ISF des dirigeants et actionnaires Les bonnes questions
L ISF : Un barème très élevé Seuil d imposition : 1 300 000. Tranche Taux Calcul < 800 000 0% Assiette x 0 Entre 800 000 et 1 300 000 0,50% (A x 0,005) - 4 000 Entre 1 300 000 et 2 570 000 0,70% (A x 0,007) - 6 620 Entre 2 570 000 et 5 000 000 1% (A x 0,01) - 14 330 Entre 5 000 000 et 10 000 000 1,25% (A x 0,0125) - 26 830 > 10 000 000 1,5% (A x 0,015) - 51 830 2
Le poids très lourd de l ISF pour les actionnaires de PME + ETI Particularités du patrimoine des actionnaires de PME et ETI : Un actif peu liquide, Une rentabilité souvent faible (les PME et ETI favorisent souvent le réinvestissement). Le législateur a dû créer des dispositifs dérogatoires pour les dirigeants et actionnaires de PME Mais : Superposition de dispositifs multiples et complexes, Contenant des zones de fragilité ou d incertitude pour certains d entre eux. Sur le principe, il existe des solutions pour rendre supportable l ISF des actionnaires, Mais nombreuses difficultés lors de leur mise en œuvre pratique. 3
Quel régime d exonération choisir? L actionnaire qui détient des titres d une société industrielle ou commerciale imposable à l impôt sur les sociétés, dispose d un large choix entre plusieurs régimes d exonération totale ou partielle pour l ISF. Régime Taux d exonération Biens professionnels (885 O bis C.G.I. ) 100 % Pacte Dutreil ISF (885 I bis C.G.I.) 75 % Régime des salariés, mandataires sociaux et retraités (885 I quater C.G.I.) 75 % Souscription au capital des PME européennes (885 I ter C.G.I.) 100 % 4
Portée : exonération d ISF à 100 % Conditions : Souscription au capital de PME européennes - La société doit être une PME, au sens communautaire : Elle emploie moins de 250 salariés, Et son chiffre d affaires est inférieur à 50 M ou le total de son bilan est inférieur à 43 M - Toutes les souscriptions en numéraire sont éligibles (à la constitution ou lors d une augmentation de capital ultérieure), - Souscription par apports en nature : uniquement biens nécessaires à l activité (à l exception des apports d immeubles et valeurs mobilières), - souscription indirecte possible dans certaines hypothèses : Par société interposée si elle a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés opérationnelles et dans la limite d un seul niveau, Par FIP, FCPI. - Ne sont pas éligibles : les titres acquis par donation, succession, achat. (885 I ter du CGI) 5
Portée : exonération d ISF à 75 % Conditions : Régime des mandataires et salariés (885 I quater du CGI) - La société doit exercer une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, - Le redevable est salarié ou mandataire social et exerce son activité principale dans la société, - Les retraités sont éligibles s ils détiennent les titres depuis au moins 3 ans au moment du départ à la retraite (et dans certaines situations, le conjoint survivant), - Obligation de conservation des titres exonérés pendant 6 ans au minimum : la cession pendant le délai de 6 ans entraîne la remise en cause du dispositif d exonération partielle depuis l origine, à hauteur seulement des titres cédés. Les titres conservés conservent le bénéfice de l abattement. - Possibilité d application par sociétés interposées (au sens de l art 39-12 du CGI), sans limitation de nombre de niveaux d interposition. 6
Biens professionnels (885 O bis du CGI) Conditions : - Conditions qui tiennent à la société : la société a une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale - Conditions qui tiennent au redevable : Etre régulièrement nommé et exercer effectivement un mandat social éligible (gérant SARL, PCA, DG, membre du directoire, Président du Conseil de Surveillance), Détenir une participation d au moins 25 % des droits de vote avec son groupe familial ou par société «interposée» (1 niveau), Percevoir une rémunération «normale» représentant plus de 50 % de ses revenus professionnels. 7
Biens professionnels : Points de difficultés L exercice effectif des fonctions par les Présidents de Conseil de Surveillance L article 885 O bis du C.G.I. prévoit expressément que le Président du Conseil de Surveillance peut bénéficier de l exonération au titre des biens professionnels. Le Code de Commerce (L.225-81) dispose que la mission du Président du Conseil de Surveillance consiste à convoquer le conseil et à en présider les séances. Or, l administration exige de plus en plus souvent qu il contrôle la gestion de la société effectuée par le Directoire, ce qui incombe en principe au conseil de surveillance collectivement et non au seul Président. Remise en cause de l exonération lorsque le Président ne peut pas l établir (cf. Cass. Com 29 mars 2011, n 10-15-571) 8
Biens professionnels : Points de difficultés Incohérence de l approche sur l immobilier Le redevable qui détient directement ou indirectement (à travers une SCI) l immobilier loué à la société qui constitue son bien professionnel peut en principe bénéficier de l exonération. Mais nombreuses incohérences : Si la SCI n est pas propriétaire, mais titulaire d un crédit bail pas d exonération, Difficultés d application dans les groupes de sociétés 9
Biens professionnels : Points de difficultés Incohérence de l approche sur l immobilier Monsieur X 99 % HOLDING 99 % 100 % 100 % SCI SA T1 SA T2 Comité fiscal MOA du 29 mars 2000 10
Biens professionnels : Points de difficultés La trésorerie «excédentaire» Article 885 O ter : «Seule la fraction de la valeur des parts ou actions correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaires à l activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société est considérée comme un bien professionnel». L administration tente parfois de remettre en cause une partie de la trésorerie ou des placements financiers détenus par les sociétés. Pour la jurisprudence : La trésorerie détenue par la société est présumée être utile à l activité professionnelle, Il incombe à l administration d établir la preuve contraire ce qui lui impose de démontrer que la société a renoncé définitivement à l utiliser à des fins professionnelles, Cass com 8 février 2005 n 189 Gandois / Cass com 21 janvier 2014 n 12 28988 La mise en attente d un réinvestissement professionnel, parfois pendant plusieurs années, ne permet pas d établir le caractère non nécessaire dans l intervalle. Cass com 18 mai 2005 n 751 Soalhat / CA Toulouse 6 janvier 2014 n 12 04586 11
Le Pacte Dutreil ISF (885 I bis du CGI) Exonération d ISF à 75 % - Objectif : stabilité de l actionnariat et du management - Exemple : participation dans une société opérationnelle détenue par un associé non dirigeant valorisée 4 M : Conditions : - ISF sans engagement 25K, - ISF avec engagement 0 K. - Société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, - Conclusion d un engagement collectif de conservation de deux ans au moins portant sur 20 ou 34 % du capital, - Conservation par l actionnaire pendant au moins 6 ans à compter du début de l engagement, - Un des signataires de l engagement doit diriger la société pendant 5 ans, - Possibilité d application par société interposée (jusqu à 2 niveaux d interposition). 12
Le Pacte Dutreil ISF : Deux modes d application en pratique Engagement collectif de 2 ans (suivi d un engagement individuel de 4 ans) EC EI N N+2 N+5 N+6 Fonction de direction direction Engagement collectif de 6 ans EC N N+5 N+6 Fonction de direction 13
Le Pacte Dutreil ISF : Points de difficultés : l activité éligible «prépondérante» Activité exercée caractère prépondérant - La société objet de l engagement doit exercer une activité industrielle, commerciale, agricole, artisanale ou libérale. - L administration précise (BOI PAT ISF 30 40 60 10 20120912 n 20) qu il «n est pas exigé que ces sociétés exercent à titre exclusif les activités précitées. Dès lors, le bénéfice du régime de faveur n est pas refusé aux parts ou actions d une société qui exerce à la fois une activité civile et une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, dans la mesure où cette activité civile n est pas prépondérante. - Le caractère prépondérant de l activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale s apprécie au regard de deux critères cumulatifs que sont le chiffre d affaires procuré par cette activité (au moins 50 % du montant du chiffre d affaires total) et le montant de l actif brut immobilisé (au moins 50 % du montant total de l actif brut)». Des critères inadaptés par rapport à l objectif poursuivi, Sont-ils applicables également aux holdings animatrices? 14
Le Pacte Dutreil ISF : Points de difficultés : La réponse ministérielle Moyne-Bressand - Selon l article 885 I bis du C.G.I. : «Les associés de l engagement collectif de conservation peuvent effectuer entre eux des cessions ou donations des titres soumis à l engagement» - Mais selon la RM Moyne-Bressand (13 août 2013 JOAN, p. 8722), si un signataire consent une cession partielle à un autre signataire, le cédant est déchu pour le passé et pour l avenir pour la totalité de sa participation (titres cédés et titres conservés). paraît contraire à la loi, contraire aux travaux parlementaires, contraire à la doctrine administrative. Une nouvelle question posée par Mme le Député Grosskost le 21/01/2014 15
Pour tous les régimes : un point de difficulté majeur : La holding animatrice Principe : les titres des holdings animatrices peuvent bénéficier de l exonération. Définition : «sociétés qui outre la gestion d un portefeuille de participations, participent activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle des filiales et rendent, le cas échéant, et à titre purement interne au groupe, des services spécifiques administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers». Mais : Risques de contestation : Sur la preuve de l animation, Sur la nécessité selon l administration d animer toutes les filiales, Sur la détention d une filiale «foncière». 16
Conclusion : Comment utiliser au mieux les régimes de faveur? 100 % 75 % 75 % 100 % 17
Conclusion : Comment utiliser au mieux les régimes de faveur? 1. Retenir le dispositif le plus adapté à chaque redevable (conditions à remplir, risques éventuels de remise en cause, évolution prévisible de la situation du redevable ou de celle de son entreprise), 2. Ne pas oublier les «petits» régimes (PME Européennes), 3. Utiliser le cumul des régimes lorsqu il est possible (par exemple : biens professionnels + pactes Dutreil ISF), 4. En cas de remise en cause d un régime, voir s il est possible d en substituer un autre pour limiter le coût du redressement (régime des mandataires et salariés), 5. Adapter les régimes au fur et à mesure de l évolution de la situation du redevable (création, détention, retraite, transmission). 18
L ISF des dirigeants et actionnaires Valentine CLEMENT journaliste à l AGEFI Xavier LEBRUN directeur de l ingénierie patrimonial, OUDART Jean-François DESBUQUOIS avocat associé, FIDAL 19