La Douceur des idiots

Transcription

1 Christian Billon La Douceur des idiots Publibook

2 Retrouvez notre catalogue sur le site des Éditions Publibook : Ce texte publié par les Éditions Publibook est protégé par les lois et traités internationaux relatifs aux droits d auteur. Son impression sur papier est strictement réservée à l acquéreur et limitée à son usage personnel. Toute autre reproduction ou copie, par quelque procédé que ce soit, constituerait une contrefaçon et serait passible des sanctions prévues par les textes susvisés et notamment le Code français de la propriété intellectuelle et les conventions internationales en vigueur sur la protection des droits d auteur. Éditions Publibook 14, rue des Volontaires PARIS France Tél. : +33 (0) IDDN.FR R.P Cet ouvrage a fait l objet d une première publication aux Éditions Publibook en 2014

3 Retrouvez l auteur sur son site Internet :

4

5 «Pitié! Ces enfants seuls étaient ses familiers Qui, chétifs, fronts nus, œil déteignant sur la joue, Cachant de maigres doigts jaunes et noirs de boue Sous des habits puant la foire et tout vieillots, Conversaient avec la douceur des idiots!» Arthur Rimbaud (Les Poètes de sept ans)

6

7 Pour Françoise Huguier Pour Raymond Depardon Pour Donald Mac Cullin Pour Gilles Caron Pour Tim Page À la mémoire de Kate Webb, de Camille Lepage, de Larry Burrows, de Brice Fleutiaux, de Gilles Jacquier, de Christian Poveda et de Pierre Schoendoerffer

8 Ceci est un roman. Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des évènements ou des situations existant ou ayant existé ne serait que pure coïncidence et le fruit du hasard. Note de l auteur : La Botanique étant une science en constante évolution, la taxinomie des plantes à fleurs utilisée dans ce roman fait référence à l enseignement de cette discipline dans les facultés de pharmacie françaises dans les années soixante-dix.

9 Libelle 1 «Il s était d abord senti tellement seul, au milieu de ces condisciples qui parlaient une langue inconnue de lui, tellement semblable à un prisonnier, tellement abandonné, qu il s était mis, pour ne plus sentir la misère de son existence, à travailler éperdument. Il se mit à étudier comme un homme se serait mis à boire : pour oublier.» Valéry Larbaud (Fermina Márquez, éditions Gallimard 1926, page 54)

10

11 Il y avait quelques magazines usés d avoir été trop feuilletés, à la couverture partant en lambeaux, qui traînaient sur la table basse de la salle d attente. Ils étaient défraîchis d aspect et commençaient à dater. Aussi ai-je déplié ostensiblement le quotidien que j avais acheté dans le hall de l hôpital, juste avant de prendre l ascenseur. Les nouvelles du jour n étaient pas fracassantes, alors avait-on ressorti les marronniers habituels : dans les pages consacrées à l actualité internationale, la partition de Chypre, le procès des dirigeants Khmers rouges encore une nouvelle fois repoussé aux calendes grecques, la dernière sortie de Berlusconi. Concernant les informations hexagonales, c était plus trivial : une probable hausse prochaine de la redevance télé, les démêlés à répétition d un ancien ministre avec la Justice, une énième réforme du permis de conduire. La secrétaire a passé la tête dans l entrebâillement de la porte de la salle d attente. M a dit que ça ne devrait plus être très long. Il y avait juste deux personnes avant moi. Ne pas m impatienter. Il n y avait pas de danger pour cela. Depuis le temps que je l attendais ce rendez-vous, je n allais pas risquer de le perdre. D ailleurs j avais tout mon temps. Plus rien ne pressait désormais pour moi. Il faut dire qu il avait fallu batailler dur pour l avoir, ce rendez-vous. Lorsque j étais passé au secrétariat du service, la secrétaire m avait gentiment annoncé que l agenda du cardiologue était complet pour six mois. On avait simplement pris soin de conserver quelques créneaux horaires pour les malades urgents. Ce n était plus mon cas puisque j avais été très bien soigné lors de ma première alerte, l année passée. Cependant, la secrétaire m a 15

12 expliqué que ce délai de six mois n était valable que pour les consultations qui avaient lieu dans le cadre de l activité publique du service mais qu on pouvait considérablement le réduire en acceptant d être vu au titre de l activité privée du praticien. Dans ce cas, l attente ne serait que de deux mois, mais il faudrait que je fasse l avance de la dépense. De toute façon, je serai remboursé intégralement puisque ce spécialiste ne pratiquait pas de dépassement d honoraires. Elle a ajouté, pour finir que je n avais pas à me tracasser, j avais une bonne mutuelle. 16