Équations de Lamé. Chapitre 5. Sommaire. O. Thual, 26 mai 2013

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Chapitre 5 Équations de Lamé O. Thual, 26 mai 2013 Sommaire 1 Loi de Hooke....................... 2 1.1 Loi de Hooke généralisée................ 2 1.2 Cas homogène et isotrope............... 3 1.3 Équations de Lamé................... 4 2 Module de Young et coefficient de Poisson..... 6 2.1 Inversion de la loi de Hooke.............. 6 2.2 Expérience de traction uniaxiale........... 7 2.3 Expérience de compression uniforme......... 8 3 Ondes élastiques..................... 9 3.1 Projection des équations de Lamé.......... 9 3.2 Ondes longitudinales.................. 10 3.3 Ondes transversales.................. 11 1

2 Chapitre 5. Équations de Lamé Introduction La loi de comportement rhéologique d un milieu continu relie les contraintes aux déformations ou aux vitesses de déformation. On dit que le milieu est élastique si les contraintes ne dépendent que des déformations. Lorsque ces déformations sont petites et que les champs considérés sont peu déformés, la loi de comportement des solides élastiques est linéaire. On détaille cette loi de comportement, appelée loi de Hooke, dans le cas où le milieu est homogène et isotrope. En reportant l expression du tenseur des contraintes en fonction du déplacement dans la loi de conservation de la quantité de mouvement, on obtient les équations de Lamé qui décrivent, en particulier, des mouvements ondulatoires. 1 Loi de Hooke Dans le cadre de l hypothèse des petites perturbations, la loi de Hooke généralisée décrit le comportement rhéologique d un solide élastique quelconque. Dans le cas homogène et isotrope, la loi de Hooke ne dépend que de deux paramètres. On obtient alors les équations de Lamé à partir du principe fondamental de la dynamique. 1.1 Loi de Hooke généralisée Un milieu continu est élastique si ses forces de contact, modélisées par le tenseur des contraintes, ne dépendent que de la déformation qu il subit et pas de la vitesse à laquelle il se déforme. On suppose ici que la configuration de référence Ω 0 est libre de toute contrainte. Ω 0 Ω σ(a, t). n e 3 0 e 2 e 1 a ξ(a, t) n Figure 5.1 Champ de déplacement ξ(a, t) et forces de contact σ(a, t) n. On se place dans le cadre des petites perturbations et on note η le petit paramètre qui mesure l amplitude de la déformation. Puisque le tenseur des contraintes σ est nul en l absence de déformation, on peut affirmer qu il dépend linéairement du déplacement ξ(a, t) à l ordre dominant du petit paramètre η. On suppose alors que le tenseur des contraintes σ(a, t) ne dépend que des

Loi de Hooke 3 dérivées premières H ij (a, t) = ξ i a j (a, t) au même point a (principe de localisation spatiale) et au même temps t. Des considérations sur l universalité des lois de comportement dans un changement de repère (principe de l indifférence matérielle), permettent d en déduire que les composantes de σ(a, t) ne dépendent que des composantes du tenseur des petites déformations ɛ(a, t) qui est la partie symétrique de H(a, t). On aboutit finalement à la loi de Hooke généralisée qui est la relation linéaire la plus générale entre ces composantes et qui s écrit σ ij (a, t) = C ijkl (a) ɛ kl (a, t) (5.1) pour tout couple (i, j), où la convention d Einstein est utilisée pour la sommation sur les indices k et l. Cette loi, qui relie le tenseur des contraintes et les paramètres de la déformation est une loi de comportement rhéologique. Si les tenseurs σ et ɛ étaient quelconques, il y aurait 9 9 = 81 coefficients C ijkl (a) en chaque point a pour décrire le comportement élastique du solide. Comme ces tenseurs sont symétriques, il n y en a en fait que 6 6 = 36. On peut alors noter par les indices I {1, 2, 3, 4, 5, 6} les couples d indices (i, j) {11, 22, 33, 23, 31, 12} et noter la loi de Hooke généralisée sous la forme σ I (a, t) = C IK (a) ɛ K (a, t) (5.2) pour I = 1,..., 6, où la convention d Einstein est utilisée pour la sommation des indices K = 1,..., 6. Si le comportement rhéologique du solide est homogène, les coefficients C ijkl = C IK ne dépendent pas de l espace. Si le comportement rhéologique du solide est invariant vis-à-vis de symétries, comme par exemple le groupe des rotations autour d un axe, le nombre de coefficients C ijkl = C IK diminue encore. Nous allons voir qu il est réduit à deux dans le cas où le comportement rhéologique est isotrope. 1.2 Cas homogène et isotrope On suppose ici que le comportement rhéologique du solide est homogène et invariant par rotation. Cette dernière hypothèse signifie qu à une rotation des contraintes correspond une même rotation des déformations alors que la configuration de référence est fixe (figure 5.2). Pour trouver la forme de la loi de Hooke dans le cas isotrope, on considère la fonction scalaire Φ(ɛ) = 1 2 σ : ɛ, (5.3) où σ est lié à ɛ par la loi de comportement. Il se trouve que Φ peut être interprété comme une énergie élastique. L isotropie entraine que Φ est une

4 Chapitre 5. Équations de Lamé Ω 0 Ω 0 σ a ɛ σ ɛ a a) b) Figure 5.2 Invariance du comportement rhéologique par rotation. fonction des invariants scalaires de ɛ qui sont toutes les fonctions des trois invariants scalaires de base que sont tr ɛ, ɛ : ɛ et det ɛ. Ces derniers s écrivent tr ɛ = ɛ : I = ɛ jj, ɛ : ɛ = tr (ɛ 2 ) = ɛ ij ɛ ij, det ɛ = ɛ ijk ɛ 1i ɛ 2j ɛ 3k. (5.4) Comme σ est une fonction linéaire de ɛ, l invariant scalaire Φ(ɛ) est donc un polynôme d ordre deux en ɛ et donc une combinaison linéaire de (tr ɛ) 2 et ɛ : ɛ que l on choisit d écrire sous la forme Φ(ɛ) = 1 2 λ (tr ɛ)2 + µ ɛ : ɛ = 1 [λ (tr ɛ) I + 2 µ ɛ] : ɛ, (5.5) 2 où λ et µ sont les coefficients de Lamé. On en déduit la loi de Hooke qui s écrit σ(a, t) = λ [tr ɛ(a, t)] I + 2 µ ɛ(a, t). (5.6) 1.3 Équations de Lamé L équation de conservation de la quantité de mouvement 2 ξ ρ 0 (a, t) = f(a, t) + div σ(a, t) (5.7) t2 fait intervenir la divergence du tenseur des contraintes. On écrit alors la loi de Hooke sous la forme σ ij = λ ɛ ll δ ij + 2 µ ɛ ij avec ɛ ij = 1 ( ξi + ξ ) j, (5.8) 2 a j a i où la convention d Einstein est utilisée pour la sommation sur l indice l. Les composantes du vecteur div σ s écrivent alors σ ij = λ ɛ ll δ ij + 2 µ ɛ ij a j a j a j ( ξl = λ a i a l ) + µ a j ( ξi + ξ ) j a j a i

Loi de Hooke 5 = λ ( ) ξj a i a j = (λ + µ) ( ξj a i a j 2 ξ j + µ 2 ξ i + µ a j a j a i a ) j + µ 2 ξ i a j a j. (5.9) On reconnait les composantes de grad (div ξ) et de ξ dans cette expression, ce qui permet d écrire div σ = (λ + µ) grad (div ξ) + µ ξ. (5.10) L équation de conservation de la quantité de mouvement, qui prend alors le nom d équations de Lamé, s écrit 2 ξ ρ 0 (a, t) = f(a, t) + (λ + µ) grad [div ξ(a, t)] + µ ξ(a, t). (5.11) t2 Lorsque la configuration de référence Ω 0 est bornée, la résolution des équations de Lamé nécessite d imposer des conditions aux limites sur toute la frontière déformée Ω(t) que l on approxime par Ω 0 à l ordre dominant du paramètre de déformation η. ξ Dirichlet n T Neumann (a, n, t) Ω Dirichlet Ω 0 ξ a Ω Neumann Figure 5.3 Conditions aux limites de Dirichlet ou de Neumann. On considère ici deux types de conditions aux limites : déplacement imposé ou contraintes imposées. On suppose que le déplacement est imposée sur la partie Ω Dirichlet Ω 0 ce qui s écrit ξ(a, t) = ξ Dirichet (a, t) pour a Ω Dirichlet. (5.12) Ces conditions aux limites sont dites de type Dirichlet dans la terminologie de la théorie des équations aux dérivées partielles. On suppose d autre part que les contraintes sont imposées sur la partie Ω Neumann Ω 0 ce qui s écrit σ(a, t) n = T Neumann (a, t) pour a Ω Neumann. (5.13) Ces conditions aux limites sont dites de type Neumann dans la mesure où σ est une combinaison linéaire de dérivées partielles des composantes de ξ par rapport à l espace et qu on le multiplie par la normale n.

6 Chapitre 5. Équations de Lamé 2 Module de Young et coefficient de Poisson La loi de Hooke inverse, qui exprime le tenseur des petites déformations en fonction du tenseur des contraintes, est écrite à l aide des deux nouveaux coefficients, le module de Young et le coefficient de Poisson, que l on relie aux deux coefficients de Lamé. La raison d être de ces coefficients est justifiée par l exemple de la traction uniaxiale. Le module de compression est défini à travers l exemple de la compression uniforme. 2.1 Inversion de la loi de Hooke La loi de Hooke exprime le tenseur des contraintes σ en fonction du tenseur des petites déformations ɛ à travers la relation linéaire σ = λ (tr ɛ) I + 2 µ ɛ. (5.14) Pour inverser cette relation et exprimer ɛ en fonction de σ, on utilise la décomposition unique en tenseurs sphérique (proportionnel au tenseur identité) et déviatorique (de trace nulle) qui s écrit σ = σ (s) + σ (d) avec σ (s) = 1 3 (tr σ) I et σ(d) = σ 1 (tr σ) I 3 ɛ = ɛ (s) + ɛ (d) avec ɛ (s) = 1 3 (tr ɛ) I et ɛ(d) = ɛ 1 (tr ɛ) I. (5.15) 3 La projection de la loi de Hooke (5.14) sur les espaces vectoriels des tenseurs sphériques et déviatoriques conduit à σ (s) = 1 3 (3 λ + 2 µ) (tr ɛ) I = (3 λ + 2 µ) ɛ(s) et σ (d) = 2 µ ɛ (d). (5.16) On en déduit alors ɛ = ɛ (s) + ɛ (d) 1 = 3λ + 2 µ σ(s) + 1 2 µ σ(d) = 1 ( 1 3 3λ + 2 µ 1 ) (tr σ) I + 1 2 µ 2 µ σ (5.17) On voit que l expression de ɛ en fonction de σ est de la même forme que la loi de Hooke, ce qui s explique par le fait que c est la seule forme de relation linéaire qui respecte l isotropie. On choisit alors d introduire les nouveaux paramètres E et ν de manière à écrire la loi de Hooke inverse (5.17) sous la forme ɛ = ν E (tr σ) I + 1 + ν E σ. (5.18) Il suffit pour cela de définir E, appelé module de Young, et ν, appelé coefficient de Poisson, à l aide des relations E = (3 λ + 2 µ) µ (λ + µ) et ν = λ 2 (λ + µ). (5.19)

Module de Young et coefficient de Poisson 7 Les coefficients de Lamé λ et µ s expriment alors à l aide des relations λ = ν E (1 + ν)(1 2 ν) et µ = E 2 (1 + ν). (5.20) La justification du choix des coefficients E et ν pour l expression de la loi de Hooke inverse (5.17) apparait dans l expérience de traction uniaxiale. À titre d exemple, on mesure E = 200 10 9 Pa, ν = 0.30 pour l acier E = 60 10 9 Pa, ν = 0.27 pour le granite et E = 0.02 10 9 Pa ν = 0.50 pour le caoutchouc. On doit toujours avoir µ > 0 et 3 λ + 2 µ > 0. 2.2 Expérience de traction uniaxiale On considère un solide élastique dont la configuration de référence Ω 0 est un parallélépipède rectangle de côtés l 1, l 2 et l 3 (voir figure 5.4). T = F e 1 Ω 0 Ω l 2 e 3 e 2 e1 h 2 T = F e 1 l 3 h 3 l 1 h 1 Figure 5.4 Expérience de traction uniaxiale. On suppose que l on applique sur les faces de normales respectives e 1 et e 1 les forces (surfaciques) de contact extérieures à Ω 0 égales à T (a, e 1 ) = F e 1 et T (a, e 1 ) = F e 1. On suppose que les quatres autres faces sont libres de contraintes, c est-à-dire T (a, n) = 0. On cherche alors la réponse du solide en supposant que sa rhéologie est homogène et isotrope et que l on reste dans le cadre de l hypothèse des petites perturbations et donc de l élasticité linéaire. On néglige les forces extérieures de volume f. En supposant que l origine du repère est au centre du parallélépipède rectangle, on cherche si un champ de déplacement de la forme ξ(a) = 1 a 1 e 1 + 2 a 2 e 2 + 3 a 3 e 3 (5.21) est une solution d équilibre. On remarque tout d abord que ξ est bien solution des équations de Lamé (5.11) dans la mesure où tous les termes de cette équations sont nuls. On peut interpréter les i comme étant les allongements relatifs dans le trois directions en vérifiant les relations i = h i l i l i, pour i = 1,..., 3, (5.22) où h 1, h 2 et h 3 sont les longueurs des côtés du parallélépipède rectangle déformé.

8 Chapitre 5. Équations de Lamé Il reste à exprimer 1, 2 et 3 en fonction de F pour que les conditions aux limites soient vérifiées. À partir du champ de déplacement ξ on déduit le tenseur des petites déformations qui s écrit : ɛ = 1 e 1 e 1 + 2 e 2 e 2 + 3 e 3 e 3. (5.23) Ce tenseur est constant. Le tenseur des contraintes constant σ = F e 1 e 1, (5.24) vérifie les conditions aux limites. Il vérifie la loi de Hooke si les relations suivantes sont satisfaites : F = E 1 et 2 = 3 = ν 1. (5.25) Ces relations simples expliquent le choix du module de Young E et du coefficient de Poisson ν pour caractériser le comportement élastique d un solide homogène et isotrope. 2.3 Expérience de compression uniforme On suppose maintenant que le paraléllépipède rectangle est soumis à des forces de pression sur toutes ses faces où les forces de contact exercées par son extérieur sont T (a, n) = p n (5.26) où p est une pression constante (figure 5.5). p Ω p p l 2 e 3 e 2 e1 h 2 Ω 0 p h 3 l 3 p p h 1 l 1 Figure 5.5 Expérience de compression uniforme. On cherche si un champ de déplacement de la forme ξ(a) = p (a 1 e 1 + a 2 e 2 + a 3 e 3 ) (5.27) est une solution d équilibre. On voit alors que les tenseurs ɛ = p I et σ = p I (5.28) forment une solution si la relation suivante est vérfiée : p = (3 λ + 2 µ) p p = p 1 2 ν E. (5.29)

Ondes élastiques 9 On peut interpréter p à l aide des volumes V 0 de Ω 0 et V de Ω en remarquant que V V 0 V 0 = tr ɛ + O(η 2 ) = 3 p + O(η 2 ). (5.30) On définit alors le module de compression κ e à l aide des relations p = κ e V V 0 V 0 avec κ e = E 3(1 2 ν) = 3 λ + 2 µ. (5.31) 3 Le bon sens, ou plutôt le second principe de la thermodynamique, requiert l inégalité κ e 0. En effet, un compression p > 0 ne peut pas conduire à une augmentation de volume, sauf si le corps est explosif, donc instable. Une conséquence de cette inégalité est que ν 1/2. Pour ν = 1/2, comme c est le cas pour le caoutchouc, le solide élastique est incompressible. 3 Ondes élastiques En projetant les équations de Lamé sur les espaces vectoriels respectifs des champs de déplacements à divergence nulle ou bien à rotationnel nul, on décrit deux types d ondes élastiques, longitudinales et transversales. Toute solution des équations de Lamé se décompose comme une superposition de ces ondes planes élémentaires. 3.1 Projection des équations de Lamé On considère ici les équations de Lamé (5.11) dans un milieu infini en supposant que f = 0, ce qui s écrit 2 ξ ρ 0 = (λ + µ) grad (div ξ) + µ ξ. (5.32) t2 On note respectivement d et r la divergence et le rotationnel du champ de déplacement ξ définis par d(a, t) = div ξ(a, t) et r(a, t) = rot ξ(a, t). (5.33) En prenant la divergence et le rotationnel des équations de Lamé (5.11) et en utilisant les identités div grad = et rot grad = 0, on obtient respectivement les équations suivantes avec c 1 = 2 d t 2 = c2 1 d 2 r t 2 = c2 2 r et λ + 2 µ ρ 0 et µ c 2 = ρ 0. (5.34) La divergence d et le rotationnel r du champ ξ vérifient donc l équation des ondes avec des vitesses de propagation respectivement égales à c 1 et c 2 avec

10 Chapitre 5. Équations de Lamé c 2 < c 1. Comme ces vitesses ne sont pas égales, on doit avoir r = 0 pour les ondes se propageant à la vitesse c 1 et d = 0 pour les ondes se propageant à la vitesse c 2. Ces ondes sont explicitées ci-dessous. a 2 a 2 0.1 0.1 0 0!0.1!0.1!0.2!0.2!0.3!0.3!0.4!0.4!0.5!0.5!0.6 a) b)!0.5!0.4!0.3!0.2!0.1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5!0.6 a 1 a 1!0.5!0.4!0.3!0.2!0.1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 Figure 5.6 Particules et vecteurs vitesses. Onde élastique a) longitudinale ou b) transversale. 3.2 Ondes longitudinales Les solutions de l équation 2 d t 2 des solutions = c 2 1 d sont des combinaisons élémentaires d(a, t) = D e i (k a ω t) + D e i (k a ω t) avec ω = c 1 k (5.35) où D est une amplitude complexe et k le module du vecteur d onde k. En posant D = D m exp(i ϕ) où D m et ϕ sont respectivement le module et l argument de D m, on peut écrire d(a, t) = 2 D m cos(k a ω t + ϕ) avec ω = c 1 k. (5.36) En tournant les axes on peut toujours se ramener au cas particulier k = k e 1 avec k > 0, on peut écrire d(a, t) = 2 D m cos[k (a 1 c 1 t) + ϕ]. (5.37) Ce champ peut être considéré comme la divergence du champ de déplacement ξ(a, t) = 2 D m k sin[k (a 1 c 1 t) + ϕ] e 1. (5.38) Il s agit donc d une onde longitudinale, c est-à-dire telle que le déplacement s effectue dans le sens de la propagation de l onde. En tournant les axes, on obtient la famille d ondes longitudinales de la forme ξ L (a, t) = L m sin(k a c 1 k t + ϕ), (5.39) où L m est une amplitude quelconque et k un vecteur d onde quelconque.

Ondes élastiques 11 3.3 Ondes transversales On considère le champ de déplacement [ ] ξ(a, t) = T e i (k a 1 ω t) + T e i (k a 1 ω t) e 2 (5.40) où T est une amplitude complexe et k > 0 un nombre d onde réel positif. En posant T = T m exp(i ϕ) où T m et ϕ sont respectivement le module et l argument de T m, on peut écrire ξ(a, t) = 2 T m cos(k a 1 ω t + ϕ) e 2. (5.41) On en déduit que le rotationnel de ξ s écrit r(a, t) = 2 k T m sin(k a 1 ω t + ϕ) e 3. (5.42) En reportant dans l équation 2 r = c t 2 2 2 r on voit que ξ est solution à condition de satisfaire la relation de dispersion ω = c 2 k. (5.43) Il s agit d une onde transversale, c est-à-dire telle que le déplacement s effectue dans un plan perpendiculaire au sens de propagation de l onde. En tournant les axes, on obtient la famille générale d ondes transversales de la forme ξ T (a, t) = 2 T m cos(k a c 2 k t + ϕ) avec T m k = 0, (5.44) où T m est un vecteur réel quelconque dans le plan perpendiculaire au vecteur d onde k.