ESPACES VECTORIELS CHAPITRE Espaces vectoriels. 1.1 Définition. Dans tout ce chapitre, K désignera R ou C. Définition 10.1

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CHAPITRE 10 ESPACES VECTORIELS Dans tout ce chapitre, K désignera R ou C. 1 Espaces vectoriels 1.1 Définition Définition 10.1 On appelle K-espace vectoriel un ensemble E muni d une addition + : E E E (x, y) x + y ; d une multiplication externe : K E E (λ, x) λ x ; ainsi que d un élément 0 E E appelé vecteur nul tels que : x, y E, x + y = y + x (l addition est commutative), x, y, z E, x + (y + z) = (x + y) + z (l addition est associative), x E, x + 0 E = 0 E + x = x (0 E est l élément neutre pour l addition), x E, 0 x = 0 E, x E, 1 x = x, λ K, λ 0 E = 0 E, λ K x, y E, λ (x + y) = λ x + λ y, λ, µ K x E, (λ + µ) x = λ x + µ x, λ, µ K x E, λ (µẋ) = (λµ) x. s Cette définition n est pas à connaître par cœur. On appellera scalaires les éléments de K et vecteurs les éléments de E. Il est crucial de ne pas confondre ces deux types d objet. Attention, on peut multiplier un vecteur par un scalaire, mais multiplier entre eux deux vecteurs n a a priori aucun sens. Proposition 10.2 Soit E un K-espace vectoriel, x un vecteur de E et λ un scalaire. On a λ x = 0 E (x = 0 E ou λ = 0). Lycée du Parc 851 1

1.2 Exemples 1.2.a Proposition 10.3 K n L espace K n, où n N, doté des opérations suivantes : addition : (x 1,..., x n ) + (y 1,..., y n ) = (x 1 + y 1,..., x n + y n ) multiplication externe : λ(x 1,..., x n ) = (λx 1,..., λx n ) est un K-espace vectoriel. Le vecteur nul de K n est 0 K n = (0,..., 0) (n zéros). s K n est à la fois l exemple le plus simple et le plus important d espace vectoriel. Il faut commencer par bien comprendre les cas n = 2 et n = 3, et ne pas hésiter à y revenir quand on est confronté à des exemples plus compliqués. Exemple 10.1 L espace R 2 est souvent appelé plan usuel. Un vecteur de R 2 correspond à un vecteur du plan et l addition et la multiplication externe sur R 2 correspondent à l addition de vecteurs et la multiplication d un vecteur par un réel. 1.2.b Proposition 10.4 Autres exemples K[X], doté des opérations usuelles, est un K-espace vectoriel. Pour tout ensemble X, l ensemble A(X, K) des applications de X dans K est un K-espace vectoriel. Pour tous n, p N, M n,p (K) est un K-espace vectoriel. 2 Sous-espace vectoriel 2.1 Définitions Définition 10.5 Soient E un K-espace vectoriel, n N et x 1,..., x n, y E. On dit que y est combinaison linéaire de x 1,..., x n si λ 1,..., λ n K, y = λ 1 x 1 + + λ n x n s Un n-uplet (x 1,..., x n ) d éléments de E est usuellement appelé famille de n vecteurs. Certains (ou tous) les λ i peuvent être nuls. Ainsi, 0 E est combinaison linéaire de n importe quelle famille (non vide) de vecteurs de E, en prenant tous les λ i égaux à 0. Exemple 10.2 Soit F la famille ((1, 2, 1), (3, 0, 4)) de vecteurs de R 3. ( 1, 4, 6) est combinaison linéaire de vecteurs de F, mais pas (0, 1, 0). Soit F la famille (3, 1 + 2X, X + X 3 ) de vecteurs de R[X] (notons que c est aussi une famille de vecteurs de C[X]). 1 X est combinaison linéaire de vecteurs de F, mais pas 1 X 2. Lycée du Parc 851 2

Définition 10.6 Soient E un K-espace vectoriel et F une partie de E. On dit que F est un sous espace vectoriel de E si F ; x, y F, x + y F (F est stable par addition) ; λ K x F, λ x F (F est stable par multiplication externe). {O E } et E sont des s.e.v de E. Proposition 10.7 Soient E un K-espace vectoriel et F E. Les propositions suivantes sont équivalentes : F est un sous-espace vectoriel de E. F est non vide et stable par combinaison linéaire, c est-à-dire x, y F λ, µ K, λx + µy F. 0 E F et x, y F λ K, λx + y F. En pratique, on utilisera la troisième formulation quand on voudra montrer que F est un s.e.v de E. Proposition 10.8 Si E est un K-espace vectoriel et que F est un sous-espace vectoriel de E, alors F est un K-espace vectoriel. Exercice 10.3 Dans chacun des cas suivants, déterminer si F est un sous-espace vectoriel de E. 1. E = R 2, F = {(x, y) R 2, x + 2y = 0}. 2. E = R 2, F = {(x, y) R 2, x + 2y = 1}. 3. E = C 3, F = {(t, (1 2i)t, 0), t C}. 4. E = C 2, F = {(x, y) C 2, x 2 + y 2 = 0}. s En pratique, on ne montrera jamais directement qu un certain ensemble est un espace vectoriel : on montrera systématiquement que c est un sous-espace vectoriel d un espace vectoriel déjà connu (comme K n, K[X],...). Par conséquent, on n utilisera jamais la définition d un espace vectoriel donnée en début de chapitre (qu il est parfaitement illusoire d espérer retenir). En revanche, il est indispensable de savoir prouver qu un certain ensemble est un sous-espace vectoriel d un espace vectoriel connu. Exemple 10.4 Pour tout n N, K n [X] est un espace vectoriel. {P R[x], P(0) = P(1) = 0} est un espace vectoriel. Théorème 10.9 Soit E un K-espace vectoriel et F 1,..., F n des sous-espaces vectoriels de E (n 1). F 1 F n est un sous-espace vectoriel de E. Attention, la réunion de sous-espaces vectoriels n est généralement pas (presque jamais en fait) un sous-espace vectoriel. Lycée du Parc 851 3

Proposition 10.10 Soient n N{ et λ 1,..., λ n K. n L ensemble (x 1,..., x n ) K n, k=1 } λ i x i = 0 est un sous-espace vectoriel de K n. Autrement dit, l ensemble des solutions d une équation linéaire homogène (sans second membre) à n inconnues à coefficients dans K est un sous-espace vectoriel de K n. Proposition 10.11 L ensemble des solutions d un système linéaire homogène à n inconnues à coefficients dans K est un sousespace vectoriel de K n. Exemple 10.5 Soit F = {(x, y, z, t) C 4, 2x + y = z it et x 3t = 2y + iz}. F est un sous-espace vectoriel de C 4. 2.2 Sous-espace engendré par une famille de vecteurs Définition 10.12 Soient n N et F = (u 1,..., u n ) une famille de vecteurs d un K-espace vectoriel E. On appelle sous-espace vectoriel engendré par F, et l on note Vect(u 1,..., u n ), l ensemble des combinaisons linéaires de vecteurs de F. Vect(u 1,..., u n ) = {λ 1 u 1 + + λ n u n, λ 1,..., λ n K} s Les λ i peuvent être nuls, ce qui signifie entre autres que 0 E et chacun des u i appartiennent à Vect(u 1,..., u n ). L «ordre» des u i n a pas d importance : par exemple, on a forcément Vect(u 1, u 3, u 2 ) = Vect(u 1, u 2, u 3 ). Exemple 10.6 Soit E = R[X]. On a Vect(1, X, X 2 ) = R 2 [X]. Proposition 10.13 Soient E un K-espace vectoriel, n N et F = (u 1,..., u n ) une famille de vecteurs de E. Vect(u 1,..., u n ) est un sous-espace vectoriel de E. Si F est un sous-espace vectoriel de E et si i 1, n, u i F, alors Vect(u 1,..., u n ) F. Si x E, Vect(u 1,..., u n ) Vect(x, u 1,..., u n ). Si x Vect(u 1,..., u n ), alors Vect(u 1,..., u n ) = Vect(x, u 1,..., u n ). Si F F, alors Vect F Vect F. Le deuxième point signifie que Vect(u 1,..., u n ) est le plus petit (au sens de l inclusion) sous-espace vectoriel contenant tous les u i. Exercice 10.7 Déterminer : 1. Vect((1, 0, 0), (0, 2, 0)) (E = R 3 ). 2. Vect((1, 0, 1), (2, 3, 0)) (E = C 3 ). Lycée du Parc 851 4

3. Vect (( ) ( )) 1 0 0 2, (E = M 0 1 1 2 2 (R)). 4. Vect((1, 2), (1, 0)), (E = R 2 ). Proposition 10.14 Soient n N, E un K-espace vectoriel et F = (u 1,..., u n ) une famille de E. Posons F = Vect(u 1,..., u n ). Si on modifie l ordre des vecteurs u i ; on ajoute à la famille F un ou plusieurs vecteurs de F ; on remplace l un des vecteurs u i par λu i, avec λ un scalaire non nul, le sous-espace vectoriel engendré par la nouvelle famille F reste inchangé. 3 Dimension d un espace vectoriel 3.1 Familles libres, familles génératrices Définition 10.15 Soient n N, E un K-espace vectoriel et F = (u 1,..., u n ) une famille de E. On dit que F est une famille génératrice de E si Vect(u 1,..., u n ) = E. Autrement dit, F est génératrice ssi tout vecteur de E peut s écrire comme combinaison linéaire de vecteurs de F : n F génératrice x E λ 1,..., λ n K, x = λ i u i s On dit également que F engendre E. On peut dans la définition remplacer E par un sous-espace vectoriel F de E. On dira alors que F engendre le sous-espace vectoriel F, ou éventuellement que c est une famille génératrice de F. Si F est génératrice et si F F, alors F est génératrice. Proposition 10.16 Soient F = (u 1,..., u n ) et F = (v 1,..., v p ) deux familles d un sous-espace vectoriel F de E. On suppose que F est génératrice de F ; i 1, n, u i Vect(v 1,..., v n ) (tout vecteur de F est combinaison linéaire de vecteurs de F ). Alors F est génératrice de F. i=1 Exercice 10.8 Montrer que (1, 1 + X, 1 + X + 3X 2 ) est une famille génératrice de R 2 [X]. Définition 10.17 Soient n N, E un K-espace vectoriel et F = (u 1,..., u n ) une famille de vecteurs de E. La famille F est dite libre ssi λ 1,..., λ n K, n λ k u k = 0 E λ 1 = = λ n = 0 k=1 Lycée du Parc 851 5

s On dit aussi que les vecteurs u 1,..., u n sont linéairement indépendants. Une famille qui n est pas libre est dite liée. Autrement dit, une famille F est libre si la seule façon d obtenir 0 E comme combinaison linéaire de vecteurs de F est de prendre tous les coefficients égaux à 0. Proposition 10.18 Soient E un K-espace vectoriel et F une famille de vecteurs de E. Si F est libre et F est incluse dans F, alors F est libre. Si F contient 0 E, alors F est liée. Si F = (u) (famille d un seul vecteur), alors F est libre ssi u 0 E. Si F = (u, v) (famille de deux vecteurs), alors F est liée ssi u et v sont colinéaires : (u, v) liée u et v colinéaires λ K, u = λv ou v = λu Si l un des vecteurs de F est combinaison linéaire des autres, alors F est liée. Si F = (u 1,..., u n ) est libre et v E, alors F = (u 1,..., u n, v) est libre ssi v Vect(u 1,..., u n ). La contraposée du premier point est souvent utile : si F contient une famille liée, alors F est liée. Proposition 10.19 Une famille F = (u 1,..., u n ) d un K-espace vectoriel E est libre ssi tout vecteur de Vect(u 1,..., u n ) s exprime de manière unique comme combinaison linéaire de vecteurs de F. Exercice 10.9 Dans chacun des cas suivants, déterminer si la famille F est libre ou liée. 1. E = R 2, F = ((1, 2), (3, 3)). 2. E = R[X], F = (1 + X, 1 + 2X). 3. E = R[X], F = (1 + X, 1 + 2X, 2). 3.2 Base d un espace vectoriel Définition 10.20 Soient E un K-espace vectoriel et F une famille de E. On dit que F est une base de E ssi F est libre et génératrice de E. On définit de même la notion de base d un sous-espace vectoriel en remplaçant E par un sous-espace vectoriel F dans la définition précédente. Proposition 10.21 Soient E un K-espace vectoriel, n N et B = (u 1,..., u n ) une base de E. Tout vecteur de E s exprime de manière unique comme combinaison linéaire de vecteurs de B : u E,!(λ 1,..., λ n ) K n, u = n λ i u i i=1 Les scalaires λ 1,..., λ n sont alors appelés coordonnées du vecteur u dans la base B. Lycée du Parc 851 6

s De même, si B est une base d un sous-espace vectoriel F de E, alors tout vecteur de F s exprime de manière unique comme combinaison linéaire de vecteurs de B. Cette propriété est en fait une équivalence : si tout vecteur de E s exprime de manière unique comme combinaison linéaire de vecteurs de B, alors B est une base de E. Si B = (u 1,..., u n ) est une base de E, alors les coordonnées du vecteur u i dans cette base sont (0,..., 0, 1, 0,..., 0) (avec le 1 en i-ème position). Les coordonnées du vecteur nul dans une base sont toujours nulles. Les exemples suivants sont considérés comme faisant partie du cours : Exemple 10.10 ( (1, 0,..., 0), (0, 1, 0,..., 0),..., (0,..., 0, 1) ) est une base de K n dite base canonique de K n. (1, X, X 2,..., X n ) est une base de K n [X]. (E i, j ) (i, j) 1,n 1,p est une base de M n,p (K) (on rappelle que E i, j est la matrice constituée d un 1 en i-ème ligne et j-ème colonne et de zéros partout ailleurs). Exercice 10.11 1. Montrer que F = (1 + X, 1 2X, 1 + X 2 ) est une base de C 2 [X]. 2. Déterminer les coordonnées des vecteurs suivants dans la base F : a. u = 2i 4iX b. v = X 2 3. Déterminer le vecteur qui a pour coordonnées (1, i, i) dans la base F. Exercice 10.12 Soit E = R 3 2x y 3z = 0 et F l ensemble des x de E solutions du système 3x 2y 4z = 0 1. Justifier que F est un sous-espace vectoriel de E. 2. Déterminer une base de F.. 3.3 Dimension Proposition 10.22 Soit E un K-espace vectoriel. Si G est une famille génératrice de E et que L est une famille libre de E, alors Card L Card G. Théorème 10.23 Base incomplète Soit E un K-espace vectoriel. Si L est une famille libre et que G est génératrice de E, alors il existe une base B de E telle que L B L G s Autrement dit, si l on dispose d une famille génératrice G, on peut compléter une famille libre avec des vecteurs de G pour en faire une base. On peut aussi adopter le point de vue inverse et dire que l on extrait une base de la famille génératrice G. Lycée du Parc 851 7

Définition 10.24 Un espace vectoriel est dit de dimension finie s il admet une famille génératrice finie. Théorème 10.25 Soit E un espace vectoriel de dimension finie, E {0 E }. E admet une base. Toutes les bases de E ont même cardinal. Ce cardinal est noté dim(e) et appelé dimension de E. Par convention, on pose dim({0 E }) = 0. Proposition 10.26 Quels que soient n, p N, les espaces K n, K n [X] et M n,p (K) sont des K-espaces vectoriels de dimension finie et : dim(k n ) = n ; dim(k n [X]) = n + 1 ; dim(m n,p (K)) = np. Exercice 10.13 1. Montrer que, pour n N, S n (K) et A n (K) sont des sous-espaces vectoriels de M n (K). 2. Donner une base de S 2 (K) et A 2 (K) et en déduire leur dimension. 3. Quelle est la dimension de S n (K) A n (K)? Proposition 10.27 Soient E un K-espace vectoriel et F et G deux sous-espaces vectoriels de E de dimension finie. Si F G, alors dim(f) dim(g). Si F G et dim(f) = dim(g), alors F = G. En particulier, si E est de dimension finie et que F est un sous-espace vectoriel de E de même dimension que E, alors E = F. Définition 10.28 Soit E un K-espace vectoriel. Un sous-espace vectoriel de E de dimension 1 est appelé droite vectorielle. Un sous-espace vectoriel de E de dimension 2 est appelé plan vectoriel. Ces termes correspondent à une intuition géométrique qu il faut essayer de garder en tête. Proposition 10.29 Soient E un K-espace vectoriel, F un sous-espace vectoriel de E de dimension n (n N ) et F une famille de vecteurs de F. Si F est libre, alors Card F n. Lycée du Parc 851 8

Si F est génératrice de F, alors Card F n. Si Card F = n, alors F est une base de F ssi elle génère F ssi elle est libre. Exercice 10.14 On considère la famille F = (X 1, X 2, (X 1)(X 2)) de R[X]. 1. Montrer que F est une famille libre (on pourra s intéresser aux évaluations en 1 et en 2). 2. En déduire que F est une base de R 2 [X]. Est-ce une base de R 3 [X]? de R 1 [X]? 3.4 Rang d une famille Définition 10.30 Soient E un K-espace vectoriel, p N et F = (u 1,..., u p ) une famille de E. Le rang de la famille F (noté rg F ) est la dimension de Vect(u 1,..., u p ) : rg F = dim Vect(u 1,..., u p ) Proposition 10.31 Soient E un K-espace vectoriel, F un sous-espace vectoriel de dimension n N et F = (u 1,..., u p ) une famille de vecteurs de F. rg F dim F. rg F = dim F ssi F génère F. rg F Card F. rg F = Card F ssi F est libre. En particulier, si E est de dimension n et si F = (u 1,..., u p ) E p, alors : rg(u 1,..., u p ) p rg(u 1,..., u p ) n rg(u 1,..., u p ) = p (u 1,..., u p ) libre. rg(u 1,..., u p ) = n (u 1,..., u p ) génératrice de E. Proposition 10.32 Soit E un K-espace vectoriel de dimension n N et (u 1,..., u n ) E n. (u 1,..., u n ) est une base de E ssi rg(u 1,..., u n ) = n. Lycée du Parc 851 9

Travaux dirigés Exercice 10.15 Dans chacun des cas suivants, déterminer si F est un sous-espace vectoriel de E. 1. E = R 2, F = Z 2. 2. E = R 2, F = {(1 + x, 1 y), (x, y) R 2 }. ( ) a ia 3. E = M 2 (C), F l ensemble des matrices de la forme, où a, b C. b a + b Exercice 10.16 Soit E un K-espace vectoriel et F, G deux sous-espaces vectoriels de E. Montrer que F G s.e.v de E (F G ou G F) Exercice 10.17 Un sous-espace vectoriel de K n peut être défini de plusieurs manières : par un système d équations cartésiennes : A = { (x, y, z, t) R 4, x + y z t = 0 et y + z t = 0 } ; par un paramétrage : B = { (a b + 3c, c, a b, 0), (a, b, c) R 3} ; par la donnée d une famille génératrice : C = Vect ( (1, 2, 1, 0), (0, 1, 3, 1) ). Écrire les ensembles A, B et C sous chacune de ces formes. Exercice 10.18 On se place dans l espace vectoriel E = A(R, R). 1. Pour chacun des ensembles suivants, déterminer s il s agit d un sous-espace vectoriel de E. Exercice 10.19 a. C (R) b. L ensemble F des applications croissantes de R dans R. c. L ensemble G des bijections de R dans R. 2. a. Justifier que D 2 (R) est un s.e.v de E. b. On considère l équation différentielle y 2y + y = 0, d inconnue y D 2 (R). Montrer que l ensemble des solutions de cette équation est un s.e.v. de D 2 (R). Dans R 3, on considère les vecteurs u 1 = ( 1, 1, 1), u 2 = (1, 2, 4), u 3 = (3, 1, a) et e 4 = (2, 3, b). Déterminer a et b dans R tels que Vect(u 1, u 2 ) = Vect(u 3, u 4 ). Exercice 10.20 On se place dans E = R 3 et l on considère u = (1, 3, 1), v = (2, 1, 2) et w = (m, m + 1, 3m + 2) (où m R). Donner une condition nécessaire et suffisante sur m pour que w Vect(u, v). Exercice 10.21 On se place dans le R-espace vectoriel E = C 0 ([0, π]). Soit n N. Montrer que la famille (x sin x, x sin 2x,..., x sin nx) est libre. Exercice 10.22 Lycée du Parc 851 10

Déterminer si F est libre, si elle est génératrice et si c est une base de E. 1. E = R 4, F = ((0, 0, 1, 0), (0, 1, 1, 2), (2, 0, 0, 2)). Exercice 10.23 Exercice 10.24 2. E = R 3, F = ((1, 2, 3), (2, 3, 1), (3, 1, 2)). 3. E = R 3, F = ((1, 2, 3), ( 1, 2, 5), ( 1, 10, 21)). 4. E = R 2, F = ((1, 2), (2, 1), ( 1, 4)). 1. Pour chacune des familles suivantes, montrer qu elle est libre et la compléter en une base de E. a. E = R 3, F = ((1, 1, 0), (1, 0, 1)). b. E = R 3 [X], F = (1, 1 + X, 2 + X X 2 ). c. E = C 4, F = ((1, 0, i, 0), (0, i, 0, 0)). 2. Pour chacune des familles suivantes, montrer qu elle est génératrice et en extraire une base de E. a. E = R 2, F = ((1, 0), (0, 1), (1, 1)). b. E = R 2, F = ((2, 3), ( 4, 6), (1, 2)). c. E = R 2 [X], F = (1 + X, 2 + X, X 2, 2 3X + 2X 2 ). On se place dans E = R 3 et l on considère u = (1, 2, 3), v = (4, 5, 6) et w = (m 2, 2m, m) (où m R). 1. (u, v) est-elle libre? génératrice? Exercice 10.25 2. Donner un condition nécessaire et suffisante sur m pour que (u, v, w) soit une base de E. Soient E un K-espace vectoriel et (e 1,..., e n ) une base de E. On considère la famille F = ( f i ) 1 i n définie par f i = i e k. Exercice 10.26 1. Pour j 1, n, exprimer e j comme combinaison linéaire des éléments de F. 2. Montrer que F est une base de E. On se place dans l espace vectoriel E = R 4 et l on définit F = Vect(( 1, 2, 1, 0), ( 1, 2, 0, 1)) et G = { (x, y, z, t) R 4, y = 2z + t }. 1. Justifier que F et G sont des sous-espaces vectoriels de R 4. Exercice 10.27 2. Déterminer la dimension de F et un système d équations cartésiennes de F. 3. Déterminer une base de G et sa dimension. 4. On pose H = F G. Déterminer une base de H et sa dimension. Soit F l ensemble des suites réelles (u n ) n N telles que n N, u n+3 = 5u n+2 6u n. 1. Montrer que F est un sous-espace vectoriel d un R-espace vectoriel E que l on précisera. 2. Justifier qu une suite de F est entièrement déterminée par la donnée de ses trois premiers termes. k=1 3. En déduire une base B de F ainsi que sa dimension. 4. Soit u une suite géométrique non nulle de raison r 0. Montrer que u F ssi r est racine de X 3 5X 2 + 6. 5. En déduire une autre base B de F puis une formule donnant la forme du terme général des suites de F. Lycée du Parc 851 11

Exercice 10.28 On se place dans E = R 2 [X] et l on considère x 1, x 2, x 3 trois réels distincts. 1. On considère l ensemble F = {P R 2 [X], P(x 2 ) = P(x 3 ) = 0}. Montrer que F est un s.e.v de E et en donner la dimension ainsi qu une base. 2. Déterminer un polynôme P 1 R 2 [X] tel que P 1 (x 1 ) = 1 et P 1 (x 2 ) = P 1 (x 3 ) = 0. 3. Déterminer de même des polynômes P 2 et P 3 de R 2 [X] tels que P 2 (x 2 ) = P 3 (x 3 ) = 1 et P 2 (x 1 ) = P 2 (x 3 ) = P 3 (x 1 ) = P 3 (x 2 ) = 0. 4. Montrer que (P 1, P 2, P 3 ) est une base de R 2 [X]. 5. Soient y 1, y 2, y 3 trois réels. Montrer qu il existe un unique P R 2 [X] tel que i 1, 3, P(x i ) = y i. 6. Application : déterminer l unique polynôme P R 2 [X] tel que P(1) = 2, P(2) = 3 et P(3) = 5. Lycée du Parc 851 12