Nouveaux anticoagulants oraux : données pharmacologiques à connaître pour la pratique clinique



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Transcription:

le point sur Nouveaux anticoagulants oraux : données pharmacologiques à connaître pour la pratique clinique Rev Med Suisse 2014 ; 10 : 319-24 X. Delavenne S. Laporte P. Mismetti Dr Xavier Delavenne Laboratoire de pharmacologietoxicologie Plateau de biologie Dr Silvy Laporte Pr Patrick Mismetti Unité de recherche clinique Innovation, Pharmacologie Bâtiment recherche Hôpital Nord 42055 Saint-Etienne France xavier.delavenne@chu-st-etienne.fr silvy.laporte@chu-st-etienne.fr patrick.mismetti@chu-st-etienne.fr New oral anticoagulants : pharmacological data to know for the clinical practice New oral anticoagulants target specific factors in the coagulation cascade by directly inhibiting thrombin for dabigatran and Factor Xa for -xatrans. Pharmacological progresses with these anticoagulants allow the use of fixed doses without any therapeutic drug monitoring. Their pharmacokinetic specificity is the key role of the transporter proteins P-glycoprotein (P-gp) for all these drugs and the metabolism mediated by CYP3A4 for -xabans. Dose adjustment is recommended for decreasing creatinine clearance or in case of drugdrug interaction. New oral anticoagulants are promising but their safety needs further investigations in particular populations such as elderly patients, patients with renal or hepatic impairment, or patients on polymedication. Les nouveaux anticoagulants oraux inhibent de façon spécifique et directe les facteurs de la coagulation activés, la thrombine pour le dabigatran, le facteur Xa pour les -xabans. Les améliorations pharmacologiques apportées par ces médicaments permettent une utilisation à dose fixe et sans suivi biologique. Au niveau pharmacocinétique, il faut souligner le rôle clé de la P-gp (glycoprotéine-p) dans le passage de toutes ces molécules et du CYP3A4 dans le métabolisme des -xabans. Il existe certaines situations cliniques nécessitant une adaptation posologique ou des précautions d emploi, comme l insuffisance rénale ou les interactions médicamenteuses. Ces molécules semblent prometteuses mais il faudra surveiller leur tolérance dans certaines populations (patients âgés, insuffisants rénaux et hépatiques, patients polymédiqués). introduction Depuis de nombreuses années, les antagonistes de la vitamine K (AVK) étaient les seuls anticoagulants oraux disponibles. Ils ont largement montré leur efficacité en prévention et dans le traitement de la maladie thromboembolique. Cependant, ils sont responsables d une importante iatrogénie liée à leur risque hémorragique. En fait, la marge thérapeutique étroite, associée à une très grande variabilité inter et intra-individuelle, de ces médicaments explique largement ce phénomène. Parmi les nombreuses sources de variabilité, on retrouve l âge, le poids, le tabagisme, l environnement, les interactions avec d autres médicaments et l alimentation. Plus récemment, il a été montré que cette variabilité résultait également d un polymorphisme de certains gènes comme ceux codant pour le CYP2C9 et VKORC1. Pour toutes ces raisons, le choix et l adaptation des doses d AVK doivent se faire selon un marqueur de l effet biologique de ces médicaments : l international normalized ratio (INR). Une belle avancée thérapeutique serait de disposer de nouvelles molécules anticoagulantes actives PO, ayant un meilleur rapport bénéfice/risque et d utilisation plus facile. Depuis quelques années, une nouvelle génération de médicaments actifs PO est arrivée sur le marché. Avec ces nouvelles molécules, l importance des variations et leurs causes devraient être moins importantes, l intervalle thérapeutique amélioré, et donc le suivi biologique évité. Parmi celles-ci, le dabigatran étéxilate, le rivaroxaban et l apixaban et bientôt l édoxaban sont ceux dont le développement est le plus avancé. mécanisme d action Contrairement aux anciennes molécules anticoagulantes comme les héparines, le fondaparinux ou les AVK, les nouvelles molécules agissent de façon spécifique et directe sur les facteurs de la coagulation activés. Deux cibles font l objet d une inhibition : la thrombine (facteur IIa) et le facteur X activé (Xa) (figure 1). Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 5 février 2014 319

Voie orale AVK Rivaroxaban Apixaban Edoxaban Bétrixaban Dabigatran Fibrinogène Figure 1. Cible pharmacologique des anticoagulants Inhibiteurs directs de la thrombine Voie parentérale Fibrine Héparines Fondaparinux Hirudine Bilavirudine Argatroban Plusieurs molécules ont été développées pour inactiver de façon spécifique l enzyme clé de la coagulation, la thrombine. Parmi elles, on retrouve les hirudines, l argatroban et le dabigatran, qui est le seul actif PO (le ximélagatran a été retiré du marché pour cause de toxicité hépatique). Inhibiteurs directs du facteur Xa Le facteur Xa occupe une place centrale dans le système de la coagulation. C est une cible de choix pour les médicaments anticoagulants tels que les héparines et les pensaccharides (fondaparinux, idraparinux). Le rivaroxaban et l apixaban sont les premiers inhibiteurs directs et sélectifs du facteur Xa, sans activité sur la thrombine et les actifs PO. L édoxaban et le bétrixaban sont en cours de développement. caractéristiques pharmacocinétiques Les principales caractéristiques pharmacocinétiques de ces nouveaux anticoagulants oraux sont regroupées dans le tableau 1. Le dabigatran étéxilate est une prodrogue rapidement hydrolysée en dabigatran. Le rivaroxaban et l apixaban sont directement actifs. Ces molécules se caractérisent par une pharmacocinétique dépendant de transporteurs membranaires et par un métabolisme hépatique dépendant des cytochromes P450 pour certains d entre eux. 1-3 Tous les nouveaux anticoagulants oraux sont des substrats de la glycoprotéine-p (P-gp). Cette glycoprotéine membranaire appartient à la famille des transporteurs membranaires de type ATP-binding cassette. Elle joue un rôle de pompe d efflux vis-à-vis de nombreux médicaments et limite leur passage à travers les principales barrières de l organisme. Au niveau intestinal, en particulier, elle limite leur absorption, et la biodisponibilité peut donc en être affectée, et ce de façon plus ou moins importante : elle varie de 80% pour le rivaroxaban à 7% pour le dabigatran. Contrairement au dabigatran, le rivaroxaban et l apixaban subissent une dégradation métabolique au niveau hépatique, notamment par le CYP3A4/3A5. Ce métabolisme n est pas la seule voie d élimination de ces molécules : celle-ci se fait majoritairement sous formes active pour le dabigatran, et de métabolites ou active pour le rivaroxaban et l apixaban. Ces molécules ont été développées pour limiter a priori la variabilité pharmacocinétique et pharmacodynamique. Néanmoins, différentes sources de variabilité ont été identifiées, pouvant être à l origine d une accumulation ou d une sous-exposition. interactions médicamenteuses à connaître Les interactions médicamenteuses avec les nouveaux anticoagulants oraux semblent moins importantes que celles concernant les AVK. Cependant, deux cibles ont été identifiées comme pouvant entraîner des interactions médicamenteuses cliniquement significatives : celle mettant en jeu la P-gp et celle concernant le CYP3A4. 4-6 Rôle de la P-gp et interactions médicamenteuses avec le dabigatran La P-gp joue un rôle fondamental dans la pharmacocinétique du dabigatran en limitant le passage digestif et, donc, la biodisponibilité à 7%. De nombreux médicaments Tableau 1. Principales caractéristiques pharmacologiques des nouveaux anticoagulants oraux UGT : UDP-glucuronosyltransférases. Dabigatran étéxilate (Pradaxa) Rivaroxaban (Xarelto) Apixaban (Eliquis) Cible pharmacologique Facteur IIa (thrombine) Facteur Xa Facteur Xa Biodisponibilité 7% 80-100% 50% Fixation aux protéines 35% 95% 87% T max 1,5-3 heures 2-4 heures 0,5-2 heures Métabolisme UGT (20%) CYP3A4/3A5 CYP3A4/3A5 CYP2J2 Elimination 80% rénale, forme active 36% rénale, forme active 25% rénale, forme active 20% rénale, biliaire, métabolites 32% rénale, métabolites 32% fécale, métabolites Demi-vie d élimination 7-17 heures 7-11 heures 8-15 heures 320 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 5 février 2014

substrats de ce transporteur peuvent en moduler l activité et, de ce fait, entraîner des modifications de l exposition au médicament (évaluée par l aire sous la courbe des concentrations plasmatiques en fonction du temps). Parmi eux, seuls les puissants inhibiteurs ou inducteurs de la P-gp sont impliqués dans des modifications pharmacociné ti ques suffisamment importantes pour entraîner des interactions médicamenteuses cliniquement significatives avec le dabigatran. La P-gp digestive, mais aussi rénale et biliaire, affecte dans une moindre mesure la pharmacocinétique du rivaroxaban et de l apixaban. Pour le dabigatran, différentes recommandations sont proposées : contre-indication formelle, évitement, réduction de la posologie et surveillance (tableau 2). Rôle du CYP3A4 et interactions médicamenteuses avec le rivaroxaban et l apixaban Le rivaroxaban et l apixaban sont des substrats du CYP3A4 hépatiques, dont l activité est soumise à une forte variabilité dépendante de facteurs environnementaux, mais surtout de l administration concomitante de médicaments. Parmi les inducteurs et les inhibiteurs de CYP3A4, seuls ceux qui modulent puissamment l activité de la P-gp de façon concomitante entraînent des modifications cliniquement significatives. Pour le dabigatran, le métabolisme hépatique ne passe pas par la voie des cytochromes (CYP450). Il n y a donc pas d interaction significative à envisager à partir de ces voies métaboliques. Pour le rivaroxaban ou l apixaban, on retrouve, selon les cas, soit des précautions d emploi, soit la recommandation d éviter l association, mais il n existe pas, à ce jour, de contre-indication formelle (tableau 3). Tableau 2. Interactions médicamenteuses cliniquement significatives avec le dabigatran donnant lieu à des recommandations Médicaments Aire sous la courbe Recommandations des concentrations plasmatiques Kétoconazole q150% Contre-indication Ciclosporine absolue Itraconazole Tacrolimus Amiodarone q60% Réduction de dose Quinidine q50% Vérapamil q70-150% Clarithromycine q2% Surveillance Rifampicine Q70% A éviter Millepertuis Carbamazépine Phénytoïne Tableau 3. Interactions médicamenteuses cliniquement significatives avec le rivaroxaban et l apixaban Médicaments Aire sous la courbe Recommandations des concentrations plasmatiques Rivaroxaban Apixaban Kétoconazole q160% q100% A éviter Ritonavir q150% Antiprotéases Itraconazole Voriconazole Posaconazole Clarithromycine q50% q40% Aucune Erythromycine q30% recommandation Diltiazem Rifampicine Q50% Q54% Précautions Millepertuis d emploi Carbamazépine Phénytoïne populations particulières D autres sources de variabilité ont été identifiées avec ces molécules, permettant d identifier des populations particulières. Patients insuffisants rénaux Le dabigatran est principalement éliminé sous forme inchangée dans les urines (tableau 1). Par rapport aux patients ayant une fonction rénale normale, l exposition des patients au dabigatran est augmentée de 40 à 80% chez le sujet insuffisant rénal léger et modèré, et de 140% chez le sujet insuffisant rénal sévère. 7 Pour le dabigatran, cette accumulation justifie une contreindication en présence d une insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine (ClCr) inférieure à 30 ml/min). Chez les patients présentant une insuffisance rénale modérée (ClCr 30-50 ml/min), la dose recommandée est : dans la prévention des événements thromboemboliques veineux après chirurgie orthopédique majeure : 150 mg 1 x/jour (au lieu de 220 mg/jour) (tableau 4). dans la fibrillation atriale (FA) : 150 mg 2 x/jour (dose inchangée) ou 110 mg 2 x/jour pour les patients à risque élevé de saignement (tableau 5). L élimination rénale sous forme active du rivaroxaban (33%) et de l apixaban (25%) est partielle, mais une accumulation est également observée chez le patient insuffisant rénal. Pour le rivaroxaban, ces données justifient une contreindication en cas d insuffisance rénale terminale (tableaux 4 à 6). Pour les autres patients : aucun ajustement de dose n est recommandé en prévention des événements thromboemboliques veineux Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 5 février 2014 321

postchirurgie orthopédique majeure. Cependant, chez les patients ayant une insuffisance rénale sévère (ClCr 15 à 30 ml/min), le rivaroxaban doit être utilisé avec prudence (tableau 4). Dans la FA, en cas d insuffisance rénale modérée ou sévère, la posologie recommandée est de 15 mg/jour au lieu de 20 mg/jour, avec une mention pour une utilisation avec prudence chez les patients présentant une insuffisance rénale sévère (ClCr comprise entre 15 et 30 ml/min) (tableau 5). Pour le traitement initial des thromboses veineuses profondes (TVP) et la prévention des récidives, les patients atteints d insuffisance rénale modérée ou sévère doivent être traités avec deux prises par jour de 15 mg pendant les trois premières semaines, puis 15 mg 1 x/jour avec une utilisation avec prudence si la ClCr est comprise entre 15 et 30 ml/min (tableau 6). Pour l apixaban, ces données justifient une contre-indication en cas d insuffisance rénale terminale (ClCr inférieure à 15 ml/min) (tableaux 4 et 5). Pour les autres patients : aucun ajustement de dose n est recommandé en prévention des événements thromboemboliques veineux postchirurgie orthopédique majeure. Cependant, chez les patients ayant une insuffisance rénale sévère (ClCr 15 à 30 ml/min), l apixaban doit être utilisé avec prudence (tableau 4). Dans la FA, en cas d insuffisance rénale sévère, ou d insuffisance rénale modérée associée à un autre facteur comme un poids m 60 kg ou un âge M 80 ans, l apixaban doit être utilisé à la dose de 2,5 mg 2 x/jour (au lieu de 5 mg 2 x/jour) (tableau 5). Il semble important de tempérer quelque peu ces recommandations. En effet, les données disponibles sur l ensemble de ces molécules sont extrêmement limitées chez les patients en insuffisance rénale sévère (ClCr l 30 ml/mn) et la prudence est de ne pas utiliser ces molécules dans cette population, dans l attente de données complémentaires. Par ailleurs, il faut souligner que tous les ajustements proposés sont basés sur la clairance de la créatinine estimée selon la formule de Cockcroft et Gault. On ne cherche donc pas ici à estimer la fonction rénale mais un risque hémorragique, notamment par la prise en compte, au sein d un seul score (Cockcroft et Gault), de l âge, du poids corporel, du sexe et indirectement du rein avec la créatininémie. Utiliser une autre formule comme le MDRD (modification of the diet in renal disease) peut surestimer ce score et, à tort, ne pas entraîner de réduction posologi que : 15% des patients avec un Cockcroft et Gault l à 50 ml/min aurait un MDRD L à 50 ml/min et recevrait donc une dose trop forte d anticoagulant. 8 Patients insuffisants hépatiques Le métabolisme hépatique partiel du dabigatran correspond à une glucuronoconjugaison qui aboutit à des métabolites actifs. Aussi, l insuffisance hépatique ne semble pas modifier de manière significative les propriétés pharmacocinétiques du dabigatran. 9 Cependant, les patients présentant un taux d enzymes hépatiques supérieur à deux fois la limite supérieure de la normale ont été exclus des essais cliniques. L administration de dabigatran n est pas recommandée dans cette population. Pour le rivaroxaban, du fait d une élimination hépatique partielle, une accumulation est observée chez l insuffisant hépatique. Pour le rivaroxaban, ces données justifient une contreindication chez les patients ayant une atteinte hépatique associée à une coagulopathie et à un risque de saignement cliniquement significatif. Par contre, chez les patients cirrhotiques ayant une insuffisance hépatique modérée (Child Pugh B) non associée à une coagulopathie : le rivaroxaban peut être utilisé avec prudence en chirurgie orthopédique majeure. Le rivaroxaban est contre-indiqué dans la FA et le traitement des thromboses veineuses profondes. Pour l apixaban, il existe également une contre-indication chez les patients ayant une atteinte hépatique associée Tableau 4. Recommandations des doses en fonction de la fonction rénale en prévention des événements thromboemboliques après chirurgie orthopédique majeure ClCr : clairance de la créatinine ; a peu de données cliniques, utiliser avec prudence. Insuffisance Insuffisance Insuffisance Insuffisance rénale légère rénale terminale rénale sévère rénale modérée ou fonction rénale normale ClCr l 15 ml/min ClCr 15 à 30 ml/min ClCr 30 à 50 ml/min ClCr L 50 ml/min Dabigatran (Pradaxa) Contre-indiqué Contre-indiqué 150 mg/jour a 220 mg/jour Rivaroxaban (Xarelto) Contre-indiqué 10 mg/jour a 10 mg/jour 10 mg/jour Apixaban (Eliquis) Contre-indiqué 2,5 mg 2 x/jour a 2,5 mg 2 x/jour 2,5 mg 2 x/jour 322 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 5 février 2014

Tableau 5. Recommandations des doses en fonction de la fonction rénale en prévention des AVC et embolies systémiques dans la fibrillation atriale Insuffisance Insuffisance Insuffisance Insuffisance rénale légère rénale terminale rénale sévère rénale modérée ou fonction rénale normale ClCr l 15 ml/min ClCr 15 à 30 ml/min ClCr 30 à 50 ml/min ClCr L 50 ml/min Dabigatran (Pradaxa) Contre-indiqué Contre-indiqué 150 mg 2 x/jour ou 150 mg 2 x/jour 110 mg 2 x/jour b Rivaroxaban (Xarelto) Contre-indiqué 15 mg/jour a 15 mg/jour 20 mg/jour Apixaban (Eliquis) Contre-indiqué 2,5 mg 2 x/jour 5 mg 2 x/jour ou 5 mg 2 x/jour 2,5 mg 2 x/jour c ClCr : clairance de la créatinine ; a peu de données cliniques, utiliser avec prudence ; b pour les patients à risque élevé de saignement : âge M 80 ans, traitement par vérapamil, association de plusieurs facteurs de risque hémorragiques ; c pour les patients à risque élevé de saignement : âge M 80 ans ou poids m 60 kg. Tableau 6. Recommandations des doses en fonction de la fonction rénale dans le traitement de la maladie thromboembolique veineuse ClCr : clairance de la créatinine ; a peu de données cliniques, utiliser avec prudence. Insuffisance Insuffisance Insuffisance Insuffisance rénale légère rénale terminale rénale sévère rénale modérée ou fonction rénale normale ClCr l 15 ml/min ClCr 15 à 30 ml/min ClCr 30 à 50 ml/min ClCr L 50 ml/min Rivaroxaban Contre-indiqué 15 mg 2 x/jour pendant 21 jours 15 mg 2 x/jour pendant 21 jours 15 mg 2 x/jour pendant 21 jours (Xarelto) 15 mg 1 x/jour ensuite a 15 mg 1 x/jour ensuite 20 mg 1 x/jour ensuite à une coagulopathie et à un risque de saignement cliniquement significatif. Quelle que soit l indication, l apixaban n est pas recommandé chez les patients présentant une insuffisance hépatique sévère. Il doit être utilisé avec précaution chez les patients ayant une insuffisance hépatique légère ou modérée (Child Pugh A ou B). Aucun ajustement posologique n est nécessaire chez les patients présentant une insuffisance hépatique légère ou modérée. Cependant, en l absence de données chez les patients ayant un taux d enzymes hépatiques ou de bilirubine élevé, l apixaban doit être utilisé avec précaution dans cette population. Comme pour l insuffisance rénale, la plus grande prudence est de rigueur en cas d insuffisance hépatique légère ou modérée dans la mesure où les données sont plus que limitées avec ces molécules dans cette population. Patients âgés Dans une étude menée chez les sujets âgés de plus de 65 ans, l aire sous la courbe du dabigatran était augmentée d un facteur 1,7 chez les femmes et de 2 chez les hommes par rapport aux sujets jeunes. 7 Cependant, une partie de cette accumulation s expliquerait par des facteurs confondants, comme une clairance de la créatinine plus faible chez les patients âgés. Les résultats cliniques plaident pour une augmentation du risque hémorragique sous dabigatran audelà de 80 ans, indépendamment de toute accumulation pharmacocinétique. 7 L âge explique aussi une partie de la variabilité de l absorption du dabigatran. Pour le rivaroxaban et l apixaban, l aire sous la courbe moyenne est également augmentée. 10 Pour le dabigatran, la dose quotidienne doit être réduite chez les sujets âgés : après chirurgie orthopédique majeure : la dose recommandée est de 150 mg 1 x/jour chez les patients de plus de 75 ans. Dans la FA, la dose recommandée est de 110 mg 2 x/ jour (au lieu de 150 mg 2 x/jour) chez les patients de plus de 80 ans. Pour le rivaroxaban, aucune réduction de dose n est recommandée, mais le traitement doit être utilisé avec prudence. Pour l apixaban, dans la FA, pour les patients de plus de M 80 ans, en cas d insuffisance rénale légère ou modérée ou d un poids m 60 kg, la dose réduite de 5 mg 2 x/ jour est recommandée. Patients de poids extrêmes Le poids des patients ne semble pas jouer un rôle majeur dans la pharmacocinétique de ces trois médicaments. Pour les poids extrêmes (moins de 50 kg ou plus de 120 kg), on retrouve des modifications de l exposition d environ 25 à 30%. 9,11-13 Pour le dabigatran, aucun ajustement posologique n est Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 5 février 2014 323

nécessaire, mais il est recommandé d avoir une surveillance clinique étroite chez les patients pesant moins de 50 kg. Pour l apixaban, dans la FA, pour les patients ayant un poids m 60 kg, en cas d insuffisance rénale légère ou modérée ou d un âge M 80 ans, la dose réduite de 5 mg 2 x/jour est recommandée. Pour les patients obèses, pesant plus de 120 kg, il n y a pas de donnée disponible actuellement. Dans l attente d études complémentaires, il est donc prudent d en rester au traitement conventionnel chez ce type de patients. relative sécurité d emploi en termes de risque hémorragique, notamment intracérébral. Ces nouvelles molécules présentent de nombreux avantages sur le plan pharmacologique. Elles possèdent une variabilité interindividuelle plus faible associée à une marge thérapeutique plus large, ce qui facilite grandement leur utilisation., elles sont administrées à doses fixes sans nécessiter de suivi biologi que. Il faudra cependant vérifier leur tolérance en termes d hémorragie dans des populations de patients moins sélectionnées et dans les conditions de pratique de soins courants, en particulier dans les populations âgées et polymédicamentées. Leur avenir semble donc prometteur, et plusieurs nouvelles molécules sont encore en cours de développement, comme l édoxaban et le bétrixaban. antidote Aujourd hui, il n existe pas d antidote spécifique à ces médicaments. En cas d interventions chirurgicales programmées, la demi-vie relativement courte de ces nouveaux anticoagulants oraux permet de réaliser une fenêtre thérapeutique (arrêt du traitement) de courte durée. Dans le cas d hémorragies majeures ou d interventions chirurgicales non programmées, une stratégie de réversion de l effet anticoagulant reste possible (facteurs de la coagulation activés ou inactifs : concentrés de complexes prothrombiniques, FEIBA (factor eight inhibitor bypassing activity) ou facteur VII activé). 14,15 conclusion Dans la plupart des indications, cette nouvelle classe thérapeutique des inhibiteurs spécifiques et directs des facteurs de la coagulation a montré une efficacité équivalente, voire supérieure, à celle des traitements de référence (héparine de bas poids moléculaire et/ou AVK) avec une Conflits d intérêts P. Mismetti a reçu des honoraires de Bayer, BMS, Boehringer Ingelheim, GSK et Pfizer en tant que consultant et membre de leur scientific advisory board. S. Laporte a reçu des honoraires de Bayer, Boehringer Ingelheim et LeoPharma en tant que consultante et membre de leur scientific advisory board. > > > Implications pratiques Du fait de leur plus faible variabilité interindividuelle et de leur marge thérapeutique plus large, ces nouvelles molécules peuvent être prescrites à dose fixe sans suivi biologique Cependant, des contre-indications et précautions d emploi sont à connaître, notamment du fait des interactions médicamenteuses et des caractéristiques de populations particulières (insuffisance rénale notamment) En l absence d antidote spécifique, dans le cas d hémorragies majeures ou d interventions chirurgicales urgentes, une stratégie de réversion de l effet anticoagulant reste indispensable Bibliographie 1 Blech S, Ebner T, Ludwig-Schwellinger E, Stangier J, Roth W. The metabolism and disposition of the oral direct thrombin inhibitor, dabigatran, in humans. Drug Metab Dispos 2008;36:386-99. 2 Lang D, Freudenberger C, Weinz C. 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