objectif de ce livre est de vous donner une vision globale des L principaux enjeux et des différents aspects du marketing comportemental. Les deux auteurs ont suivi des parcours différents. L un est parti de la data et du CRM* 1, et s est ensuite spécialisé sur l exploitation de la donnée client sur le web. L autre est venu à la donnée online en partant du web marketing, de la publicité interactive et des conversions en temps réel digitales. Le marketing comportemental est précisément à la jonction des univers de la data et du web, qui pendant trop longtemps ne se sont pas parlés. Les sociétés intégrant au sein d une même division leurs services marketing online et offline ou domaines de connaissance client et de l internet restent une très faible minorité. Le marketing comportemental est précisément à la croisée de ces deux chemins car il regroupe les forces combinées de ces deux composantes du marketing en passe de devenir indissociables. Toutes les données disponibles sur les consommateurs contribuent au développement de la connaissance client. Une fois portée sur le web, cette connaissance client trouve un terrain d expression exceptionnel et devient un formidable accélérateur de performance marketing. Dès que l on parle de base de données clients, de segmentation d audience, de profiling*, de ciblage ou de personnalisation, on rentre dans le champ d application du marketing comportemental. Le marketing comportemental étend chaque jour un peu plus son champ d action. Si vous êtes dans le marketing, vous allez forcément être amené à le pratiquer, ou à minima à y être exposé. Nous allons partager avec vous les conséquences parfois révolutionnaires du marketing comportemental, l impact sur les principaux acteurs du marché, et les business modèles émergents à observer. En effet, le 1. Les mots ou expressions suivis d un astérisque sont définis dans le glossaire en fin d ouvrage. Avant-propos
Avant-propos marketing comportemental fera rentrer des générations de marketeurs dans une nouvelle ère. Les régies publicitaires, les agences, les annonceurs, les médias commencent à comprendre les implications de ces pratiques. Et comme le titrait le New York Times en mai 2009, «Il y a peu, la data était citée en annexe dans les présentations des agences interactives*. Elle est aujourd hui au cœur des stratégies internet que celles-ci proposent». VI
Remerciements....................................... Avant-propos......................................... III V Partie I : Fondements et genèse du marketing comportemental Chapitre 1 :.................. 3 Internet, un monde vivant fait de partage, de profusion et de fragmentation. 3 Média internet et pression sur les prix. 4 Moteurs de recherche, ciblage et impact sur la valeur créée. 6 Développement des ad exchanges et rôle central de la donnée sur le nouvel écosystème média. 7 Chapitre 2 : Le développement du marketing comportemental.... 9 Définition du marketing comportemental. 10 Développement du ciblage et du marketing comportemental. sur les canaux traditionnels. 11 Les méthodes de ciblage non comportemental. 11 Les méthodes de ciblage comportemental développées. sur les canaux traditionnels. 13 Ciblage comportemental et secteurs transactionnels. 18 Émergence du marketing comportemental aux États-Unis. 22 Développement de la personnalisation aux États-Unis. 23 Développement du ciblage comportemental aux États-Unis, puis en Europe. 26 Internet favorise l expression et le développement du marketing comportemental. 28 Le marketing comportemental est amené à prendre une place croissante dans les dispositifs marketing. 33 Sommaire
Fondements et genèse du marketing comportemental Internet est un média atypique. Il remet en question les modèles traditionnels de valorisation et de pilotage du média. Son avenir et sa place au sein des dispositifs marketing croîtront avec le dévelop pement du marketing comportemental. Développées en premier lieu sur le web, les approches marketing comportementales vont peu à peu irriguer l ensemble des canaux et des médias. Partie 1
Chapitre 1 Le web sans ciblage souffre de la comparaison avec les autres médias. Pourtant, dès lors qu il permet de toucher des cibles clients en phase d achat, il retrouve des couleurs et devient fortement valorisé. Le web a besoin du ciblage pour exprimer tout son potentiel. Internet, un monde vivant fait de partage, de profusion et de fragmentation Avec quinze années de recul sur internet et sur son mode de fonctionnement, chacun a sa définition de ce qu est l internet. Wikipedia le définit comme «un réseau informatique mondial qui rend accessibles au public des services variés comme le courrier électronique, la messagerie instantanée et le World Wide Web, en utilisant le protocole de communication IP (Internet protocol)». Nous voulons retenir pour notre part qu internet est une technologie qui permet à chacun, quel qu il soit, de mettre à disposition de tous, l ensemble des contenus, services ou articles qu il souhaite partager ou faire connaître. Ainsi, Youtube diffuse plus de contenus vidéos en deux mois que le cumul des programmes diffusés par les trois grandes chaînes historiques américaines ABC, NBC et CBS depuis 1948, année depuis laquelle ces trois grandes chaînes cohabitent 1. Le web est un média vivant, que nous contribuons tous à créer et à alimenter. Comme le recense Erik Qualman dans son livre Socialnomics 2, le web c est 200 millions de blogs, 13 millions d articles mis en ligne sur Wikipedia, plus de 1,5 million de contenus échangés 1. Karl Fisch et Scott Mc Leod, «Did you know» sur le blog The FischBowl. 2. Voir blog d Erik Qualman http://socialnomics.net. Mots-clés Prolifération des contenus Fragmentation des audiences Modèles média Ad exchanges Moteurs de recherche Inventaires publicitaires
1 Chapitre chaque jour sur Facebook. De même Terrence Sejnowski, neuroscientifique spécialiste de l intelligence numérique au Howard Hughes Medical Institute et co-auteur de The Computational Brain, résume ainsi l évolution de l internet : «Depuis sa genèse en 1969, l internet a grossi d une manière qu aucun de ses inventeurs n aurait pu imaginer. La plupart des systèmes issus de l ingénierie humaine deviennent obsolètes lorsque la limite liée à l exploitation de leurs capacités est atteinte. La croissance de l internet est sans limite car l internet a la capacité à s autoréguler et à toujours emprunter les voies les plus efficaces pour faire circuler des volumes sans précédent d informations et de contenus [ ]. L évolution de l internet sur les dernières décennies ressemble davantage à une mutation biologique qu à un système construit par des ingénieurs.» Le web est partage, profusion et prolifération. Les contenus produits sur internet explosent et croissent beaucoup plus vite que ne le fait la consommation des médias, cette dernière étant mécaniquement limitée aux quelques heures que chacun de nous y consacre dans une journée. Cette explosion de contenus illustrée par la croissance exponentielle des volumes de requêtes sur Google, passées de 500 millions par jour en 2006 à plus de 1 milliard en 2009 remet fondamentalement en question les modèles économiques des médias tels que nous les avons connus avant l apparition du web. Média internet et pression sur les prix Sur internet, l offre de contenu ne connaît aucune limite ni technique ni légale dans son développement. La croissance de l offre de contenus est elle-même génératrice d un volume d inventaires publicitaires disponibles chaque jour plus important. Cet espace publicitaire croît mécaniquement et structurellement alors que la demande, représentée par la somme des budgets médias des annonceurs croît à rythme très modéré, de quelques pourcents par an. Il en ressort un excédent structurel de l offre publicitaire sur internet, avec pour corollaire une pression très forte sur les prix. Comme le montre la figure 1.1 publiée par Morgan Stanley ci-après, le coût au mille (CPM*) des bannières publicitaires sur internet a été divisé par deux entre 2005 et 2008. Si on prolonge cette tendance sur 2009, on peut estimer que le prix a été divisé par 3 depuis 2005. 4
Chapitre 1 Surcapacité d inventaires publicitaires et baisse des prix : l exemple des États-Unis Impressions et CPM de bannières aux États-Unis - 1 er trim. 2005 à 2 nd trim. 2008 1,000,000 $ 3,50 Impressions et CPM de bannières aux États-Unis - 1 er trim. 2005 à 2 nd trim. 2008 40,000 $ 40 Figure 1.1 Impressions (millions) 900,000 800,000 700,000 600,000 500,000 400,000 300,000 200,000 100,000 0 3/05 9/05 CPM moyens des bannières 3/06 9/06 Nombre d impressions de bannières 3/07 9/07 3/08 $ 3,00 $ 2,50 $ 2,00 $ 1,50 $ 1,00 $ 0,50 $ 0,00 CPM Impressions (millions) 35,000 30,000 25,000 20,000 15,000 10,000 5,000 0 3/05 9/05 CPM moyens du Rich Media* 3/06 9/06 Nombre d impressions en Rich Media 3/07 9/07 3/08 $ 35 $ 30 $ 25 $ 20 $ 15 $ 10 $ 5 $ 0 CPM Source : Morgan Stanley Research, Internet Advertising Bureau, Nielsen Netratings. Comparaison du prix des différents supports médias (États-Unis) TV chaînes généralistes Presse quotidienne TV par câble Presse magazine Internet Affichage Radio Coût au mille (CPM) par type de média Figure 1.2 CPM <$2 $6 $10 $14 $18 $22 $26 $30 >$34 Source : Morgan Stanley Media Research, Media Dynamics. 5
1 Chapitre Aujourd hui, le revenu publicitaire généré par un contenu donné est entre 5 et 10 fois supérieur lorsque ce même contenu est diffusé sur un support traditionnel (en broadcast TV ou en diffusion papier) par rapport à sa diffusion sur internet. Ce manque à gagner considérable est illustré dans les écarts de prix constatés entre les différents supports médias tels que présentés dans la figure 1.2. Moteurs de recherche, ciblage et impact sur la valeur créée 6 Pourtant, alors que l offre d espace publicitaire sur internet est supérieure à la demande, il est un support publicitaire qui voit ses prix augmenter de façon soutenue et régulière depuis maintenant de nombreuses années. Ce support est celui des moteurs de recherche : le prix des mots-clés augmente de 3 à 5 % année après année. Pourquoi et comment un acteur comme Google parvient-il à maintenir et à continuer de faire croître ses prix dans un environnement où l offre est sur-capacitaire? Au-delà d être un moteur de recherche pour les internautes, Google est un formidable outil de ciblage pour les marketeurs : les moteurs de recherche permettent de toucher les consommateurs qui sont très exactement dans la phase d achat d un produit ou d un service. Le succès actuel du retargeting* sur le marché français est un autre parfait exemple de cette mécanique. Si un éditeur E permet de réexposer un internaute I qui a abandonné son panier sur le site de l annonceur A, A sera prêt à payer un prix très élevé à E pour réexposer I à sa marque. Avec les moteurs de recherche, comme avec le retargeting, ce que l annonceur achète et est prêt à «surpayer», ce n est plus l inventaire mais les quelques secondes d attention d un acheteur potentiel de son produit ou service. Ces quelques secondes valent très cher, car à la différence de l inventaire publicitaire qui est illimité, le temps passé par un internaute sur la toile est lui limité. Le ciblage permet donc de créer la rareté du temps d exposition d un internaute à forte valeur là où il y avait abondance et sur-offre de contenus publicitaires. C est pourquoi les acteurs capables de présenter aux marques les acheteurs potentiels de leurs produits et services les proposent sous forme de mise aux enchères : c est déjà le cas pour les moteurs de recherche et les réseaux de retargeting, ce sera de plus en plus le cas avec le développement des techniques de ciblage.
Chapitre 1 À RETENIR La minute passée sur Google génère un revenu 15 à 20 fois supérieur au revenu publicitaire moyen généré par minute sur internet. Google nous démontre que la donnée de ciblage est une composante essentielle de l efficacité du média internet. Développement des ad exchanges et rôle central de la donnée sur le nouvel écosystème média Bien qu encore assez peu développées en Europe, et quasi inexistantes en France, les places de marché publicitaires, ou ad exchanges, explosent aux États-Unis 1. Elles mettent en relation acheteurs et vendeurs d inventaire publicitaire sur internet. Et offrent les fonctionnalités suivantes : l inventaire publicitaire est vendu aux enchères ; cette enchère se fait en temps réel ; le mieux disant est celui qui possède l information la mieux qualifiée sur l internaute. Dans un tel écosystème, la valeur de l inventaire est une fonction de la valeur des audiences qu il permet de toucher. Son développement a de nombreuses conséquences dont toutes ne sont pas encore connues. Parmi celles-ci notons-en au moins deux tout à fait déterminantes : la vente de l inventaire sur les places de marché s est accompagnée d une hausse des CPM, les acheteurs disposant d une qualification des internautes étant prêts à payer un prix plus élevé pour toucher les audiences à forte valeur ; la data joue un rôle central dans cet écosystème. Ainsi, le développement des ad exchange s accompagne de l apparition de nouveaux types d acteurs spécialisés sur la fourniture et l exploitation de la donnée nécessaire au ciblage : les data exchanges qui compilent la data sur les internautes et la mettent à disposition des acheteurs d inventaire ; les audience marketplaces qui agrègent données et inventaires pour proposer des dispositifs publicitaires ciblés clés en main. 1. Les principaux intervenants sur ce marché sont la plateforme Right Media de Yahoo!, la plateforme Adecn de Microsoft et la plateforme Google AdExchange. 7