1 Les référentiels de l agroalimentaire 1.1 Un florilège de référentiels agroalimentaires Depuis quelques années, l évolution des règles du commerce international et les exigences croissantes des consommateurs ont fait de la sécurité des aliments une préoccupation majeure des acteurs de la filière alimentaire. On rappellera qu en 1994, dans le cadre du cycle des négociations sur le commerce international qui se terminait en Uruguay, la sécurité des aliments était au cœur des débats pour ce qui concerne les produits agroalimentaires. Les quelques crises alimentaires qui ont frappé le secteur de l agroalimentaire au cours de ces dernières années ont forcément contribué au renforcement des exigences de transparence et de confiance des consommateurs. Face à une demande de plus en plus importante des clients, et compte tenu que la norme ISO 9001 sur le management de la qualité ne traite pas spécifiquement de la sécurité des aliments, les initiatives se sont multipliées pour établir des règles plus ou moins volontaires au travers de différents référentiels. En 2001, le CIES The Food Business Forum, a lancé la Global Food Safety Initiative (GFSI), dont les exigences sont disponibles sous www.foodsafety. com. L objectif de l initiative est d imposer l application d un «référentiel»
Les fondamentaux de l audit agroalimentaire de système de management de la sécurité des aliments. Par ailleurs, des travaux internationaux au sein de l Organisation internationale de normalisation (ISO) ont permis d élaborer une norme sur le management de la sécurité des denrées alimentaires : la norme ISO 22000 qui a été publiée en 2005. 1.2 Le panorama des référentiels Un référentiel est un document de référence regroupant l ensemble des critères auquel un produit, un processus ou un service doit répondre pour pouvoir bénéficier de la certification conçue par son auteur. L auteur du référentiel peut être un législateur (national ou international) ou une entité associative ou privée. Il est possible que plusieurs référentiels s adressent à un même produit. Indépendamment des référentiels existants depuis 1997 qui se basaient prioritairement sur le système HACCP 1 et sur une démarche qualité, tels que le référentiel danois DS 3027 Conditions auxquelles doivent se conformer les sociétés de l agroalimentaire et leurs sous-traitants et le référentiel néerlandais CCvD-HACCP Critères d évaluation d un système HACCP opérationnel établis par le Comité National Néerlandais des Experts en HACCP, certains distributeurs européens exigent dorénavant de leurs fournisseurs une certification BRC (British Retail Consortium) ou IFS (International Food Standard) pour les produits à Marque de Distributeurs (MDD), pour les premiers prix ou même pour tous les produits. De nombreux acteurs s interrogent sur le choix pertinent à faire entre ces référentiels et s inquiètent devant l augmentation des ressources à mettre à disposition (cf. figure 1.1). 2 1 HACCP est l abréviation, devenue courante ces dernières années de Hazard Analysis Critical. Control Point, signifiant Analyse des dangers. Points critiques pour leur maîtrise
Les référentiels de l agroalimentaire? Figure 1.1 Le casse-tête des référentiels de l agroalimentaire 1.3 Le référentiel IFS Il est à noter que le référentiel IFS a été développé par la fédération du commerce de détail allemand et la confédération des syndicats allemands du commerce à partir de 2002. En 2003, ils sont rejoints par la France, via la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD), puis en 2007 par les Italiens (cf. figure 1.2). Figure 1.2 Les utilisateurs de l IFS D autres distributeurs acceptent aussi l IFS (Migros, Coop en Suisse ; Tesco, Superunie au Royaume-Uni, Spar en Autriche et en Hongrie, Billa en Autriche, Ahold en Pologne et aux Pays Bas, Woolworth en Australie et en Afrique du Sud, par exemple). La structure de l IFS (version 5) est détaillée dans la figure 1.3. 3
Les fondamentaux de l audit agroalimentaire Partie 1 Protocole d audit P1 Annexe 1 IFS Food versus IFS Logistic P1 Annexe 2 Processus de certification P1 Annexe 3 Catégories de produits Partie 2 Exigences P2 Annexe 1 Glossaire Partie 3 Exigences pour les OA, OC et auditeurs P3 Annexe 1 Secteurs des auditeurs Partie 4 Rapport d audit IFS P4 Annexe 1 Page de garde P4 Annexe 2 Rapport AuditXpress P4 Annexe 3 Plan d actions P4 Annexe 4 Trame de certificat IFS Figure 1.3 La structure de l IFS (version 5) Dans sa version 5 de juillet 2007, l IFS contient 251 exigences au total. L audit selon l IFS est présenté au chapitre 2 du présent ouvrage. 4 1.4 Le référentiel BRC Le projet BRC a démarré en 1996 au travers de groupes de travail incluant treize distributeurs (tels que Safeway, Tesco, Asda, Sainsbury, Iceland, Somerfield, CWS, Boots, Waitrose ), six organismes de certification, des syndicats professionnels et le UK Accreditation Service (UKAS). Au départ, ce projet avait comme finalité d élaborer un référentiel pour l audit des fournisseurs de la grande distribution. C est ainsi qu une première norme et un protocole ont vu le jour en octobre 1998 après beaucoup d efforts. Le référentiel est actuellement en version 5 (janvier 2008). La structure du «BRC Food v5» se présente ainsi : Engagement de la Direction et amélioration continue. Plan de sécurité des aliments (HACCP). Sécurité des aliments et système de management de la qualité. Standards relatifs au site (emplacement). Maîtrise du produit. Maîtrise du procédé. Personnel.
Les référentiels de l agroalimentaire IFS et BRC sont des référentiels d audit. Des exigences de moyens (ce que vous devez mettre en œuvre) et de résultats (ce que vous devez atteindre) cohabitent : les audits sont donc exhaustifs, pointus et approfondis. Les objectifs évoqués par la grande distribution sont : de diminuer les coûts d audit et d apporter de la transparence à la chaîne d approvisionnement ; de donner l assurance du respect d un cahier des charges et de la réglementation en vigueur ; d homogénéiser les pratiques d achats vis-à-vis des fournisseurs. 1.5 La norme ISO 22000 La norme ISO 22000 spécifie les exigences d un système de management de la sécurité des denrées alimentaires qui est un ensemble cohérent d activités destiné à permettre à la direction d un organisme de s assurer de l application efficace et effective de sa politique et de ses objectifs d amélioration. Toutes les entreprises quels que soient leur taille, leur secteur d activité ou leur implantation locale ont plus ou moins formalisé leurs pratiques de management au cours du temps. L existence et la maîtrise d un système de management de la sécurité des denrées alimentaires peuvent aider l entreprise à donner confiance aux parties intéressées, sur le fait qu il existe un engagement du management pour mettre en œuvre sa politique dans ses processus de décision et le système d information et de mesure pour en juger. Les bénéfices potentiels dégagés par la mise en place d un système efficace de management de la sécurité des aliments sont, entre autres : L assurance apportée aux différents acteurs de la chaîne alimentaire d une maîtrise plus efficace et plus dynamique des dangers liés à la sécurité des aliments. L aptitude à fournir en permanence des produits finis sûrs, satisfaisant à la fois aux exigences des clients ayant fait l objet d un accord et aux exigences réglementaires en matière de sécurité des aliments. L assurance apportée aux parties intéressées de la transparence dans sa communication organisée et ciblée entre les partenaires. 5
Les fondamentaux de l audit agroalimentaire La mise en œuvre d une démarche structurée qui implique l ensemble du personnel dans un processus d amélioration continue. Elle concerne tous les acteurs de la chaîne alimentaire : les organismes directement impliqués (producteurs, transformateurs, distributeurs ) ou indirectement impliqués dans la chaîne (fournisseurs de matériaux d emballages, de produits de nettoyage ). La norme ISO 22000 s appuie sur le principe de la roue de Deming et sa boucle d amélioration continue de type PDCA (Plan, Do, Check, Act), qui est aujourd hui reconnue comme un principe de conduite managérial simple et universel. Sa déclinaison sur les systèmes de management des entreprises a été largement appliquée au cours des dernières années après avoir fait la preuve de son efficacité au Japon. Sa structure tient compte des dispositions contenues dans la norme ISO 9001, afin de permettre une parfaite compatibilité et complémentarité avec les différents référentiels de management couramment utilisés par les entreprises (cf. figure 1.4). 4. Système de management de la sécurité des denrées alimentaires Amélioration continue du système de management de la sécurité des denrées alimentaires Client et autres parties 5. Responsabilité de la direction Client et autres parties 6. Management des Ressources 8. Validation, vérification et amélioration Satisfaction Exigences 7. Planification et réalisation de produits sûrs de produits sûrs Produits sûrs 6 Figure 1.4 La structure de la norme ISO 22000 Elle repose sur quatre blocs principaux étroitement liés : La responsabilité de la direction. Le management des ressources.
Les référentiels de l agroalimentaire La planification et la réalisation de produits sûrs. La validation, la vérification, et l amélioration du système. Le schéma fait apparaître l organisme entre ses clients et les autres parties intéressées. Si l organisme souhaite être conforme aux exigences de la norme ISO 22000, il doit mettre en place un système de management de la sécurité des denrées alimentaires (chapitre 4 de la norme). Les procédés de réalisation de l organisme doivent permettre de réaliser des produits sûrs conformes aux exigences réglementaires et à celles des clients. L organisme s appuiera pour cela sur la méthode HACCP (chapitre 7 de la norme). Le management des ressources (chapitre 6 dela norme) est indispensable à la réalisation de produits sûrs ; la direction est responsable (chapitre 5 de la norme) de la définition d une politique et des objectifs et de l atteinte ces objectifs. Ce système devra enfin être validé, vérifié et amélioré en continu (chapitre 8 de la norme). D autres référentiels ont vu le jour en 2008 et 2009. Il s agit de référentiels consacrés aux bonnes pratiques d hygiène (les préalables ou les programmes pré-requis). 1.6 Le PAS 220 Le PAS 220:2008 Publicly Available Specification on Prerequisite programmes on food safety for food manufacturing est un document publié à l automne 2008 par l Institut de normalisation britannique (BSI). Il a été rédigé par quatre grands groupes (Danone, Unilever, Nestlé et Kraft Foods) avec l appui de la Confédération européenne des industries agroalimentaires (CIAA) représentée par l Association nationale des industries agroalimentaires (ANIA). Le but de ce document était de compléter et de détailler de manière technique et opérationnelle les programmes pré-requis (PRP), dont la maîtrise est exigée par la norme ISO 22000. Le PAS 220 est à mettre en relation avec le paragraphe 7.2.3 de l ISO 22000. Combiné à la norme ISO 22000, il permet de passer une certification spécifique FSSC 22000 2. Le détail de cette certification est présenté au chapitre 2 du présent ouvrage. 2 FSSC : Food Safety System Certification. 7
Les fondamentaux de l audit agroalimentaire L ISO/TC 34/SC 17 a souhaité reprendre le PAS 220 en document normatif ISO. Le vote, clos le 3 octobre 2009, est positif et le processus de reprise a donc été officiellement enclenché. Le choix s est porté sur le développement d une spécification technique (ISO TS) dont la publication est plus rapide qu une norme ISO. Elle a été publiée en janvier 2010 et porte la référence ISO/TS 22002-1. Il est à noter que le domaine d application du PAS 220 concerne uniquement la transformation. Il est possible que d autres documents sur les PRP soient développés au sein de l ISO/TC 34/SC 17 dans le futur (par exemple, sur la restauration collective). 8 1.7 Le PRP 22000 Publiée en mai 2009, la norme Synergy PRP 22000 vient combler une lacune de l ISO 22000 en définissant les programmes pré-requis en matière d hygiène (PRP) nécessaires à sa reconnaissance par la grande distribution. À ce jour, aucun dispositif de certification de système de management de la sécurité des aliments n était en mesure de couvrir l intégralité des filières agroalimentaires. C est désormais chose faite, grâce au dispositif Synergy 22000, dont la portée est calquée sur celle de l ISO 22000, soit la chaîne alimentaire complète. Aujourd hui, les opérateurs de la chaîne agroalimentaire (producteurs agricoles, éleveurs, industriels, grande distribution ) doivent montrer leur capacité à maîtriser la sécurité sanitaire de leurs produits. La norme ISO 22000 (publiée en 2005) a défini des principes unanimement reconnus pour la mise en place d un système de management de la sécurité des aliments, ainsi que pour l application de la méthode HACCP (Analyse des dangers et points critiques pour leur maîtrise). Toutefois, pour être reconnue par les principaux grands distributeurs, il y manque une spécification des bonnes pratiques d hygiène (ou programmes pré-requis) applicables. Donc, pour combler cette lacune, un groupe d experts internationaux reconnus et représentatifs de tous les échelons des filières agroalimentaires a conçu et développé, sous l égide de Synergy Global Standardisation Services SA à Genève, une nouvelle norme, dénommée Synergy PRP 22000, couvrant la totalité des bonnes pratiques de l ensemble des intervenants, de la fourche à la fourchette, sans oublier les secteurs connexes, comme les fabricants de machines ou de matériaux d emballage.
Les référentiels de l agroalimentaire Ce développement représente un progrès important, qui permettra à l ensemble des acteurs des filières concernées de disposer d une culture commune. 1.8 Quel choix pour sa certification? La multiplicité des référentiels, et leur absence de reconnaissance mutuelle, engendrent une forte pression d audit sur les organismes agroalimentaires. Nous avons vu que le Global Food Safety Initiative (GFSI) regroupe les grandes enseignes de distribution et les principaux groupes industriels à l échelle internationale. À l heure actuelle, le GFSI reconnaît sept schémas de certification pour la transformation des aliments : BRC Global Standard (Version 5). Dutch HACCP (Option B). FSSC 22000 (PAS 220 + ISO 22000). Global Red Meat Standard (Version 3). International Food Standard (Version 5). Safe Quality Food 2000 (Level 2). Synergy 22000. Quatre schémas de certification sont aussi reconnus pour la production primaire : GlobalGAP (Aquaculture and Livestock IFA V3.0). GlobalGAP (Fruit and Vegetable Scope Options 1 and 2 only). PrimusGFS. Safe Qualité Food 1000 (Level 2). Le choix d un référentiel dépend donc : des objectifs internes de l organisme (stratégie) ; des objectifs de communication ; des exigences des clients. La devise du GFSI est «Once Certified, accepted everywhere» (se traduisant par Certifié une fois, reconnu partout), mais aux dires des industriels, elle est encore loin d être appliquée sur le terrain. 9