Journée décentralisée - Neurologie - Toulon, vendredi 11 septembre 2015 Sclérose en plaques (SEP) et aptitude médico-aéronautique M. MONTEIL 1, N. HUIBAN 2, F-X. BROCQ 1 A. FAIVRE 3, H. GOMMEAUX 1 1 CEMPN Toulon, 2 CPEMPN, HIA Percy 2 Service de neurologie HIA Sainte-Anne, Toulon
Les auteurs déclarent n avoir aucun conflit d intérêts pour cet exposé
Une vraie histoire de chasse (embarquée) Juin 2009, pilote Rafale Marine 32 ans (X puis Officier de Marine), blépharospasme paupière inférieure gauche, disparition totale en 15 jours de traitement par Rivotril arrêt immédiat des vols Juillet : IRM cérébrale et médullaire hypersignaux T2 avec rehaussement au gadolinium, rassemblant critères de Barkhof + synthèse intrathécale PL SEP automne 2009 : contrôle IRM (2 étages) = absence d évolution
déc 2009, CEMPN Toulon : explorations renforcées EEG avis psychiatrique batterie tests SLPA-Aéro : simulateur SEPIA et comparaison avec résultats antérieurs (sélection initiale) : absence altération efficience intellectuelle et capacités psychomotrices explorations fonctionnelles OPH : CV, PEV En accord avec neurologues militaires, APTE T 3 mois en double commande et hors avion d arme (en Etat-major, volera peu sur F 50) pour 4 neurologues : découverte fortuite (myokinie faciale gauche)
juin 2010, contrôles IRM = possible évolutivité au niveau cervical mais reste asymptomatique (différentiel car IRM + performante / 1?) mise en route traitement Interféron Bêta-1a (Avonex hebdomadaire) jugée avec recul «extrêmement prudente» mais en accord avec ce pilote désireux de mettre toutes les chances médicales de son côté arrêt total des vols revu octobre 2010, tolérance parfaite, reprise vols double commande suivi semestriel gestion identique jusqu en janvier 2013 où dérogations militaire et civile présentations retardées car pilote hors poste opérationnel (état-major) + avoir maximum recul évolutif
décision militaire : Inapte Pilote Groupe 1 (= Chasse embarquée), dérogation pour Groupe 2 (PatSiMar) sr 2 nd pilote à bord et suivi annuel en CEMPN décision civile (CMAC, mars 2013) : INAPTE classe 1 et 2, à représenter dans 1 an après expertise complète au CPEMPN! revu juin 2013 : asymptomatique, tolérance parfaite, part commander 2 ans flottille OM, accord Marine pour retour intermédiaire en métropole
revu juin 2014 : asymptomatique, tolérance parfaite, actualisation IRM Stabilité des hypersignaux cérébraux Régression des hypersignaux médullaires C3-4-5 Nouvel avis neuro VDG : 5 ans de suivi radio-clinique = aucune évolution péjorative au contraire Risque poussée minime = population générale «syndrome radiologiquement isolé» (Ø activité clinique) # SEP classique - vu aussi au CPEMPN pour aptitude civile décision Pôle médical : APTE Limitations : OML/OSL - TML 1 an - SIC 1 an - SSL AeMC Toulon 2015 : RDV 14/9 (prolongation durée Cdt), Cs neuro faite renvoi Pôle médical
Que retenir de cette histoire de chasse embarquée? Imagerie performante découvertes inopinées Obligation de les prendre en compte Difficultés de gérer les rares cas rapportés en aéro Discordances possibles dans les décisions d aptitude Obtenir compréhension/confiance du PN
La SEP en 2015
Maladie complexe auto-immune inflammatoire démyélinisante et dégénérative du SNC entrainant des lésions perturbations motrices, sensitives et cognitives + ou long terme handicap irréversible maladie de l adulte jeune, entre 25 et 35 ans
Répartition géographique inégale, gradient N/S Sex-ratio 1 H / 2 F France : prévalence intermédiaire/forte, 80 000 personnes ¾ femmes, progression 2 000 nouveaux cas/an Etiologie : encore mal connue facteurs endogènes (génétique) + environnement 11
Manifestations initiales = motrices, sensitives ou sensorielles préférentielles = cérébelleuses, névrite optique, pyramidale Évolution initiale par poussées dans 85 % des cas versus progressive d emblée (15 %, début > 40 ans) 3 évolutions : rémittente régressive, rémittente progressive et progressive continue positif = dissémination temporelle + spatiale lésions = IRM [et étude liquide cérébro-spinal (LCS)]
Traitement * poussée = corticoïdes en perfusion * fond = 1 intention : immunomodulateurs (interféron bêta, acétate de glatiramère ) formes agressives/résistantes : immunosuppresseurs (natalizumab, fingolimod, mitoxantrone + hors AMM azathioprine, méthotrexate, cyclophosphamide ) symptomatique # spasticité, fatigue, dépression, douleurs hors aéro
Les objectifs des traitements de fond Réduire la fréquence des poussées - critère principal - obtenir une rémission clinico-radiologique Eviter le handicap à long terme
La révolution des traitements de fond Avant, peu de choix - Formes modérées = Interferons et acétate de glatiramère (Copaxone) - Formes graves = mitoxantrone (Elsep) En 5 ans, véritable arsenal thérapeutique - classe 1 : interferons, acétate de glatiramère (Copaxone), teriflunomide (Aubagio), diméthyle fumarate (Tecfidera) - classe 2 : fingolimod (Gilenya) - classe 3 : natalizamab (Tysabri), alemtuzumab (Lemtrada), mitoxantrone (Elsep) Nombreuses autres molécules essais/à venir 15
Les problèmes Avant - efficacité modérée - injections - acétate de glatiramère : intolérance cutanée - mitoxantrone (= anthracyclines) : leucémie aiguë, leucopénie et défaillance cardiaque Maintenant - beaucoup de traitements oraux, très efficaces - nouveaux pb de tolérance, notamment infection grave - natalizumab : leucoencéphalite multifocale progressive - fingolimod : complications cardiaques (bradycardie, BAV : monitoring # effet 1 prise) 16
La gestion des biothérapies - molécules nouvelles («encore» ou totalement) - interféron bêta mieux connu, plus de recul (20 ans) ex. interféron bêta-1a ½ vie courte : 10 H conservation au froid IM hebdomadaire 17
Tolérance interféron connu : syndrome pseudo-grippal, perturbations hématologiques (pancytopénie, thrombopénie, leucopénie ), troubles digestifs, maladies auto-immunes, fonctions hépatique (cytolyse, hépatite), rénale, endocrinienne (glycémie) clinique : confiance/relation pilote, IT introduction, gestion / vols Y penser * pb thymiques (dépression) * OPH : modifications oculaires = rétinopathies : hémorragies rétiniennes, nodules cotonneux, œdèmes papillaires, thrombose artère ou veine rétinienne, névrites optiques * surveillance thyroïde (TSH + Ac) même non formellement recommandée surveillance bio de sécurité NFS + créat + transaminases
Les problèmes en aéronautique
Maladie extrêmement hétérogène d un patient à un autre Variabilités des symptômes y penser devant trouble neuro-musculaire, oculomoteur, équilibre difficile : pas de test spécifique, faisceau arguments Incertitudes évolutives Pronostic individuel évolutif imprévisible Gestion d une telle affection à cet âge Traitement notamment biothérapie
La question centrale Risques incapacité (subtile) en vol? atteinte cognitive, troubles moteurs, retentissement psychologique, fatigabilité symptômes jamais brutaux, mais sur plusieurs heures et gênants en 12-24H (délai usuel même + long) Quid du rôle du stress lié à l environnement aéronautique sur l évolution naturelle de la maladie? influence négative plus par durée que par intensité?
Selon la littérature en population générale atteinte cognitive 40 à 60 % des cas non corrélée avec déficit physique retrouvée dans toutes les formes rôle de la fatigue et des traitements problème des tests = accessibilité, comparaison (PN = pop spécifique, idéal antériorité chez le PN touché) fatigue 50 à 100 % des cas retrouvée à tous les stades rôle des traitements dépression 50 % des cas non corrélée avec déficit physique
La littérature aéro Seule expérience retrouvée = Israeli Air Force (3 cas) Multiple sclerosis in Israeli military aviators H. Zinger, O. Barel, R. Levite, E. Barenboim Communication au 57 ICASM, Zagreb, Croatie, le 8 septembre 2009 Return to flight with Multiple sclerosis : aeromedical considerations H. Zinger, A. Grossman, A. Assa, O. Barel, E. Barenboim, R. Levite Aviat Space Environ Med. 2011 jan;82(1):61-64
Les «bons cas»? Facteurs évolutifs prédictifs - jeune âge de début - mode rémittent - long délai entre les 2 premières poussées Durée du recul/suivi clinico-radiographique Absence d handicap Formes asymptomatiques de découverte inopinée «syndrome radiologiquement isolé» Bref notre pilote!
Conditions/cadre/limitations Cas par cas Rémission depuis au moins 6 mois Avis neurologique Evaluation neurocognitive Double commande Suivi neurologique et médico-aéro / 3 à 6 mois IRM à 1 an voire tous les ans Décision collégiale et/ou Autorité
Que retenir?
rare mais y penser d où grande difficulté pour expert aéro savoir se faire aider bon sens clinique + aéro + humain valorisant et créateur lien fort avec PN
Merci pour votre a0en1on! Questions?