Dermo-hypodermites, fasciites nécrosantes et myonécroses. Julien Rousset 16/09/09 Limoges

Documents pareils
Apport de la TDM dans les cellulites cervico-faciales

Infiltrats pulmonaires chez l immunodéprimé. Stanislas FAGUER DESC Réanimation médicale septembre 2009

Réflexions sur les possibilités de réponse aux demandes des chirurgiens orthopédistes avant arthroplastie

B06 - CAT devant une ischémie aiguë des membres inférieurs

Intérêt diagnostic du dosage de la CRP et de la leucocyte-estérase dans le liquide articulaire d une prothèse de genou infectée

INFECTIONS POST- TRAUMATIQUES SUR MATÉRIEL D'OSTÉOSYNTHÈSE. Accidentologie et épidémiologie bactérienne

Prise en charge de l embolie pulmonaire

Mise au point sur le bon usage des aminosides administrés par voie injectable : gentamicine, tobramycine, nétilmicine, amikacine

Don d organes et mort cérébrale. Drs JL Frances & F Hervé Praticiens hospitaliers en réanimation polyvalente Hôpital Laennec, Quimper

Mise en place du contrôle du bon usage des carbapénèmes: expérience d une équipe pluridisciplinaire

PRISE EN CHARGE DES PRE ECLAMPSIES. Jérôme KOUTSOULIS. IADE DAR CHU Kremlin-Bicêtre. 94 Gérard CORSIA. PH DAR CHU Pitié-Salpétrière.

La santé bucco-dentaire au cabinet OMS. Problèmes majeurs. Santé bucco-dentaire et santé générale. Santé. Déterminants sociaux et santé bucco-dentaire

MONITORING PÉRI-OPÉRATOIRE DE L'ISCHÉMIE CARDIAQUE. Dary Croft 9 mai 2013

URGENCES MEDICO- CHIRURGICALES. Dr Aline SANTIN S.A.U. Henri Mondor

Docteur, j ai pris froid!

APONEVROTOMIE ENDOSCOPIQUE du Syndrome Compartimental d Effort à l Avant-bras

Les Infections Associées aux Soins

Incontinence anale du post-partum

Observation. Merci à l équipe de pharmaciens FormUtip iatro pour ce cas

Spondylarthropathies : diagnostic, place des anti-tnf et surveillance par le généraliste. Pr P. Claudepierre CHU Henri Mondor - Créteil

Les différentes maladies du coeur

Tuméfaction douloureuse

Existe t il des effets pervers à l identification du portage de BMR?

Les anticoagulants. PM Garcia Sam Hamati. sofomec 2008

Définition de l Infectiologie

La Dysplasie Ventriculaire Droite Arythmogène

Maternité et activités sportives

Conduite à tenir devant une morsure de chien (213b) Professeur Jacques LEBEAU Novembre 2003 (Mise à jour mars 2005)

Échographie normale et pathologique du grand pectoral

GHUPC Projet de transformation du site Hôtel Dieu. Pr S CHAUSSADE, Dr I. FERRAND

La Maladie Thrombo-Embolique Veineuse (MTEV) et sa prise en charge médicamenteuse

Item 182 : Accidents des anticoagulants

Vous intervenez en équipage SMUR sur un accident de la voie publique : à votre arrivée sur les lieux, vous trouvez un homme d environ 30 ans au sol à

Laurence LEGOUT, Michel VALETTE, Henri MIGAUD, Luc DUBREUIL, Yazdan YAZDANPANAH et Eric SENNEVILLE

{ Introduction. Proposition GIHP 05/12/2014

TITRE : «Information et consentement du patient en réadaptation cardiovasculaire»

Nouveaux anticoagulants oraux : aspects pratiques

Contrôle difficile non prévu des voies aériennes: photographie des pratiques

CONTROVERSE : IDR OU QUANTIFERON LORS D'UN CONTAGE EN EHPAD?

INFORMATION À DESTINATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ LE DON DU VIVANT

MIGRAINES. Diagnostic. A rechercher aussi. Critères IHS de la migraine. Type d aura. Particularités chez l enfant. Paraclinique.

Cordarone et Thyroïde par François Boustani

ALTO : des outils d information sur les pathologies thromboemboliques veineuses ou artérielles et leur traitement

TRAUMATISME CRANIEN DE L ENFANT : conduite à tenir?

Anatomie. Le bassin inflammatoire. 3 grands cadres. 4 tableaux. Spondylarthrite ankylosante. Spondylarthrite ankylosante 26/10/13

Colette Franssen Département d Anesthésie Réanimation CHU Sart Tilman LIEGE

Association lymphome malin-traitement par Interféron-α- sarcoïdose

Les formes cliniques. Maxime Breban

PRINTEMPS MEDICAL DE BOURGOGNE ASSOCIATIONS ANTIAGREGANTS ET ANTICOAGULANTS : INDICATIONS ET CONTRE INDICATIONS

Incontinence urinaire : trop souvent taboue

Evaluation péri-opératoire de la tolérance à l effort chez le patient cancéreux. Anne FREYNET Masseur-kinésithérapeute CHU Bordeaux

Dermatologie courante du sujet âgé. Printemps Médical de Bourgogne 31 Mars 2012 Dr Claude Plassard Gériatre CHI Châtillon/Montbard

Fièvre sans foyer chez l enfant de moins de 3 mois

Le traitement conservateur des tumeurs malignes des membres a largement remplacé les amputations

Prise en charge du patient porteur d un dispositif implantable. Dr Philippe Gilbert Cardiologue CHU pavillon Enfant-Jésus

UN PATIENT QUI REVIENT DE LOIN. Abdelmalek AZZOUZ GRCI 29/11/2012 Service de Cardiologie A2 CHU Mustapha. Alger Centre. Algérie

Ministère de la santé, de la jeunesse et des sports. Comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins

Innovations thérapeutiques en transplantation

PLACE DE L IRM DANS LE BILAN D EXTENSION DU CANCER DU RECTUM. Professeur Paul LEGMANN Radiologie A - Cochin Paris

INSUFFISANCE CARDIAQUE «AU FIL DES ANNEES»

Quoi de neuf dans la prise en charge du psoriasis?

Le Centre Hospitalier Universitaire de Reims

HTA et grossesse. Dr M. Saidi-Oliver chef de clinique-assistant CHU de Nice

Prépration cutanée de l opéré

Charte régionale des Réunions de Concertation Pluridisciplinaire de PACA, Corse et Monaco

Déclaration médicale Prise d effet le 1 er octobre 2012

Certificat SSO de formation postgrade en médecine dentaire générale

Vaccination et tuberculose en Gériatrie. Unité de Prévention et de Dépistage: Centre de vaccination et centre de lutte anti tuberculeuse CH Montauban

Collection Soins infirmiers

La prise en charge de l AVC ischémique à l urgence

LE FINANCEMENT DES HOPITAUX EN BELGIQUE. Prof. G. DURANT

Prise en charge des déchirures périnéales obstétricales sévères. Courjon M, Ramanah R, Eckman A, Toubin C, Riethmuller D.

L ACCÈS VEINEUX DE COURTE DURÉE CHEZ L ENFANT ET LE NOUVEAU-NÉ

REPOUSSER LES LIMITES DE LA CHIRURGIE BARIATRIQUE DANS LES OBESITES MASSIVES AVEC COMORBIDITES

Ischémie myocardique silencieuse (IMS) et Diabète.

Soins infirmiers et gestion des risques

Aspects réglementaires du don et de la transplantation des organes. Mohamed Arrayhani - Tarik Sqalli Service de Néphrologie CHU Hassan II - Fès

S o m m a i r e 1. Sémiologie 2. Thérapeutique

Moyens d étude de la peau

Monitoring non invasif dans l état de choc

Votre guide des définitions des maladies graves de l Assurance maladies graves express

M.S - Direction de la réglementation et du contentieux - BASE DE DONNEES. REFERENCE : B O N 5070 du 2 janvier 2003

CRITERES DE REMPLACEMENT

: Stratégies de réduction de l'utilisation des antibiotiques à visée curative en. réanimation (adulte et pédiatrique)

Comment devenir référent? Comment le rester?

Dr Pierre-François Lesault Hôpital Privé de l Estuaire Le Havre

Causes d insatisfactions du patient pris en charge en ambulatoire

INCONTINENCE URINAIRE

Evaluation de la gravité et complications chez un traumatisé des membres

Assurance-maladie complémentaire (LCA)

DIU DE REEDUCATION PELVI-PERINEALE. Responsables de l enseignement :

Traumatismes pelviens

Atelier N 2. Consultation de patientes porteuses d une maladie générale

Feuille d instructions destinée aux agents quant à la façon de remplir le questionnaire médical VacanSanté

Etat des lieux du prélèvement et de la greffe d organes, de tissus et de cellules MAROC

Grossesse et HTA. J Potin. Service de Gynécologie-Obstétrique B Centre Olympe de Gouges CHU de Tours

Fièvre chez un patient immunodéprimé.

Logiciels de gestion sur mesure Etude et développement. Logiciel de suivi des évènements indésirables dans les établissements hospitaliers

PROGRESSEZ EN SPORT ET EN SANTÉ. Mieux vivre avec ma maladie chronique, Me soigner par l activité physique Programmes Santé

AGRES Hugues IADE RD LA ROCHE / YON

Transcription:

Dermo-hypodermites, fasciites nécrosantes et myonécroses Julien Rousset 16/09/09 Limoges

Généralités Infection des tissus mous Gravité fonction de la profondeur de l atteinte anatomique 50% des DHBNN prises en charge en ambulatoire 30% de mortalité dans les Fasciites nécrosantes Plus de 50% dans les Myonécroses.

Classification Demohypodermite bactérienne non nécrosante Dermohypodermite bactérienne nécrosante Fasciite nécrosante avec atteinte de l aponévrose superficielle Myonécroses

Facteurs de risques DHB: Lymphoedème Porte d entrée Œdème des membres inférieurs Insuffisance veineuse Surpoids Kaul et al, Am J Med 1997; 103: 18-24

Facteurs de risque des fasciites nécrosantes Age >65 ans Diabète VIH Hémopathies, cancer, chimiothérapies, immunosuppresseurs Pathologie cardiaque et pulmonaire Prise d AINS Kaul et al, Am J Med 1997; 103:18-24

Critères diagnostiques des dermohypodermites, fasciites et myonécroses Diagnostique clinique Difficulté: différencier les dermohypodermites non nécrosantes des formes nécrosantes.

Formes nécrosantes Signes locaux: douleur croissante, œdème induré, purpura, bulles, nécrose, hypoesthésie, aspect livédoide. Signes généraux de sepsis sévère. Évolution défavorable malgré une antibiothérapie adaptée.

Importance de l imagerie: Pour le diagnostic TDM: -présence de gaz -amincissement du fascia -extension de l œdème au septa intermusculaires -absence de réhaussement du fascia à l injection 1- Fayad et al, Radiographics 2007, 27(6), 1723-36

En fonction de la localisation Recherche médiastinite et porte d entrée dans les formes cervico-faciales. Recherche porte d entrée dans les formes abdomino-périnéales.

Microbiologie des dermohypodermites Essentiellement Streptococcus pyogènes du groupe A+++, mais aussi G, B et C. Plus rarement S. aureus et BGN type entérobactéries ou Pseudomonas aeruginosa

Antibiothérapie TTT de référence: Péni G 10 à 20 M UI en 4 à 6 perfusion par jour Amoxicilline par voie orale 3 à 4,5 g/j en 3 prises En cas d allergie: pristinamycine ou clindamycine. Vancomycine en cas d intolérance à ces TTT. Durée du TTT: 15 jours Conférence de consensus SPILF 2000

Microbiologie des fasciites nécrosantes Type I dite synergistique Polymicrobienne Association aéroanaérobie de S. pyogènes, S. aureus, entérobactéries, anaérobies. Type II Streptococcus pyogenes toxinogène Choc toxinique streptococcique

Choc toxinique streptococcique Streptococcus pyogenes porteur certains type de protéine M en particulier Type emm1 et emm3 Poduction superantigènes ( SpeA, SpeC ) se fixant simultanément sur MHC classe II et région V béta du récepteur des lymphocytes T Activation grand nombre cellules T responsables d une libération massive d IL et autres cytokines inflammatoires

Myonécroses Myosite nécrosante clostridienne ( gangrène gazeuse) Myonécrose à Streptococcus pyogenes responsable d un choc toxinique avec CIVD Pyomyosite ( 90% S. aureus), A. hydrophila ( eau douce), B. cereus ( macadam), Vibrio vulnificus ( eau de mer)

Antibiothérapies des formes nécrosantes Bases: spectre large couvrant les anaérobies et les Gram - - B lactamines dérivées des pénicillines et inhibiteur B lactamase - Ou Pénèmes - Associé à un aminoside Probabiliste de 1 intention: pipéracilline-tazobactam (16 g/j) ou carbapénème (1gx3/j) + Amikacine ( 20 mg/kg/j) ou Genta ( B. cereus) Strepto pyogenes (A) : Clamoxyl 6 g /J + Dalacine 1,8 g / J

Chirurgie Urgence: retard à la prise en charge chirurgicale augmente la mortalité (1) Excision large des tissus nécrosés Reprise +++ Dérivation digestive et/ou urinaire dans les formes abdomino-périnéales. 1- McHenry et al, Ann Surg 1995, 221: 558-65

Oxygénothérapie Hyperbare Recommandé en tant que thérapeutique adjuvante Séance de 90 min à 2,5 ATA 2 à 3 séances dans les 24 h puis 10 séances HAS, recommandations concernant l oxygénothérapie hyperbare, janvier 2007

Immunoglobuline intaveineuse Indiquée dans Choc toxinique Blocage in vitro activation cellules T (1) et réduction significative in vivo de la production IL 6 et TNF alpha (2) 1 g/kg J1 puis 0,5 g/kg J2 et J3 1- Kato et al, Allergol Intern 2007; 56: 439-444 2- Kaul et al, Clin Infect Dis 1999; 28: 800-07

A propos d un cas Femme 38 ans aux atcds obésité hypothyroidie et épilepsie Cs méd TTT pour douleur épaule et sein droit survenue alors qu elle portait son enfant Dg élongation mise /AINS

À 24h, admise aux Urgences après malaise A son entrée malade fébrile, tachycarde, hypotendue, oligurique avec apparition d un hématome rapidement extensif. Imagerie retrouve un hématome des parties molles et l absence de TVP Remplissage vasculaire et mise sous catécholamine

Transfert au CHU en réanimation Dg de Choc septique sur fasciite nécrosante et myosite Gd et petit pectoral, dentelé antérieur et grand dorsal droit. IOT, poursuite remplissage vasculaire, mise sous Tazocilline, Vancomycine, Gentamycine et transfert au bloc opératoire pour excision large des tissus nécrosés.

Evolution A son retour en réanimation, hémodiafiltration et mise sous Xygris Stabilisation de l état pdt 48 h Aggravation avec extension zone ischémique à l ensemble du tronc et aux membres inférieurs responsable d un Sd de loge nécessitant aponévrotomie bilatérale et amputation du membre inférieur gauche. Limitation thérapeutique décidée devant l étendue de l excision à réaliser.

Conclusion Différencier les formes nécrosantes des formes non nécrosantes Transfert rapide des formes nécrosantes après chirurgie vers centre de référence permettant la mise en place traitement adjuvant.