Pancréatites chroniques et aiguës. Pr. Philippe Lévy Pôle des Maladies de l Appareil Digestif Hôpital Beaujon, Clichy

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Transcription:

Pancréatites chroniques et aiguës Pr. Philippe Lévy Pôle des Maladies de l Appareil Digestif Hôpital Beaujon, Clichy 1

Pancréatite chronique 2

HISTOLOGIE Fibrose mutilante, irrégulière, intralobulaire, ± inflammatoire du parenchyme Calcifications et amas protéiques intracanalaires Involution du parenchyme exocrine puis endocrine

Pathogénie Augmentation de la concentration protéique dans le suc pancréatique induite par l alcool Précipitation d'amas protéiques dans les canaux Obstruction canalaire, calcifications Effet toxique direct de l alcool sur les acini Activation enzymatique in situ ++++

Pathogénie de la pancréatite chronique héréditaire

ASP Diagnostic Echographie calcifications TDM +++ CPIRM (valeur dans les f.débutantes? examen de référence ) Echoendoscopie (très sensible) CPRE de moins en moins Les tests fonctionnels sont peu utilisés Histologie en cas de résection.

TDM 7

CP-IRM Irrégularité du canal de Wirsung Alternance de sténoses et de dilatations Dilatation en «boule» des canaux secondaires Calculs intra-canalaires 8

CP-IRM 9

CP-IRM 10

Echoendoscopie 11

CPRE Plus jamais à titre diagnostic mais uniquement thérapeutique

CPRE 13

CPRE 14

Facteurs de risque Hommes : 80-90 % Début clinique entre 35-40 ans après 15-20 ans d alcoolisme chronique (moyenne 150 g/j) => 10-15 ans avant la cirrhose Tabac: très débattu (perpétuation des douleurs) Rôle d un régime riche en lipides et en protéines? Autres facteurs de risque +++ 15

Manifestations cliniques Douleurs chroniques (» 80-90 %) Poussées aiguës (révélatrices dans 30 % des cas) 10-20% de formes qui restent indolore

Douleurs chroniques Plus fréquentes dans les PC alcooliques 15 à 55% de formes indolores dans les PCNA 5 ans après le début clinique: 85% sans douleur 15-20 ans: 100% (parallèlement à l apparition des calcifications, du diabète et de l insuffisance pancréatique exocrine 17

Mécanismes de la douleur Hyperpression intracanalaire Inflammation péripancréatique Hypoxie par compression vasculaire par la fibrose Engainement péri-nerveux Complications (pseudo-kystes)

Pancréatite aiguë La PA alcoolique sans PC sous jacente n existe pas! Gravité inversement proportionnelle à la durée d évolution de la PC 19

Pancréatite aiguë Inaugurale chez 30 % des malades Touche 50% des malades Première poussée exceptionnelle après 5 ans. Gravité inversement proportionnelle à la durée d évolution de la PC 20

Pseudokyste pancréatique: Définition C est la complication la plus fréquente des pancréatites aiguës (PA) ou chroniques (PC). C est une collection de liquide pancréatique riche en enzymes, non bordée par un épithelium. 21

Pseudokyste pancréatique: Classification Grande hétérogénéité dans la littérature sur la classification des PK. Classifications basées sur: l aspect du contenu (macroscopique, radiologique...) la durée d évolution (+/- 6 semaines) les circonstances de survenue communiquant ou non 22

Pseudokyste pancréatique: Classification La meilleure classification actuelle est celle de D Edigio (1) qui distingue: PK compliquant une PA ( nécrotique) PK compliquant une PA sur PC ( nécrotique) PK rétentionnel compliquant une PC ( clair) (1) D Edigio Br J Surg 1991;78:981 23

Pseudokyste pancréatique: Evolution spontanée Asymptomatique Complication (cf infra) Régression Disparition spontanée 24

Pseudokyste pancréatique: Lesquels traiter d emblée? PK symptomatiques: Douleurs Compression d un organe de voisinage PK infectés ( abcès) PK hémoragiques (pseudoanévrisme) PK caudal et compression de la veine splénique? 25

Pseudokyste pancréatique: Facteurs prédictifs de traitement. PK intrapancréatique PK < 4 cm. 26

Compression de la VBP Chez 1/3 des malades, associée à une sténose duodénale dans un cas sur 3. A rechercher, même en l absence de symptomes (ictère, prurit, angiocholite), Par : - dosage Gamma GT Phosph. alcalines - échographie abdominale Risque d évolution : cirrhose biliaire secondaire Possibilité d une régression de la fibrose après traitement

Diabète Complication presque inexorable Rôle favorisant de la pancréatectomie gauche Rôle «préventif» de la dérivation wirsungo-jéjnunale? Pas de rôle des autres types de chirurgie, notamment la DPC. 28

Diabète 29

Stéatorrhée Elle n apparaît que si > 90 % du parenchyme pancréatique est détruit Son apparition est parallèle à celle des calcifications et à celle du diabète Elle est rarement seule responsable d une grande altération de l état général

Risque de dégénérescence Risque relatif élevé de développer un cancer pancréatique sur pancréatite chronique. Complication rare et de diagnostic difficile : son dépistage est inutile Le risque est plus élevé dans la pancréatite chronique héréditaire (RR= 80) Nécessité du dépistage d un cancer ORL ou oesophagien

Causes d altération de l état général Douleurs chroniques invalidantes Diabète sucré décompensé Cancer épidémiologiquement lié à l alcoolo-tabagisme (ORL, oesophage, poumon) Hépatopathie alcoolique Cancérisation?

Autres complications Compression duodénale (± DKPA) Thrombose veineuse mésentérique ou portale Epanchement des séreuses Pseudoanévrisme Complications spléniques 33

Mortalité Surmortalité 35% après 20 ans Mortalité due directement à la PC 25% des décès Causes de décès surtout liées aux autres complications de l alcoolo-tabagisme Cancer ORL et œsophage Cirrhose Affections cardio-vasculaires 34

Mortalité PCNA Population générale PCA 35

Complications de la pancréatite chronique 1-5 années d évolution Douleurs chroniques Poussées aiguës Pseudokystes nécrotiques Thromboses veineuses (veine porte, mésentérique supérieure, splénique) Nécessité d un recours à la chirurgie

Complications de la pancréatite chronique 5-10 ans d évolution Calcifications (» 50 % des cas) Pseudokystes rétentionnels Compression biliaire ou duodénale Epanchement des séreuses Douleurs chroniques Nécessité d un recours à la chirurgie Stéatorrhée Diabète sucré

Complications de la pancréatite chronique > 10 ans d évolution Calcifications (» > 80 % des cas). Rareté des douleurs Stéatorrhée Diabète sucré (80-90 % après 15 ans d évolution) Cancérisation (?)