Examen clinique d un trouble de la statique pelvienne



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Transcription:

Examen clinique d un trouble de la statique pelvienne B. Blanc, A. Agostini et P. Coulom L interrogatoire insistera sur l étude des antécédents obstétricaux et chirurgicaux, la recherches de tares, les signes fonctionnels urinaires pelviens et proctologiques. L examen clinique doit être réalisé vessie pleine à la recherche d une incontinence d urine patente ou masquée se révélant lors du refoulement d une composante du prolapsus. Vessie vide, on étudiera les différents éléments du prolapsus. Il faut privilégier les spéculums à valves démontables placés en position verticale. Les touchers pelviens (toucher vaginal, toucher rectal, toucher bidigital) et l examen neuromusculaire doivent compléter l examen clinique. INTERROGATOIRE Il s attachera à la recherche d antécédents personnels obstétricaux, chirurgicaux et médicaux pouvant interférer dans la survenue d un trouble de la statique pelvienne. Antécédents obstétricaux C est l analyse des circonstances des accouchements et en particulier du premier enfant. Il convient de noter le poids de l enfant, les manœuvres instrumentales et les déchirures périnéales éventuelles. Enfin, l existence de fuites urinaires pendant la grossesse et le post-partum doit être recherchée ainsi que la mise en place éventuelle d une rééducation périnéale adaptée. Antécédents chirurgicaux Il faut rechercher : la notion d interventions gynécologiques antérieures, a fortiori s il s agit d un traitement chirurgical de prolapsus ou d incontinence urinaire ; le compte rendu opératoire détaillé doit être demandé en particulier en cas de cure préalable de prolapsus ; l ancienneté des troubles ; le degré d invalidité occasionné par ces fuites (port de protection ) ; le retentissement socio-professionnel et sexuel; l évolutivité des symptômes et leurs modifications éventuelles ; les traitements antérieurs effectués (chirurgie, traitement médical, kinésithérapie, électrothérapie, biofeedback) et leurs effets sur les symptômes. Terrain et tares associées En dehors de l âge et de l état général, il convient de préciser : les éventuels facteurs de risques généraux : métaboliques, cardio-vasculaires, pulmonaires ; les prises médicamenteuses, en particulier certaines drogues qui peuvent interférer avec la continence urinaire. Enfin l avis spécialisé d un confrère anesthésiste entraîné à l anesthésie en chirurgie gynécologique permettra d évaluer le risque opératoire dans certaines situations difficiles. Il faut constater qu actuellement, avec les progrès de l anesthésie, de la surveillance de la période périopératoire et l utilisation de la voie vaginale, les contre-indications à la cure chirurgicale des prolapsus sont devenues rares, repoussant ainsi l utilisation des pessaires. Les signes fonctionnels amenant la patiente à consulter sont dominés par les troubles urinaires.

46 Pelvi-périnéologie Non seulement, il peut s agir de fuite urinaire à l effort, mais aussi de troubles urinaires divers : pollakiurie, dysurie, brûlure vésicale. L incontinence urinaire à l effort est l apanage de la femme ayant accouché. Elle est souvent associée à des troubles de la statique pelvienne. Elle peut apparaître à l éternuement, à la marche rapide, sans être encore gênante. Elle le devient quand elle survient lors de la toux ou aux changements de position. Il s agit d une incontinence mécanique qui survient à l effort. L IUE une fois confirmée doit être classée selon son importance. Cette classification ne peut être que subjective. La plus utilisée est celle d Ingelmann-Sundberg : stade 1 : fuite pour un effort entraînant une forte augmentation de la pression intra-abdominale (éternuement, éclat de rire) ; stade 2 : fuite pour un effort entraînant une augmentation modérée de cette pression (toux, courir, soulever une charge) ; stade 3 : fuite pour un effort ayant une répercussion faible sur la pression (marche rapide, lever, montée d escaliers). La fuite d urine peut être accompagnée de pollakiurie, de mictions impérieuses, de dysurie. Ce type de fuite évoque une instabilité vésicale. Elle n est pas rare chez la femme jeune, a fortiori s il y a des antécédents d énurésie. La carence hormonale postménopausique la rend fréquente chez la femme plus âgée. Plus rare, la fuite d urine spontanée évoque une origine neurologique périphérique ou centrale et est l apanage de la femme très âgée. Un écoulement permanent doit faire rechercher une fistule vésicovaginale post-traumatique (obstétricale ou chirurgicale). Dans certains cas, il n existe pas de troubles urinaires et l interrogatoire retrouve une sensation de pesanteur pelvi-périnéale, de boule intravaginale apparaissant à l effort, à la toux, en fin de journée. L interrogatoire doit par ailleurs rechercher de façon systématique des troubles de type proctologique : tenesme, épreinte, constipation, fuite de gaz et de matières ou humidité de l anus. EXAMEN L examen doit être pratiqué sur la femme en position gynécologique puis debout et accroupie, vessie pleine puis si possible après évacuation vésicale. Inspection L inspection de la vulve au repos peut révéler un prolapsus totalement extériorisé, une fourchette vulvaire béante, des cicatrices de déchirure périnéale. L inspection de la vulve après avoir demandé à la patiente de pousser (inspection à l effort) doit porter sur deux points : le prolapsus et l incontinence urinaire. Le prolapsus peut comporter plusieurs éléments : le déroulement de la paroi vaginale antérieure, colpocèle antérieure, qui intéresse à la partie haute la vessie (aspect lisse de la face antérieure du vagin) à la partie basse, striée transversalement, l urètre ; le déroulement de la paroi vaginale postérieure, colpocèle postérieure, qui comprend le rectum à la partie basse (rectocèle) et le cul-desac de Douglas à la partie haute (élytrocèle). Cette hernie du cul-de-sac de Douglas peut être pédiculée (développée aux dépens de la fossette de Meigs) ou sessile ; une chute du col utérin dont on recherche l allongement intravaginal hypertrophique, caractérisé par un col «tapiroïde» avec un allongement plus important de la lèvre antérieure que de la lèvre postérieure. En fonction du niveau de «descente» du col, on distingue trois degrés de prolapsus : 1 er degré : le col est intravaginal ; 2 e degré : le col effleure l orifice vulvaire ; 3 e degré : le col est extériorisé. Une fuite urinaire lors des efforts de toux ou de poussée doit être recherchée. Examen au spéculum (à valves démontables) L examen du col permet la pratique de frottis, éventuellement une colposcopie et une biopsie. L hystérocervicométrie distingue le col hypertrophique intravaginal et le col atrophique susvaginal. La traction sur le col avec une pince de Pozzi permet d apprécier la mobilité de l utérus. L examen du vagin doit comporter les manœuvres utilisant une seule valve du spéculum :

Examen clinique d un trouble de la statique pelvienne 47 la manœuvre de la valve antérieure, refoulant la cystocèle, permet d explorer la paroi vaginale postérieure et d estimer le niveau (rectocèle ou élytrocèle) et l importance du déroulement postérieur ; la manœuvre de la valve postérieure, refoulant la paroi vaginale postérieure, explore l étage antérieur du périnée et recherche une fuite urinaire. La persistance d un bombement vaginal antérieur lors de cette manœuvre avec accrochage du col utérin, refoulé en haut et en arrière, est le signe d une altération importante des connexions vésico-génitales. Par cette manœuvre, on doit rechercher également une incontinence urinaire d effort masquée, qui ne se produit qu après réduction du prolapsus, susceptible d apparaître après le traitement chirurgical du prolapsus. L examen en position gynécologique, vessie pleine, précisera l existence d une fuite urinaire aux efforts de toux et de poussée abdominale. Une observation attentive doit noter le synchronisme rigoureux de la fuite à l effort, dans le cas d une incontinence urinaire d effort pure (une fuite d urine pendant l effort cédant à l arrêt de celui-ci est à différencier d une miction involontaire déclenchée par l hyperpression abdominale). La correction de l incontinence urinaire d effort, en simulant la correction chirurgicale du trouble de la statique vésicale (manœuvres de Bonney et de Béthoux, manœuvre sous-urétrale) a une valeur indicatrice en tant que test thérapeutique. Manœuvre de Bonney Elle consiste à introduire dans le vagin de chaque côté du col vésical, derrière la symphyse, deux doigts ou deux clamps courbes matelassés et à remonter la paroi antérieure du vagin et le col de la vessie vers le haut et vers l avant. Le test est positif si la fuite urinaire à l effort cesse. Il est négatif si elle persiste. On reproche quelquefois à cette manœuvre de fermer artificiellement l urètre par compression, même si les clamps ou les doigts agissent très latéralement. Aussi lui préfère-t-on la manière de Béthoux. Manœuvre de Béthoux À l aide de deux clamps matelassés d une compresse et introduits dans les culs-de-sac latéraux du vagin, on exerce une poussée en direction du promontoire, replaçant ainsi la zone vésico-urétrale dans l enceinte manométrique. La correction de la fuite urinaire aux efforts de poussée affirme l incontinence urinaire d effort liée à la ptose vésicale et justiciable d un acte chirurgical. Test sous-urétral d Ulmsten Il consiste à effectuer, par l intermédiaire d une pince vaginale matelassée d une compresse ou avec deux doigts (index et médius), une pression sous l urètre à mi-distance entre le méat urétral et le col vésical. La correction de la fuite urinaire à la toux justifie, en cas d IUE mécanique, un geste de soutènement sous-vésical selon le mode d Ulmsten. S il n y a pas de fuite à l effort, il faut penser à réduire le prolapsus utérin, rectal ou vésical pour révéler une «incontinence urinaire masquée» par un ou plusieurs éléments de ce prolapsus. Cette manœuvre est particulièrement importante. En cas d incontinence urinaire masquée et révélée lors de l examen, un geste de soutènement sous-urétral ou de cervicocystopexie doit toujours être réalisé quelle que soit l intervention chirurgicale prévue. Examen en position gynécologique, vessie vide L examen en position gynécologique, vessie vide, permet d apprécier : l état de la vulve (béante ou fermée) ; l état de la muqueuse vaginale et urétrale, le degré d imprégnation hormonale ; l importance du prolapsus associé et ses éléments (cystocèle, hystérocèle, élytrocèle). L utilisation d un spéculum à valve démontable placé en position verticale permet une exploration particulièrement intéressante des différentes composantes du prolapsus. On voit, en effet, apparaître lors d un effort de poussée le déroulement vaginal et les composantes du prolapsus des trois étages tout particulièrement au niveau de la colonne postérieure du vagin. Il est souvent possible ainsi d affirmer l existence d une élytrocèle même à son début. Touchers pelviens Le toucher vaginal apprécie : le col utérin : sa position, son allongement éventuel intra-, ou sus-vaginal ;

48 Pelvi-périnéologie l utérus : son volume, sa consistance, sa mobilité ; les annexes et les paramètres, à la recherche d une douleur, d un empâtement ou d une masse ; la qualité des ligaments utérosacrés par la mobilité du col lors du toucher ; l état des releveurs dont on appréciera le tonus : - les faisceaux sphinctériens sont testés en palpant en dehors, vers la paroi pelvienne et en demandant à la patiente de pratiquer des efforts de retenue, - les faisceaux élévateurs sont recherchés à la partie antérieure lors de la manœuvre de Delbet d adduction contrariée des cuisses ; l avant-bras gauche du médecin étant placé horizontalement entre les genoux de la patiente, on demande à la patiente de rapprocher les cuisses, pendant qu avec la main droite, on pratique le toucher vaginal. Le toucher rectal, une rectocèle est recherchée en dirigeant le doigt intrarectal vers la paroi vaginale, ce qui permet de la distinguer d une élytrocèle, et on apprécie la tonicité du sphincter anal. Les touchers combinés explorent le noyau fibreux central du périnée et recherchent une élytrocèle que l on perçoit sous différentes formes selon l organe intéressé : ressaut (péritoine), masse gargouillante (anse grêle), masse grenue (épiploon). Le testing des releveurs de l anus apprécie la force, la tenue et la fatigabilité du muscle, il doit être recherché lors de tout examen d un trouble de la statique pelvienne. Force musculaire : la cotation se fait de 0 à 5 : 0 : pas de contraction visible ou palpable ; 1 : contraction faible, difficilement perceptible; 2 : contraction faible, mais ferme ; 3 : contraction bien ferme, mais insuffisante pour contrarier une opposition modérée ; 4 : contraction bien ferme, mais résistant mal à une opposition modérée ; 5 : contraction maximale, résistant parfaitement à une opposition forte. Tenue : la contraction doit être efficace pendant cinq secondes de façon uniforme. Fatigabilité : la contraction doit pouvoir être répétée et intense cinq fois de suite. Bilan neurologique Il doit être complet pour préciser notamment l état neurologique du périnée et comprendre un examen minutieux du rachis, du bassin et de la statique vertébrale. EXAMEN NEUROMUSCULAIRE DU PÉRINÉE (ENMP) Souvent négligé dans les consultations de spécialistes l ENMP apporte de précieux renseignements dans les anomalies de la statique pelvienne, les algies périnéales, l incontinence, les neuropathies centrales ou périphériques et les troubles de la sexualité. L ENMP précédé d un interrogatoire attentif est à la fois : musculaire : moteur ; neurologique : réflexe et sensitif. L interrogatoire analyse : les antécédents médicaux et chirurgicaux, obstétricaux et traumatiques ; le mode d apparition des troubles, le caractère subit ou progressif de la symptomatologie ; le caractère des douleurs, les positions antalgiques, les modes de survenue, les facteurs favorisants ou aggravants, les irradiations, l uni- ou la bilatéralité ; les troubles associés sur le plan urinaire, sexuel et anorectal. Examen musculaire Porte sur l ensemble du périnée à la fois antérieur et postérieur ; se fait toujours de façon bilatérale ; au repos et lors d une contraction volontaire. Toucher vaginal Il apprécie : le tonus de base ; la commande volontaire. Il est important de noter la fatigabilité à la reproduction de l effort mais surtout l existence de contractions parasites notamment celles des abdominaux et des fessiers. L innervation des releveurs de l anus est à dominante S3.

Examen clinique d un trouble de la statique pelvienne 49 Toucher rectal Toujours précédé d une inspection attentive de la marge anale, de l harmonie des plis radiés et de la réponse aux manœuvres bidigitales d étirement de la marge anale. Le toucher du périnée postérieur ne doit pas être rectal comme l usage linguistique l a fait devenir, mais être marginal canalaire puis rectal, appréciant le sillon intersphinctérien et le tonus de base des sphincters interne (qui est un sphincter lisse) et externe (qui est un sphincter strié). L un a un fonctionnement automatique, l autre répond à la commande volontaire. Aussi le tonus peut être : normal ; diminué ; augmenté. La commande volontaire à l effort apprécie la commande S4 du sphincter strié. La contraction réflexe à la toux étudie les voies de la motricité automatique afférence D6-D12 et efférence et S3 et S4. Le palper bidigital apprécie l état de la cloison recto-vaginale et du noyau fibreux central du périnée. Membres inférieurs On explore l innervation S2 qui participe au plexus honteux par le testing du court fléchisseur plantaire et des intrinsèques des orteils. Examen neurologique Il sera toujours bilatéral et il étudie les réflexes et la sensibilité au niveau périnéal et au niveau des membres inférieurs (pour le territoire S2). Réflexes Ils peuvent être présents, diminués, vifs ou diffusés. Au niveau périnéal L analyse des réflexes peut se faire au niveau visuel ou lors du toucher rectal (TR) : réflexe anal (S4) : la piqûre de la marge anale provoque une contraction sphinctérienne qui doit être brève et rapide ; l effleurement de la marge anale avec un coton provoque également la contraction anale (réflexe cutané anal) la diffusion de ce réflexe aux releveurs est pathologique ; réflexe bulbo-anal ou clitorido-anal (S3) Le pincement de la région clitoridienne ou du gland entraîne une contraction du sphincter anal. Il existe de même une contraction réflexe perceptible sur le périnée (réflexe bulbocaverneux). le réflexe d étirement de la marge anale (S4) est un réflexe myotatique ; l étirement rapide et bref de chaque hémisphincter provoque une contraction réflexe rapide et brève. Dans les lésions du motoneurone périphérique après étirement facile, l anus reste béant puis se referme lentement. Il s agit là d une activité caractéristique du sphincter interne qui est un muscle lisse. Au niveau des membres inférieurs réflexe médio-plantaire : S2 la percussion de la voûte plantaire provoque une contraction réflexe des fléchisseurs des orteils ; réflexe de Rossolimo : S2 la percussion des têtes métatarsiennes provoque une flexion des orteils (franche dans les hyperréflexies pyramidales) ; la stimulation électrique ou manuelle de la région plantaire provoque une contaction réflexe du sphincter anal et urétral ; réflexe crémastérien explore L2 et non pas une racine sacrée. Sensibilité La sensibilité du canal anal, du vagin et du rectum est exprimée au cours de l interrogatoire ainsi que lors de l examen clinique et notamment lors des touchers pelviens. L exploration de la sensibilité doit être bilatérale et comparative. Elle se fait par le toucher, la piqûre, la chaleur ou le froid (exploration tactile douloureuse et thermique). Elle permet de définir les territoires d anesthésie, d hypo- ou d hyperanesthésie. An niveau périnéal La répartition des aires de sensibilité a été définie par Y. Lazorthes :

50 Pelvi-périnéologie S5 : ovoïde péri-anal et/ou éventuellement zone comprise entre anus et coccyx ; S4 : triangle à pointe antérieure et base rétroanale comprenant la sensibilité postéro-vulvaire péri- ou rétroanale ; S3 : organes génitaux externes, partie externe des fesses ; Ll L2 : région pubienne et face interne de la cuisse, racine de la verge. Au niveau des membres inférieurs S2 possède un territoire sensitif au niveau de la face postérieure de la cuisse et non au niveau périnéal. L examen neuromusculaire du périnée doit être réalisé en routine et de première intention chez tout consultant de la sphère ano-génitale. Il permet le plus souvent de faire le diagnostic dans les grands thèmes de la périnéologie (algies, incontinences et dirige les examens complémentaires. L EXAMEN CLINIQUE EN PROCTOLOGIE L examen clinique en proctologie ne doit pas être réservé au spécialiste qui malheureusement ne voit que trop souvent des pathologies évoluées, mais doit faire partie intégrante de l acte médical dès qu une plainte est exprimée, qu il s agisse de : saignements ; douleurs ; écoulements ; changement de l anatomie locale ; prurit anal ; troubles de l exonération. Le danger d une prescription sans examen est grand à la fois pour le malade comme pour le médecin. L interrogatoire permet parfois à lui seul de faire le diagnostic. Il oriente les investigations ultérieures vers l anus, le rectum ou le côlon et permet d intégrer une pathologie locale à une pathologie générale. Les antécédents familiaux, personnels médicaux ou chirurgicaux, les pathologies de voisinage gynécologique ou urologique seront soigneusement notés. L histoire de la maladie, son mode de début, son évolution et les traitements déjà employés, sont autant d arguments pour s orienter vers telle ou telle pathologie proctologique. L interrogatoire qui se veut complet offre un double intérêt : non seulement il permet l approche diagnostique, mais encore permet l approche psychologique du patient. La reconnaissance des symptômes rassure les sujets inquiets et instaure un dialogue médecin-malade, permettant ensuite de réaliser l examen dans les meilleures conditions, en levant des inhibitions bien compréhensibles. Les instruments doivent être placés hors de la vue du patient et comprennent : 1 table d examen classique ; 1 source de lumière : qu il s agisse d un miroir de Clar ou d une lampe halogène sur pied des gants jetables ou des doigtiers roulés en caoutchouc, mieux que des doigtiers en plastique soudés ; du coton hydrophile en boule ; 1 lubrifiant : Xylocaïne gel, vaseline, glycérolé d amidon des anuscopes adultes ou pédiatriques dont le plus classique est celui de Bensaude muni d un mandrin à bout arrondi et dont on trouve l équivalent à usage unique ; des rectoscopes de 20 mm de diamètre dont il existe des modèles de différentes longueurs et de 15 mm de diamètre utilisables chez l enfant ou en cas de rétrécissement anal. L éclairage est assuré par un manche éclairant soit à pile, soit à lumière froide ; enfin du matériel de petite chirurgie : - ciseaux courbes, - bistouri à lames, - curette mousse Le patient est placé en position génu-pectorale. Pour ménager sa pudeur, le médecin se tient latéralement par rapport à la table d examen. Les pieds sont placés en dehors de la table et la joue droite ou gauche doit être appuyée sur le plan de la table, de façon à cambrer les reins pour obtenir une hyperdose orientant le rectum «vers le regard de l opérateur». La lumière vive dans la salle d examen n est pas nécessaire, bien au contraire, celle du miroir de Clar est largement suffisante. On lui préfère, actuellement, celle d une lampe halogène sur pied ou sur casque. On peut également examiner le malade en décubitus latéral, jambes fléchies comme le font les Anglo-Saxons.

Examen clinique d un trouble de la statique pelvienne 51 Enfin, il faut savoir en fin d examen, réaliser en décubitus dorsal, jambes fléchies, un toucher rectal qui appréciera l intégrité de la cavité rectale, mais aussi la cloison recto-vaginale. L inspection se fait dans un premier temps, sans aide matérielle à la recherche d un défaut dans l anatomie habituelle (désaxation du sillon interfessier, suppuration ou tuméfaction paraanale, lésion dermatologique, etc.), elle est ensuite réalisée en plaçant les pouces sur les deux côtés de la marge anale, et en déplissant les plis radiés de l anus, en faisant des tractions latérales et sagittales et il faut savoir devant une symptomatologie évocatrice rechercher, par exemple, une fissure anale cachée profondément à la commissure postérieure. Le toucher est ensuite réalisé en expliquant au malade la séquence de l examen : «Je vais maintenant vous examiner avec le doigt». Ce toucher doit être délicat et comporte trois temps : marginal, anal, rectal. Le premier temps marginal palpe la région péri-orificielle, à la recherche d un cordon de fistule ancienne, en appréciant le caractère fluctuant d une tuméfaction ou le caractère fixé d une lésion tumorale. La pression du doigt fera parfois perler une goutte de pus d une glande sous-pectinéale. Ce toucher marginal flatte l anus et le prépare au toucher anal. Le toucher anal est réalisé avec douceur. Les deux hémicirconférences anales sont examinées successivement avec l index au besoin, en réalisant un toucher pince avec le pouce, l index doit être complètement retiré du canal anal entre les deux explorations des hémicirconférences, cela pour éviter les phénomènes douloureux de vissage. On apprécie la régularité de la ligne des cryptes, l importance des papilles, leur sensibilité, la contractibilité anale à la toux et à la contraction volontaire, mais en aucun cas il ne faut compter sur le toucher anal pour faire le diagnostic d hémorroïdes. Enfin, le toucher rectal apprécie l intégrité des parois rectales, la saillie en cordon que peut réaliser un abcès intramural, le contact ligneux d une formation tumorale, la capacité contractile du muscle puborectal, en mettant le doigt en crochet dans la concavité sacrée. L anuscopie complète l examen proctologique standard. Après lubrification de l embout, l anuscope est introduit à fond. On demande au malade de pousser modérément, de façon à relâcher l appareil sphinctérien. L examen est ensuite réalisé après avoir enlevé le mandrin par retrait de l anuscope et sa luxation dans tous les quadrants. Lorsque l introduction de l anuscope est douloureuse, il faut réaliser une anesthésie locale à la Xylocaïne à 1 %, et au besoin, utiliser un anuscope pédiatrique qui donne une vision moins bonne. L anuscope permet d apprécier les qualités de la muqueuse rectale, et le retrait très progressif de l anuscope passe en revue les hémorroïdes internes, la ligne pectinée, la région sous pectinéale. Il faut parfois maintenir fermement l anuscope pour lui éviter d être expulsé et quand cela se produit, il faut savoir changer d anuscope pour refaire l examen qui serait sinon, par trop incertain. La rectoscopie explore le rectum et la partie basse du sygmoïde. Elle est réalisée avec un rectoscope rigide de 25 cm de longueur et de 2 cm de diamètre, dont on trouve actuellement des exemplaires à usage unique. Pour réaliser dans les meilleures conditions la rectoscopie, il est nécessaire de faire cambrer la région lombaire (en disant au patient de creuser le dos) et en lui proposant de poser la joue sur la table. Il faut impérativement faire progresser l appareil à vue, au besoin, en insufflant de l air avec poire pour déplisser les parois collabées. L aspect muqueux normal est lisse, rose pâle, en fond d œil avec un réseau vasculaire régulier. Enfin, l examen clinique permet d apprécier la valeur de l appareil recto-sphinctérien. Les épreuves de toux et de contraction volontaire explorent la valeur de l appareil résistif, l exploration des volumes intra-rectaux détermine la valeur de l appareil capacitif, qui est le rectum. On utilise pour ce faire, une sonde d aspiration bronchique sur laquelle est branché un ballonnet.

52 Pelvi-périnéologie L ensemble est lubrifié et introduit dans le rectum, et par un remplissage progressif du ballonnet par de l air, à l aide d une seringue de grande capacité, on analyse le volume seuil perçu, le volume du premier besoin et le volume maximal tolérable. Cette exploration simple, permet d apprécier la sensibilité et les capacités de compliance du rectum. Au terme d un interrogatoire bien conduit et d un examen clinique méthodique, la pathologie proctologique est le plus souvent évidente.