Le projet de loi Maltais vole la vedette au budget du Québec Le ministre des Finances et de l Économie du Québec, Nicolas Marceau, a déposé son deuxième budget le. Ce budget ne contient aucune mesure significative affectant les employeurs du Québec outre qu on y affirme poursuivre les travaux déjà amorcés suite au Rapport D Amours. Pour les promoteurs de régimes de retraite du secteur municipal, néanmoins, le gouvernement réservait une surprise de taille avec la parution, quelques heures avant la publication du budget, du projet de Loi concernant la restructuration des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal et d'autres modifications à ces régimes (ci-après «projet de Loi sur la restructuration»). Rappelons que le 12 décembre dernier, la ministre responsable de la Régie des rentes du Québec, Madame Agnès Maltais, présentait le plan d action du gouvernement «Vers des régimes de retraite équitables et durables». Ce plan d action constituait le point de départ d une importante réforme visant à donner suite au rapport du comité d experts sur l avenir du système de retraite québécois (Rapport D Amours), rendu public en avril 2013. Conformément à ce plan d action, des forums ont été mis sur pied pour chacun des secteurs suivants : privé, municipal et universitaire. Lors de la première réunion du forum municipal, la ministre s était engagée à présenter rapidement un projet de loi concernant la restructuration des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal, en réponse à une demande formulée par les municipalités. Le «projet de Loi sur la restructuration» est donc le premier jalon de cette importante réforme. Restructuration : régimes visés, mesures à négocier et autres règles applicables Le projet de loi oblige la restructuration d un régime de retraite à prestations déterminées dès que l une des conditions suivantes est satisfaite : une évaluation actuarielle au 31 décembre 2013 montre que le degré de capitalisation du régime est inférieur à 85 %; le régime offre une subvention pour retraite anticipée avant l âge de 55 ans. Le processus de restructuration peut aussi être entrepris sur une base volontaire, donc avec l accord de l organisme municipal et des participants actifs. Aon Hewitt Aon Hewitt inc., 2014. Tous droits réservés. 1
Pour satisfaire ces exigences, on peut penser qu une évaluation actuarielle sera requise pour tous les régimes de retraite au 31 décembre 2013 et le rapport relatif à cette évaluation actuarielle devra être transmis à la Régie des rentes du Québec (Régie) au plus tard le 30 juin 2014. Lorsque le processus de restructuration s applique, l organisme municipal et les participants actifs doivent négocier en vue de déterminer des mesures visant : l atteinte d un degré de capitalisation minimal de 85 %; l abolition de la subvention pour retraite anticipée avant l âge de 55 ans; le partage des coûts à parts égales pour le service courant; l abolition de la prestation additionnelle prévue à l article 60.1 de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite (Loi RCR). Les parties peuvent décaler l entrée en vigueur de l abolition de la subvention pour retraite anticipée jusqu à 5 ans après la date de signature de l entente conclue dans le cadre du processus de restructuration. Les mesures relatives au partage des coûts peuvent être étalées pour atteindre le partage à parts égales du service courant sur le même horizon. Le partage des déficits passés peut faire l objet de négociation dans le cadre du processus de restructuration. Pour atteindre un degré de capitalisation de 85 %, le projet de loi permet la réduction ou l élimination de toute prestation prévue au régime, à l exception de la rente normale. Dans le cas des retraités, leur rente ne peut être réduite. Le projet de loi permet d en suspendre l indexation ou d en modifier la formule d indexation. Toutefois, ces modifications ne peuvent être mises en place si 30 % ou plus des retraités s y opposent. Processus de restructuration Les principales règles définies dans le projet concernant le processus de restructuration sont les suivantes : la date du début des négociations est celle de la première rencontre prévue dans l avis transmis par l organisme municipal à toute association représentant des participants actifs concernés par le régime. Cette date ne peut être postérieure au 15 juillet 2014. À défaut d un tel avis, les négociations sont réputées avoir débuté le 1 er juillet 2014; si le ministre n a pas reçu un avis d entente dans les 6 mois suivant le début des négociations, celui-ci nomme un conciliateur; la conciliation se déroule sur une période de 6 mois à compter de la nomination du conciliateur. Sur demande conjointe des parties, cette période peut être prolongée une seule fois et d au plus 30 jours; Aon Hewitt Aon Hewitt inc., 2014. Tous droits réservés. 2
s il n y a pas entente sur l ensemble des matières qui lui sont soumises, le conciliateur remet aux parties au plus tard 30 jours après l expiration de la période de conciliation un rapport dans lequel il indique : les matières qui ont fait l objet d un accord; celles faisant encore l objet d un différend; toute recommandation qui n a pas été suivie par les parties. Une copie de ce rapport est aussi transmise au ministre et à la Commission des relations de travail (CRT); sur réception du rapport de conciliation, la CRT convoque les parties en indiquant les propositions ou documents qui doivent lui être transmis; pour l aider à régler le différend, la CRT : doit requérir un rapport écrit de la Régie, dans les domaines de sa compétence, notamment quant à la conformité des propositions soumises avec la Loi sur la restructuration et la Loi RCR; peut demander à un spécialiste des finances municipales du ministère des Affaires municipales, des Régions et de l Occupation du territoire un rapport écrit lui permettant notamment de faire l évaluation de la capacité de payer des contribuables; ces rapports ne lient pas la CRT; la CRT rend sa décision dans les 6 mois de la date où elle a été saisie du différend. Modifications obligatoires Tout régime de retraite qui n est pas soumis au processus de restructuration doit être modifié pour prévoir les mesures suivantes : le partage des coûts à parts égales pour le service courant; l abolition de la prestation additionnelle prévue à l article 60.1 de la Loi RCR. Les mesures relatives au partage des coûts doivent être négociées dès la date de sanction de la «Loi sur la restructuration» si la convention collective entre les parties est échue à cette date. Sinon, la négociation débute à la date d échéance de la convention collective en vigueur. Une entrée en vigueur progressive du partage des coûts à parts égales est permise sur une période maximale de 5 ans débutant à la date de signature de la nouvelle convention collective. La date pour l abolition de la prestation additionnelle est déterminée selon la règle décrite ci-dessus, avec effet immédiat. Aon Hewitt Aon Hewitt inc., 2014. Tous droits réservés. 3
Enfin, tout régime de retraite doit être modifié afin de prévoir une provision pour écarts défavorables. Cette provision est constituée par le biais d une réserve ou d un fonds de stabilisation et financée par une cotisation d exercice additionnelle. Comme la cotisation d exercice est partagée à parts égales, on comprend qu il en va de même pour les cotisations qui seront versées au fonds de stabilisation ou à la réserve. À terme, la cotisation à verser au fonds ou à la réserve devra correspondre à 20 % de la cotisation d exercice. Ici aussi, une entrée en vigueur progressive de ces mesures est permise sur une période maximale de 5 ans débutant à la date de signature d une nouvelle convention collective. Nous comprenons que les régimes de retraite du secteur municipal seront dorénavant assujettis à des règles de financement plus contraignantes. Ainsi, sous réserve d une utilisation d excédent d actif permise par la Loi, toute modification devra être payée en entier le jour suivant la date de l évaluation actuarielle qui détermine la valeur de ces engagements supplémentaires. De même, les congés de cotisation seront dorénavant interdits sauf si un tel congé est requis pour satisfaire aux règles fiscales, c'est-à-dire lorsque l excédent d actif excède 25 % des engagements du régime. Commentaires Les régimes visés par la restructuration devront atteindre une degré de capitalisation minimal de 85 %. Par contre, le projet de loi permet aux retraités de s opposer à toute réduction de leurs droits. Prenons l exemple d un régime dont le degré de capitalisation au 31 décembre 2013 est de 75 %. Posons aussi comme hypothèse que la valeur des engagements des retraités de ce régime représente 50 % de son passif total selon l approche de capitalisation, ce qui est fréquent dans le secteur municipal. Si l atteinte de l objectif est obtenue par la seule réduction des droits des participants actifs, la valeur de leurs droits devra alors être réduite de près de 25 %. Reconnaissons qu il s agit là d une réduction majeure. On le constate, l orientation du gouvernement à l effet de protéger la rente des retraités est difficilement conciliable avec l équité intergénérationnelle. Cette réduction appréhendée et potentiellement importante des droits des participants actifs pourrait enclencher un phénomène néfaste pour bien des régimes, produisant davantage d iniquité pour les plus jeunes travailleurs. Dans un tel contexte, plusieurs participants admissibles à une retraite anticipée pourraient opter pour une telle retraite. En tant que retraités, ces participants seraient mieux protégés contre une réduction de leurs droits. Dans un régime non indexé, ils bénéficieraient même d une protection absolue. Cela produira des réductions plus importantes pour les participants actifs. Cet exode possible des travailleurs expérimentés pourrait aussi limiter à court terme la capacité de plusieurs municipalités dans la livraison des services aux citoyens. Aon Hewitt Aon Hewitt inc., 2014. Tous droits réservés. 4
Enfin, soulignons que la possibilité de prendre un congé de cotisation selon les limites fiscales pourrait déplaire à plusieurs municipalités qui ont négocié dans le passé des clauses banquiers. Bien que cela n élimine pas les règles de banquier, leur utilisation serait alors reportée à une date plus tardive. Ce projet de loi a été rédigé dans un très court laps de temps afin de respecter un engagement du gouvernement face aux municipalités. Il a été présenté dans un contexte où des élections pourraient être déclenchées à court terme. D ailleurs, plusieurs maires ont déjà promis que la situation des régimes de retraite du secteur municipal serait abordée durant la campagne électorale si de telles élections devaient avoir lieu. Plusieurs forums seront disponibles pour les principaux intervenants afin de faire valoir leur point de vue. Cela devrait permettre de bonifier le projet de loi. Si vous désirez obtenir des renseignements supplémentaires à ce sujet, veuillez communiquer avec votre conseiller Aon Hewitt local ou envoyer un courriel à info@aonhewitt.com. Aon Hewitt publie Bulletin d information aux seules fins de fournir des renseignements généraux. L information contenue dans Bulletin d information ne constitue pas un avis financier, juridique ou autre et ne doit pas être utilisée pour la prise de décisions d affaires. Afin d obtenir de l information spécifique aux besoins de votre organisation, veuillez communiquer avec votre conseiller chez Aon Hewitt. Les renseignements publiés dans le présent numéro de Bulletin d information sont la propriété d Aon Hewitt. Le contenu de ce numéro ne peut être distribué, reproduit, copié, modifié, ou changé sans l autorisation écrite préalable d Aon Hewitt. Aon Hewitt Aon Hewitt inc., 2014. Tous droits réservés. 5