Le vent dans les voiles! Elles font partie des produits financiers qui enregistrent la croissance la plus forte au pays, révélait l été dernier la Bourse de Toronto. À tel point que, depuis octobre 2002, le TSX a mis au monde, en collaboration avec Standard & Poor s, un indice lui étant entièrement consacré. Les initiés les désignent familièrement par leur acronyme anglais : REITs, pour Real Estate Investment Trusts. Quoique leur équivalent français, fiducie de placement immobilier (FPI), circule de plus en plus au Québec. CLAUDE COUILLARD Sociétés détentrices de portefeuilles immobiliers, les FPI sont apparues aux États-Unis dans les années 1960. «Leur capitalisation boursière actuelle dépasse les 300 milliards de dollars américains», nous apprend Patrick Lachapelle, courtier à la Financière Banque Nationale à Laval. «À la FBN, on en est à huit milliards de dollars canadiens.» Leur arrivée au Canada est toutefois beaucoup plus récente. «La loi permettant la mise en FÉVRIER 2003 11
Patrick Lachapelle,coutier à la FBN Raymond Kerzérho,directeur à la recherche de PWL Capital «Environ 20 % de nos hypothèques viennent chaque année à échéance. Si les taux augmentent de 2 % demain matin, seules 20 % d entre elles seront touchées.» place de FPI au Québec a été adoptée en mars 1995», raconte Jules Dallaire, président et chef de la direction du Fonds de placement immobilier Cominar de Québec (Voir encadré Cominar : l étoile montante québécoise). Plusieurs FPI canadiennes sont publiques, c est-à-dire cotées en Bourse. D autres sont privées, «mais on ne les connaît pas», poursuit M. Dallaire. Avantage fiscal Leur premier avantage est de nature fiscale, rapporte Patrick Lachapelle, qui propose les FPI à sa clientèle depuis près de trois ans. «Leur statut de fiducie les oblige à transférer la grande majorité de leurs profits aux détenteurs de parts», continue Raymond Kerzérho, directeur de la recherche de PWL Capital à Montréal. Appelés «distributions» dans le jargon des FPI, ces versements, souvent mensuels ou trimestriels, se composent de deux éléments explique l analyste : primo, de revenu ordinaire imposable (proportion : 40 % en moyenne); secundo, d un retour sur le capital investi (proportion : 50 à 60 %), portion qui réduit d autant l investissement initial du détenteur. Autre avantage des FPI : «Les distributions sont élevées, ajoute M. Lachapelle. En moyenne, de 9 %. Par exemple, sur FÉVRIER 2003 13
Cominar l étoile montante québécoise Si vous mettez les pieds dans la Place de la Cité, vaste complexe commercial et de bureaux niché entre la Place Sainte-Foy et la Place Laurier,sachez que vous vous trouvez dans une propriété du Fonds de placement immobilier Cominar. Évalué à quelque 130 M $, «c est notre plus gros actif à Québec», informe son président, Jules Dallaire. La principale FPI québécoise possède l un des parcs immobiliers les plus importants du Québec : autour de 105 propriétés,réparties à parts égales dans les espaces industriels, les immeubles de bureaux et les centres commerciaux.«au total,nous détenons 7,5 millions de pieds carrés.» Les deux tiers se trouvent dans la région de Québec; l autre tiers, disséminé aux quatre coins de l agglomération montréalaise.fondé en mai 1998,le Fonds de placement immobilier Cominar a vu la valeur de son actif plus que doubler. En quatre ans! «Il dépasse le demimilliard de dollars», dévoile Jules Dallaire. Jusqu à maintenant, ce dernier constituait la seule FPI québécoise.déjà en décembre 2002,un second acteur s apprêtait à investir le marché prometteur des fiducies de placement immobilier :le Groupe Alexis Nihon,géant de l immobilier montréalais.
une part payée 10 $, l investisseur recevra 90 cents par année», schématise-t-il. Un rendement intéressant en ces années de faibles taux d intérêt. «Tous les mois, on distribue 1/12 des revenus annuels», mentionne M. Dallaire. C est le cas de la plupart des FPI canadiennes. Sensibles aux taux en vigueur? Bien qu acquis au produit, Patrick Lachapelle le considère toutefois comme risqué. «En achetant des parts de FPI, on achète une entreprise immobilière, dit-il. La conjoncture économique peut influencer le taux d inoccupation d un immeuble, heureusement très faible ces temps-ci à Montréal. Mais, il y a cinq ans, c était autre chose», rappelle-t-il. Et puis, il évoque l influence des taux d intérêt. «Les FPI financent leurs immeubles avec des hypothèques. Si les taux hypothécaires augmentent considérablement, le rendement des FPI va diminuer. Il faut s attendre à ce que les parts bougent à la hausse ou à la baisse, et que le rendement fluctue.» Sans oublier, poursuit-il, que plus les taux d intérêt augmentent, plus les FPI risquent de subir la concurrence d autres produits financiers garantis. Jules Dallaire de la FPI Cominar cherche à nuancer ces propos. «Environ 20 % de nos hypothèques viennent chaque année à échéance. Si les taux augmentent de 2 % demain matin, seules 20 % d entre elles seront touchées. Ça ne nous empêchera pas de faire notre distribution.» Même avis de l analyste Raymond Kerzérho : «Les FPI seront sensibles aux taux d intérêt s il y a une réelle flambée.» Probabilité qu il juge faible actuellement, en cette époque d inflation et de déficits gouvernementaux maîtrisés. Est-il besoin de rappeler toutefois que les FPI ne sont pas garanties? Raymond Kerzérho propose donc trois mesures, en vigueur au sein de PWL Capital, qui ont pour but de protéger les avoirs des clients : «On investit dans les fiducies dont le gestionnaire est un actionnaire très important. Il a alors fortement intérêt à agir de la façon la plus diligente possible. On essaie aussi de choisir des fiducies qui ont un taux d endettement moins élevé. Enfin, on investit rarement plus de 2 ou 3 % du portefeuille d un client dans une fiducie en particulier.» Pour les rentiers et les retraités Signe de l intérêt grandissant que suscitent les FPI, Jules Dallaire reçoit au moins 50 appels par semaine d investisseurs curieux. «Les moments difficiles en Bourse ont notamment eu pour résultat que des gens privilégient des produits procurant un revenu mensuel régulier.» À qui conviennent-elles le mieux? «À quelqu un qui vit de ses revenus», précise le courtier Patrick Lachapelle. Un préretraité ou un retraité «qui a beaucoup de sous dans un compte hors REER, en raison de l attrait fiscal. Cent pour
Les FPI :une famille nombreuse! Le 15 octobre 2002, la Bourse de Toronto et Standard & Poor s lançaient l Indice canadien des fiducies de placement immobilier S&P/TSX. Il est constitué de 12 FPI, individuellement cotées en Bourse, que l on peut subdiviser en cinq familles : FPI hôtelières Ces fiducies de placement immobilier se concentrent sur l industrie hôtelière.«leur rendement est un peu plus élevé»,déclare Raymond Kerzérho. Considérée comme plus risquée, «l hôtellerie est très liée aux cycles économiques et touristiques». Et qui dit risque accru dit rendement accru. Quelques titres compris dans l Indice? Legacy Hotels Real Estate Investment Trust (LGY.UN) et Canadian Hotel Income Properties REIT (HOT.UN). FPI retraite «Il y a des FPI qui investissent dans des résidences de préretraités et de retraités», affirme Patrick Lachapelle. C est le cas de Retirement Residences REIT (RRR.UN). «Ce n est en tout cas pas un secteur en décroissance!» lance le courtier lavallois. FPI commerciales RioCan (REI.UN) se consacre aux centres commerciaux.en plus de ces derniers, la québécoise Cominar (CUF.UN) privilégie aussi les investissements dans les espaces industriels et les immeubles de bureaux. FPI résidentielles Comme leur nom l indique, ces FPI, telle la Canadian Apartment Properties REIT (CAR.UN),favorisent les propriétés résidentielles. FPI mixtes Dans bien des cas, ces FPI détiennent un portefeuille varié, réparti dans plusieurs secteurs immobiliers.un choix sage pour les investisseurs désireux de répartir le risque. Outre les quelques fiducies susmentionnées, ajoutons Summit REIT (SMU.UN), Morguard REIT (MRT.UN) et H&R REIT (HR.UN). Une semaine plus tard, le 22 octobre 2002, Barclays Global Investors de Toronto mettait en vente 1 500 000 parts de ireit (symbole boursier :XRE),un fonds indiciel qui reproduit fidèlement l Indice canadien des fiducies de placement immobilier S&P/TSX. Depuis l avènement du Fonds ireit, Patrick Lachapelle, de la Financière Banque Nationale,le propose de plus en plus à sa clientèle.«je bénéficie des mêmes avantages que si je détenais une FPI,sauf que j en ai plusieurs, signale le courtier. Je répartis ainsi mon risque entre plusieurs compagnies.» LES FPI SUR LE WEB www.iunits.ca (cliquer sur «Les fonds iunits», puis sur «ireit») www.tse.com (cliquer sur «français», puis sur «fonds indiciels») www.cominar.com cent de ces gens-là devraient en détenir. Dans un REER, il n y a pas d impôt. Ça ne vaut pas vraiment la peine de détenir des FPI». Leur limite? Comme pour tout produit financier, secteur économique ou titre en particulier : 5 % d un portefeuille. «Depuis bientôt cinq ans, chez nous, les FPI font partie intégrante d un portefeuille structuré», révèle Raymond Kerzérho de PWL Capital, qui gère des comptes de 500 000 $ et plus. Il apprécie, entre autres, leur complémentarité. «Au cours des cinq dernières années, les FPI ont fréquemment fluctué dans le sens contraire de la Bourse. C est un bon moyen de stabiliser un portefeuille», conclut-il. En plus, «elles offrent des rendements semblables à ceux des actions ordinaires. Mais attention, ajoute-t-il, elles ne constituent pas un substitut des obligations, qui demeurent l outil de choix pour réduire la volatilité d un portefeuille». Intérêt croissant des conseillers Force est de constater que les conseillers québécois connaissent et conséquemment offrent encore peu les FPI. «Il y a encore beaucoup de chemin à faire, observe Patrick Lachapelle. Mais, au Québec, ça se développe.» Échos aussi encourageants de Jules Dallaire : «Les courtiers ont fait beaucoup de chemin depuis deux ans.» Le président de la FPI Cominar constate cependant que plusieurs professionnels du placement connaissent encore mal le fonctionnement d une fiducie, ce qui ralentit leur percée. «Nous les rencontrons et leur expliquons le produit lors d ateliers, dit-il. C est le meilleur moyen. Car c est un produit qui est là pour demeurer», est-il convaincu. «Il n y a aucun doute là-dessus», enchaîne Raymond Kerzérho. «Investir dans une fiducie de placement immobilier, c est comme acheter un portefeuille de propriétés immobilières, mais sans hériter de tous les problèmes de gestion quotidienne» OBJECTIF CONSEILLER 16