Université Paris 7 U3MI36 CHAPITRE 3 Calcul Propositionnel : SÉMANTIQUE 1 Distributions de valeurs de vérité. Tables de vérité 3.1 Définition : Une distribution de valeurs de vérité sur P est une application de P dans l ensemble { 0, 1 }. Remarques : distribution de valeurs de vérité valuation évaluation. Une distribution de valeurs de vérité sur P est un élément de l ensemble { 0, 1 } P. Se donner une distribution de valeurs de vérité δ {0, 1 } P, c est attribuer à chaque variable propositionnelle A une valeur δ(a) qui est 0 ou 1. Ceci étant fait, il est alors possible, d une façon et d une seule, de prolonger δ à l ensemble de toutes les formules propositionnelles. Théorème : Pour toute distribution de valeurs de vérité δ {0, 1 } P, il existe une unique application δ : F {0, 1 } qui coïncide avec δ sur P ( c est-à-dire prolonge δ 2 )etvérifie les propriétés suivantes pour toutes formules F et G: (i) δ( F ) = 1 si et seulement si δ(f )=0 (ii) δ((f G) ) = 0 si et seulement si δ(f )= δ(g) =0 (iii) δ((f G) ) = 1 si et seulement si δ(f )= δ(g) =1 (iv) = G) ) = 0 si et seulement si δ(f )=1et δ(g) =0 (v) δ((f G) ) = 1 si et seulement si δ(f )= δ(g) Observons tout d abord que les conditions (i) à (v) peuvent s exprimer en utilisant les opérations d addition et multiplication du corps à deux éléments Z/2Z auquel on identifie naturellement l ensemble { 0, 1 }. Ces conditions sont alors équivalentes à : 1 Ce Chapitre s inspire de notes manuscrites de Catherine Muhlrad-Greif et se réfère au Chapitre 1 du Tomes I de COURS DE LOGIQUE de Cori-Lascar Ed MASSON 2 Soit A, B, C des ensembles tels que B A. Soit f une application de A dans C et g une application de B dans C. On dit que f prolonge g si f(x) =g(x) pour tout x B. On écrit dans ce cas f B = g.
2 quelles que soient les formules F et G: (i ) δ( F )=1+ δ(f ); (ii ) δ((f G))= δ(f )+ δ(g)+ δ(f ) δ(g); (iii ) δ((f G))= δ(f ) δ(g); (iv ) = G))=1+ δ(f )+ δ(f ) δ(g); (v ) δ((f G))=1+ δ(f )+ δ(g); On voit alors que la fonction δ est définie par induction sur l ensemble des formules, ce qui garantit son existence et son unicité (prop 2.5). Ici ϕ 0 = δ, les fonctions f, g, h, i et j à valeurs dans Z/2Z sont ici définies par : pour tous F, G, x et y, f(f, x) =1+x, g(f,g,x,y)=xy, h(f,g,x,y)=x+y+xy, i(f,g,x,y)=1+x+y et j(f,g,x,y)=1+x+y. Remarques : δ(f ) est la valeur de vérité de F pour la distribution δ. En pratique, on ne fera pas de distinction entre la distribution δ et son prolongement δ. Lorsque δ(f ) = 1 on dira que F est satisfaisable par δ, ou que δ satisfait F. Pour chaque formule F nous désignerons par (F ) l ensemble des distributions de valeurs de vérité qui satisfont F : (F )={δ {0, 1 } P ; δ(f )=1}. 3.2 Pour calculer la valeur de vérité d une formule, nous n avons besoin que des valeurs prises par la distribution de valeurs de vérité sur les variables occurrant dans la formule. Proposition : Pour toute formule F = F [A 1,...,A n ] ( ne comportant pas de variable propositionnelle en dehors de A 1,..., A n ), et toutes distributions de valeurs de vérité λ et µ {0, 1 } P,siλ et µ coïncident sur { A 1,...,A n }, alors λ(f )= µ(f ). Démonstration par induction sur la formule F. Notation : On considère P = {A 1,...,A n }. Pour chaque n-uplet (ɛ 1,...,ɛ n ) {0, 1 } n nous appelons δ ɛ1... ɛ n la distribution de valeurs de vérité définie par δ ɛ1... ɛ n (A i )=ɛ i, pour tout i {1,...,n.} On remarquera que pour toute distribution de valeurs de vérité δ sur P il existe (ɛ 1,...,ɛ n ) {0, 1 } n tel que δ = δ ɛ1... ɛ 3 n. 3 ɛ i = δ(a i ).
3 Définitions : On considère une formule F = F [A 1,...,A n ]. matrice suivante ( représentée sous forme de tableau ) : Alors, la A 1 A 2... A n F 0 0... 0 δ00... 0 (F ) 0 0... 1 δ00... 1 (F )..... ɛ 1 ɛ 2... ɛ n δɛ1 ɛ 2... ɛ n (F )..... 1 1... 1 δ11... 1 (F ) est une table de vérité de F, elle consigne les variables propositionnelles qui peuvent occurrer dans F, le nom de la formule F, les diverses distributions de valeurs de vérité sur A 1,...,A n et la valeur de vérité de F pour chacune de ces distributions. On remarquera que, avec les conventions relatives à la notation F [A 1,...,A n ], il n y a pas d unicité de la table de vérité d une formule. Il y a cependant une table minimale. Considérons F =(A B). Alors F = F [A, B, C] et le tableau : A B C F 0 0 0 0 0 0 1 0 0 1 0 0 0 1 1 0 1 0 0 0 1 0 1 0 1 1 0 1 1 1 1 1 est une table de vérité de F. On peut écrire F = F [A,B,C,D] et le tableau :
4 A B C D F 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 0 1 0 0 0 0 1 1 0 0 1 0 0 0 0 1 0 1 0 0 1 1 0 0 0 1 1 1 0 1 0 0 0 0 1 0 0 1 0 1 0 1 0 0 1 0 1 1 0 1 1 0 0 1 1 1 0 1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1 1 est aussi une table de vérité de F. On peut aussi bien écrire F = F [A, B] et le tableau : A B F 0 0 0 0 1 0 1 0 0 1 1 0 est aussi bien une table de vérité de F. C est la table de vérité minimale de F. Tautologies. Formules logiquement équivalentes. 3.3 Définitions : Une tautologie est une formule qui prend la valeur 1 pour toute distribution de valeur de vérité. Une antilogie (ouantitautologie ) est une formule qui prend la valeur 0 pour toute distribution de valeur de vérité. Etant données deux formules F et G, F est logiquement équivalente à G si et seulement si la formule F G est une tautologie. La notation pour logiquement équivalente est : F G. Proposition : a) Quelles que soient les formules F et G, les propositions (i), (ii) et (iii) qui suivent sont équivalentes :
5 (i) F G. (ii) (F )= (G). (iii) pour toute distribution de valeurs de vérité δ {0, 1 } P δ(f )= δ(g) 4. b) La relation binaire est une relation d équivalence sur F. Une question immédiate est de déterminer les classes d équivalences pour la relation et de trouver leur nombre. La réponse sera donnée dans le chapitre suivant. 3.4 Substitution Théorème : Soient δ une distribution de valeurs de vérité, n un entier naturel, F, G 1,...,G n, des formules, et A 1,...,A n des variables propositionnelles deux à deux distinctes. Appelons λ la distribution de valeurs de vérité définie par : { δ(x) si X {A1,...,A Pour tout X P, λ(x) = n } δ(g i ) si X = A i ( ) On a alors : δ(f G1 /A 1,...,G n/a n )= λ(f ). G 1,..., G n Fet A 1,..., A n P étant fixés, on fait la démonstration par induction sur la formule F. Corollaire : Quelles que soient les formules F, G 1,...,G n, et les variables propositionnelles deux à deux distinctes A 1,...,A n,sif est une tautologie, alors la formule F G1 /A 1,...,G n/a n en est également une. Etant donné une distribution de valeurs de vérité quelconque δ, en définissant la distribution λ comme dans le théorème précédent, on a : δ(f G1 /A 1,...,G n/a n )= λ(f )=1 puisque F est une tautologie. Théorème : Considérons une formule F, une sous-formule G de F et une formule H logiquement équivalente à G. Alors la formule F, obtenue à partir de F en substituant à la sous-formule G la formule H, est logiquement équivalente à F. Démonstration par induction sur la formule F. 4 c-à-d : Pour tout (ɛ 1,...,ɛ n ) {0, 1 } n, δ ɛ1... ɛ n (F )= δ ɛ1... ɛ n (G)
6 Quelques tautologies : A, B et C désignent des variables propositionnelles ( et on peut le corollaires ci-dessus, leur substituer des formules quelconques ); 1 désigne une quelconque tautologie et 0 une antilogie. 0. (A A) 1. ((A A) A) 2. ((A A) A) 3. ((A B) (B A)) 4. ((A B) (B A)) 5. ((A (B C)) ((A B) C)) 6. ((A (B C)) ((A B) C)) 7. ((A (B C)) ((A B) (A C))) 8. ((A (B C)) ((A B) (A C))) 9. ((A (A B)) A) 10. ((A (A B)) A) 11. ( (A B) ( A B)) 12. ( (A B) ( A B)) 13. ((A 0) A) 14. ((A 1) A) 15. ((A 1) 1) 16. ((A 0) 0) 17. ((A= B) ( B= A)) 18. (A A) Comme conséquences, en substituant, on a les tautologies suivantes : (F F ) ((F F ) F ) ((F F ) F ) ((F G) (G F )) ((F G) (G F )) ((F (G H)) ((F G) H)) ((F (G H)) ((F G) H)) ((F (G H)) ((F G) (F H))) ((F (G H)) ((F G) (F H))) ((F (F G)) F ) ((F (F G)) F ) ( (F G) ( F G)) ( (F G) ( F G)) ((F 0) F ) ((F 1) F ) ((F 1) 1)
7 ((F 0) 0) ((F = G) ( G= F )) (F F ) (F G H) ( F G H) (F G H) ( F G H)) ( F i ) F i ( F i ) F i F, G, H, et les F i étant des formules quelconques.