BANQUE. STRATÉGIE cahier de prospective bancaire & financière ENASS PAPERS 5. ENASS Entreprise DOSSIER



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Transcription:

BANQUE n 315 Juin 2013 ISSN 0762-4077 Mensuel - 70 euros revue-banque.fr STRATÉGIE cahier de prospective bancaire & financière DOSSIER ENASS PAPERS 5 Ce cinquième numéro des ENASS Papers couvre, comme les précédents opus, des problématiques très diverses mais d une grande actualité : entre autres, les défis et opportunités du phénomène Big Data, les perspectives des entreprises d assurances en 2013, l évolution du business model de la réassurance, les systèmes de retraite entre répartition et capitalisation, le caractère potentiellement discriminatoire de l assurance au regard de la législation européenne, ou encore l assurance emprunteur au travers de la loi Lagarde 4 Sommaire Avec la participation de ENASS Entreprise

Dossier ENASS PAPER 5 5 Gestion des données Big Data : défis et opportunités pour les assureurs François Ewald, ENASS, CNAM, et Patrick Thourot, ENASS, CNAM, ALTIA 9 Perspectives 2013 Assurances européennes : surmonter la défiance des investisseurs Philippe Picagne, CNAM, CreditSights 12 Législation européenne L activité assurantielle est-elle discriminatoire? Marine Capet, STERIA 16 Stratégie Les fortes spécificités du business model de la réassurance Patrick Thourot, CNAM-ENASS, ALTIA 22 Entre objectifs fondamentaux et enjeux démographiques Quelles alternatives valables pour la retraite en France? Mélina Brichory, Optimind Winter 28 Santé L avenir des réseaux de soins Séverine Sollier, journaliste économique 34 Immobilier La garantie des risques locatifs est-elle légitime au travers d un dispositif assurantiel? Stéphane Grandchamp, Verspieren 38 Loi Lagarde L assurance emprunteur, un marché monopolisé par les banques Laurent Devorsine, Cabinet Devorsine 42 Discrimination du risque géographique pour les garanties vol en MRH La création d un zonier vol optimum Armelle Nyankam Tchana, ENASS 47 Art contemporain Les nouvelles formes d art et l assurance Mathias Lanvin Lespiau, ENASS & BANQUE STRATÉGIE 18, rue La Fayette 75009 Paris Fax : 01 48 24 12 97 www.revue-banque.fr La reproduction totale ou partielle des articles publiés dans Banque & Stratégie, sans accord écrit de la société Revue Banque SARL, est interdite conformément à la loi du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique. Directeur de la publication : Valérie Ohannessian Secrétaire général : Pierre Coustols Rédacteur en chef : Élisabeth Coulomb Rédacteurs : Sophie Gauvent (54 02) ; Séverine Leboucher (54 15) ; Annick Masounave (54 14) ; Samorya Wilson (54 15) ; Secrétariat de rédaction : 1 er SR, Alain de Seze (54 17) ; Christine Hauvette (54 10). Maquette : 1 er maquettiste, Emmanuel Gonzalez (54 12) ; Alexandra Démétriadis (54 18) Directrice marketing et commercial : Valérie Dumas-Paoli (54 19) Publicité : Isabelle Conroux (54 20) Conception graphique : Rampazzo & Associés Pour nous contacter, devant chaque numéro, ajouter l indicatif 01 48 00. SERVICE ABONNEMENTS REVUE BANQUE 18 rue La Fayette 75009 Paris Tél. : 33(0)1 48 00 54 26 Fax : 33(0)1 48 00 54 25 E-mail : service.abonnement@revue-banque.fr ISSN 0762-4077/CPPAP 0616 I 84975 - Imprimé à Pulnoy (54) par SPEI - Dépôt légal 2 e trimestre 2013. Ce numéro comprend un encart jeté «Revue Banque Abonnement». banque & stratégie Banque & Stratégie n 315 juin 2013 3

À paraître L ouvrage donne une vision complète et synthétique du droit des assurances tel qu il est enseigné dans le cadre des études juridiques. Les auteurs une universitaire et un professionnel, codirecteurs de l Institut des Assurances de Bordeaux ont pour objectif d être à la fois clairs, pédagogiques et complets, afin de permettre au lecteur d appréhender facilement la matière, d en comprendre les principes et les mécanismes fondamentaux, mais également d en saisir la complexité et la subtilité. Suivant une approche à la fois didactique et globale de la matière, l ouvrage est divisé en deux parties. La première est consacrée aux «acteurs» de la relation d assurance et comprend, d une part, l étude des normes régissant les compagnies d assurance ainsi que les activités des intermédiaires professionnels (courtiers et agents) ; d autre part, la présentation des personnes qui, légalement ou conventionnellement, sont appelées à bénéficier de la prestation d assurance (assuré, tiers victime, créancier titulaire d une sûreté sur le bien assuré, bénéficiaire d une assurance pour compte). La seconde partie de l ouvrage est consacrée à l étude du contrat qui unit ces acteurs ; la progression du texte suit le cours normal de la vie de ce contrat en détaillant les règles qui gouvernent sa formation, son objet, son déroulement et enfin son extinction. Conçu dans l optique d aider les étudiants à la préparation des examens de droit des assurances, droit des affaires et droit des entreprises, ce manuel s adresse aussi bien à un public universitaire qu aux professionnels qui souhaitent acquérir une connaissance théorique et pratique du droit des assurances. DROIT DES ASSURANCES Maud Asselain et Christophe Vercoutère Collection Master Assurance, 35 Maud ASSELAIN est Maître de conférences, codirectrice de l Institut des Assurances de Bordeaux (IAB) et du Master II «Droit et pratique de l Assurance» à l Université Montesquieu-Bordeaux IV. Coauteur du Traité du contrat d assurance terrestre (ss dir. de H. Groutel) paru chez Litec en 2008, elle collabore à titre permanent à la Revue générale du droit des assurances (RGDA) et à L Essentiel Droit des Assurances (LEDA). Ses articles et commentaires rendent compte des réformes législatives et revirements jurisprudentiels qui caractérisent ce droit en perpétuelle évolution. Christophe VERCOUTERE est codirecteur de l Institut des Assurances de Bordeaux (IAB) et Directeur des études professionnelles du Master II «Droit et pratique de l Assurance» à l Université Montesquieu-Bordeaux IV et codirecteur de l Institut des Assurances de Bordeaux. Professionnel de l assurance, il est en charge, au niveau régional, des relations «courtage» pour les risques d entreprise au sein d une importante compagnie d assurance française. Son parcours universitaire et sa profession lui permettent d avoir une maîtrise globale, à la fois théorique et pratique, de la relation d assurance. Commandez cet ouvrage sur revue-banque.fr Cet ouvrage est également disponible à La librairie de la Banque et de la Finance, 18 rue La Fayette 75009 Paris

Dossier ENASS PAPER 5 Gestion des données Big Data : défis et opportunités pour les assureurs FRANÇOIS EWALD Directeur ENASS Professeur CNAM Manne d informations précieuses pour les assureurs, le Big Data continue toutefois de poser des questions éthiques. Même si la réglementation limite son exploitation, le Big Data révolutionne le métier d assureur. Ainsi, la complémentaire santé pourrait disparaître. Le 26 mars 2013 s est tenu un important colloque 1 sur le sujet du Big Data, au cours duquel sont intervenus 36 orateurs. La nature même des sujets abordés et leur caractère majeur pour l avenir de l industrie de l assurance nous ont paru mériter un court résumé 2, avant la publication exhaustive des travaux. VERS UNE NOUVELLE SCIENCE DES RISQUES PATRICK THOUROT Professeur associé ENASS, CNAM Président ALTIA Pour définir le Big Data, Denis Kessler, P-DG de SCOR, se réfère à Wikipédia : «expression qui désigne des ensembles de données qui sont tellement volumineux qu ils en deviennent difficiles à travailler avec des outils classiques de gestion des bases de 1. Ce colloque a été organisé par F. Ewald, sous le parrainage de la SCOR, de l Institut des actuaires français, de l IFPASS et de l Institut des sciences financières et actuarielles de Lyon (ISFA). 2. Cet article ne prétend pas constituer les actes de ce colloque. Les positions exprimées par les intervenants ne les engagent pas : elles résultent des notes prises au cours des exposés et n engagent par conséquent que l auteur de celles-ci, qui demande par avance l indulgence des orateurs. À noter que toutes les interventions n ont pas été reprises. données». Les échanges de données via Internet devraient dépasser le Zettaoctet en 2016, soit 10 21 octets ou 1 milliard de fois la capacité d un disque dur domestique annuel. Mais ces données sont inorganisées, ce qui requiert de nouvelles méthodes de recueil, de stockage et d analyse pour permettre leur utilisation. Il note que la quantité de données est l élément majeur de la fiabilité des statistiques, fondement de l assurance, et que l abondance et la qualité des données sont par conséquent des facteurs essentiels de différenciation compéti- tive pour les assureurs. Il imagine ce que peut devenir l assurance dans le «monde merveilleux du Big Data» : nouvelles méthodes de segmentation, et donc nouvelles méthodes de tarification ; connaissance précise des habitudes (alimentaires, par exemple) des clients et inutilité probable des questionnaires de santé ; amélioration de l efficacité des campagnes publicitaires et de démarchage commercial des prospects ; efficacité des messages de prévention «ciblés»; Banque & Stratégie n 315 juin 2013 5

Dossier ENASS PAPER 5 limitation du risque de fraude à l assurance. Le Big Data pourrait également modifier profondément le paysage concurrentiel du secteur, en remettant en cause la hiérarchie des compagnies existantes. Les fournisseurs de données vont chercher à s approprier une part significative de la valeur, voire à devenir eux-mêmes assureurs, en soumettant les assureurs en place à une forte antisélection 3 de leur propre portefeuille. À moins, bien sûr, que les réglementations ne viennent contrecarrer l utilisation du Big Data, qu il s agisse des règles sur le respect de la vie privée ou de celles qui tendent à réduire les possibilités de segmentation considérées comme des discriminations (cf. la Cour de Justice européenne et la «discrimination» dans les tarifs auto fondés sur le genre). Que dire des perspectives de décryptage rapide et quasi gratuit du génome humain? Pour l heure, la réglementation en interdit l usage, mais celui-ci modifierait en profondeur la souscription et la gestion des assurances vie et santé. Du mythe à la réalité Dans son intervention, Serge Abiteboul, directeur de recherche à l IN- RIA, a voulu ramener les perspectives d utilisation du Big Data à leur véritable mesure. Le «mythe» est que, grâce à des analyses de masse, les prédictions vont être beaucoup plus fines et que les grands problèmes de l humanité (le cancer) vont être résolus. La réalité actuelle est plus triviale : recherche d une efficacité commerciale accrue et augmentation de la puissance des États (surveillance de la criminalité, prévention des actions terroristes). Mais l avenir pourrait être plus réjouissant : prévision et prévention des crises sanitaires, des catastrophes naturelles, des risques environnementaux, amélioration des systèmes de santé et de transport, suivi et accompagnement des personnes âgées et des élèves en difficulté. L intervenant décrit aussi les «revers» de cette amélioration de la connaissance : mes données personnelles 3. L expression «antisélection» désigne les dysfonctionnements des marchés d assurance qui résultent de l information cachée dont les assurés peuvent disposer sur leurs propres risques et qui n est pas accessible aux assureurs. (par exemple, mon génome) peuvent être consultées sur Internet, pour une somme de 100 dollars, les polices d assurance santé vont être évidemment plus coûteuses, pour un nombre croissant de «risques aggravés», tandis que la qualité (et la taille) des mutualités diminuera. Donc il est urgent de prévoir l anonymation des données personnelles, la définition de leurs conditions d utilisation et la responsabilité légale de ceux qui les détiennent. Pour Marc Atallah et Gontran Peubez, consultants de Deloitte, le Big Data dans l assurance permet de dépasser la loi des grands nombres et de «marcher sur la crête» entre mutualisation et segmentation. Il offre la possibilité de «fouiller» un nombre considérable de données et de traiter les zones sousexploitées de l information sur les clients (les queues de distribution). Cette information est déterminante de grands changements dans la gestion de la distribution, l amélioration de la rétention des clients, la tarification, la gestion des sinistres et la détection de la fraude. L essentiel n en demeure pas moins l amélioration de l efficacité commerciale. Celle-ci se fonde sur la connaissance de la sensibilité des clients aux actions commerciales et aux actions de prévention fondées sur l augmentation de la fidélité des clients par l identification de ceux qui peuvent, veulent ou envisagent de résilier leurs contrats. Un outil de modélisation prédictive Gérard Karsenti, P-DG d HP France, fait le constat du taux de croissance de l information mondiale (59 %), mais aussi de la faible capacité des data centers à utiliser la masse, la croissance et la complexité de l information : 85 % en seraient incapables. Or les nouvelles sources d information sont nombreuses (vidéo, audio, mails, textos, mobiles, documents, images). Encore faut-il traiter le volume, la variété, la complexité et le faire rapidement (vélocité de l information). Deux médias sont déterminants pour les assureurs : d une part, les «capteurs» 4 pour l assurance au kilo- 4. Géolocalisation et boîtiers de contrôle du kilométrage parcouru. mètre, la connaissance des risques, la recherche des produits volés, les réseaux sociaux pour la rénovation du marketing, de l approche et de la fidélisation du client. Ainsi, les assureurs pourront-ils mieux communiquer avec leurs clients et mieux «délivrer» (conformité des produits avec les attentes, meilleure identification des cibles de clientèle). Encore faut-il disposer des bons outils pour structurer l information, sélectionner les informations utiles bref, garder des objectifs de développement du chiffre d affaires. Jules Constantinou, Head of Marketing, Underwriting and Claims chez Gen Re Life UK, ne dit pas autre chose. Le Big Data est un outil de modélisation prédictive, comme le montre l exemple des recherches sur les causes de résiliation des contrats d assurance Vie. Mais il considère que cette utilisation peut être étendue à la presque totalité des activités d assurance : la tarification, la souscription, le marketing, les efforts de fidélisation, la gestion des sinistres et la détection de la fraude. Jean-Michel Lasry, CEO de MFG LAbs, illustre le propos sur les découvertes en marketing que permet l exploitation des «relations d amitié» en matière de tourisme ou de fréquentation des salles de cinéma. C est bien en effet, comme le proposait le titre de la table ronde, «une nouvelle science du risque», où la qualité de la prédiction s appuie sur l ampleur des informations disponibles (et définies comme appropriées et dûment traitées) qui s instaure, à condition de pouvoir (et savoir) gérer cette masse nouvelle et croissante d informations. QUE PEUVENT CRAINDRE OU ESPÉRER LES ASSUREURS DU BIG DATA? Eric Brat et Stephan Heydorn, Senior Partners du Boston Consulting Group, rappellent que le Big Data se caractérise par le volume, la variété, la rapidité et la complexité des informations collectées. Ils identifient, comme d autres orateurs, cinq domaines dans lesquels ces données sont utilisables par les assureurs : la création de produits : étude du marché, développement des nouveaux 6 Banque & Stratégie n 315 juin 2013

ISSN 0762-4077 Mensuel - 70 euros revue-banque.fr Banque & Stratégie ABONNEMENTS 2013 Je choisis l abonnement à BANQUE & STRATÉGIE coché ci-dessous : DÉCOUVERTE 1 MOIS: 1 n o + accès online France (TTC) Étranger Quantité Total Nouveaux abonnés (offre réservée non renouvelable) 70,00 75,00...... 1 AN : 11 n os + accès online France (TTC) Étranger Quantité Total Tous abonnés 655,00 685,00...... COUPLAGE REVUE BANQUE + BANQUE & STRATÉGIE 1 AN : 23 n os + 2 suppléments + accès online France (TTC) Étranger Quantité Total Offre réservée aux non abonnés 780,00 820,00...... LA BIBLIOTHÈQUE NUMÉRIQUE (1) France (TTC) Quantité Total Abonnement annuel 1 compte 165,00... Abonnement annuel 5 comptes (2) 625,00...... TOTAL (TVA : 2,10 % incluse sur le tarif France) (1) Réservé aux abonnés à une des revues du groupe. (2) Au-delà de 5 comptes, nous consulter (bibliotheque@revue-banque.fr). Société... Nom... Prénom... n 295 Septembre 2011 BANQUE STRATÉGIE cahier de prospective bancaire & financière dossier les institutions financières internationales se réinventent Qu elles aient pour vocation le financement du développement ou le maintien de la stabilité mondiale, les institutions financières internationales sont, avec la crise, sur le devant de la scène. Appréciées dans leur rôle de pompiers, elles essuient en revanche des critiques sur leur incapacité à prévenir la crise et résorber les déséquilibres macrofinanciers. Depuis leur création, elles ne cessent pourtant de se réinventer. 4 Sommaire veille STRATÉGIquE 28 Banque de détail Le moniteur des ventes : pour faciliter la conversion à une culture «relation-client» Yves Negro, Université Université Jean Moulin Lyon 3 En bref 38 La vie des affaires BANQUE & STRATÉGIE Le complément stratégique et prospectif de Revue Banque 70,00 le numéro Fonction... Service... Adresse... Code postal/ville...pays... Code TVA (pour les pays de la CEE)... Téléphone...Télécopie... E-mail (indispensable)... En application de la loi du 6 janvier 1978, les informations ci-dessus sont indispensables au traitement de votre commande et sont communiquées aux destinataires aptes à les traiter. Elles peuvent donner lieu à l exercice du droit d accès et de rectification auprès de Revue Banque. Vous pouvez vous opposer à ce que vos nom et adresse soient cédés ultérieurement en le demandant par écrit au secrétariat général de Revue Banque. À retourner au SERVICE ABONNEMENTS REVUE BANQUE 18 rue La Fayette 75009 Paris Tél. : 33(0)1 48 00 54 26 Fax : 33(0)1 48 00 54 25 E-mail : service.abonnement@revue-banque.fr Règlement à l ordre de La Revue Banque par chèque par carte bancaire* n Date limite de validité : _ / _ Notez les 3 derniers chiffres du cryptogramme visuel (au verso de votre carte) : _ * Sauf American Express et Diner s Club. Le règlement sur l étranger est à joindre impérativement à la commande et doit être effectué en euros, par chèque payable en France, net de frais. Pour les virements bancaires et CCP, nous consulter. DATE et SIGNATURE BS13 Vos abonnements se poursuivent on line sur revue-banque.fr Feuilletage, accès illimité aux archives de Banque & Stratégie