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Transcription:

DOSSIER LCR Editorial : c est maintenant qu il faut agir! Jean-Claude Delavigne, Rouge n 2036, 23 octobre 2003 Selon le président de la Mutualité Française, les cotisations des mutuelles augmenteront de 10% d ici au primtemps 2004. Cette hausse brutale sera essentiellement payée par les salariés, pour payer des soins que l assurance maladie ne va plus prendre en charge. Raffarin a beau prétendre qu il prend le temps de sa «réforme» Celle ci est déjà sur les rails. Il s agit de réduire le plus possible la part de l assurance maladie obligatoire et solidaire, au profit d un systéme laissant une place beaucoup plus grande aux assurances individuelles, et donc aux développement des inégalités devant les soins. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, discuté dans les jours qui viennent au Parlement réduit en effet la part des soins remboursés par l assurance maladie. Le forfait hospitalier passe de 10,5 à 13 euros. Certains actes chirurgicaux coûteux ne seront plus intégralement remboursés. Le contrôle des affections de longue durée et des arrêts de maladie va être renforcé. Ces mesures vont s ajouter au déremboursement de certains médicaments. En créant le Haut Conseil pour l avenir de l assurance maladie, Raffarin a donné le coup d envoi d une «nouvelle étape décisive» dans la destruction de la Sécurité sociale au profit d un système de protection sociale néolibérale. Le calendrier est fixé et les orientations sont données. Même si le gouvernement prétend recueillir l avis du Haut Conseil et aboutir à un «diagnostic partagé», la «feuille de route» remise le 13 octobre ne laisse aucune marge de manœuvre: les conclusions sont déjà données, avant même que les 53 membres ne se soient réunis. Il ne leur reste plus qu à mettre en musique la partition écrite par le gouvernement. Dans son discours, Raffarin situe parfaitement le niveau de l attaque portée. Rappelant les seize «plans de sauvetage» de la Sécurité sociale qui se sont succédé depuis 1977, il affirme la volonté du gouvernement de ne pas se limiter à des mesures conjoncturelles. Il ne s agit pas pour lui de «préparer un plan qui se contenterait de limiter les prestations ou d augmenter les cotisations pour rééquilibrer provisoirement les comptes en attendant le retour de la croissance» mais d une transformation radicale de la Sécurité sociale issue de 1945. Le «défaut structurel» est clairement désigné: «Le sentiment de gratuité de notre système de santé au moment où nous avons recours à lui nous fait méconnaître son coût réel.» Dès lors, «il y a des débats à ouvrir: quel est le juste équilibre entre solidarité collective et responsabilité individuelle? Faut-il couvrir dans les mêmes conditions une fracture du bras causée par une chute dans la rue ou par un accident de ski?». Le Quotidien du médecin ne s y trompe pas qui affirme: «Même s'il ne fait que poser la question, Jean-Pierre Raffarin a rouvert le débat, explosif mais nécessaire, sur le panier de soins, c'est-à-dire l'équilibre à inventer entre solidarité collective et responsabilité individuelle. Le chef du gouvernement suggère que certains risques devront être couverts demain par le privé. Comme le montrent les premières réactions, c'est le chapitre le plus périlleux de la réforme en préparation». Il s agit bel et bien de mettre en œuvre le rapport Chadelat, c est-à-dire la diminution de l assurance obligatoire et solidaire au profit de l assurance individuelle. Le calendrier du gouvernement est désormais calé. Le Haut Conseil doit remettre son rapport avant la fin de l année. La concertation puis la négociation avec les organisations syndicales auront lieu au début 2004. Les décisions seront ensuite annoncées avant l été, la période électorale devant garantir, dans l intervalle, la paix sociale. Raffarin ne cache pas sa volonté d éviter un nouveau grand mouvement pouvant déboucher sur une grève générale afin d aller le plus loin possible dans la recherche d un accord avec les confédérations syndicales et avec les dirigeants de la mutualité française. L offensive contre l assurance maladie est engagée. C est donc dès aujourd hui que la mobilisation doit se préparer. Quelques mois après les grèves et manifestations du printemps 2003, un silence absolu règne dans les confédérations syndicales. Alors que les salariés subissent chaque jour les attaques du gouvernement, elles entrent sur le terrain miné de la concertation à froid sur l assurance maladie. Pire: le signe lancé par la direction de la CGT avec la signature de l accord sur la formation professionnelle ne peut marquer la volonté de trouver un compromis «acceptable» avec le gouvernement sur l assurance maladie, au prix de quelques concessions. Le silence de la gauche plurielle est tout aussi assourdissant. Pourtant, la disponibilité à une grande mobilisation unitaire pour la défense de la Sécurité sociale existe. Des initiatives sont prises pour expliquer les enjeux de la réforme de l assurance maladie. La campagne lancée par l association Attac y joue un rôle important. Les syndicats et les salariés qui se sont mobilisés en mai-juin sont dans l attente de perspectives. Ils ont fait l expérience des coordinations interprofessionnelles capables de coordonner les luttes. C est avec eux que la LCR et ses militants préparent dès maintenant la grève générale nécessaire pour contraindre le gouvernement à reculer.

LA SANTE OU LES PROFITS Gislaine Rigaux, Rouge n 2037, 30 octobre 2003 Le Gouvernement a fini par faire voter sa réforme des retraites. Et bien que déstabilisé par la catastrophe sanitaire qui a touché les personnes âgées (souvent pauvres) l été dernier, il s attaque maintenant à l assurance maladie. Il veut briser la solidarité sociale basée sur des cotisations. Après avoir fait passer en force leur réforme sur les retraites, le Gouvernement et le MEDEF ne préparent pas seulement une attaque «de plus» contre l assurance maladie et l hôpital public. Ils veulent imposer un démantèlement complet de la protection sociale et du système de soins actuels, au profit d un système libéral où chacun accèderait aux soins qu il pourrait se payer. Les raisons invoquées sont multiples : l énorme déficit historique (créé de toute pièce), les «charges sociales» qui pèseraient trop sur les entreprises, le soit-disant déséquilibre démographique pour les retraites, la progression des dépenses de santé Tout ceci n est que prétexte. En fait, il s agit de baisser les coûts salariaux et de permettre aux assurances privées et aux spéculateurs de tout poil de récupérer une part importante de ce «marché» géré à ce jour par la Sécurité sociale. Rejetant le discours libéral «honteux» tenu tant par Juppé que par la Gauche plurielle sur la prétendue «maîtrise des dépenses de santé» le gouvernement Raffarin annonce désormais la couleur : la santé étant un marché (et même un marché très lucratif) il ne doit pas y avoir de limitation à la «consommation médicale», mais une limitation aux soins remboursés par l assurance obligatoire et les cotisations sociales. Pour le reste, sur le marché de la santé comme ailleurs, le «client» est roi et peut tout s offrir pourvu qu il ait les moyens de payer. Le cœur de la réforme libérale : le «panier de soins» Il propose la mise en place d un système «à 3 vitesses». Dans ce schéma l actuelle sécurité sociale, obligatoire pour tous, ne disparaît pas, mais elle est désormais réduite à la portion congrue, «filet de sécurité» minimum pour les pauvres et les maladies graves. (c est ce que J.Barrot appelait la couverture du «gros risque»). Cette assurance obligatoire devra donc être nécessairement complétée par une assurance complémentaire (mutuelle ou assurance) facultative qui permettra de couvrir les soins les plus courants. Afin de favoriser l accès des 20% de la population qui n ont pas d assurance complémentaires, l Etat apporterait une aide aux plus démunis. Toutefois, ces deux premiers étages de la couverture maladie ne rembourseront pas la totalité des soins, mais seulement la partie, définie en commun par la sécurité sociale, les mutuelles et les assureurs privé : cette liste, c est le «panier de soins». Hors de ce panier, il faudra alors (pour ceux qui le pourraient) s offrir une seconde couverture complémentaire, cette fois totalement à la charge de l assuré. Les conséquences de cette «réforme»? La partie la plus précarisée de la population renoncera malgré les aides gouvernementales aux soins exclus du panier de soins et devra se contenter de l assistance ou de l humanitaire. La réduction de la place de l assurance maladie obligatoire entraînera l explosion des tarifs des mutuelles et des assurances. Aujourd hui, la sécurité sociale prend en charge 75% des dépenses de santé (112 Milliards d euros) et les complémentaires 18,9 milliards. On peut estimer que le report sur les complémentaires des 10 Md d euros du prétendu déficit prévu en 2003 pour l assurance maladie aurait pour conséquence une augmentation de 60 à 70% des cotisations des assurés des mutuelles. L habileté va consister à faire passer cette montée en puissance des assurances complémentaires par le biais de soins mal remboursés par la sécurité sociale : les soins dentaires et l optique. La gestion commune du «panier de soins» par l assurance obligatoire et les complémentaires permettrait aux assureurs de s introduire dans la gestion de l ensemble de la couverture sociale y compris du régime de base, et donc d imposer leurs choix et leurs critères : cotisations modulées selon l état de santé, l âge (voire refus d assurance, malus, bonus) ; communication du dossier médical pour rentabiliser les contrats d assurance y compris les contrats automobiles, immobiliers 2

Le Plan «Hôpital 2007», autre volet de la contre-réforme La pénurie de lits, de services de soins et de personnel soignant a été sciemment et méticuleusement organisée à partir des années 90 (en 10 ans 70 000 lits hospitaliers ont été fermés). C était précisément l une des fonctions du Plan Juppé, appliqué par la Gauche. L application des 35 heures dans les hôpitaux, sans les créations de postes et la formation des personnels en conséquence, relève de la même logique. La rénovation du parc hospitalier est donc devenue une nécessité absolue. Mais les choix faits à cette occasion par le Gouvernement sont plus qu inquiétants : l attribution des crédits vise à accélérer les restructurations hospitalières, et le regroupement sur quelques sites de l ensemble des activités. Ces crédits sont accordés sans distinction tant aux établissements publics que privés. Les établissements privés lucratifs vont donc toucher le jackpot des aides gouvernementales, leur évitant ainsi des investissements lourds. Les profits des actionnaires en seront augmentés d autant, financés par l argent public. On peut enfin craindre que le parc hospitalier ainsi rénové en 2007, ne soit alors bradé, flambant neuf à des intérêts privés, ou transmis aux régions dans la perspective de régionalisation du système de santé. Un nouveau mode de financement commun aux établissements publics et privés est «expérimenté» en 2003 avant d être généralisé en 2004. Chaque maladie devient un «segment de marché» pour laquelle un coût est défini. Les établissements publics et privés sont mis en concurrence. La meilleure «offre» emporte le marché. En outre la «tarification à l activité» va permettre de définir pour les soins hospitaliers ceux qui seront compris ou non dans le «panier de soins» (remboursements des séjours et actes hospitaliers) les «suppléments» devant être payés soit par le patient, soit par une assurance supplémentaire totalement à sa charge. L Hôpital sera désormais dirigé selon les normes d une entreprise privée, directeur et médecins dirigeants seront rémunérés d après les «résultats» de l entreprise. Les services d un même hôpital seront mis en concurrence, et le personnel intéressé aux «résultats» (Adieu les statuts de la fonction publique!). La tutelle déjà très forte des «Agences Régionales de l Hospitalisation» (ARH) sur les établissements sera renforcée et leur autonomie croissante jette les bases de la «décentralisation» du système de santé. La «carte sanitaire» qui fixait des normes nationales pour les différentes spécialités médicales disparaît. A l Hôpital, la potion libérale est la même que dans les autres services publics : réduction des moyens, service «universel» (minimum) ; au lieu d un service de qualité, privatisation et régionalisation. Une mobilisation nécessaire Même imparfait et toujours menacé, le droit à l accès aux soins pour tous est un droit fondamental dont la perte constituerait un recul social majeur. N en doutons pas, les enjeux sont tels que le gouvernement et le patronat feront preuve de la même détermination pour imposer leur contreréforme que pour les retraites. Rien n est pour autant joué! La mobilisation de mai-juin sur les retraites et pour la défense de l école publique ont confronté le Gouvernement à une résistance qu il n attendait pas! Même si la victoire n a pas été au rendez-vous, ce n est pas la démoralisation, mais la colère qui aujourd hui domine. Des réseaux, des solidarités se sont créés sur lesquels peut s appuyer la préparation d une nouvelle lutte. Le discrédit du Gouvernement, la chute libre de Raffarin dans les sondages et les tensions qui apparaissent au sein de la majorité, rendent illégitime ce gouvernement pour imposer ce nouveau recul social. Tout dépend de la capacité du mouvement ouvrier à préparer dès maintenant la confrontation. L objectif doit être clairement affirmé : il faudra pour gagner cette deuxième épreuve de force aller jusqu au bout, jusqu à la paralysie de l ensemble de l économie par la grève générale des secteurs publics et privés. Le Gouvernement et le MEDEF, vont essayer d entraîner le mouvement syndical, dans la voie d une pseudo-négociations débouchant sur une «réforme inévitable», en essayant également d obtenir la complicité active du mouvement mutualiste. La prise de conscience dans le mouvement syndical et mutualiste pèsera lourd pour faire échec à un tel projet. En ce qui la concerne, la LCR et ses militants feront tout pour préparer l épreuve de force qui s annonce et lui permettre cette fois d être victorieuse. 3

Quand on veut tuer son chien, on dit qu il a la rage! Le budget de la Sécurité sociale est supérieur d un tiers à celui de l Etat. Cette masse financière considérable échappe en grande partie aux circuits financiers. Elle est donc l objet de toutes les convoitises. Ce budget reste majoritairement alimenté par l'argent des salariés sous la forme des cotisations sociales pour couvrir les aléas de l'existence : maladie, accident du travail, maternité, décès, vieillesse et charges familiales. Part dite salariale ou part dite patronale, toutes les cotisations constituent le salaire socialisé - (ou indirect). Les employeurs raisonnent eux-mêmes en terme de «charges salariales» constituées par le salaire net et les cotisations. Les prévisions ont été délibérément sous estimées afin d annoncer «un déficit d ampleur considérable» (10,6 milliards d euros en 2003, 14 en 2004 pour la branche maladie). Mais si toute les sommes qui normalement devraient revenir aux Caisses étaient versées, il ne serait nullement question de déficit. La Sécurité sociale souffre d'un manque de recettes en raison du chômage et des bas salaires * 100 000 chômeurs, c'est près d' 1 milliard d'euros en moins de recettes ; * La part des salaires dans la valeur ajoutée (la richesse créée) est passée de 69 à 60 % depuis 20 ans. Si les profits n'avaient pas ainsi progressé de neuf points, il y aurait 15 % de recettes en plus. La Sécurité sociale est pillée par les patrons et l'etat Le montant des exonérations de cotisations patronales s élève à 20,34 milliards d euros (18,24 compensés par l'état, donc les impôts ; 2,1 non versés) Le montant des dettes patronales est de 1,9 milliards d'euros dont les 3/4 (1,4 milliards) ne seront pas recouvrés ; Les employeurs ne déclarent pas des accidents de travail et maladie professionnelle : 15 milliards d euros (estimation CGT) ; L'Etat doit 4,2 milliards d'euros aux caisses ; Le régime général finance d autres régimes (exploitants agricoles, militaires, cultes ) : soit 11,25 milliards d euros. 4

LA SECU EST A NOUS LA SANTE GRATUITE : UN DROIT POUR TOUS 1. L'accès aux soins gratuits pour tous, pas de charité publique. Aller vers une santé gratuite pour tous les soins, y compris dentaires et l'optique, en commençant dès maintenant pour les revenus inférieurs ou égal au SMIC, en généralisant le tiers payant en ville et à l'hôpital, en supprimant le forfait hospitalier et les dépassements d'honoraires pratiqués par de nombreux médecins. 2. La santé doit être financée par les employeurs intégralement : ni assurances privées, ni mutuelle obligatoire. Abrogation de la CSG et de toutes les mesures de fiscalisation Refus de toutes les exonérations de cotisations Remboursement des dettes patronales par une caisse de garantie alimentée par les employeurs ; Augmentation de nos salaires directs et de la cotisation dite patronale en fonction de nos besoins de santé. 3. Extension de la socialisation et du Service public de santé. Défendre notre droit à la santé, ce n'est pas seulement défendre ce qui existait mais au contraire pallier à ses défauts et l'améliorer. La santé ne peut être soumise aux lois du capitalisme dont le seul intérêt est de faire les profits des assureurs, des trusts pharmaceutiques et des patrons de cliniques. Il faut donc mettre en place une autre politique de santé, tant préventive sur les conditions de travail et de vie que curative, basée sur les besoins de la population, en assurant les financements nécessaires. 4. Contre la mainmise du patronat et de l'etat sur la Sécurité sociale, gestion par les salariés et démocratisation maximum. La Sécurité sociale ne doit pas être une administration supplémentaire, mais l'outil des travailleurs, à leur service, toute entière gérée et contrôlée par eux, pour dispenser les mêmes droits et services à tous, sur l'ensemble du territoire, aux plus près des besoins. Abrogation du vote du budget de la Sécu par le Parlement. Fin de la tutelle de l Etat sur les organismes de Sécu Dehors les patrons des caisses. Election et contrôle à tous les niveaux des Conseils d'administration, disposant de tous les pouvoirs de gestion par les bénéficiaires de la Protection sociale. Définition des besoins et des réponses à y apporter avec les bénéficiaires, au niveau nécessaire : équipements hospitaliers et services de soins (hôpitaux locaux, départementaux, régionaux, réseaux locaux publics de soins, dispensaires). Pour une Sécurité sociale qui réponde aux besoins de tous, de qualité, il faut en finir avec la dictature du capitalisme. Notre santé, notre vie vaut plus que leurs profits. 5