stade 2 : Expression clinique Stade 0 Stade 1 Stade 2 7 - Les 3 stades de l hémochromatose 25 10 10 30 65 60 0 50 100 Femme Homme On évoquera le diagnostic devant une asthénie isolée, une arthropathie ou une élévation modérée des transaminases mais, actuellement, le diagnostic est de plus en plus effectué après des anomalies biologiques du fer ou un dépistage familial. 70 60 50 40 30 20 10 0 Asthénie Athralgies Pigmenta... Femme Homme Cœur Cirrhose 8 - Signes cliniques de l hémochromatose Diabète 1) Sur quel test biologique doit-on évoquer une hémochromatose? La saturation de la transferrine est le test phénotypique le plus sensible. Le seuil de 45 % est le chiffre au-dessous duquel il est inutile d effectuer une recherche de mutation du gène HFE. L intérêt de la ferritine est que, dans l hémochromatose, elle est proportionnelle au stock martial. 2) Comment faire le diagnostic positif génétique? Les mutations du gène HFE C282Y +/- H63D se recherchent sur un simple bilan sanguin dans un laboratoire de génétique moléculaire agréé. Cette recherche n est pas inscrite à la nomenclature ; elle est soumise aux règles de tout test génétique nécessitant un conseil génétique, un consentement écrit et, en cas d anomalie, seul le probant peut prévenir sa famille dans le cadre d un dépistage familial. 3) Traitement curatif de l hémochromatose Les saignées régulières constituent le seul traitement de l hémochromatose ; elles peuvent être réalisées au domicile, en cabinet, dans les centres de Santé mais très souvent en hospitalisation de jour. On débutera par 400 à 500 ml par semaine à moduler suivant l état cardiovasculaire puis 300 à 500 ml tous les 1 à 3 mois à vie. Les buts à atteindre sont une ferritinémie < 50 µg/l puis une saturation de la transferrine <20%. La gravité de l hémochromatose dépend de la présence ou non d une cirrhose, le diagnostic doit donc être systématiquement recherché. Les facteurs prédictifs de fibrose hépatique sévère sont : Ferritine > 1000 et/ou une augmentation des transaminases et/ou une hépatomégalie. Si l un de ces critères est présent, une ponction biopsie hépatique doit être réalisée pour éliminer une cirrhose qui nécessiterait une surveillance semestrielle par échographie hépatique et dosage de l alphafœtoprotéine.

60 50 40 30 20 10 0 Asthénie Arthralgies Cœur Diabète Peau Régression Aggravation 1) L hépatosidérose dysmétabolique Dans la fin des années 1990, l équipe de Rennes des P rs Brissot et Deugnier a mis en évidence des patients présentant une surcharge hépatique en fer inexpliquée sans mutation du gène HFE. La surcharge en fer est liée à une insulino-résistance. Cinquante pour cent (50 %) des patients ont un foie normal, 50 % une stéatose avec 25 % de stéatohépatite et 12 % de fibrose sévère. 9 - Evolution des signes cliniques après saignées dans l hémochromatose 120 100 Surcharge en fer inexpliquée 50 % Foie 25 % Stéatose 25 % Stéato hépatite Fibrose stade 3 stade 4 12 % 80 60 40 20 0 Diabète Cirrhose Cœur HCC 10 - L hépatocarcinome (HCC) : principale cause de mortalité dans l hémochromatose 12 - Histologie des patients présentant une surcharge en fer inexpliquée Chez les patients présentant une stéatohépatite, une partie de ces patients présente une surcharge en fer. L association d une stéatohépatite et d une surcharge en fer a permis de décrire un nouveau syndrome : l hépatosidérose dysmétabolique. HFE 1 HFE 2 HFE 3 HFE 4* Nom Néonatale Chromosome 6p 1q21 7q22 2q32 19q13 C282Y H63D Inconnue (juvénile) RTf2 Mutation ferroportine 1 inconnue Type de mutation Mutation hepcidine Acéruloplasminémie 11 - Autres mutations génétiques III - LES SURCHARGES EN FER NON HÉMOCHROMATOSIQUES Fréquence ++++ +/- +/- + +/- +/- +/- Ces surcharges sont fréquentes ; elles peuvent être en rapport avec des apports excessifs, soit per os (cyclistes), soit post transfusionnelles, dans le cadre de maladies hématologiques (thalassémie, sphérocytose héréditaire ). L hépatologue sera plutôt confronté au syndrome polymétabolique de description récente avec une incidence croissante et les maladies chroniques du foie souvent associées à une surcharge en fer. Surcharge en fer inexpliquée Hépatosidérose dysmétabolique 13 - Hépatosidérose dysmétabolique Non alcoolique Stéatohépatite L hépatosidérose dysmétabolique se traduit, soit par aucun symptôme, soit par une asthénie ou des arthralgies, sur le plan biologique la ferritine est élevée ; en revanche, le coefficient de saturation est normal, la surcharge en fer est de l ordre de 100 micromol/g de foie sec. Cette surcharge en fer est présente dans un contexte métabolique avec une surcharge androïde, une hypertension artérielle, un diabète de type II, une dyslipidémie. Il s agit d une des causes les plus fréquentes d augmentation de la ferritine mais le taux de ferritine n est pas corrélé avec la surcharge en fer expliquant que quelques saignées espacées suffisent à baisser la ferritine. Le traitement de l hépatosidérose par saignées sera associé au traitement des troubles métaboliques et au traitement de la NASH. 13

2) Les surcharges en fer et maladies chroniques du foie De nombreuses maladies chroniques du foie sont associées à une surcharge en fer (foie alcoolique, porphyrie cutanée tardive, hépatite B, toute cirrhose ). L hépatite C chronique est associée à une surcharge en fer et une augmentation de la ferritine dans 20 à 35 % des cas, une augmentation de la fibrose avait été suspectée. Bien que les saignées entraînent une baisse des transaminases, aucune modification de la virémie et aucun bénéfice n ont été retrouvés avec l interféron classique. La surcharge en fer serait non spécifique de l hépatite C chronique et plutôt en rapport avec d autres cofacteurs (alcool, syndrome dysmétabolique ). En conséquence, il n existe pas de preuves suffisantes pour recommander des saignées en dehors des surcharges en fer importantes. CONCLUSION La génétique a révolutionné les connaissances sur l hémochromatose et la physiologie du fer. Un nouveau syndrome très fréquent a été décrit : l hépatosidérose dysmétabolique. Le traitement principal des surcharges en fer reste la saignée. De nombreux problèmes restent non résolus. Faut-il lancer un dépistage de l hémochromatose et comment? En dehors de l hémochromatose, quels sont les seuils de surcharge en fer nécessitant une saignée? RÉFÉRENCES Diaporama complet avec bibliographie sur le site du CREGG : http://www.cregg.org Site de radiologie université de Rennes : http://www.radio.univ-rennes1.fr Conférences des francophones : http://www.snfge.org Conférences de l AFEF : http://www.meditis.net/pagepro.asp 14

Cas cliniques : hépatite C Nathalie BOYER (Nanterre) Trois cas cliniques ont été proposés aux participants au 2 e forum d hépatologie libérale en décembre 2003. CAS CLINIQUE N 1 Madame M 50 ans, a été transfusée en 1973 au cours d une chirurgie. Elle ne fume pas et ne consomme pas d alcool. Les transaminases sont fluctuantes à 4-5N ; il est réalisé la recherche d anticorps anti-vhc qui sont positifs. Elle présente une multiplication virale C persistante (PCR- C+) avec un virus C de génotype 1. L échographie montre une dysmorphie hépatique. Il est réalisé une biopsie hépatique qui retrouve un score Métavir A2 F4. La fibroscopie est normale ainsi que le dosage d alphafœtoprotéine. Question n 1 : Que proposer? absence de traitement et dépistage du CHC ; traitement antiviral. Parmi l assistance interrogée, 13 % seulement étaient en faveur d un simple dépistage du carcinome hépatocellulaire avec une absence de traitement, alors qu une large majorité (88 %) était en faveur d un traitement antiviral chez cette patiente jeune, bien qu elle présente déjà une fibrose importante avec présence d une cirrhose, un virus C de génotype 1 et une contamination assez ancienne. Cette patiente reçoit en 2001 un traitement par association interféron pégylé et ribavirine. Le ViraferonPeg est administré à la dose de 1,5 µg/kg/semaine pendant 16 semaines, puis diminué à la dose de 1 µg/kg pendant les 32 semaines suivantes en raison d une neutropénie. Le Rebetol à la dose de 1000 mg/jour est poursuivi pendant les 48 semaines. La tolérance clinique est moyenne avec, en particulier, une importante asthénie. Sur le plan biologique, elle présente une nette diminution des transaminases de 5N à 1,2N au cours du traitement. Elle ne présente pas de réponse virologique puisque l ARN du VHC par PCR est positif en fin de traitement. Après l arrêt du traitement, les transaminases remontent à environ 4N. La surveillance est poursuivie et, en 2003, les transaminases restent stables aux alentours de 4 à 5N. Question n 2 : Quelle attitude avoir? attendre les nouveaux traitements ; envisager un retraitement. A ces deux questions, l avis des membres de l assemblée était plus partagé puisque 40 % préféraient attendre l arrivée des nouveaux traitements alors que près de 2/3 (60 %) préféraient envisager un retraitement dès maintenant. Question n 3 : Si un retraitement est décidé, lequel proposer? retraiter par bithérapie interféron pégylé + ribavirine ; retraiter par bithérapie avec induction d interféron pégylé ; retraiter au long cours par interféron pégylé 0.5 µg/kg/semaine ; retraiter au long cours par ribavirine seule. Dans la grande majorité des cas (73 %), les médecins présents préféraient envisager un traitement d entretien au long cours à la dose de 0,5 µg/kg/semaine en espérant l effet antifibrosant, alors que les retraitements par bithérapie pégylé étaient retenus, dans un nombre de cas beaucoup plus faible, aux doses classiques (15 %) ou avec induction d interféron pégylé (10 %). Un retraitement au long cours par ribavirine seule n était retenu que dans 2 % des cas. Discussion Un avis était donc demandé aux experts et, en particulier, au Pr Christian TREPO (CHU Lyon), qui ont pu répondre aux questions de la salle. A la question de savoir s il fallait traiter les patients avec cirrhose, la réponse a été positive, si elles sont compensées et actives. Il a été rappelé que 40 à 55 % des malades cirrhotiques présentaient une réponse virologique à la bithérapie pégylé avec, chez certains, une diminution de la fibrose, voire une régression de la cirrhose. A l inverse, si la cirrhose est décompensée d une part, les risques de complication sont majorés et il faut, par ailleurs, envisager le traitement dans la problématique globale d une éventuelle transplantation ultérieure. Il semble raisonnable d envisager le retraitement des malades avec hépatite chronique C «non répondeurs virologiques» à un premier traitement par association interféron et ribavirine, dans certaines conditions. En effet, chez un certain nombre de ces malades, il existe une efficacité partielle du traitement, appréciée sur la «réponse biochimique», comme c était le cas chez cette malade. Ceci est d autant plus vrai que les malades présentent une maladie évoluée, avec une fibrose extensive ou une cirrhose, puisque ce sont ceux-là qui risquent le plus d évoluer, à court ou moyen terme, vers des complications graves. On peut donc envisager un retraitement avec l idée de diminuer l activité histologique et d obtenir un effet antifibrosant, voire de diminuer le risque de survenue de carcinome hépatocellulaire, comme cela a pu être suggéré dans un certain nombre d études. 15

Il est bien sûr utile de vérifier qu il n existe pas de risque d effets secondaires graves au cours d un traitement prolongé, en particulier, rechercher des commodités pertinentes en dehors du tabac et de l alcool (dysthyroïdie, maladie auto immune, co-infection ). Dans ces conditions, en tenant compte de la tolérance, le bénéfice semble supérieur au risque. Concernant les modalités de retraitement chez un patient non répondeur virologique, s il est vrai que la probabilité d éradication virale est probablement faible, elle semble non nulle aux alentours de 10 %. La stratégie devra être choisie en fonction du risque d intolérance et de la démotivation possible du malade (avec un vécu difficile lié à l échec) dans l idée de normaliser les transaminases et de diminuer l activité. L option du traitement d entretien a été retenue par la conférence de Consensus 2002 puisqu il existe de nombreuses études en faveur d un bénéfice sur la fibrose et sur l incidence du carcinome hépatocellulaire ; celui-ci étant corrélé à la diminution du taux de transaminases, il semble qu il faille rester prudent et la dose n est pas clairement définie entre 0,5 et 1µg/kg/semaine. Il faut savoir optimiser la tolérance pour privilégier la durée au besoin pendant plus de deux à trois années. Plusieurs études sont en cours pour essayer de compléter la réponse à ces questions. Les autres possibilités de mode de retraitement ont été abordées. Le changement d interféron pégylé semble être une tentation «de facilité» mais il n existe aucune donnée concernant l avantage d un interféron par rapport à l autre, et il faut se méfier des faux espoirs pouvant être donnés au malade. En ce qui concerne les doses d induction, leur utilisation n est pas recommandée en dehors de protocole. Il existe des difficultés de tolérance (ce qui semble être le cas de notre cas clinique, puisque déjà les doses d interféron avaient dû être diminuées en raison de la neutropénie), et les espoirs de réponse virologique prolongée semblent faibles. Enfin, le traitement par monothérapie de ribavirine peut être un bon compromis à envisager en cas de contreindication ou d intolérance à l interféron malgré la persistance de la virémie ; il existe une diminution de l inflammation et quelques études semblent favorables à ce traitement envisageant une amélioration histologique. CAS CLINIQUE N 2 Monsieur P 35 ans, ancien toxicomane, reçoit un traitement par Subutex (4 mg/jour) depuis deux ans. Il persiste la prise de quelques rares injections IV d héroïne. Sa consommation d alcool qui a nettement diminué est actuellement de 60 g/jour. Il présente un syndrome anxiodépressif pour lequel il reçoit un traitement par Seropram, Seresta 50 et 1 mg de Rohypnol par jour. Sur le plan virologique, il existe une infection VIH connue depuis 1993 ; il est traité depuis un an par association Combivir (AZT + 3TC) et Viramune (Névirapine). Les T4 sont à 500/mm 3 et la charge virale VIH inférieure à 50 copies/ml. Il existe, par ailleurs, une co-infection par un virus C de génotype 3, connu depuis 1995. Une biopsie hépatique montre un Métavir A2 F2 et l échographie est normale. 16 Question n 1 : Que proposer? absence de traitement VHC ; bithérapie interféron pégylé + ribavirine d emblée ; prise en charge des comorbidités puis bithérapie. Très peu de médecins interrogés envisageaient l absence totale du traitement du VHC (8 %) ; alors que dans une proportion égale, respectivement 47 et 45 %, il était envisagé soit une bithérapie par interféron pégylé et ribavirine d emblée, soit ce traitement après une prise en charge des comorbidités. Question n 2 : Si la prise en charge des comorbidités est envisagée, quelle attitude avoir? obtenir un arrêt complet de l alcool avant bithérapie ; envisager un sevrage par Subutex avant bithérapie ; éliminer une contre-indication et/ou modifier le traitement psychiatrique avant bithérapie ; modifier le traitement anti-vih avant bithérapie. Plus de la moitié des personnes interrogées pensent qu il faut éliminer une contre-indication ou modifier le traitement psychiatrique avant d envisager le traitement antiviral chez ce malade et près de 1/3 pensent qu il faut obtenir l arrêt complet de l alcool avant ce traitement. A l inverse, ils estiment que le traitement anti-vih ou par Subutex ne doit pas être modifié. Discussion Les discussions et réponses aux questions de la salle se sont ouvertes avec l aide des commentaires du Docteur Bernard NALET (CHG Montélimar). Il est reconnu que la co-infection VIH aggrave l infection VHC en augmentant la charge virale du VHC, en augmentant le risque de cirrhose (22 % vs 10 %) avec une survenue plus rapide (15 ans vs 20 ans). Cela est favorisé par une consommation d alcool supérieure à 50 g/jour et un taux bas des CD4, et entraîne un risque de surmortalité. Il semble donc clair qu un traitement soit indiqué mais que la prise en charge des comorbidités soit nécessaire : toxicomanie, alcoolisme, état anxio-dépressif, coinfection VIH. Il faut, bien sûr, différencier les anciens toxicomanes, les toxicomanes substitués et les usagers de drogues actifs. Si cette prise en charge multidisciplinaire est difficile, elle reste possible comme l ont démontré deux études française et allemande. Il est cependant vrai que le pourcentage de patients arrivant à poursuivre un traitement, complet, sans effet secondaire grave, est plus faible que dans la population non toxicomane. Elle demande donc une offre de soins adaptée à chaque patient, prenant en charge simultanément les différents problèmes. L arrêt de la consommation d alcool diminue la charge virale et améliore la réponse au traitement. En l absence d arrêt d alcool, le traitement peut être complet mais la réponse est moins bonne. Il semble donc raisonnable d essayer d obtenir un sevrage

prolongé avant de débuter le traitement. Cependant, en cas de fibrose importante ( F2), il faut le débuter dès que possible en tolérant éventuellement une consommation très modérée. Enfin, il a été prouvé que l interféron modifiait l activité des neuromédiateurs (sérotonine, tryptophane) et plusieurs études ont montré l intérêt du prétraitement des patients par les antidépresseurs. Des états dépressifs peuvent survenir au cours du traitement, même chez les patients n ayant pas d antécédent, et il faut rester très prudent et s appuyer sur des avis spécialisés avant de débuter le traitement. Il faut insister sur l importance de la poursuite, voire de l augmentation de la substitution au cours du traitement antiviral, afin de favoriser la stabilité psychique, de contrôler les symptômes physiques de manque (qui peuvent sembler accentués en raison des effets secondaires de l interféron) et de favoriser également la stabilisation de la consommation d alcool. Il n y a pas de contre-indication au traitement concomitant des infections VIH et VHC. Il faudra cependant tenir compte des interactions possibles de la ribavirine avec l AZT, le D4T et le DDI avec un risque majoré de survenue de cytopathies mitochondriales. Si les CD4 restent supérieurs à 350 éléments/mm 3, il est possible de débuter le traitement du VHC dans un premier temps (meilleure tolérance des antiviraux). Si les CD4 sont inférieurs à 200/mm 3, il est préférable de commencer par le traitement de l infection VIH et d envisager, dans un deuxième temps, après stabilisation, le traitement du VHC. CAS CLINIQUE N 3 Madame T 55 ans, 75 kg pour 1,75 m est infirmière libérale ; elle ne fume pas et ne consomme pas d alcool. Il a été trouvé chez elle une infection virale C de génotype 1 devant une élévation des transaminases, fluctuant entre 3 et 4N. Il est noté une hémoglobine à 11.5 g, une ferritine un peu élevée à 800 µg/l avec une saturation à 45 %. Question n 1 : Conduite à tenir? PBH ; Fibrotest ; bithérapie interféron pégylé et ribavirine d emblée. A cette question, la grande majorité des médecins consultés au cours du forum se sont prononcés en faveur de la réalisation d une biopsie hépatique (78 %), vs 16 % pour le Fibrotest. Très peu envisageaient un traitement d emblée chez cette patiente. La biopsie a été réalisée et montre un Métavir A2 F1 avec une stéatose présente dans 40 % des hépatocytes et une discrète surcharge en fer intrakupferrienne et intrahépatocytaire. Un diagnostic génétique d hémochromatose est négatif. Question n 2 : Que proposer? surveillance biologique et nouvelle évaluation de la fibrose dans trois à cinq ans ; bithérapie interféron pégylé + ribavirine d emblée ; prise en charge des co-facteurs puis bithérapie. Là encore, la prise en charge des co-facteurs a été retenue par la moitié des consultants alors que 1/4 d entre eux préféraient traiter par bithérapie d emblée ou réaliser une simple surveillance avec une nouvelle évaluation de la fibrose à distance. Question n 3 : Si la prise en charge des co-facteurs est envisagée, quelle attitude avoir? saignées puis bithérapie interféron pégylé et ribavirine ; proposition d amaigrissement sur une année, puis bithérapie pégylé ; saignées avec proposition d amaigrissement, puis bithérapie. Les consultants ayant été «brillamment informés» par les exposés de la matinée, ils n ont pas retenu l indication de saignées chez cette patiente. En revanche, la proposition d un amaigrissement avant traitement était retenue dans 3/4 des cas. Discussion La discussion s est ouverte avec l aide des commentaires du Docteur Hervé DESMORAT (gastroentérologue libéral - Toulouse). Il semble en effet important d avoir une évaluation histologique chez cette patiente dont la contamination (possiblement professionnelle) peut être ancienne, où il semble exister des co-facteurs liés au surpoids (NASH?) ou à une surcharge en fer. Enfin, ces résultats seront importants dans la décision d un éventuel traitement chez cette patiente de génotype 1, présentant une profession libérale où les arrêts de travail éventuels sont difficiles! La biopsie ou les tests biochimiques permettent d évaluer la fibrose d une part, l activité d autre part. La biopsie a par ailleurs l avantage de pouvoir évaluer l existence de co-facteurs : stéatose, surcharge en fer, ou lésions liées à l alcool, aux pathologies vasculaires, auto-immunes ou autres. Cependant, l absence de biopsie ne doit pas être un obstacle à la prise en charge thérapeutique du malade. Comme il a été noté, l excès de fer augmente le risque de survenue de cirrhose et serait un facteur associé de sévérité de l infection virale C. Les saignées diminuent l activité mais ne modifient pas la charge virale et le rôle dans la réponse au traitement n est pas clairement établi. Comme il a été également précisé, l excès pondéral augmente le risque de stéatose, de stéatohépatite, et est lié à un risque supérieur de fibrose. Il a par ailleurs été évoqué le fait que quelques études ont maintenant montré que le tabac pourrait être un co-facteur de risque d une maladie hépatique plus sévère. Il faut donc conseiller aux patients, avant traitement, de maigrir, d arrêter l alcool et peut-être bientôt le tabac! 17

Cas cliniques : hépatite B Denis OUZAN (Institut Arnault Tzanck - Saint-Laurent-du-Var) CAS CLINIQUE N 1 Il s agit d une femme de 43 ans, originaire de Tunisie et vivant en France depuis 15 ans, qui consulte en octobre 2003 pour une hépatite B découverte 3 ans auparavant. Elle ne présentait aucun symptôme. Son examen clinique était normal. Sa mère était décédée d une maladie non alcoolique du foie. Son conjoint était négatif pour l anti HBc. En septembre 2000, l antigène HBs et l anticorps anti HBe étaient positifs. Le taux d ALAT était normal à 14 (N : 5-40). La détection de l ADN du VHB a été réalisée par 2 techniques : hybridation moléculaire Murex : négative (seuil 10 8 copies/ml) ; PCR qualitative Sorin : positive (seuil 1 000 copies/ ml). En septembre 2003, la sérologie du VHB était inchangée, à savoir antigène HBs positif, anticorps anti HBe positif. Les transaminases étaient strictement normales avec des ALAT à 12 (N : 5-40). La recherche de l ADN du VHB réalisée par PCR qualitative (seuil entre 30 et 300 copies/ml) était positive. L anticorps anti Delta et l anti VIH étaient négatifs. Le diagnostic qui a été évoqué est celui d un portage inactif du VHB, malgré la présence de l ADN du VHB constatée à 2 reprises par PCR qualitative, alors que cette recherche s est révélée négative par hybridation moléculaire. Les arguments pour ce portage inactif sont : la présence de l anticorps anti HBe ; la notion de transaminases normales à 2 examens ; la négativité de l ADN du VHB par hybridation moléculaire ; et la négativité de l anti HBc chez l époux de cette patiente. Dans ce contexte, et de façon plus générale, la recherche de l ADN du VHB par PCR qualitative est de peu d intérêt. Il faut réaliser une PCR quantitative. Cette recherche a été réalisée par la méthode Cobas Amplicor Monitor Roche dont le seuil est de 200 copies/ml. Ce test a montré une valeur de 8 900 copies/ml ; par conséquent, une réplication virale très faible. La réalisation d une biopsie hépatique n a pas été jugée utile. Il a été proposé un suivi tous les 6 mois par un dosage des transaminases et une recherche de l ADN du VHB par PCR quantitative. Le conjoint de cette patiente sans enfant a été vacciné contre l hépatite B. Le travail le plus récent concernant les porteurs inactifs du VHB a été publié par Martinot-Peignoux et al. en 2002 [1]. Il s agissait d une cohorte de 85 patients antigène HBs positif et antigène HBe négatif. Chez tous les patients, la réplication du VHB était inférieure à 7.10 5 copies d ADN du VHB (qui correspond au seuil du test ADN branche Versant). Les transaminases étaient normales. Seuls, 16 % des 18 patients avaient une PCR quantitative négative, 84 % de ces patients avaient un taux moyen d ADN de 1 300 copies, 65 patients ont eu une biopsie hépatique qui a montré constamment des lésions minimes. Les recommandations de la Conférence Internationale de Consensus de Genève sur le portage inactif du VHB, étaient les suivantes [2] : un taux faible ou indétectable d ADN du VHB est associé à une maladie inactive ; la limite supérieure du taux d ADN du VHB qui est constamment associée à une maladie inactive, n est pas encore clairement définie ; un seuil provisoire de 10 5 copies a été proposé pour définir un taux d ADN du VHB ; lors du portage inactif du VHB, l antigène HBs et l antigène HBe sont toujours présents, associés à des transaminases normales ; il y a peu ou pas de lésions nécrotico-inflammatoires à la biopsie hépatique ; toutefois, le diagnostic d un porteur inactif du VHB ne peut être porté qu après avoir surveillé le taux des transaminases et de l ADN du VHB pendant 1 an ; le pronostic du portage inactif du VHB est bon et ce statut ne nécessite pas de traitement. CAS CLINIQUE N 2 Il s agit d un homme de 56 ans qui consulte, en septembre 1997, pour une cytolyse hépatique (ALAT = 4N) et un antigène HBs positif. On notait dans ces antécédents une hépatite B en 1988. Son examen clinique ainsi que son échographie abdominale étaient normaux. En novembre 1997, l antigène HBs était positif, l antigène HBe négatif, l anticorps anti Delta négatif, les transaminases étaient à 5N, le taux d HBV DNA était à 50 pg/ml en hybridation moléculaire. La biopsie hépatique révélait un score Métavir A3 F4. Le diagnostic retenu était celui d une cirrhose virale B à virus B mutant. Parmi les deux traitements interféron et lamivudine disponibles à cette époque, c est l interféron qui a été proposé. Le patient a reçu, pendant 1 an, un traitement par interféron à raison de 6 MU 3 fois par semaine. Pendant toute la durée de ce traitement (décembre 1997 à novembre 1998), les transaminases étaient normales, l ADN du VHB était négatif par la méthode Quantiplex (seuil = 7.10 5 eq/ml). A l arrêt du traitement par interféron en janvier 1999, on assistait à une rechute avec des transaminases à 5 fois la

normale et un HBV DNA par méthode Quantiplex à 72,8.10 5 copies. Devant cette rechute précoce, un traitement par lamivudine, à raison de 100 mg/j, a été prescrit de mars 1999 à septembre 2001, soit 30 mois. Pendant toute la durée du traitement, les transaminases vont être normales et l ADN du VHB < 7 10 5 cp/ml. Le suivi sans traitement d environ 2 ans (septembre 2001 à septembre 2003) a montré une stabilité de cette réponse avec des transaminases normales et un ADN du VHB < 7 10 5 cp/ml. Néanmoins, une PCR quantitative réalisée en mars 2003 sera faiblement positive, à 3 670 copies par le test Monitor. Cette observation appelle plusieurs commentaires : Il s agissait donc d une infection à virus B mutant, relativement sévère, avec une cirrhose constituée. La durée du premier traitement par interféron a été de 12 mois. Il a été montré qu un traitement de 24 mois pouvait entraîner un bénéfice supplémentaire dans cette indication [3,4]. Cependant, le pourcentage de réponse durable n excède pas 30 % des cas après 24 mois de traitement par interféron. La durée du second traitement (lamivudine) a été de 30 mois. La réponse à l arrêt du traitement par lamivudine s est révélée stable, après un suivi de plus de 2 ans. Il n y a pas eu, dans cette observation, d émergence de mutant. Néanmoins, le test de surveillance utilisé était moins sensible que ceux qui utilisent une PCR quantitative. A cet égard, la Conférence de Consensus de Genève avait émis l avis suivant : le taux d ADN du VHB qui est constamment associé à une réponse virologique significative, n est pas encore défini [2]. CAS CLINIQUE N 3 Il s agit d un homme de 38 ans qui consulte en juillet 1995 pour une hépatite B dont le début, en apparence aigu, remontait à environ 1 an. En juillet 1995, ce patient était antigène HBs et antigène HBe positifs. L anti Delta et l anti VHC étaient négatifs. Les transaminases étaient à 1.2N, l HBV DNA était < 2 000 pg/ml en hybridation moléculaire. La biopsie hépatique retrouvait un score de Métavir A1 F1. Compte tenu de la présence d une réplication virale intense, de transaminases subnormales et de lésions histologiques peu sévères, ce patient n a pas été traité. Cinq ans plus tard, en septembre 2000, il présentait le même profil virologique. La biopsie réalisée alors montrait un score Métavir A2 F2. Compte tenu de l intensité de la réplication virale, un traitement par lamivudine a été préféré à l interféron. Ce traitement a été administré à raison de 100 mg pendant 2 ans (sept. 2000 à sept. 2002). L ADN du VHB est devenu indétectable par le test Monitor dont le seuil est de 200 copies/ml. Les transaminases étaient normales. A l arrêt du traitement, il n y a pas eu de réactivation. La séroconversion HBe a été observée après 6 mois de traitement. Elle est restée stable à l arrêt du traitement, sans disparition de l antigène HBs. Il s agit donc d une observation d hépatite chronique B à virus sauvage dont l évolution a été tout à fait favorable sous lamivudine, avec l obtention d une séroconversion relativement rapide, stable dans le temps, sans argument biochimique ou virologique en faveur de l émergence de mutant YMDD. On sait maintenant que la lamivudine, molécule habituellement bien tolérée, favorise l émergence au cours du temps (70 % à 4 ans) de mutants résistants (YMDD ) qui s accompagnent d un rebond réplicatif puis cytolytique qui peut être dangereux en cas d hépatopathie évoluée [5]. L échappement à la lamivudine est sensible à l Adéfovir [6]. On dispose de moins de recul avec l Adéfovir mais les mutations semblent moins fréquentes (< 2 % en 2 ans) [7]. Par ailleurs, le traitement par lamivudine doit être poursuivi au minimum 6 mois après la réponse virologique (séroconversion HBe), faute de quoi on expose le patient à une rechute précoce [8]. L intérêt de l association lamivudine/adéfovir de première intention mériterait d être rapidement validé par un essai contrôlé. RÉFÉRENCES 1. Martinot-Peignoux M., Boyer N., Colombat M. et al. Serum hepatitis B virus DNA levels and liver histology in inactive HBsAg carriers. J of Hepatol 2002; 36:543-46 2. EASL Consensus Conference on Hepatitis B. J of Hepatol 2003; 39:S1-236 3. Lampertico P., Del Ninno E.,Viganò M. et al. Extended Interferon therapy increases hepatitis suppression and reduces liver-related morbidity of hepatitis Be antigen negative chronic active hepatitis B. Hepatology 2003; 37:756-63 4. Brunetto M.R., Oliveri F., Coco B. et al. Outcome of anti-hbe positive chronic hepatitis B in alphainterferon treated and untreated patients: a long term cohort study. J Hepatol 2002; 36:263-70 5. Lai C.L., Dienstag J., Schiff E. et al. Prevalence and clinical correlates of YMDD variants during lamivudine therapy for patients with chronic hepatitis B. Clin Infect Dis 2003; 36:687-96 6. Peters M., Hann H.W., Martin P. et al. Adefovir dipivoxil (ADV) alone and in combination with lamivudine (LAM) suppresses lam-resistant hepatitis B (HBV) replication: 16 weeks interim analysis. J Hepatol 2002; 36:suppl 6-7 7. Yang H., Westland C., Delaney W.E. et al. Complete genotypic and phenotypic analyses of HBV mutations identified in HBe Ag-negative chronic hepatitis B patients receiving 96 weeks of adefovir dipivoxil (ADV). Hepatology 2003; 38:705A 8. Dienstag J.L., Goldin R.D., Heathcote E.J. et al. Histological outcome during long-term lamivudine therapy. Gastroenterology 2003; 124:105-17 Cet ouvrage contient des informations médicales pouvant ne pas être en totale conformité avec les monographies internationales en vigueur dans certains pays. Les Editions ALN recommandent de se référer au texte officiel des Autorisations de Mise sur le Marché des produits concernés pour disposer d une information validée par les autorités médicales (exemple : dictionnaire VIDAL). 19

hépatologie Nous n'avons pas trouvé de remède contre les peines de cœur, mais pour ce qui est du foie et de l'hépatite C, nous progressons chaque jour. L'Hépatite C touche près de 600 000 personnes en France 1 et constitue un enjeu majeur de Santé Publique 2. Schering-Plough depuis 10 ans en a fait une priorité de recherche et a contribué au quotidien à l'information, à la prévention et à la prise en charge de l'hépatite C aux côtés de tous les acteurs de Santé Publique. Aujourd'hui, l'hépatite C chronique est "une maladie qui peut être guérie" 3. 1 Conférence Nationale de Santé du 27 mars 2001 2 Conférence nationale de santé 2001. Programme de santé présenté par Bernard Kouchner. 27 mars 2001 3 Campagne de presse nationale du Comité Français d'education pour la Santé, de l'assurance Maladie et du Ministère de l'emploi et de la Solidarité, Juin 2001 Nous partageons votre préoccupation pour la santé publique. 92, rue Baudin 92307 Levallois-Perret cedex - Téléphone : 01 41 06 35 00 - Site internet : www.schering-plough.fr