PNEUMOPATHIES INTERSTITIELLES DIFFUSES item 120



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Transcription:

Collège des Enseignants de Pneumologie Référentiel pour la préparation de l ECN Pr Crestani (Paris), Pr Israel Biet (Paris) Pr Reynaud-Gaubert (Marseille); Pr Marquette (Nice) Dernière mise à jour : Juin 2010 PNEUMOPATHIES INTERSTITIELLES DIFFUSES item 120 Objectifs d enseignements tels que définis dans le programme de l ECN : Diagnostiquer une pneumopathie interstitielle diffuse Objectifs pédagogiques terminaux définis par le Collège des Enseignants de Pneumologie 1. Connaître la définition des pneumopathies interstitielles diffuses 2. Connaître les signes cliniques et radiologiques des pneumopathies interstitielles diffuses (encore appelées pneumopathies infiltrantes ou infiltratives diffuses) 3. Connaître les caractéristiques fonctionnelles respiratoires (EFR) des pneumopathies interstitielles diffuses 4. Savoir orienter l étiologie en fonction du caractère aigu ou chronique, primitif ou secondaire et de l état immunitaire du patient (immunocompétence versus immunodépression). 5. Connaître les principales causes 6. Connaître la stratégie diagnostique initiale devant une pneumopathie interstitielle diffuse 7. Connaître les manifestations et les principaux critères du diagnostic des principales pneumopathies interstitielles diffuses (Sarcoïdose, Fibrose pulmonaire idiopathique, Pneumopathie d hypersensibilité, Pneumopathie Interstitielle Non Spécifique, Pneumoconioses)

Points clés 1. Les pneumopathies interstitielles diffuses (PID) rassemblent plus d une centaine d entités différentes dont le point commun est de donner des opacités infiltratives diffuses sur la radiographie pulmonaire. 2. Contrairement à ce que le terme pneumopathie interstitielle pourrait laisser croire, les maladies en cause, si elles touchent essentiellement le compartiment interstitiel du poumon, peuvent aussi concerner le compartiment alvéolaire. 3. Les PID peuvent être classées en fonction de leur caractère aigu ou chronique et de leur cause, connue ou inconnue. 4. Les PID aiguës sont dominées par les causes infectieuses et hémodynamiques. 5. Le lavage broncho-alvéolaire est l examen clé au cours des PID aigues fébriles 6. Le bilan cardiologique est indispensable au cours des PID aigues non fébriles 7. PID sub-aigues ou chroniques sont dominées par la sarcoïdose, la fibrose pulmonaire idiopathique, les fibroses pulmonaires associées aux connectivites, la lymphangite carcinomateuse et l insuffisance cardiaque 8. La présentation clinique et les EFR des PID sont peu discriminatives. 9. Le scanner thoracique représente la pierre d angle de l orientation étiologique des PID subaigues ou chroniques 10. La prise en charge optimale nécessite la collaboration d experts spécifiquement formés au diagnostic des maladies interstitielles pulmonaires (cliniciens, radiologues, anatomopathologistes, chirurgiens) à toutes les étapes de la démarche diagnostique. 2/31

I. INTRODUCTION Les pneumopathies interstitielles diffuses (PID) regroupent les pathologies respiratoires de causes et de mécanismes variés, dont le point commun est de se traduire radiologiquement par des opacités infiltratives diffuses. Anatomiquement l atteinte de l interstitium pulmonaire (tissu conjonctif de soutien des axes broncho-vasculaires, cloisons interlobulaires et intra-alvéolaires, tissu sous-pleural) est au 1 er plan. L interrogatoire, la présentation clinique (aigue ou chronique), la séméiologie radiologique et le lavage broncho-alvéolaire sont les éléments essentiels du diagnostic des PID. La présentation clinique, radiologique et fonctionnelle et le raisonnement diagnostique face aux PID aigues et chroniques sont développés. La présentation des principales PID chroniques est exposée en annexe, à l exception de la sarcoïdose qui fait l objet d un chapitre spécifique. II. PRESENTATION CLINIQUE Le plus souvent : dyspnée d effort, non spécifique, d apparition très progressive toux non productive. Plus rarement découverte fortuite sur une radiographie réalisée pour une autre indication tableau clinique d emblée sévère (insuffisance respiratoire aiguë) III. PRESENTATION RADIOLOGIQUE III.1 La radiographie pulmonaire 1 Elle montre typiquement des opacités non confluentes, à contours nets, le plus souvent non systématisées bilatérales, plus ou moins symétriques associant des nodules (figure 1 et 2) de taille variable, des infiltrats et des lignes. Quand les lignes s entrecroisent, elles dessinent un réseau, encore appelé réticulations (du latin rete, filet; en anglais network). La radiographie pulmonaire montre plus rarement un pseudo aspect de bronchectasies kystiques ou d emphysème (c est le scanner thoracique qui corrige le diagnostic) un aspect normal (< 10 % des PID) et c est le scanner qui détecte la PID 1 La qualité technique de la radiographie est fondamentale pour une analyse précise des opacités interstitielles. 3/31

III.2 Le scanner thoracique : l examen clé son analyse nécessite une technique parfaite 2 et un radiologue expérimenté il caractérise les lésions élémentaires, il apprécie l étendue et la distribution anatomique des lésions :apicales/basales, centrales / périphériques il permet d évaluer la réversibilité des lésions 3. il permet d objectiver les potentielles pathologies intriquées III.3 la séméiologie radiologique élémentaire III.3.1 Nodules (figures 1, 2 et 3) Taille variable Définition Miliaire (grain de mil) Micronodules Nodules Macronodules Masse < 3 mm < 6 mm 6 10 mm 10 30 mm > 3 cm Distribution Au hasard (figure 1) Préférentielle : sous pleurale ; péribronchovasculaire (figure 3) ; péribronchiolaire (figure 4). Contours : nets ou flous (figure 4) 2 L examen doit comporter des coupes fines (1-1,5mm) reconstruites en haute résolution permettant l analyse du parenchyme pulmonaire mais également des coupes épaisses (5-10 mm) sans et avec injection de produit de contraste iodé, reconstruites en fenêtres médiastinales et parenchymateuses, afin d analyser de façon optimale la plèvre (épaississement, calcifications), de rechercher des adénopathies, et d explorer le parenchyme pulmonaire dans sa totalité. Le scanner doit être réalisé avant la fibroscopie dont il guidera les prélèvements. 3 Les opacités réticulées et le nid d abeille sont très fortement associés à l existence d une fibrose irréversible. Les opacités en verre dépoli sont potentiellement réversibles. 4/31

Figure 1 : miliaire tuberculeuse : micronodules à contours nets, < 3 mm, de distribution diffuse dans le parenchyme pulmonaire. De gauche à droite et de haut en bas : radiographie de thorax, même cliché, zoom sur le lobe inf droit, scanner thoracique, coupe en fenêtre parenchymateuse ; comparaison au même niveau de coupe d un poumon droit normal avec et l aspect de la miliaire de ce patient 5/31

Figure 2 : Métastases pulmonaires d un cancer thyroïdien : nodules et macronodules à contours nets (on note aussi l existence d un épanchement pleural droit). Figure 3 : Parenchyme pulmonaire normal (gauche). Sarcoïdose avec micronodules à distribués en sous pleural (plèvre pariétale et le long des scissures) et le long des parois bronchiques et des vaisseaux (droite). Il résulte de cette distribution une irrégularité et un épaississement des parois bronchiques. La grande scissure est marquée par les flèches. 6/31

Figure 4 : Parenchyme pulmonaire normal (gauche). Pneumonie d hypersensibilité (PHS) avec présence de nodules de faible densité à contours flous à distribution péribonchiolaires (droite). III.3.2 Lignes et réticulations Les lignes correspondent le plus souvent à l accentuation ou à la visualisation de structures anatomiques normalement non visibles. Septa inter-lobulaires (SIL) chaque lobule pulmonaire est centré sur une bronchiole terminale accompagnée de son artère centro-lobulaire les septa séparent les lobules pulmonaires (figure 5) ces septa contiennent le retour veineux pulmonaire et le retour lymphatique (figure 6) l épaississement des SIL se traduit par des lignes nettes dessinant des polygones à la périphérie du poumon (figure 7), constituant un réseau à grandes mailles souvent régulières, mieux visible aux apex et aux bases. 7/31

Figure 5 : représentation schématique du lobule pulmonaire Figure 6 : Homme, 45 ans fumeur. Dépôts de poussière (anthracose) dans les lymphatiques présents dans les SIL, marquant les limites des lobules pulmonaires à la périphérie du poumon, sous la plèvre viscérale (vue en thoracoscopie). 8/31

Figure 7 : Lymphangite carcinomateuse. Radiographie thoracique montrant un syndrome réticulo-nodulaire. Scanner en haute résolution (coupes passant par l apex et par la base du poumon gauche) montrant un épaississement des septa inter-lobulaires (SIL) dessinant la périphérie des lobules pulmonaires (les flèches désignent des artères centro-lobulaires). 9/31

Réticulations intra-lobulaires (RIL) opacités linéaires entrecroisées agencées en réseau à petites mailles le plus souvent irrégulières, prédominant dans les régions sous-pleurales (figure 8) correspondent à l épaississement de l interstitium péri-bronchiolaire intra-lobulaire Figure 8 : RIL dans le cadre d une pneumopathie interstitielle non spécifique (PINS). Les lignes peuvent aussi correspondre à des bandes de fibrose ou d atélectasie parallèles ou perpendiculaires à la plèvre essentiellement aux bases (voir asbestose). III.3.3 Epaississement péri-bronchovasculaire et des interfaces (scissure, plèvre) Régulier : non spécifique Irrégulier (spiculé ou nodulaire): plus spécifique de certaines affections comme la lymphangite carcinomateuse ou la sarcoïdose (figure 3) III.3.4 Hyperdensités Condensations pulmonaires : hyperdensité effaçant les scissures, les contours des vaisseaux et les parois bronchiques parfois avec bronchogramme aérique (figure 9). traduisent un comblement alvéolaire par du liquide, des cellules ou une substance amorphe 4 4 si l espace avéolaire ne fait pas à proprement parler de l interstitium pulmonaire, le fait que les affections qui comportent des condensations se traduisent sur la radio de thorax par des opacités infiltratives diffuses les inclut de facto dans les PID 10/31

Figure 9 : Pneumonie organisée cryptogénique (POC) se traduisant par des condensations bilatérales, de densité variables, à limites floues ou nettes, de localisation périphérique, certains contenant un bronchogramme aérique Verre dépoli : hyperdensité n effaçant pas les contours des vaisseaux ni les parois bronchiques (figure 10 et 11) traduisent un comblement alvéolaire (cf ci-dessus) ou une redistribution du flux sanguin capillaire Figure 10 : hémorragie alvéolaire se traduisant par des plages de verre dépoli diffuses 11/31

Figure 11 : carcinome bronchiolo-alvéolaire se traduisant une plage de verre dépoli localisée III.3.5 Kystes Kystes à paroi fine (figure 12) Espaces aériques de forme arrondie limités par une paroi fine, séparés les uns des autres par du poumon normal Diamètre de quelques mm à plusieurs cm, forme variable Diagnostic différentiel : emphysème, bronchectasies Figure 12 : Histiocytose langerhansienne se traduisant par l association de kystes, de nodules pleins, des nodules «troués» et de lésions de destruction parenchymateuse de forme aléatoire émanant de la confluence de kystes. 12/31

Kystes en rayon de miel, encore appelées images en nids d abeilles (figure 13) Espaces kystiques aériques limités par des parois épaissies, jointifs, en couches successives à disposition sous-pleurale, Traduit le stade ultime de la fibrose pulmonaire Figure 13 : «rayon de miel» ou images en «nids d abeille» au cours d une fibrose pulmonaire idiopathique III.3.6 Bronchectasies «par traction» (figure 14) il ne s agit pas à proprement de bronchectasies car la paroi bronchique est normale elles résultent de la traction exercée sur les parois bronchiques quand l élasticité du parenchyme diminue qu elle qu en soit la cause (et en particulier dans les PID). elles ne partagent pas les conséquences des bronchectasies (infection, hémoptysie) 13/31

Figure 14 : Bronchectasies «par traction» au cours d une fibrose pulmonaire idiopathique IV PRESENTATION FONCTIONNELLE Les Explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) montrent typiquement : un trouble ventilatoire restrictif (TVR) caractérisé par une diminution homogène des volumes (capacité vitale) et donc des débits (VEMS) avec un rapport VEMS/CVF normal (> 70%) une diminution de la capacité pulmonaire totale (CPT) < 80% de la valeur théorique une altération de la fonction échangeur pulmonaire caractérisée par une diminution de la diffusion du monoxyde de carbone (DLCO) témoin d un trouble de la diffusion alvéolo- capillaire) une désaturation oxygénée (SpO2) au test de marche de 6 minutes (TM6) une hypoxémie, initialement à l effort puis au repos 14/31

V. LES ELEMENTS DU DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE V.1. La présentation aigue ou chronique Les PID aigues ont un profil d étiologies fort différent de celui des PID subaigues ou chroniques. Leur prise en charge diagnostique et thérapeutique est bien codifiée (cf infra). V.2. Le contexte épidémiologique Âge et sexe Entre 20 et 40 ans, la sarcoïdose et les PID associées aux maladies systémiques sont plus fréquentes. Au-delà de 50 ans, la fibrose pulmonaire idiopathique et les pneumoconioses occupent les 1ères places. La lymphangioléiomyomatose (LAM) s observe presque exclusivement chez les femmes en période d activité génitale. Origine ethnique V.2. La sarcoïdose est particulièrement fréquente chez les sujets de peau noire (x10) Les données de l interrogatoire Tabagisme Un tabagisme important diminue fortement la probabilité de pneumopathie d hypersensibilité ou de sarcoïdose. L histiocytose langerhansienne et plus encore, la pneumopathie interstitielle desquamative s observent presque exclusivement chez des patients tabagiques. Toxicomanie Quelle que soit la voie d administration, les drogues ou les produits de coupe (silice, etc ) peuvent induire des PID aiguës ou chroniques : granulomatoses chroniques (toxicomanies IV) bronchiolites (cannabis) pneumoconiose (cocaïne) hémorragies intra-alvéolaires (cannabis, cocaïne poudre ou crack) œdème pulmonaire lésionnel (héroïne) Prises médicamenteuses Une histoire détaillée des prises médicamenteuses est indispensable. L interrogation du site internet Pneumotox (www.pneumotox.com) permet d accéder en ligne à des informations régulièrement actualisées. Ne doivent pas être négligés les médicaments 15/31

dont la prise est chronique et ancienne (plusieurs années) ; certaines chimiothérapies pouvent induire des fibroses pulmonaires plusieurs années après leur administration (ex. carmustine). utilisés en dehors de prescriptions médicales (huile de paraffine, anti-inflammatoires non stéroïdiens par exemple) utilisés en topiques (collyres, pommades, gouttes nasales) utilisés à visée esthétique (otions capillaires, préparations magistrales pour lutter contre l obésité, etc ). Médecines traditionnelles ou suppléments diététiques Potentielle toxicité pulmonaire Expositions professionnelles et domestiques La reconstitution complète de l histoire professionnelle (cursus laboris) doit être méticuleuse et prendre en compte des périodes même brèves et anciennes d exposition. Les périodes de latence peuvent être longues. L interrogatoire recherche notamment l exposition : aux principaux agents responsables de pneumoconioses : amiante, silice, aluminium, métaux durs (cobalt) au béryllium (responsable de granulomatoses pouvant simuler la sarcoïdose) à des antigènes d hypersensibilité organiques (PHS) susceptibles d origine animale d entraîner (éleveurs une d oiseaux pneumopathies par exemple), bactérienne (actinomycètes du foin humide dans le poumon de fermier par exemple, huiles de coupe contaminées) ou fungique (Penicillium des fabricants de fromage ou de saucisson, Aspergillus des systèmes de climatisation, ) La liste des antigènes susceptibles d induire une pneumopathie d hypersensibilité professionnelles ou domestique ne cesse de s accroître. L enquête sur le lieu de travail ou au domicile est parfois seule à même d affirmer une exposition délétère. ATCD familiaux de PID De rares cas de fibroses pulmonaires familiales sont liés à des mutations génétiques à transmission autosomique dominante (protéines du surfactant, système télomérase ) V.4 L examen clinique Les râles crépitants sont particulièrement fréquents dans la fibrose pulmonaire idiopathique (> 90 %), l asbestose et les fibroses associées aux connectivites en règle absents dans la sarcoïdose, les PHS (< 25 %) et l histiocytose langerhansienne. L hippocratisme digital fréquent dans la fibrose pulmonaire idiopathique (50 à 90 %), dans l asbestose (40 %), et dans les PID accompagnant la polyarthrite rhumatoïde (jusqu à 75 %). 16/31

Signes extra-respiratoires asthénie, amaigrissement et fièvre sont non spécifiques et observées dans de nombreuses PID. lésions cutanéo-muqueuses et adénopathies à rechercher systématiquement (parfois accessibles à une biopsie permettant d obtenir un diagnostic étiologique de la PID). oculaires : examen ophtalmologique systématique à la recherche d un syndrome sec ou d une lésion de sarcoïdose. manifestations cliniques diverses liées à une connectivite (cf item 116) telles qu une atteinte rénale (recherche d hématurie ou de protéinurie) V.4. La présentation radiologique = pierre d angle de l orientation diagnostique La sémiologie tomodensitométrique est la pierre d angle de l orientation diagnostique des PID subaigues et chroniques (tableau 1). 17/31

Tableau 1 : Orientation diagnostique devant une PID subaiguë ou chronique en fonction de l aspect tomodensitométrique nodules Carcinome bronchioloalvéolaire Lymphangite carcinomateuse Tuberculose Pneumocystose Insuff. cardiaque gauche Pneumoconioses - asbestose - silicose PHS opacités parenchymateuses ++ PID idiopathiques -FPI -PINS -POC Légende : images kystiques adénopathies médiastinales +++ SIL ++ + + ++ + calcifiées VD +++ SIL+ ++ + +/- +++ sup et post sous pleuraux scissures +++ moy et périphérique sup et moy RIL RM inf RIL++ RIL RM+++ inf / périphérique +++ parfois excavés parfois bases sup. +/- CA + + excavés +++ moy et inf VD et/ou CA CA+ sup sup et moyen péri-hilaire ++ +++ micronodules péri-boncho vasculaires +++ épanchement et ou épaississement pleural moy et inf +++ parfois excavés VD VD et/ou CA prédominance lésionnelle + +++ Poumon éosinophile Histiocytose langerhansienne -sclérodermie -polyarthrite rhumatoïde -Wegener opacités linéaires VD et/ou CA ++ péribonchiolaires faible densité bords flous Pneumonies médicamenteuses Sarcoïdose épaississements péri-bronchovasculaires et sup VD et/ou CA VD et/ou CA VD + VD+++ VD et/ou CA inf / périphérique PHS = pneumopathies d hypersensibilité ; FPI = fibrose pulmonaire idiopathique ; PINS = pneumopathie interstitielle non spécifique ; POC = pneumopathie organisée cryptogénétique ; VD = verre dépoli ; CA = condensations alvéolaires (consolidation) ; SIL = septa inter-lobulaires; RIL = réticulation intra-lobulaires ; RM = rayon de miel (nid d abeille) ; sup / moy / inf = champs pulmonaires supérieurs / moyens / inférieurs. 18/31

V.5. Les données biologiques Le bilan biologique sanguin minimal doit être orienté. Il a pour but de détecter une atteinte extrarespiratoire et de repérer des éléments d orientation étiologique Examens biologiques NFS, CRP formule sanguine BNP créatininémie 5 dosage des précipitines sériques 6 ECA*, calcémie, calciurie facteur rhumatoïde, Ac anti-nucléaires, anticorps anti-adn, Ac anti-antigène soluble de noyau (notamment anti-ssa et anti-ssb), Ac anti-synthétases ANCA Anticorps anti-membrane basale glomérulaire sérologie VIH * Signes ou maladies recherchés syndrome inflammatoire biologique hyperéosinophilie insuffisance cardiaque insuffisance rénale pneumopathies d hypersensibilité sarcoïdose connectivites vascularite Goodpasture pneumonie opportuniste l enzyme de conversion de l angiotensine est normal dans 40 % des sarcoïdoses et peut être élevé dans d autres granulomatoses (bérylliose, silicose, tuberculose, histoplasmose, pneumopathie d hypersensibilité, ) et dans de nombreuses autres situations cliniques (diabète, cirrhose hépatique, maladie de Gaucher ). Le lavage broncho-alvéolaire (LBA) Il est réalisé au cours d une bronchoscopie. Il fournit des éléments diagnostiques essentiels : Cytologie (présence de cellules malignes) Microbiologie (agents infectieux pathogènes) Il fournit des éléments d orientation étiologique: - Cellularité (numération et formule des éléments nucléés) LBA normal Alvéolite Histiocytose langerhansienne Sarcoïdose Pneumopathie d hypersensibilité Silicose Fibrose pulmonaire idiopathique Asbestose Connectivites (sclérodermie, PR) Infections Pneumopathies à éosinophiles Tuberculose PINS, POC Pneumopathie médicamenteuse Hémorragie alvéolaire Protéinose alvéolaire Composition du LBA 80 à 90% de macrophages alvéolaires < 15 à 20% de lymphocytes < 5% de polynucléaires neutrophiles < 2% de polynucléaires éosinophiles hypercellularité définie par un compte cellulaire 6 >150 10 /l chez le non fumeur 6 > 250 10 /l chez le fumeur formule macrophagique formule lymphocytaire formule neutrophilique formule éosinophilique formule panachée formule variable aspect rosé, sidérophages aspect laiteux 5 anticorps de type IgG dirigés contre l antigène responsable (déjections d oiseaux, notamment de pigeons, moisissures du foin). La recherche non orientée de précipitines n est pas justifiée. La présence de précipitines signe l exposition à l antigène, mais ne permet pas d affirmer le diagnostic. 6 L activité de l enzyme de conversion de l angiotensine est abaissée chez les patients recevant des inhibiteurs de l enzyme de conversion de l angiotensine. 19/31

V.6 L apport de l histologie V.6.1 Prélèvements histologiques pulmonaires Biopsies d éperons de division bronchiques (par bronchoscopie) permettent l étude des structures lymphatiques de la muqueuse et sous-muqueuse bronchique rentabilité > 50% dans la sarcoïdose et la lymphangite carcinomateuse Biopsies trans-bronchiques (par bronchoscopie) permettent l étude des bronchioles terminales et des quelques alvéoles adjacents rentabilité de l ordre de 75% dans la sarcoïdose qui comporte une atteinte réellement diffuse et bronchique (stades 2 à 4) insuffisantes et souvent non contributives pour le diagnostic de la fibrose pulmonaire, qui nécessite une analyse de fragments pulmonaires plus volumineux risque de pneumothorax et d hémoptysie qui les contre-indique en cas d insuffisance respiratoire ou de risque hémorragique accru. Biopsies pulmonaires chirurgicales (par vidéothoracoscopie) prélèvements de plus grande, portant si possible sur au moins deux lobes différents guidées par le scanner thoracique. plus rentables pour caractériser les lésions histologiques au cours des PID idiopathiques7 à proposer quand la présentation radio-clinique n est pas caractéristique d une fibrose pulmonaire idiopathique et/ou que le résultat peut modifier l attitude thérapeutique Biopsie d adénopathies médiastinales (par médiastinoscopie) rendement proche de 100% au cours de la sarcoïdose proposée en cas de doute sur le diagnostic radio-clinique de la sarcoïdose et si les prélèvements moins invasifs sont négatifs 7 Pas d intérêt dans le diagnostic de fibrose pulmonaire d allure idiopathique Classification clinique et histologique des pneumopathies interstitielles idiopathiques. Diagnostic clinique (contexte idiopathique) Fibrose pulmonaire idiopathique Aspect histopathologique Remarque Pneumopathie interstitielle commune (usual interstitial pneumonia, UIP) Pneumopathie interstitielle non spécifique (idiopathique) Pneumopathie interstitielle non spécifique (nonspecific interstitial pneumonia, NSIP) Pneumopathie organisée cryptogénique Pneumopathie organisée Pneumopathie interstitielle aiguë (idiopathique) Autres entités plus rares Dommage alvéolaire diffus Un aspect histopathologique de pneumopathie interstitielle commune peut se recontrer au cours des connectivites (polyarthrite rhumatoïde notamment), de l exposition à l amiante, d autres causes, ou de la forme idiopathique de la maladie Un aspect histopathologique de pneumopathie interstitielle non spécifique s observe en particulier au cours des connectivites (sclérodermie systémique notamment), plus rarement au cours des pneumopathies d hypersensibilité ou comme maladie idiopathique Cet aspect peut se rencontrer dans diverses circonstances étiologiques ou de façon idiopathique ; il s agit alors d un tableau de condensation alvéolaire multifocale corticosensible et souvent migratrice Forme idiopathique du syndrome de détresse respiratoire aiguë de l adulte Autres aspects histologiques plus rares 20/31

V.6.2 Prélèvements histologiques extrathoraciques Les biopsies d organes extra-thoraciques particulièrement utiles au cours de la sarcoïdose (sarcoïdes cutanées, adénopathies périphériques), des cancers ou des connectivites. Les biopsies de glandes salivaires accessoires utiles au diagnostic de sarcoïdose, de syndrome de Gougerot-Sjögren, ou d amylose. VI. SYNTHESE DIAGNOSTIQUE VI.1. PID aigues L éventail diagnostique (tableau 2) et la conduite de l enquête étiologique diffèrent de ceux des PID chroniques. Tableau 2 : Orientation diagnostique devant une pneumopathie interstitielle diffuse aigue fièvre Pneumopathies infectieuses ++ +++ + Oedème pulmonaire hémodynamique Lymphangite carcinomateuse - - Oedème pulmonaire lésionnel (SDRA) +/- Pneumonies médicamenteuses PHS Poumon éosinophile aigu Hémorragie alvéolaire Connectivites PID aiguë idiopathique +/+/- +/- agent causal / mécanisme virale virus à tropisme respiratoire dont la grippe et le VRS varicelle infection bactérienne communautaire tuberculose dans sa forme miliaire Legionella, Streptococcus pneumoniae, Mycoplasma ou Chlamydia pneumoniae infection fongique (Pneumocystis jiroveci) nécrose myocardique rupture valvulaire mitrale surcharge hémodynamique aiguë sur anurie bronche sein colon estomac agression aiguë exogène (épithéliale) infectieuse (cf supra) toxique (gaz toxique, liquide gastrique) agression aiguë endogène (endothéliale) tout sepsis sévère pancréatite aiguë CEC, transfusions massives Polytraumatisme, brûlures étendues méthotrexate, amiodarone, -lactamines, nitrofurantoïne, cytotoxiques,.. inhalation massive d antigène idiopathique ou dans un contexte de parasitose ou de prise médicamenteuse vascularite anomalie de la coagulopathie syndrome de Goodpasture lupus, lupus érythémateux aigu disséminé +/- particularités radiologiques éléments du diagnostic LBA et/ou sérologie LBA, HC, sérologie sup / moy kystes LBA péri-hiliaire ECG, BNP, écho cœur nodules réticulations moy et inf ép. pleural biopsies bronchiques et transbronchiques contexte bilan infectieux moy et sup. périphérique contexte LBA contexte et sérodiagnostic LBA NFS hémoptysies LBA contexte diagnostic d exclusion Légende : HC = hémocultures ; SDRA = Syndrome de détresse respiratoire aiguë ; CEC = circulation extracorporelle ; PHS = pneumopathies d hypersensibilité ; NFS = numération formule sanguine. LBA = lavage broncho- alvéolaire ; BNP = brain natriuretic peptide 21/31

La prise en charge diagnostique est d abord fondée sur l analyse du contexte antécédents éventuelle immunodépression (pathologie VIH, antécédent de cancer ou autre) éventuelle exposition à des particules pouvant causer un œdème lésionnel ou une pneumopathie d'hypersensibilité ; prise médicamenteuse En présence de fièvre, la réalisation d un lavage broncho-alvéolaire permet le diagnostic de la plupart des causes infectieuses pose le diagnostic des hémorragies intra-alvéolaires permet une orientation diagnostique dans les autres cas. En l'absence de fièvre, du fait de la fréquence de l'oedème cardiogénique, les investigations doivent comporter en 1er lieu ECG dosage du BNP échographie cardiaque un test thérapeutique aux diurétiques ou un cathétérisme cardiaque droit en cas de doute La démarche diagnostique ne doit pas retarder la thérapeutique qui associe : La prise en charge en réanimation dès qu il existe une détresse respiratoire L oxygénothérapie à haut débit assistance ventilatoire non invasive ou invasive En présence de fièvre, un traitement anti-infectieux à large spectre couvrant : le pneumocoque et les germes intracellulaires (ex une ß lactamine et un macrolide) M. tuberculosis si l imagerie est compatible avec une tuberculose P. jiroveci si le contexte d immunosuppression et l imagerie sont évocatrices Les diurétiques en cas de doute sur une insuffisance cardiaque ou une surcharge hydrosodée L arrêt immédiat des traitements potentiellement toxiques pour le poumon, Une corticothérapie systémique est discutée au cas par cas, en fonction des orientations diagnostiques. Le traitement est secondairement adapté en fonction de l étiologie et de l évolution. 22/31

VI.2. PID chroniques La démarche diagnostique doit être méthodique et graduelle (figure 1), en évoquant en premier lieu les PID les plus fréquentes (tableau 1). Figure 14 : Schéma diagnostique des PID sub-aigues et chroniques histoire clinique examen clinique scanner thoracique en haute résolution EFR diagnostic pas de diagnostic fibroscopie bronchique avec LBA + biopsies bronchiques (si suspicion de sarcoïdose ou de lymphangite carcinomateuse) diagnostic en fonction du scanner biopsies trans-bronchiques biopsies d ADP médiastinales diagnostic pas de diagnostic biopsie pulmonaire chirurgicale* diagnostic * si l on peut en attendre une conséquence thérapeutique 23/31

Tableau 3 : Etiologie des pneumopathies interstitielles diffuses sub-aigues ou chroniques Cause connue Proliférations néoplasiques lymphangite carcinomateuse* cancer bronchiolo-alvéolaire* lymphomes Cause inconnue Granulomatoses - sarcoïdose* - granulomatose à cellules de Langerhans (anciennement nommée histiocytose X) Insuffisance cardiaque gauche* Pneumopathies infiltrantes diffuses idiopathiques - fibrose pulmonaire idiopathique* - pneumopathie interstitielle non spécifique - pneumopathie desquamative (pneumopathie alvéolaire à macrophages) - pneumopathie organisée cryptogénique - pneumopathie interstitielle lymphocytaire - bronchiolite respiratoire avec pneumopathie interstitielle Infection tuberculose miliaire* pneumocystose Pneumoconioses silicose asbestose bérylliose métaux durs Pneumopathies d'hypersensibilité poumon d'éleveur d'oiseaux poumon de fermier autres causes (nombreuses) Pneumopathies médicamenteuses* Pneumopathies infiltrantes au cours des connectivites et des vascularites Pneumopathies idiopathiques à éosinophiles (chroniques, aiguës) Autres pneumopathies infiltrantes diffuses - lymphangioléiomyomatose - lipoprotéinose alvéolaire ; amylose ; etc. Maladies génétiques - sclérose tubéreuse, neurofibromatose - maladie de Niemann-Pick, de Gaucher, etc * causes les plus fréquentes Le traitement dépend de la maladie causale. 24/31

ANNEXE 1 : Fibrose Pulmonaire idiopathique (FPI) La FPI est la plus fréquente des PID de cause inconnue après la sarcoïdose. Son incidence est d environ 10 cas/100 000 habitants. C est une maladie grave avec une médiane de survie à 3 ans. L âge moyen de survenue est de 65 ans avec une légère prédominance masculine. On ne retrouve pas d exposition à des toxiques pulmonaires. Le signe clinique le plus fréquent est une dyspnée chronique d aggravation progressive, souvent associée à une toux sèche. L examen retrouve constamment des crépitants secs à l auscultation en regard des bases. Il n y a pas d atteinte extra-respiratoire en dehors d un hippocratisme digital (40%). La radiographie retrouve des opacités réticulées prédominant dans les lobes inférieurs et dans les régions sous-pleurales (figure 14). Le scanner thoracique retrouve typiquement des RIL et des images en «rayons de miel» prédominant dans les mêmes zones (figure 13). Les EFR mettent en évidence un trouble ventilatoire restrictif (diminution de la CPT, de la CV, et la CRF) et une diminution de la capacité de transfert du CO (DLCO/VA) qui sont corrélés à la gravité de la maladie. L insuffisance respiratoire (hypoxémie) peut être peut être absente au repos au début de la maladie et ne se révéler qu à l occasion d un effort (désaturation oxygénée au cours du test de marche des 6 minutes). Les examens biologiques sont normaux et le bilan auto-immun est négatif. Ces examens sont destinés à écarter une étiologie connue de PID. Figure 15 : évolution de la radiographie de thorax au cours du temps, à intervalles de deux ans, de haut en bas, dans une FPI (normal en haut, images réticulaires dans les bases et diminution du volume pulmonaire qui apparaissent progressivement) 25/31

Le LBA montre en général une augmentation du pourcentage de polynucléaires neutrophiles (5 à 20%) et éosinophiles (habituellement 1 à 5%). La biopsie pulmonaire chirurgicale apporte le diagnostic de certitude en montrant un aspect de pneumopathie interstitielle commune (Usual Interstitial Pneumonia en anglais). En pratique cette biopsie n est réalisée que lorsque la présentation radio-clinique n est pas caractéristique de la FPI, (i.e. évolution rapide, absence de RM, VD important faisant évoquer un autre diagnostic) et si l on peut en attendre une conséquence thérapeutique. Il n existe à ce jour aucun traitement ayant démontré un bénéfice franc dans la FPI. Les corticoïdes par voie générale constituent souvent le traitement initial. La transplantation pulmonaire doit être envisagée chez les sujets âgés de moins de 60-65 ans. Dans 20 à 30% des cas environ, chez les patients fumeurs, la fibrose est associée à de l emphysème, association qui réalise une présentation clinique et fonctionnelle particulière («syndrome emphysème fibrose»). La dyspnée est souvent très importante, contrastant avec une spirométrie subnormale (absence de TVR notamment). La fonction échangeur est cependant profondément altérée (diminution de la DLCO, désaturation cours du TM6, hypoxémie). Le scanner montre l association d emphysème (prédominant dans les sommets) et de fibrose (prédominant au niveau des bases). L évolution est marquée par l apparition fréquente d une l hypertension artérielle pulmonaire, qui constitue un élément de mauvais pronostic. ----------- ANNEXE 2 : pneumopathie interstitielle non spécifique (PINS) Le terme de PINS désigne un aspect histopathologique de PID, caractérisé par des lésions homogènes, comportant à des degrés variables une inflammation lymphoplasmocytaire et une fibrose collagène, sans destruction de l architecture pulmonaire (à la différence de la pneumopathie interstitielle commune qui caractérise la FPI). Le LBA montre une lymphocytose. Le diagnostic est affirmé par la biopsie pulmonaire. Le scanner thoracique est caractérisé par une prédominance de verre dépoli, de RIL et de bronchectasies par traction, la rareté des kystes en rayon de miel et l absence de prédominance sous pleurale et basale des lésions (tableau 1). Les EFR sont non spécifiques (cf chapitre IV). L aspect radiologique et histologique de PINS est comme son nom l indique non spécifique. Il s observe essentiellement au cours des connectivites dont c est l aspect le plus fréquent ou comme maladie idiopathique (on parle alors de PINS idiopathique). Plus rarement il traduit une PHS ou une pneumopathie médicamenteuse. La PINS idiopathique est le principal diagnostic différentiel de la fibrose pulmonaire idiopathique. La PINS idiopathique est plus rare, survient plus jeune (avant 50 ans); les râles crépitants et l hippocratisme digital y sont inconstants. 26/31

A la différence de la FPI, une amélioration ou une stabilisation de la maladie est en règle obtenue avec le traitement corticoïde oral et / ou immunosuppresseur (azathioprine, mycophénolate mofétil, parfois cyclophosphamide). L évolution vers l insuffisance respiratoire chronique est possible, mais beaucoup plus rare et plus tardive qu au cours de la FPI. ----------- ANNEXE 3 : Pneumoconioses Les pneumoconioses sont des fibroses pulmonaires secondaires à l inhalation de particules minérales ou métalliques. Le développement d une maladie dans ce contexte est lié à la taille des particules inhalées, à la durée et à l intensité de l inhalation. L interrogatoire est primordial en particulier sur le curriculum laboris qui doit être aussi détaillé que possible. Il s agit la plupart du temps de maladies professionnelles justifiant d une reconnaissance par la Sécurité Sociale. Asbestose Il s agit de la plus fréquente des pneumoconioses. Elle désigne précisément la fibrose pulmonaire secondaire à l inhalation de fibres d amiante (cf chapitre maladies professionnelles). Ce terme ne doit pas être utilisé pour caractériser les autres manifestations pulmonaires secondaires à l inhalation d amiante, notamment les pathologies pleurales (pleurésies bénignes, épaississement et plaques et mésothéliome). Sa présentation clinique est aspécifique (dyspnée d effort). Parfois le patient est asymptomatique et la maladie est révélée par une radiographie pulmonaire réalisée pour une autre raison ou pour la surveillance d un sujet exposé à l amiante. Le scanner montre initialement des opacités linéaires non septales, aux bases, parallèles ou perpendiculaires à la plèvre (figure 16) puis, quand la fibrose progresse, des RIL et du RM indistinguables de l aspect d une FPI. La présence de plaques pleurales plus ou moins calcifiées est inconstante (figure 16) mais, dans un contexte d exposition à l amiante, permet d évoquer le diagnostic. En cas de doute diagnostique, les particules d amiante peuvent être recherchées dans l expectoration, dans le lavage alvéolaire ou sur une biopsie pulmonaire, sous la forme de corps ferrugineux ou de corps asbestosiques. La fibrose tend à s aggraver progressivement et à évoluer vers l insuffisance respiratoire chronique de façon lente mais inéluctable. Aucun traitement n a fait la preuve de son efficacité. 27/31

Figure 16 : stade précoce d une probable asbestose chez un travailleur exposé à l amiante : opacités linéaires non septales, aux bases, parallèles (haut, droite) ou perpendiculaires (haut, gauche) à la plèvre. Les anomalies pleurales associées : épaississements pleuraux calcifiés (flèche) et non calcifiés (double flèche) ne font par partie de l asbestose à proprement parler mais confirment la probable exposition à l amiante. Silicose La silicose est une pneumoconiose secondaire à l inhalation de silice libre cristalline. Les professions les plus exposées sont les mineurs de charbon, les tailleurs de pierre ou d ardoise, les employés au décapage au jet de sable, les ouvriers des fonderies et du bâtiment. La silicose est devenue rare en France avec la fermeture des mines, mais elle est fréquente dans les pays où cette activité est encore importante (Chine notamment). Chez un individu exposé, le développement d une silicose va dépendre de l importance et de la durée de l exposition et d une certaine susceptibilité individuelle. Lorsque l exposition est massive, on peut observer des silicoses aiguës, mortelles en quelques mois. La phase de latence peut être très longue, justifiant des surveillances radiographiques 28/31

prolongées chez des patients ayant été exposés. L examen clinique est peu spécifique. Les EFR peuvent être normales ou montrer un trouble ventilatoire restrictif ou mixte. Les examens radiologiques mettent en évidence des opacités micronodulaire diffuses prédominant dans les lobes supérieurs. Elles peuvent confluer jusqu à donner des masses pseudo-tumorales caractéristiques (Figure 17). Il s y associe souvent des adénopathies médiastinales contenant des calcifications en coquille d œuf. Figure 17 : nodules, masses (radio et scanner) et calcifications ganglionnaires médiastinales et hilaires (radio) dans le cadre d une silicose chez un mineur de charbon La maladie peut évoluer vers l insuffisance respiratoire chronique et l hypertension pulmonaire. Les patients présentent un risque accru d infection par des mycobactéries typiques ou atypiques et par Aspergillus. Les masses silicotiques peuvent se nécroser, les patients décrivant parfois l émission de crachats noirâtres abondants (vomique). Le développement d un cancer bronchique est reconnu comme une complication de cette maladie professionnelle. Il n y a pas de traitement spécifique de la silicose. Berylliose La bérylliose est secondaire à l inhalation de particule de béryllium chez des patients présentant un groupe HLA particulier. Les professions exposées sont les prothésistes dentaires et les mécaniciens en particuliers dans la construction aéronautique. La présentation est celle d une sarcoïdose avec cependant des opacités scannographiques préférentiellement en verre dépoli. ------------ 29/31

ANNEXE 4 : Pneumopathie d hypersensibilité (PHS) Les PHS sont des granulomatoses secondaires à l inhalation répétée d antigènes le plus souvent organiques. L inhalation peut survenir dans un contexte domestique (moisissures, oiseaux de compagnie) ou professionnel (agriculture exposant à l inhalation de moisissures ou d actinomycètes se développant dans le foin moisi, ou à des déjections d animaux). Il existe un nombre très important de possibilités d exposition antigénique qui doivent être recherchées par un interrogatoire précis sur le mode de vie et le curriculum laboris. Les PHS sont rares chez le fumeur. Il existe 3 formes cliniques principales : - La forme aiguë se présente sous la forme d un syndrome pseudogrippal fébrile survenant quelques heures après une exposition antigénique. L auscultation retrouve des râles crépitants. L évolution est spontanément favorable en l absence de nouvelle exposition. - La forme subaiguë évolue en plusieurs semaines ou mois avec toux, fébricule et râles crépitants. - La forme chronique est révélée par une toux et une dyspnée. L auscultation révèle plus fréquemment des sibilants ou des ronchi. Les EFR retrouvent un syndrome restrictif dans les formes aiguës ou suraiguës et un syndrome obstructif, restrictif ou mixte dans les formes chroniques. La DLCO est toujours diminuée. La radiographie montre dans les formes aiguës des opacités infiltratives bilatérales. Le scanner montre des plages de verre dépoli et des nodules de faible densité, à bords flous, péribonchiolaires. Les formes chroniques peuvent se présenter sous la forme d une fibrose d aspect non spécifique. La détection de précipitines sériques (IgG) spécifiquement dirigées contre l antigène suspecté confirme l exposition mais ne permet pas à elle seule d affirmer la maladie. Inversement, l absence des précipitines n exclut pas le diagnostic. Le LBA retrouve typiquement une hypercellularité avec une augmentation du pourcentage de lymphocytes en règle CD8+. Le diagnostic repose le plus souvent sur un faisceau d arguments. Le recours à la biopsie pulmonaire chirurgicale est rare. Le traitement repose sur l éviction de l antigène (ce qui peut nécessiter un changement de profession) et les corticoïdes par voie orale, surtout dans les formes aiguës ou sub-aiguës. ------------ ANNEXE 5 : Proliférations néoplasiques Lymphangite carcinomateuse Elle se traduit par une toux sèche rebelle et une polypnée, d apparition progressive. Les cancers le plus fréquemment en cause sont les cancers bronchique, mammaire, gastrique et plus rarement 30/31

pancréatique ou prostatique. Le diagnostic est évoqué sur la base des antécédents ou de l existence d une tumeur extrathoracique, sur la radiographie qui peut montrer des opacités linéaires aux bases et un épanchement pleural et surtout sur le scanner qui montre typiquement un épaississement irrégulier et nodulaire des septa interlobulaires et, parfois, des adénopathies médiastinales. Les biopsies d éperons de division bronchiques (bronchoscopie) confirment le diagnostic. Carcinome bronchiolo-alvéolaire Il peut être suspecté face à une dyspnée non fébrile, d apparition progressive associée à une expectoration propre, abondante et fluide (bronchorrhée) et, en imagerie, à des condensations pulmonaires ou à des plages de verre dépoli. La mise en évidence de cellules tumorales (adénocarcinome) sur l expectoration, le LBA ou les biopsies trans-bronchiques confirme le diagnostic. Lymphomes pulmonaires primitifs Il s agit de tumeurs rares, le plus souvent de bas grade, développées aux dépens du tissu lymphoïde associé aux muqueuses. Souvent asymptomatique, ces tumeurs se présentent en imagerie comme des condensations alvéolaires chroniques uniques ou plurifocales (souvent avec un bronchogramme aérique en leur sein). L'électrophorèse des protéines sériques montre souvent une gammapathie monoclonale. Le diagnostic peut être obtenu par l'étude cytologique et immunologique du LBA, ou des biopsies bronchiques ou trans-bronchiques. L'étude moléculaire dans ces prélèvements peut confirmer le caractère clonal de la prolifération. 31/31