La RSE dans les PME et TPE : du diagnostic à l'action.

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1 La RSE dans les PME et TPE : du diagnostic à l'action. Mardi 13 septembre 2011, de 9h30 à 10h30 Peu d'informations sont disponibles sur les bonnes pratiques de responsabilité sociétale des PME françaises. Non concernées par la loi NRE, l'engagement de ces entreprises reste en grande partie le reflet des valeurs défendues par leurs dirigeants. Les grandes entreprises ont également un impact en formulant des exigences RSE à l'égard de leurs fournisseurs. Lors du webinar du 13 septembre, des dirigeants engagés revenaient sur leurs motivations initiales, les opportunités et obstacles rencontrés. Quelle prise en compte de la RSE par les PME/TPE? Comment convaincre les DG de ces entreprises d'établir une politique RSE? Intervenants : IMPRESSION DURABLE : Arnaud TAVARD, Directeur général ROSKOPLAST : Jean-Luc VIDAL, Directeur général I. Intervention d Arnaud Tavard, Directeur général d Impression durable Impression durable est née d une problématique commerciale, à savoir la reprise d une imprimerie familiale, et la recherche d un angle différencié en termes de marketing pour renouveler la clientèle. Un nombre croissant de clients étant demandeurs d un certain nombre d engagement en matière d écologie (tels que le label Imprim vert, ou la capacité à travailler sur des papiers recyclés), Arnaud Tavard a choisi, dans les années , de créer une marque synonyme d écologie, de changement et d action pour l environnement, un engagement particulièrement porteur de sens pour la symbolique papier. L entreprise a créé un partenariat avec un Master Environnement de l Ecole des Mines, qui lui ont fourni un certain nombre d outils, et notamment le bilan carbone. Ce dernier constitue un avantage certain face à la complexité que représente l ingénierie environnementale, souvent éloignée des préoccupations des clients. 1

2 L intérêt du bilan carbone par rapport aux autres éléments de technologie environnementale réside dans le caractère chiffré et facilement mesurable de la réduction de l impact écologique, avec, à terme, l atteinte du «zéro» grâce aux mécanismes de compensation. Ainsi, une série d actions a pu être mise en place. Le bilan carbone d Impression durable se structure assez simplement: 80% des émissions étaient liées au papier, 10% à la logistique, et 10% dans le reste des activités. Ainsi, l entreprise a mené l essentiel du travail et acquis une expertise forte autour du papier recyclé, relevant pourtant plus du métier de papetier que d imprimeur. Concernant l activité d imprimeur en elle-même, l entreprise a mené un travail sur les livraisons, faites au moyen d un camion au gaz naturel, sur l électricité, à travers une alimentation issue à 100% d énergie renouvelable, sur la limitation de la chimie et le développement d une flotte de véhicules commerciaux plus propres. En termes d impact climatique, Impression durable témoigne d une réduction de ses émissions de GES de 10% entre 2006 et La difficulté pour une PME est de réévaluer en permanence les bilans carbone. Ainsi, impression durable a du réaliser trois bilans carbones pour mesurer cette progression, l un d entre eux ayant notamment été effectué par Bureau Veritas, afin d obtenir une certification. Aujourd hui, cette démarche a eu plusieurs impacts sur société. D une part, l entreprise est en adéquation forte avec la demande du marché, les clients y sont très sensibles, hier comme aujourd hui. En interne également, avec les collaborateurs, ce concept récolte une forte adhésion, les employés trouvent en effet du sens à travailler dans cette démarche. Désormais, le challenge pour Impression durable est de réaliser à nouveau 10% d économies sur les trois prochaines années. Tous les leviers ont déjà été actionnés aujourd hui, les efforts tels que les Plan de Transports des salariés, ou l évolution de leur alimentation étant trop colossaux pour être envisagés. Les pistes les plus sérieuses reposent sur la standardisation du papier recyclé (la qualité est suffisante aujourd hui pour cela). Ainsi, il s agirait de pouvoir imprimer les papiers recyclés sans en faire la demande préalable au client. La RSE et le développement durable sont des outils de grandes sociétés. A l échelle d une PME, cela a peu de sens d aborder cette démarche sous l angle des trois sphères économiques, sociale, et écologique. En effet, en termes d économie, la performance s impose à une PME car elle doit en permanence démarcher les fournisseurs et les collaborateurs pour exister. Il en va de même pour l aspect social, du fait de la proximité des membres de l entreprise. Ainsi, pour une PME, le développement durable se mesure essentiellement à l aune de l écologie, d autant plus que depuis la création d impression durable, la qualité des processus s est améliorée. 2

3 Question de Pauline Bian Gazeau, Agrion : Dans les grandes entreprises, la mise en place du développement durable est assurée par la création d une fonction spécifique. Comment est-ce organisé dans une petite équipe? Dans une grande entreprise, la politique de développement durable constitue à créer une direction développement durable, au même titre qu une autre direction (communication ). Ainsi, cette direction se trouve plutôt dans une obligation de moyens que de résultats. Chez Impression durable, il s agit d un engagement collectif, plus transversal. Pour cela, l aide des étudiants des Mines a permis de nombreuses avancées. Ces améliorations ont pu être mises en place par des étudiants stagiaires, ou par les salariés eux-mêmes. Intervention de Florence Jasmin, Burgeap : Une plus grande entreprise aborde en effet plutôt la RSE sous l angle socio-économique qu écologique. Par exemple, «quel est le retour sur investissement du développement durable?». Question de Madame Jasmin: Quelle est la communication d Impression Durable sur le développement durable : L entreprise a-t-elle établi une charte pour s engager devant ses clients? Quel est le type d engagements? Les clients d Impression durable demandent aujourd hui des logos, et des certifications du type Imprim vert. Paradoxalement, Imprim vert n a aucune valeur ajoutée écologique, c est simplement l application de la loi pour un industriel, en matière de gestion des chimies dangereuses, qui auparavant étaient facilement jetées dans la nature. Certains demandent de travailler avec des Centres d Aide par le Travail. Vis-à-vis des fournisseurs, l exigence majeure est d être le plus proche possible des principes du développement durable. Il existe un CAT à proximité de l entreprise, il relève donc du bon sens de le faire travailler. 3

4 II. Intervention de Jean- Luc Vidal, Directeur général de Roskoplast - Présentation de la démarche Roskoplast fabrique des suremballages plastiques promotionnels en impression sérigraphiée. La sérigraphie étant une activité assez polluante, l enjeu du développement durable y est important. L entreprise Roskoplast est une PME indépendante, créée en En 2000 elle a été cédée au petit groupe Cosfibel, qui instauré ses méthodes à Roskoplast, malgré certains dysfonctionnements. Arrivé en 2005, Jean-Luc Vidal a proposé mettre en place une politique de RSE. L objet de cet exposé est de présenter la politique qu il a mise en place, qui se décline en axes : - environnemental, concernant le process - environnemental, concernant le produit - social, vis-à-vis des salariés (conditions de travail, participation aux bénéfices de l entreprise ) - sociétales, vis-à vis des parties prenantes extérieures - l aspect «synthèse pour un développement durable» : le gain économique résultant de cette démarche 1. Axe environnemental, en termes de process L objectif était de minimiser l impact du processus de production, en diminuant d une part toutes consommations (division par dix des consommations d eau, changement des équipements électriques et installation de minuteries, permettant une réduction de 25% des consommations électriques, maîtrise des consommations de fioul qui ont diminué de 20%, de matières premières, de cartons, etc.) Il s agit d autre part de maîtriser l ensemble des rejets, par des analyses d eau, le lancement d un bilan carbone en 2008, la pratique du tri sélectif, l utilisation de chiffons au lieu de produits jetables, l évolution du conditionnement par la diminution du volume de bois, la réutilisation des cartons pour les réexpédier 2. Axe environnemental, en matière de produit L objectif étant de minimiser l impact du produit sur l environnement, il s agit d avoir une approche d écoconception, en veillant à la quantité et à la qualité des matières (choix de matériaux recyclables et recyclés), la limitation de la gâche, ainsi que des transports, le fournisseur le plus éloigné étant situé à 160 kilomètres. Enfin, l analyse de cycle de vie permet de mieux connaître l impact du process. 4

5 3. Axe social, en faveur des salariés L objectif est ici d étendre aux salariés la richesse créée, à travers trois types d accords d entreprises. D une part, il s agit de leur faire profiter des résultats positifs liés à l éco-conception (réduction de la marge opérationnelle, si la gâche est inférieure à 1%, les salariés reçoivent une prime, etc.). De par cette mesure, les salariés peuvent toucher environ un treizième voire un quatorzième mois. En second lieu, l entreprise investit dans la qualité des postes de travail, afin de limiter la pénibilité. L âge moyen des salariés chez Roskoplast étant de quarante-sept ans, l aménagement des postes pour faciliter le travail est réellement opportun. Enfin, il s agit de créer une cohésion d équipe, à travers des sorties et événements en commun, financées par des dotations de l entreprise. 4. Axe sociétal, vis-à-vis des parties prenantes extérieures à l entreprise L objectif est de faire connaître les apports mutuels entre l entreprise et le monde extérieur. Pour cela, Roskoplast liste l ensemble des aides reçues, et toutes les interventions auprès des pouvoirs publics, et travaille en partenariat avec un lycée, dans des activités d éducation au développement durable notamment, à travers des interventions sur l éco-conception. L entreprise tente également de créer du lien autour des pratiques de développement durable, afin de les rendre plus accessibles, et d encourager notamment les sous-traitants 5. Synthèse pour un développement durable L entreprise récolte aujourd hui les fruits de ses investissements dans la durabilité, et gagne notamment parce qu elle consomme et jette moins, ce qui motive ses partenaires. Roskoplast affiche des résultats notoires en matière de réduction des consommations, avec -90% d eau utilisée, -25% d électricité, un passage de 53% à 75% d utilisation du poids de matière première achetée, etc. Les 25% de matière restante sont par ailleurs broyés et revendus à un acteur local, qui recycle ces déchets de fabrication en flacons de miel. L entreprise a ainsi reçu le prix «entreprise et environnement» du Ministère de l écologie pour ce projet de recyclage. Ce projet d écologie industrielle permet d occuper une personne, et en contrepartie de gagner en valeur ajoutée (le résidu broyé est revendu 750 la tonne, contre 105 pour un déchet non broyé). - Les résultats 5

6 Les résultats du bilan carbone de 2008 attestent d une réduction de 18%, essentiellement par une économie sur la matière et sur l électricité. Roskoplast utilise aussi le label «Print environnement», qui ne prend pas seulement en compte l aspect écologique, mais la RSE également. L analyse du cycle de vie démontre que l entreprise peut toucher tous les impacts liés à un produit, à l exception son utilisation par le client, qui ne sont pas nécessairement prêts à changer. Au final, l entreprise utilise 40% de matière et émet 25% de CO2 en moins. Roskoplast a fait breveter le process de conditionnement de bouteilles de Champagne «pack and green», qui a été primé lors d un salon professionnel. Les résultats obtenus en termes sociaux sont également importants : - L absence d accident de travail depuis la mise en place des pratiques RSE - Une baisse de l absentéisme - Une vigilance quand à la toxicité des produits utilisés, avec le concours de l Ademe - Une utilisation de bio-solvants sans fiches de sécurité et issus de l agriculture Ainsi, l entreprise a obtenu le trophée RSE de la région Aquitaine en matière de respect des salariés. Par exemple, le broyage ne crée pas de richesse en termes de marge, mais cette activité crée un emploi, c est pourquoi l entreprise le conserve. Au niveau sociétal, Roskoplast est investie dans de nombreux partenariats. Elle est notamment membre de l action 3D, de la Fondation Action Contre l Exclusion, du réseau Entrepreneurs d avenir, ou du cluster d écoconception Créer. - Les difficultés rencontrées Le retour sur investissement, d une part, inquiète les actionnaires, exprimant le désir de garanties et d exemples. Le développement durable constituait surtout un challenge, une motivation personnelle, il est difficile de trouver des arguments face à cela. La compréhension des salariés, si elle est simple à gagner dans une PME, est plus difficile à obtenir dans une grande entreprise. Il importe que les salariés intègrent le devoir que représente la participation à la vie d une entreprise, et qu ils se sentent acteurs. Enfin, l isolement est une difficulté majeure, car ces initiatives sont assez diffuses. 6

7 Face à ces difficultés, les solutions résident dans l instauration de la confiance, et dans la capacité à se comporter plutôt en négociateur qu en directeur. Cette confiance repose sur un effet boule de neige, en commençant par de petites actions, et en acquérant au fur et à mesure l adhésion du plus grand nombre sur des projets plus importants. Cela demande du temps en revanche (quatre ans chez Roskoplast apr exemple). Ainsi, on agit en reliant les parties prenantes (les partenaires responsables), en intégrant les salariés, en adoptant une approche complète de l impact de son produit, l obtention de certification, qui donnent du crédit vie-à-vis des clients. Le bien-être des salariés est également primordial, il s agit de petites actions pour prévenir l absentéisme, pour améliorer la productivité des employés. Enfin, le bilan carbone est une action importante à engager. Son coût eut être pris en charge à 50% par l ADEME. Question de Bérénice Harfouf Ponthus, BIO Intelligent Service : L Analyse du Cycle de Vie est souvent onéreuse et technique pour une PME : quelle est la valeur réelle de cette démarche? L ACV peut entrer dans les aides européennes pour l éco-conception, et le coût peut être nul si l ACV est intégré à des projets de recherche. Ainsi, l absorption des coûts par des projets de plus grande ampleur est une question de méthodologie. Il est notamment important pour les clients ou les fournisseurs de Rokopast, qui sont de plus grands groupes, d intégrer l ACV de leurs emballages. Questions de Sandra Ledesma, ONF International : Comment avez-vous entamé la démarche d ACV, alors que cette démarche apparaît complexe au premier abord? L entreprise a fait appel à un Centre de Recherche Technologique dans le cadre d un projet européen. En travaillant avec eux, elle a pu obtenir un petit logiciel qui fonctionne sur la base d une règle de trois, et permettant de faire une ACV de tous les produits. De plus, il existe des aides de la Région et de l ADEME, pouvant atteindre 75% de l investissement. L ACV, ramenée sur le nombre total de pièces, représente finalement un faible coût. Le coût des investissements a-t-il constitué une contrainte pour vous dans la décision? 7

8 Les investissements en développement durable, en tant qu imprimeur sérigraphie, passent par exemple par le remplacement de la climatisation par un système de refroidissement de l air, peu coûteux. Ceci a permis de réduire consommation d eau et d électricité. De plus, il s agit d un matériel bien plus fiable, et offre un retour sur investissement. Intervention de Nathalie Martinez, CCI Seine et Marne : La RSE dans l activité d imprimerie est en effet majoritairement axée sur l impact environnemental, les deux autres piliers étant pris en compte de fait. En analysant l ensemble des structures qui gravitent autour de ce type d activité, on réalise que l on peut mettre beaucoup d actions à travers les fournisseurs, employés, clients. Il est donc judicieux d approfondir l analyse. Au niveau des chambres de commerce, l échange de bonnes pratiques est un enjeu important. Conclusion : Jean-Luc Vidal : Les entreprises ont leur rôle à jouer sur des actions collectives qui sont plus rassurantes pour les PME. Il y a des choses à faire, et c est plus simple d agir en réseau. Arnaud Tavard : Le développement durable se mesure à l aune des actions et du changement, et celui-ci doit pouvoir être chiffrable et quantifiable. Cette nécessité de mesurer l impact réel est valable en particulier pour les grandes entreprises, afin notamment d éviter l écueil du green washing. 8