ÉLOGE DE LA DICTEE / EHRENRETTUNG DES DIKTATS 1 Jean-Michel Robert, Université d Amiens, LESCLaP ÉLOGE DE LA DICTEE Depuis plus de trente ans, la correction a mauvaise presse en didactique des langues étrangères. On préfère des termes tels que pédagogie de la faute, analyse des fautes. La faute étant communément considérée comme une erreur constructive (l apprenant construit son système en langue cible par généralisation), elle est perçue comme étape indispensable du processus d apprentissage (ce qu elle est effectivement souvent). Mais certaines erreurs (ou fautes) peuvent difficilement être analysées de cette façon, lors d activités de classe comme la dictée. La dictée et ses problèmes Symbole d une méthodologie traditionnelle anti-pédagogique par excellence, la dictée souffre d une vision négative de la part des enseignants comme des apprenants. Absente des examens et des contrôles, elle suscite de nombreuses critiques méthodologiques (qui ne sont pas toutes sans fondement) : - Elle ne s inscrit pas dans une approche communicative. - Elle n apprend rien : les étudiants ne peuvent écrire que ce qu ils connaissent. - Ce type d exercice ne peut déboucher que sur la correction ; elle pénalise inutilement l étudiant. - Elle ne correspond pas aux besoins langagiers des apprenants. - Elle est trop liée aux méthodes traditionnelles, dénoncées depuis de nombreuses années... Et pourtant... La dictée peut être un excellent exercice d évaluation et d analyse des fautes et même devenir une activité distrayante et efficace pédagogiquement. Pour cela, il faut éviter quelques écueils, comme : - confondre dictée et compréhension orale, - faire de la dictée une activité trop longue, - se contenter pour l enseignant de corriger les fautes. Deux autres problèmes sont inhérents à la dictée : - L apprenant est responsable de sa production et toute correction de la dictée par l enseignant est assimilée à un jugement global sur ses compétences. Certains apprenants, dans des centres 1 Ce petit article, à l origine écrit en allemand pour la revue Der fremdsprachliche Unterricht / Französisch, a servi de support, dans sa version française, à un atelier pour enseignants de FLE à l Institut français de Jérusalem, (2008). 1
d enseignement de FLE, tels les Alliances Françaises (public adulte et adolescent), sont réticents à laisser voir leur production (peur de montrer leurs lacunes à l écrit, refus d être jugé, dévalorisé,...). - Un réflexe très humain fait que chez l apprenant, lors d une activité telle que la dictée, le regard a tendance (quels que soient l âge, le sexe, la nationalité ou le statut social) à glisser vers la copie du voisin. On ne triche pas, on vérifie sa propre production... et très souvent on recopie les fautes des voisins. Des groupes de dictées La constitution de groupes de dictée permet d éviter les inconvénients cités ci-dessus. Les apprenants sont séparés en groupes de trois ou quatre. L enseignant choisit une dictée courte comprenant une lexie connue par la classe. Il lit le texte une ou deux fois - pour que le texte soit compréhensible et que les apprenants se concentrent sur la graphie et non sur la compréhension. Lors de la dictée, il est conseillé aux apprenants de ne pas regarder sur les voisins du groupe, puisque, de toute façon, ils auront accès à la production des voisins du groupe lors de la phase de correction. Après la dictée, les apprenants confrontent leur production et argumentent en cas de différences. Ils ont droit au dictionnaire et à la grammaire. En effet en situation authentique d écrit, l étudiant se réfère naturellement à ces outils pédagogiques - qui peuvent l aider pour l orthographe d un mot ou la conjugaison d un verbe, mais qui ne décideront pas pour lui d un accord grammatical ou de la sélection d un son (de ou des). Chaque groupe doit se décider pour une version définitive. Exemple de dictée (faite à l Alliance Française de Paris) : ensemble, mais ils apparaissaient en général séparés. Ils se vouvoyaient depuis toujours. On avait appris qu ils avaient chacun son adresse. (Sartre et Beauvoir s aimaient-ils, ou ne faisaient-ils que se supporter? Espace III, Hachette, p.74) Trois versions différentes dans un groupe: - C était un vieux couple du genre «on s est déjà tous dit cent fois». Le public savait bien qu ils étaient ensemble, mais ils apparaissaient en general séparés. Ils se vuvoyaient depuis toujours. On avait apprit qu ils avaient chaqu un son adress. - C était un vieux couple, du genre «on sait déjà tout dit sans foi». Le public savait bien qu ils étaient ensemble, mais ils apparaisaient en general separé. Ils se vous-voyez depuis toujours. On avait appris 2
- C était un vieux couple, du genre «on s est déjà tout dit sans fois». Le publique savait bien qu ils étaient ensemble, mais ils apparaissaient en général séparés. Ils se vouvoyaient depuis toujours. On avait appris Discussion entre apprenants : 1. «On sait déjà...» : erreur, la phrase est incompréhensible. 2. «sans foi» : même problème qu en 1. 3. «apparaisaient», problème de phonétique [s] ou [z]? 4. «public» - «publique» : incertitude entre c et que (masculin / féminin?). Dictionnaire. 5. «en general» : problème de phonétique. 6. «séparé» : grammaire (accord de l attribut) / «separé» : phonétique. 7. «vuvoyaient» «vous-voyez» : dictionnaire. 8. «apprit» : grammaire (le participe passé). 9. «adresse» : dictionnaire. Version définitive de ce groupe : ensemble, mais ils apparaissaient en genéral séparés. Ils se vouvoyaient depuis toujours. On avait appris Correction dirigée Lorsque les versions définitives sont établies, l enseignant corrige ces versions en indiquant le type de fautes (grammaticales, orthographiques, phonétiques) selon un moyen particulier, entourer, souligner une fois ou deux selon le type de faute: C était un vieux couple, du genre «on s est déjà tout dit cent fois». Le public savait bien qu ils étaient ensemble, mais ils apparaissaient en *genéral séparés. Ils se vouvoyaient depuis toujours. On avait appris (*erreur phonétique, orthographe). Les groupes retravaillent à partir de ces corrections, et généralement, grâce aux indications parviennent à corriger toutes les fautes. La dictée s inscrit donc comme activité d évaluation des connaissances (principalement phonologiques et grammaticales). L autocorrection en groupe permet d éviter l aspect trop pénalisant d une correction par le seul enseignant d un seul apprenant. Elle permet concertation et réflexion. 3
EHRENRETTUNG DES DIKTATS Seit mehr als dreißig Jahren hat der Begriff Korrektur einen schlechten Ruf in der fremdsprachlichen Didaktik. Ausdrücke wie Fehlerpädagogik, Fehleranalyse werden bevorzugt. Da die Fehler gemeinhin als konstruktive Fehler betrachtet sind -der Lernende entwickelt in der Zielsprache ein linguistisches System durch Generalisieren-, sind sie denn in der Fehlerlinguistik als unumgängliche Stufen des Lehrprozess wahrzunehmen. Was sie sehr oft auch tatsächlich sind. Einige Fehler aber können sehr schwer als solche analysiert werden, besonders in gewissen Klassenaktivitäten, wie z.b. bei einem Diktat. Das Diktat und seine Probleme Als Symbol einer traditionellen, schlechthin antipädagogischen Methodologie, leidet das Diktat unter einem negativen Wahrnehmen von Seiten der Lernenden wie der Lehrenden. Abwesend in den Prüfungen und Testen, stiftet es zahlreiche methodologische Auseinandersetzungen, wie Z.B.: - Das Diktat gehört nicht zu einer kommunikativen Lehrstrategie. - Es lehrt nichts : die Lernenden können nur schreiben, was sie schon kennen. - Diese Art Übung führt nirgendwo hin, es bestraft unnützerweise den Lernenden. - Es entspricht den Sprachbedürfnissen des Lernenden nicht. - Es ist zu sehr mit den alten traditionellen, seit lange abgelehnten Methodologien verbunden. Und dennoch... Das Diktat kann nicht nur eine hervorragende Evaluations-, Fehleranalyseübung sein, sondern auch eine zerstreuende, pädagogische Aktivität bilden. Dafür müssen nur ein paar Hindernisse vermieden werden, wie Z.B.: - Diktat und mündliches Verständnis zu verwechseln. - den Lernenden ein zu langes Diktat vorzuschlagen, - für den Lehrenden, sich mit der Fehlerkorrektur zu begnügen. Zwei andere Probleme sind dem Diktat inhärent: - Der Lernende ist für seine Schreibproduktion verantwortlich und jede Korrektur dieser Produktion vom Lehrenden wird als globales Urteil über die Kompetenz des Lernenden gelten. In Fremdspracheninstituten, wie die Alliances Françaises (erwachsenes und jugendliches Publikum) zögern oft Lernenden, ihre Produktion sehen zu lassen (Angst, ihre schriftlichen Fehler zu zeigen, Verweigerung, beurteilt oder abgewertet zu werden, usw.). 4
- Ein sehr menschlicher Reflex bringt dem Lernenden, während solch einer Klassenaktivität, einen Blick auf die Arbeit des Nachbars zu werfen (ohne Rücksicht auf Parameter wie Alter, Geschlecht, Nationalität oder Sozialstatut). Man schreibt nicht ab, man prüft nur seine eigene Produktion nach. Und sehr oft, schreibt man die Fehler des Nachbars ab. Diktatgruppen Die Zusammensetzung der Diktatgruppen muss die oben angeführten Nachteile vermeiden. Die Lernenden werden in Gruppen zu je drei oder vier Personen eingeteilt. Der Lehrende wählt ein kurzes Diktat, welches ein bei der Klasse bekanntes Vokabular beinhaltet. Er liest ein oder zwei male den Text vor - damit der Text verständlich wird und damit die Lernenden sich auf die Schreibweise und nicht auf das Verständnis konzentrieren. Während des Diktats werden den Lernenden angeraten, nicht auf die Gruppennachbarn zu achten, da sie während der Korrekturphase, die innerhalb der Gruppe stattfindet, ohnehin Einsicht in die Arbeiten der Gruppennachbarn nehmen können. Nach dem Diktat vergleichen die Lernenden ihre Arbeiten und diskutieren die Unterschiede, falls es welche gibt. Sie dürfen eine Grammatik und ein Wörterbuch verwenden. Denn in der authentischen Situation des Schreibens hilft sich der Lernende natürlich mit seinem pädagogischen Werkzeug - das ihn bei der Rechtschreibung eines Wortes helfen kann, das aber für ihn nicht eine grammatikalisches Übereinstimmung oder die Auswahl eines Lautes (frz. de oder des) entscheidet. Jede Gruppe muss sich für eine endgültige Fassung entscheiden. Diktatbeispiel (Alliance Française, Paris) ensemble, mais ils apparaissaient en général séparés. Ils se vouvoyaient depuis toujours. On avait appris qu ils avaient chacun son adresse. (aus dem Text: Sartre et Beauvoir s aimaient-ils, ou ne faisaient-ils que se supporter? Espace III, Hachette, s.74) Verschiedene Arbeiten in einer germanischen Gruppe (Deutschland, Schweiz, Österreich): - C était un vieux couple du genre «on s est déjà tous dit cent fois». Le public savait bien qu ils étaient ensemble, mais ils apparaissaient en general separés. Ils se vuvoyaient depuis toujours. On avait apprit qu ils avaient chaqu un son adress. - C était un vieux couple, du genre «on sait déjà tout dit sans foi». Le public savait bien qu ils étaient ensemble, mais ils apparaisaient en general séparé. Ils se vous-voyez depuis toujours. On avait appris 5
- C était un vieux couple, du genre «on s est déjà tout dit sans foi». Le publique savait bien qu ils étaient ensemble, mais ils apparaissaient en général séparés. Ils se vouvoyaient depuis toujours. On avait appris Diskussion zwischen den Lernenden: 1. «On sait déjà...»: Fehler, da der Satz inhaltlich nicht verstanden wurde. 2. «sans foi»: das gleiche Problem wie 1, bei beiden wusste man, dass es ein Fehler war - man konnte es nicht korrigieren, da der Inhalt nicht klar war. 3. «apparaisaient»: -s- fehlt, Aussprachprobleme, [s] oder [z]? 4. «public» - «publique»: Unsicherheit bezüglich «c» und «que». Unterscheidung männlich-weiblich? Wörterbuch. 5. «en general»: Aussprachprobleme. 6. «séparé»: Grammatikfehler / «separé» : Phonetik. 7. «vuvoyaient», «vous-voyez»: Wörterbuch. 8. «apprit»: Grammatikfehler. 9. «adress»: Wörterbuch. Endgültige Fassung der Gruppe: ensemble, mais ils apparaissaient en genéral séparés. Ils se vouvoyaient depuis toujours. On avait appris Korrektur Wenn die endgültigen Fassungen erstellt sind, korrigiert der Lehrende diese, indem er den Fehlertypus zugibt (grammatikalisch, orthographisch oder phonetisch) gemäß einem gewissen System: umranden, einoder mehrfaches unterstreichen gemäß Fehlertypus. Z. B: ensemble, mais ils apparaissaient en *genéral séparés. Ils se vouvoyaient depuis toujours. On avait appris (*Phonetikfehler, orthographischer Fehler). Die Gruppen überarbeiten und korrigieren anhand dieser Korrekturen und Anweisungen die verbliebenen Fehler. Das Diktat erweist sich hiermit als eine Art aktive Evaluationsübung (grundsätzlich phonetischer und grammatikalischer Art). Die gemeinsame Korrekturarbeit verhindert den allzu verstrafenden Aspekt der Korrektur. Sie ermöglicht und erfordert gemeinsame Absprache und Reflexion. 6