ATTEINTES NEUROLOGIQUES ET VIH Ana Canestri
Mr Franck L. Homme âgé de 34 ans, serveur, tabagique Dépistage VIH+ en 2010 Uvéite syphilitique Méningite lymphocytaire avec virologie et bactériologie négative Sang: VDRL: 64, TPHA: 20480 LCR: VDRL: 8
Q-1 Quel traitement proposez vous?
Penicilline IV pendant 10 à 14 jours (21 j) 18 à 24 million UI/ j en IVSE ou toutes les 4h Corticothérapie (80 mg/j) surtout dans l uvéite pour diminuer inflammation intraoculaire et dans les atteintes sévères de neurosyphilis pour prévenir la réaction de Jarisch-Herxheimer En cas d allergies aux pénicillines: Tetracyclines, chloramphenicol, et ceftriaxone Pas d étude mais cas cliniques, ou extrapolation sur des modèles animaux
Neurosyphilis A tout stade d infection Clinique: méningite (céphalées, fièvre méningisme, méningovascularite, atteinte parenchymateuse avec atteinte du tronc (VII/VIII, II/III/VI) gomme syphilitiques Rares: 0.3% to 2.4% des syphilis non traitées. Méningite lymphocytaire, hyperprotéinorachique, normoglychorachique VDRL + : Dg positif mais si n élimine pas dg PCR
Mr Franck Pas de coinfection, sérologies CMV et toxoplasmose positives CD4: 332/mm3 et CV: 50 000 cp/ml Mis sous TDF/FTC/LPV Perdu de vue
Mr Franck L. 05/02/12: Céphalées fébriles, troubles de l équilibre, vomissements en jet, perte de conscience Grande garde de neurochirurgie: ventriculocysternotomie Vous êtes appelé parce que son compagnon signale la séropositivité
Q2- Quel bilan biologique et radiologique demandez vous?
Q2- Quel bilan biologique et radiologique demandez vous? Bilan VIH: Sérologies VHB/VHC Sérologies toxoplasmose et CMV Charge virale Génotype CD4/CD8 HLAB57-01 Sérologie syphilis Bilan lésion cérébrale: IRM avec injection PL avec biochimie et bactério standard Recherche de HSV/VZV/CMV/JC /EBV Charge virale VIH LCR ; PCR toxo Encre de chine et Ag cryptocoque VDRL Cytologie; garder un tube
Le bilan retrouve LCR: Protéinorachie à 0,46 g/l, glycorachie normale 1 éléments, bactériologie négative au direct et en culture PCR CMV/VZV/HSV négatives HIV RNA LCR: 300 000 cp/ml Encre de chine négative CD4: 10/mm3 (4%), CV: 223 000cp/ml VDRL: 16, TPHA: 5120
Q3-Décrivez les lésions visibles à l IRM cérébrale
Hyposignal T1 Abcès cérébral prenant le contraste en cocarde
Q-4: Quel est le diagnostic le plus probable? Donnez les arguments pour et contre pour chaque étiologie 1- Lymphome 2- Toxoplasmose cérébrale 3- Tuberculome 4- Cryptococcome 5- Gomme syphilitique
Q-4: Quel est le diagnostic le plus probable? Donnez les arguments pour et contre pour chaque étiologie 1- Lymphome: Pour: patient très immunodéprimé, lésion unique paraventriculaire, IRM en faveur Contre: argument de fréquence (0,1/1000 PA) 2- Toxoplasmose cérébrale: Pour: CD4< 200/mm3, sérologie toxoplasmose positive, IRM en faveur, argument de fréquence (5èmè cause de mortalité liée au VIH en France, prévalence: 1,2/1000PA) Contre: rien 3- Tuberculome: Pour: IRM en faveur, même si lésions le plus souvent multiples Contre: argument de fréquence, pays d origine, tableau plus insidieux avec AEG et fièvre 4- Cryptococcome Contre: argument de fréquence, pays d origine, lésions ne prenant pas le contraste 5- Gomme syphilitique Contre: argument de fréquence, lésions ne prenant pas le contraste, tableau plus insidieux (10 à 20 ans), démence associée HIV-associated central nervous system diseases in the recent combination antiretroviral therapy era, European Journal of Neurology 2011
Toxoplasma gondii
Toxoplasmose: Diagnostic Clinique: Forme Abcédée (80% des cas): Déficit neurologique focalisé d installation rapide. Céphalées, Hypertension Intracrânienne Fièvre dans 50% des cas Forme Encéphalitique Aiguë: Confusion, crises comitiales, coma rare chez le patient VIH sauf en cas de Idep sévère et primo infection. Imagerie (+) : IRM plus sensible que TDM Lésion élémentaire : non spécifique mais caractéristique Lésions multiples d'âge différent ++ Sérologie Toxoplasmique (-): Dg improbable PCR dans le sang et le LCR: Dans le sang ou le LCR: sensibilité allant de 17% à 65% en fonction des études Traitement d épreuve (++) Molecular diagnosis of toxoplasmosis in immunocompromised patients, Florence Robert-Gangneuxa, Curr Opin Infect Dis 2016
Toxoplasmose cérébrale: Traitement Traitement d'attaque (Probabiliste et Urgent +) Pyriméthamine - Sulfadiazine = Référence Toxicité hématologique Acide Folinique (25 mg/j) Toxicités cutanée, rénale et hépatique Triméthoprime - Sulfaméthoxazole Torre, AAC 1998- Béraud, Am J Trop Med Hyg., 2009 - Goita, MaliMed, 2012 Pyriméthamine Clindamycine (2,4g/j): si allergie aux sulfamides Pyriméthamine - Atovaquone (1500 mg *2) Efficacité clinique en 5-7 jours Durée: au moins 6 semaines Traitement d entretien: demi dose jusqu à CD4>200/mm 3 Traitements Adjuvants Si épilepsie: traitement anticomitial Si HTIC: discuter corticoïdes mais dg lymphome Attention à anguillulose déssiminée et hvb chronique
Mr Franck L. Mis sous Pyrimétamine/Sulfadiazine J10: allergie à la sulfadiazine, remplacée par clindamycine Amélioration clinique des céphalées et de la diplopie J15: IRM: nette diminution de l abcès du tronc Mis sous TDF/FTC/DRVr
Mr Franck L. Revu en HDJ à S6 du traitement d attaque pour toxoplasmose cérébrale S4 du traitement antirétroviral Cliniquement: tremblement de la main G avec une dissymétrie cérébelleuse Bilan immunovirologique à M1: CV: 774 cp/ml (- 2.5 log) CD4: 100/mm3 (15%) (+ 90 CD4/mm3, 11%)
Mr Franck L. IRM: nette diminution de l abcès du tronc
Mais Q-5: décrivez les lésions IRM
Mais Q-5: décrivez les lésions IRM Hyposignal T1 Discrète prise de contraste Hypersignal T2-Flair
Mr Franck L. PL: Biochimie: protéinorachie: 0.57g/l, gly: 3.4 mmol/l Bactério: 13 éléments, 1 hématies, direct et culture négative Virologie: PCR CMV/HSV/VZV négative PCR JC négative CV: 59 000 cp/ml, génotype sauvage Syphilis: VDRL négative, TPHA: 80
Q-6 Quel est le diagnostic le plus probable. Argumentez votre choix Quel est le diagnostic le plus probable 1- Lymphome 2- Toxoplasmose cérébrale 3- LEMP 4- Encéphalite VIH
Mr. Franck L. Toxoplasmose: Evolution: nette diminution de l image du tronc cérébral Imagerie non typique: abcès prenant le contraste en anneau Lymphome cérébral: Diagnostic différentiel de la toxoplasmose cérébrale Imagerie non caractéristique Diagnostic d exclusion
Mr Franck L. Encéphalite VIH: Pour: CV: 9 000 cp/ml dans le LCR Contre: Clinique: encéphalite et non déficit local CV + dans le LCR mais décroissance dans le LCR plus lente que dans le plasma Imagerie non caractéristique: pas d hyposignal T1, pas de prise de contraste, hypersignal T2 mais atteinte périventriculaire souvent symétrique
Mr Franck L. LEMP-IRIS: Pour: Clinique insidieuse, déficit focal Imagerie typique: atteinte localisée, asymétrique. Hyposignal T1, hypersignal T2 Flair, prise de contraste évocatrice de IRIS Début du traitement antirétroviral il y a un mois, diminution rapide de la CV Contre: PCR JC négative mais faible sensibilité
La neuroinvasion par VIH Sang Monocyte BHE ICAM-1 VCAM INF, IL-4, IL-10.. Astrocyte Neurotoxines Cerveau Macrophage périvasculaire Microglie PAF, QUIN, glutamate gp120
Encéphalite à VIH Cliniquement: Syndrome sous-cortico-frontal: troubles de la mémoire, ralentissement psychomoteur troubles de l attention et de la concentration. démarche spastique, adiadococinésie. Imagerie: Leucopathie diffuse, bilatérale et symétrique Prédominance sus-tentorielle : Périventriculaire (fronto-parietale) Atteinte sous-tentorielle possible : cervelet et TC Hypersignal FLAIR en plages confluentes Isosignal T1 Pas d anomalie en diffusion, pas de rehaussement, pas d effet de masse
Diagnostic et traitement Diagnostic d élimination: Eliminer les autres pathogènes Classiquement CV élevée dans le LCR mais non toujours corrélée à la clinique. Compte tenu de la diffusion à travers la BHE, on dit que CVLCR <1 log/cv plasma Chez les patients non traités, présence de virus dans le LCR sans clinique ni imagerie en faveur ne veut pas forcément dire encéphalite à VIH: Présence de virus dans le LCR d autant plus si autre IO à tropisme neuro associée. Diminution de la CV plus lente dans le LCR/Sang Traitement: Mise en route d un tt ARV ++ Avec une bonne diffusion dans le LCR : tenir compte de la taille des molécules ARV, de leur liaison protéique, de la liposolubilité
Leucoencéphalopathie Multifocale Progressive Démyélinisation de la substance blanche par réactivation du Papovavirus JC (John Cunningham) JC virus: virus DNA, prévalence de 50 à 90% de la population générale. Tropisme urines, os et SNC Avant HAART: prévalence de LEMP de 3 à 7% l incidence décroit de 0.7/100 PA en 94 0.07/100PA en 2001 Cependant la diminution d incidence la plus faible de toutes les infections du SNC (D Arminio Monforte, Ann Neurol 2004) Peut se développer chez des patients avec CD4>200/mm3 chez de patients avec un traitement antirétroviral efficace LEMP associée à une restauration immunitaire
Leucoencéphalopathie Multifocale Progressive Clinique: L atteinte neurologique est progressive et dépend de l étendue de la lésion. Tropisme pour la SB, souvent asymétrique, cervelet souvent atteint Céphalées et fièvre sont rares IRM: atteinte de la SB, hyposignal T1, hypersignal T2 Formes inflammatoires: prise de contraste œdème, effet de masse PCR JC: sensibilité de 72 à 92%; spécificité: 92 à 100% Sensibilité diminue à 58% chez les patients sous tt et dépend de l étendue des lésions
Mr Franck=LEMP-IRIS Clinique insidieuse, déficit focal S4 ARV avec: CV: 774 cp/ml (- 2.5 log) CD4: 100/mm3 (15%) (+ 90 CD4/mm3, 11%)
Q7:Dans le cas de Franck quelle est votre attitude thérapeutique? 1- Changement traitement antirétroviral + corticothérapie 2- Changement traitement antirétroviral sans corticothérapie 3- Pas de modification du traitement antirétroviral + corticothérapie 4- Poursuite à l identique 5- Cidofovir
Traitement actif sur le JC virus Pas de traitement spécifique du JC virus en dehors de la restauration immunitaire: Les ARV arrêtent la progression de la LEMP dans 50% des cas
IRIS associé à JC-virus: place des corticoïdes? (Tan, Neurology 2009) Étude rétrospective: apparition ou aggravation d une LEMP chez des patients VIH sous traitement ARV 54 IRIS-LEMP 36 pts: Infection latente 18 pts : aggravation paradoxale Délai médian: S7 après début antiretroviraux (S1-26 mois) Données immunovirologiques: CD4: initial 40/mm3 (0-450); CV: 150 000 cp/ml IRIS: + 124/mm3 (19-550), - 2.3 log Aggravation paradoxale vs infection latente: Aggravation plus précoce, plus de lésions, mortalité supérieure
Traitement IRIS-LEMP : Place des corticoïdes? Les corticoïdes sont immunosuppresseurs et donc pourraient favoriser la réplication du virus JC? Efficacité et tolérance? 12 patients traités par CT pour IRIS-LEMP Pas de différence sur survie chez pts traités par corticoïdes ou non 5 décès, 7 patients ont survecus 6/7 qui ont survecus avaient une prise de contraste à IRM Meilleur pronostic si corticothérapie précoce, plus longues et décroissance moins rapide Corticoïdes devraient être réservés aux situations : d aggravation clinique majeure d engagement cérébral (clinique ou radiologique)
Place du MVC dans le traitement de IRIS- LEMP Augmentation des LEMP chez les patients traités par natalizumab Augmentation des cas d IRIS-LEMP à l arrêt de immunosupression Implication des récepteur CCR-5 des monocytes dans les IRIS -> utilisation du MVC (anti CCR-5) dans le traitement d un IRIS-LEMP Maraviroc and JC Virus Associated Immune Reconstitution Inflammatory Syndrome N Engl J Med. 2014 Stork L, High CCR5 expression in natalizumab-associated progressive multifocal leukoencephalopathy immune reconstitution inflammatory syndrome supports treatment with the CCR5 inhibitor maraviroc. Acta Neuropathol 2015 -> utilisation du MVC (anti CCR-5) dans le traitement VIH pour prévenir un IRIS- LEMP??
En synthèse tt de la LEMP chez patient VIH Traitement antirétroviral Patients naïfs Patients traités depuis <6 mois Patients sous traitements avec CV LCR <50 c/ml Patients sous traitement CV LCR > 50cp/ml Si signes inflammatoires Débuter sans attendre Continuer Intensification par MVC? Modification (génotype) Intensification ARV Continuer les ARV Discuter les corticoïdes/mvc
Mr. Franck L. Changement ARV: Arrêt TDF/FTC pour ABC/3TC, poursuite du DRVr Pas de corticothérapie Stabilité clinique, amélioration avec de la rééducation IRM à M6: Disparition de la prise de contraste Diminution de l hypersignal en séquence T2- Flair
Merci de votre attention