Carnassiers Rencontre avec un géant : Dietmar Isaiasch. Coup. Carpe. Tourisme-pêche. La truite au féminin Toc : le retour à l originel

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1 Avril 2011 N 3 3,40 c Pêche & Pisciculture Périodique mensuel de la Fédération Sportive des Pêcheurs Francophones de Belgique a.s.b.l. (F.S.P.F.B.) reconnue par l ADEPS. Association touristique reconnue par le Commissariat général au Tourisme Editeur responsable : Charlie Dubourg Truite La truite au féminin Toc : le retour à l originel Coup Pour le plaisir avec P.-F. Deschepper Carpe «Roulez» vos bouillettes! Tourisme-pêche Québec Nouvelle rencontre avec le musky Gestion Réforme de la pêche : Le Ministre Lutgen nous répond ISSN Charleroi X 121 e ANNEE P Ne paraît pas en janvier et août Carnassiers Rencontre avec un géant : Dietmar Isaiasch

2 Carnassiers Rencontre avec un géant de la pêche des carnassiers Dietmar Isaiasch Propos recueillis par B. Chermanne Photos B. Chermanne 6 Le Pêcheur Belge - Avril 2011

3 Bio express Prénom et Nom : Dietmar Isaiasch (prononcez Isaïass) Nationalité : allemande Age : 43 ans Vit au Pays-Bas Dietmar Isaiasch entouré des membres belges du team Fox Rage. A gauche, Jean-Marc Brison. A droite, Fred De Greef. Dietmar Isaiasch. Si ce nom n évoque rien pour vous, surtout ne vous en vantez pas et lisez attentivement ce qui suit afin de combler ce manque dans votre culture halieutique. Dietmar Isaiasch fait en effet partie des quelques personnes en Europe auxquelles la pêche moderne des carnassiers et ceux qui la pratiquent doivent beaucoup. Celui qui est l un des concepteurs de la pêche à la verticale a créé la sensation en remportant la première Coupe du Monde de pêche des carnassiers à Carcans (F) en 2002 (voir PB septembre 2002, p 54). Ce jour-là, la pêche à la verticale a fait une entrée fracassante dans l univers francophone de la pêche des carnassiers. J ai pu rencontrer ce géant de la pêche des carnassiers grâce à notre collaborateur Jean- Marc Brison membre du team Fox Rage à l occasion d une sortie du team sur le Waal (Rhin) aux Pays-Bas. Pareille occasion se présente rarement. La rencontre fut très riche, tant sur le plan humain que sur le plan technique. Pêcheur Belge (P. B.) : Les pêcheurs de Belgique francophone et de France on découvert l efficacité de la verticale à la suite de la coupe du monde 2002 à Carcans, épreuve que tu as remportée avec ton épouse. Et pour toi, à quand remonte cette découverte? Dietmar Isaiasch (D. I.) : Il ne s agit pas vraiment d une découverte dans la mesure où j ai pu prendre part à la naissance de cette technique, naissance qui remonte à 25 ans, soit au milieu des années 80. La verticale est une technique dérivée de la pêche à la dandine, très pratiquée dans les années 70 aux Pays-Bas, à l aide de pilkers principalement à l époque. Cette technique est très efficace mais celui qui la pratique sait qu elle entraîne souvent le harponnage non intentionnel de poissons. Le groupe de pêcheurs dont je faisais partie et au sein duquel on retrouvait également Bertus Rozemeijer mon mentor à l époque ainsi que Jan Helvert et Robi Blom a alors réfléchi au développement d une alternative qui permettrait de conserver l avantage de la pêche à la dandine, c est-à-dire une pêche insistante, tout en minimisant les risques de harponnage : la capture devait résulter d une volonté du poisson à se saisir de l appât. Ainsi est née la verticale, technique aux mouvements moins amples et moins brutaux. Le pilker a alors cédé la place à un leurre, en l occurrence le twister à l époque. Et on s est rendu compte que la technique était très efficace. Depuis, elle ne cesse d évoluer, pour mon plus grand bonheur. P. B. : Elle ne cesse d évoluer, effectivement. A ce sujet, aujourd hui, la diversité des leurres souples pour la verticale est quasi sans limite et tout semble avoir été développé en la matière. Quels sont les aspects qu il est encore possible d améliorer dans ce domaine? Le Pêcheur Belge - Avril 2011 Pêche les carnassiers de manière intensive depuis plus de 25 ans. Son diplôme universitaire en marketing à peine en poche, Dietmar est engagé chez DAM. Plus tard, il fondera sa propre entreprise de fabrication de leurres souples, laquelle fournira notamment des produits à la marque Man s. Sa société sera ensuite absorbée par Ultimate, marque pour laquelle il travaillera durant quelques années. Depuis 2009, Dietmar est manager chez Fox Europe, responsable du développement de la gamme carnassiers Fox Rage. Vainqueur de la coupe du monde de pêche des carnassiers à Carcans en 2002, où il faisait équipe avec son épouse, Carmen Klein. Dietmar se définit comme un pêcheur européen accompli : de nationalité allemande, il vit aux Pays-Bas et travaille pour une firme anglaise qui possède ses bureaux en Belgique Dietmar fut rédacteur en chef de la revue allemande «De Raubfische» et est co-fondateur de la revue néerlandaise «De Roofvis». Multilingue (anglais, allemand, français, néerlandais et russe) il collabore actuellement de manière régulière avec une douzaine de magazines de pêche en Europe. Ce qu il recherche à la pêche : des touches, de préférence violentes. Son objectif : rendre les pêcheurs heureux au bord de l eau et sur l eau. D. I. : Au-delà de la couleur et des formes, je crois énormément et j accorde aujourd hui beaucoup d importance à la matière qui constitue un leurre souple. Celle-ci doit résulter d un bon compromis entre souplesse et dureté. Une souplesse suffisante pour obtenir la mobilité voulue et une dureté suffisante pour garantir à la fois une bonne tenue sur la tête plombée, un bon ancrage des hameçons triples et une durée de vie suffisamment longue. P. B. : Justement : le plus important pour un leurre souple, sa couleur ou sa forme? D. I. : L un et l autre sont tout aussi importants. Ce qu il faut éviter, c est de tomber dans la maladie qui consiste à acheter systématiquement tout ce qui sort sur le marché. Au total, je n ai pas plus de 30 modèles différents dans ma boîte. Depuis quelques années, les leurres aromatisés montent en 7

4 Au-delà de la couleur et de la forme des leurres souples, Dietmar crois énormément et accorde aujourd hui beaucoup d importance à la matière qui constitue ces leurres puissance. Ils sont devenus incontournables. Ils font en sorte que les poissons gardent le leurre plus longtemps en bouche, ce qui augmente les chances d un bon ferrage. Attention, je parle des leurres imprégnés dans la masse. Lorsqu ils touchent l eau, certains leurres provoquent en surface une tache comparable à la marée noire du Golfe du Mexique mais sont complètements «lavés» après une à deux minutes d immersion. Ces leurres simplement recouverts d attractant en surface ne valent rien. Est-ce utile de préciser que les leurres Fox Rage sont imprégnés dans la masse? Chez Fox Rage, 10 kg de matière première sont utilisés pour fournir l attractant nécessaire à l imprégnation de 1 litre de matière liquide destinée à la fabrication des leurres. P. B. : En quoi consiste l animation de base de la verticale? Sinon, quelles en sont les principales déclinaisons? D. I. : A la verticale, le plus important est de pêcher au bon niveau, c est-à-dire à proximité du fond. La meilleure manière de s en assurer est de poser la tête plombée sur le fond à intervalles réguliers, de manière à épouser la topographie du fond. Pour le Paré pour la verticale. reste, à savoir l amplitude des animations, leur vitesse etc., c est une question de goût, de confiance en ce que l on fait, de tempérament. Pour ma part, j opte pour des animations très minimalistes. Je décolle le leurre du fond et le maintient ainsi quelques secondes sans animation avant de le poser à nouveau. Je pratique de la sorte car j ai remarqué que c est ainsi que les touches sont les plus brutales. Cette animation minimaliste est également plus efficace sur les gros poissons, que je recherche en priorité. Le but de Dietmar : rendre les pêcheurs heureux sur ou au bord de l eau. P. B. : Beaucoup de pêcheurs en bateau hésitent entre drop-shot et verticale. Quand l une plutôt que l autre? D. I. : Le drop-shot permet de pratiquer une pêche insistante à distance, notamment depuis le bord. En barque, je privilégie souvent la verticale, surtout lorsque le courant est important, conditions dans lesquelles la pratique du drop-shot devient problématique : les touches sont plus difficiles à percevoir, les débris s accumulent au niveau du leurre. Le drop-shot est selon moi davantage une technique à réserver pour les eaux calmes (lacs, canaux). Et puis, pourquoi diable pratiquer le drop-shot en bateau lorsque l on peut se rendre à l aplomb du poste convoité et pratiquer à la verticale? En fait, beaucoup de pêcheurs en bateau utilisent aujourd hui un montage en drop-shot mais pratiquent à l aplomb du bateau, ce qui n est pas du drop-shot véritable. P. B. : Quelle est ta tactique lorsque tu abordes un plan d eau que tu ne connais pas? D. I. : J opte pour une technique qui me permet de battre rapidement beaucoup de terrain. Je pratique une espèce de pêche en diagonale au départ de lancers à l aide de leurres souples montés sur une tête plombée. Lorsque j ai une touche, je m attarde alors sur le poste à la verticale. P. B. : Quelles sont les techniques que doit aujourd hui maîtriser un pêcheur de carnassiers complet? D. I. : Je me limiterai au cas de la pêche en grands plans d eau ou en rivière profonde. Il y a tout d abord la verticale, bien entendu, cette technique étant aujourd hui incontournable. Ensuite, la pêche en casting. Et puis, la pêche en diagonale décrite ci-dessus, laquelle permet de battre du terrain. P. B. : Si, demain, tu étais obligé de ne plus pratiquer qu une seule de ces techniques, quelle serait cette technique et pourquoi? D. I. : La verticale, sans hésiter, tout simplement parce qu elle me procure beaucoup de plaisir! C est le plus important à la pêche! P. B. : Si tu avais un seul conseil à donner à un pêcheur qui recherche la perche, quel serait ce conseil? Et

5 La pêche moderne des carnassiers doit beaucoup à Dietmar Isaiasch. Il est notamment l un des concepteurs de la pêche à la verticale. Un poisson qui a engamé franchement le leurre aromatisé dans la masse proposé par Dietmar. pour un pêcheur de sandre? Et pour un pêcheur de brochet? Combat avec un beau sandre dans les courants puissants du Waal. D. I. : Un seul conseil? Pas facile La capture d un gros poisson procure toujours plus de plaisir. Je vais donc tenter de délivrer un conseil en ce sens. Concernant la perche, je conseillerais à ce pêcheur de ne surtout pas délaisser les imitations d écrevisses brunes. Ce type de leurre est un véritable aimant à grosses perches, ces poissons recherchant activement les écrevisses. En ce qui concerne le sandre, je conseille l utilisation de leurres de grande taille, minimum cm. Combiné à l animation minimaliste décrite ci-avant pour la verticale, ce choix m a permis de capturer 9 sandres de plus du mètre à ce jour. Et pour le brochet, je conseille l emploi de leurres dont l effet de flanc est très marqué. Le brochet est très sensible à la chose. P. B. : Une question relative à la compétition maintenant. Quelle est la meilleur manière de départager les pêcheurs lors d une compétition aux carnassiers : la taille des prises ou le poids des prises? Pourquoi? D. I. : La taille des prises. C est ce paramètre qui reflète le mieux nombre de prises enregistrées par les compétiteurs. Et Quel plus grand bonheur que de leurrer un poisson? Le Pêcheur Belge - Avril 2011 le compétiteur qui a effectué le plus grand nombre de prises est aussi celui qui a enregistré et concrétisé le plus grand nombre de touches. Et provoquer une touche, c est bien là tout l art de la pêche. P. B. : Une dernière question. Que penses-tu de la pêche au vif? D. I. : Je n ai rien contre les pêcheurs qui pratiquent cette pêche, pour autant qu elle soit autorisée bien sûr. Cependant, j estime que l on s éloigne fortement de la pêche sportive avec cette technique. Je viens de le dire : tout l art de la pêche consiste à provoquer une touche. Or, à la pêche au vif, le pêcheur est passif, ce n est pas lui qui provoque la touche. Aussi, je pense que la pêche au vif n a pas sa place en compétition, de même que la pêche au poisson mort posé. Où est le mérite du pêcheur dans ces techniques passives? Et puis, ces techniques ne m intéressent pas vraiment dans la mesure où elles privent le pêcheur du choc ressenti lors de la touche. Enfin, quel plus grand bonheur que de leurrer un poisson? P. B. : Aurais-tu un dernier message à adresser aux lecteurs du Pêcheur Belge? D. I. : Oui. Je voudrais leur dire que la pêche, cela se passe sur l eau ou au bord de l eau et pas devant un ordinateur. Se rendre à la pêche est une condition indispensable pour engranger l expérience qui permet de progresser. Et cette expérience, il faut la partager avec d autres en échangeant ses impressions, ses expériences vécues, ses observations. C est ainsi que la pêche évolue! P. B. : Merci Dietmar! 9