LE PERP retraite et protection Benoit Rama http://www.imaf.fr Le PERP (Plan d Épargne Retraite Populaire) est une mesure d encouragement à la préparation de la retraite destinée aux salariés. Il copie les principales caractéristiques de la retraite Madelin, prévue pour les travailleurs non-salariés, tout en en différant par certains points de détail. Cet encouragement est un avantage fiscal pendant la période d'épargne : les capitaux investis sont déduits dans la limite d'un plafond (10% du revenu annuel plus les deux dernières années non déduites) et l'impôt est donc réduit suivant la tranche marginale d imposition. La sortie est une rente viagère fiscalisée, avec éventuellement 20% en capital calculé sur le capital final (possibilité non prévue dans la loi Madelin). La fiscalité de la rente est celle de l impôt sur le revenu, avec des prélèvements sociaux de 8,1%, après un abattement de 10%. L opération financière paraît intéressante. Et pourtant Les capitaux investis sur le PERP viennent soit du revenu du travail, soit du revenu du capital. Étant déduits des revenus pendant la période d épargne, il est compréhensible qu ils soient imposés au titre des revenus lors de la liquidation ; mais cela réduit l avantage fiscal dont le souscripteur a bénéficié pendant la période d épargne : en fait il rembourse la réduction d impôt en payant l impôt sur la rente. Et l impôt est calculé sur 90% du capital, plus-value comprise, et non pas sur la seule plusvalue. Copyright IMAF 1 25/02/15
En ce qui concerne les prélèvements sociaux, la situation est moins favorable. Les capitaux investis sur le PERP viennent de l épargne sur les salaires ou des revenus d un capital (par exemple, immobilier locatif). Ils ont déjà été soumis aux cotisations sociales. Les prélever à nouveau sur la totalité du capital, comme c est le cas, et non sur la seule plus-value, revient à effectuer deux fois les prélèvements sur le capital investi. Il est donc nécessaire d analyser en détail la fiscalité du PERP pendant la période d épargne et la retraite, alors que dans la plupart des cas, l avantage fiscal est seul mis en avant. Parfois en effet, suivant la plus-value et les tranches d imposition, il est en fin de compte au bénéfice de l État! ANALYSE DE LA RÉDUCTION D IMPOT Pour simplifier les calculs, nous avons supposé une sortie du PERP en capital. La rente étant calculée à partir de ce dernier et de l âge du bénéficiaire, la fiscalité est équivalente. Période d épargne : Le tableau ci-dessous donne la réduction d impôt pour une épargne investie de 100 000 suivant le taux marginal d imposition (TMI) : Epargne 100 000 TMI 14% 30% 41% 45% Réduction d impôt 14 000 30 000 41 000 45 000 Période de retraite Supposons une plus-value de 50%, ce qui correspond à un taux très vraisemblable de 2,05% net de prélèvements sociaux pendant 20 ans. Le capital à la liquidation est donc de 150 000, soit 135 000 après l abattement de 10%. Le tableau ci-dessous donne le montant total des prélèvements en fonction du taux marginal d imposition pendant la retraite, auquel s ajoutent les prélèvements sociaux de 7,5% (sortie en capital) : 0% 14% 30% 41% 45% 10 125 29 025 50 625 65 475 70 875 Taux final suivant la tranche d imposition Montant total des prélèvements Le montant des prélèvements après la retraite dépasse donc dans certains cas la réduction d impôt pendant l épargne. Par exemple, un contribuable fiscalisé à 14% pendant l épargne a bénéficié d une réduction d impôt de 14 000, mais versera 29 025 s il est fiscalisé à 14% pendant sa retraite. Cette situation est devenue très vraisemblable du fait de la modification des tranches d imposition. Nous avons effectué ce calcul pour une plus-value variant de 30% à 90%, en prenant comme base le capital initial investi (100 000 dans l exemple précédent). Le tableau ci-dessous donne le taux de prélèvement final sur ce capital investi : Copyright IMAF 2 25/02/15
TMI Taux de prélèvement final sur le capital investi en fonction de la plus-value 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 0,00% 8,78% 9,45% 10,13% 10,80% 11,48% 12,15% 12,83% 14,00% 25,16% 27,09% 29,03% 30,96% 32,90% 34,83% 36,77% 30,00% 43,88% 47,25% 50,63% 54,00% 57,38% 30,38% 64,13% 41,00% 56,75% 61,11% 65,48% 69,84% 74,21% 78,57% 82,94% 45,00% 61,43% 66,15% 70,88% 75,60% 80,33% 85,05% 89,78% Taux de prélèvement de la rente et du capital en fonction du taux d imposition marginal et de la plus-value réalisée. La lecture de ce tableau suit la règle suivante : 1. On choisit le taux marginal d imposition pendant la retraite (par exemple 14%). 2. On choisit le taux de plus-value réalisée (par exemple 50%) 3. Au croisement de la ligne 14% et de la colonne 50%, on lit le total des taux des prélèvements effectués pendant la retraite (ici 29,03%) sur le capital investi. Le bénéfice fiscal de l épargnant est, en pourcentage du capital investi, la différence entre son taux marginal d imposition pendant la retraite (par exemple, 30%) et le taux précédent (29,03%) ; le résultat en euro est le produit du capital investi par cette différence (0,97% x 100 000 = 970 ) et représente le gain fiscal. Si ce taux est inférieur au taux marginal d imposition pendant l épargne, l État prélève moins pendant la retraite que la réduction d impôt dont le contribuable a profité. Sinon, l avantage fiscal est au bénéfice de l État. La lecture de la ligne 14% donne l information suivante : l avantage fiscal d un contribuable fiscalisé à 30% pendant la période d épargne n est réel que si le taux marginal d imposition pendant sa retraite est de 0%, et de 14% si la plus-value est inférieure à 50% (taux de prélèvements inférieurs à 30%). Lorsque les taux marginaux sont égaux avant et après la retraite, l avantage fiscal est toujours au bénéfice de l État et aux dépens du souscripteur. Lorsque la plus-value est relativement forte (150% par exemple, 3,101% pendant 30 ans), le contribuable imposé à 14% redonne presque la moitié du montant initial à l État, alors qu il n en a économisé que 30%! UNE SIMULATION Mais il ne faut pas jeter le PERP! Il est préférable de le compléter en investissant l équivalent de l avantage fiscal sur un contrat d assurance-vie, dont seule la plus-value est imposée, et dans des conditions très avantageuses, indépendantes du taux marginal d imposition. Les données de notre simulation sont les suivantes : Copyright IMAF 3 25/02/15
Nombre Versement max. Revenu annuel TMI épargne TMI retraite d'années avec déduction 25 35 000,00 30% 3 804,00 14% Le versement annuel choisi est le maximum : 3 804. La réduction annuelle d impôt est de 1 141,20 soit de 28 530 pour 25 ans. Dans la première simulation, elle n est pas réinvestie, ce qui correspond à un versement avantage fiscal déduit de 2 662,80. Nous comparons cette épargne à l épargne équivalente sur un contrat d assurance-vie unique, avec les mêmes plus-values. Le bilan est donné ci-dessous : Capital net Plus-value Plus-value Plus-value Plus-value Plus-value Plus-value Plus-value d'impôt et de 30% 50% 70% 90% 110% 130% 150% PERP seul 99 707,60 115 047,23 130 386,86 145 726,49 161 066,12 176 405,75 191 745,38 A-V équivalente 85 965,34 98 435,56 110 905,79 123 376,01 135 846,24 148 316,46 160 786,69 Les calculs montrent une différence significative entre le PERP et le contrat d assurance-vie équivalent au profit du PERP. Cela s explique par la cotisation plus grande sur le PERP : on y investit annuellement 3804,00 contre 2 662,80 sur l assurance-vie. La réduction d impôt (1 141,20 ) est en fait un crédit que l on rembourse pendant la retraite. Une autre façon d épargner équivalente consiste à verser 2 682,80 sur le PERP et l économie d impôt correspondante 798,84 sur l assurance-vie. L avantage est d investir sur un contrat dont la sortie peut être en rente viagère ou en capital. Le tableau ci-dessous donne les résultats : Capital net Plus-value Plus-value Plus-value Plus-value Plus-value Plus-value Plus-value d'impôt et de 30% 50% 70% 90% 110% 130% 150% PERP+A-V 94 828,97 108 941,81 122 858,68 136 718,39 150 578,10 164 437,80 178 297,51 La performance est un peu moins bonne que celle du PERP. Par contre, on dispose du capital en assurance-vie intégré dans les résultats précédents : Capital net A-V 25 033,65 28 408,75 31 587,88 34 709,85 37 831,82 40 953,78 44 075,75 Ce contrat d assurance-vie est disponible en capital (les valeurs ci-dessus sont nettes d impôt sur la plus-value et de prélèvements sociaux) ou en rente calculée suivant l âge du bénéficiaire. UNE STRATEGIE Pour une épargne longue dont l objectif est la retraite, la meilleure solution consiste à investir sur le PERP de façon que la mensualité avantage fiscal déduit corresponde au versement mensuel choisi. Copyright IMAF 4 25/02/15
La formule est la suivante : Versement PERP x (1-Taux TMI épargne) + Versement sur AV = Versement mensuel total Pour un versement mensuel total fixé, on choisira l une des deux autres variables (Versement PERP ou Versement sur AV) pour en déduire la troisième en fonction du taux marginal d imposition. Il faut modifier le résultat suivant le plafond de versement avec déduction. C est un choix personnel, qui dépend de la situation patrimoniale de chacun, en particulier des capitaux déjà investis sur des contrats d assurance-vie. Le PERP peut être utilisé à d autres fins. En effet, il existe des PERP à versements libres, que l on peut continuer à souscrire pendant la retraite. Le but est ici de transmettre un patrimoine ou une rente pour assurer la protection de quelqu un en difficulté (enfant handicapé par exemple). On investira alors tous les ans le maximum, (10% du plafond annuel de la sécurité sociale 38 040 en 2015). La rente du PERP sera versée au bénéficiaire, et calculée en fonction de son âge. Un couple versant 7 600 annuels pendant dix ans (2 x 3 800 sur le PERP garantira une rente un capital rente de 90 000 au bénéficiaire pour un taux annuel raisonnable de 4,18%. Il diminuera ses impôts de 22 800 s ils sont tous les deux en activité. Un dernier usage du PERP est la transmission d un patrimoine supplémentaire. Il faut pour cela multiplier le nombre de PERP à primes uniques, de façon que le capital de chaque contrat soit insuffisant pour verser une rente supérieure à 40 mensuels, et par suite versé au bénéficiaire. Ce dernier devra s acquitter des droits calqués sur ceux de l assurance-vie. EN CONCLUSION Le PERP n est pas une solution de défiscalisation miraculeuse. Son intérêt financier est dû à l avance faite sur les impôts pendant la période d activité, que l on rembourse bien plus tard pendant la retraite. Il est surtout intéressant lorsque le taux marginal d imposition à la retraite est beaucoup plus faible qu en activité. Passer de 41% à 14% n est pas rare, et le PERP est alors très efficace. Ce n est pas une «niche fiscale» : le calcul est copié sur les cotisations retraite versées par un salarié et son employeur. Mais il s agit de capitalisation, et le montant de la rente, s il n est pas garanti, reste tout de même calculé sur un capital accumulé. Le risque est bien plus élevé dans la retraite par répartition qu ici. L État d ailleurs y gagne souvent à terme. Naturellement, un gros inconvénient est que l on ne connaît pas actuellement la fiscalité qui sera appliquée dans trente ans. Mais la seule solution consiste à raisonner avec la fiscalité actuelle (et à espérer qu elle s améliore!). Copyright IMAF 5 25/02/15