Chapitre 5 Séries trigonométriques I. Introduction et définitions Dans ce chapitre, nous verrons une autre casse importante de séries de fonctions, es séries trigonométriques. La propriété essentiee de ces séries est a prise en compte, dans a décomposition d une fonction périodique en somme infinie de fonctions simpes, du caractère de périodicité. Prenons par exempe a fonction x sin x. Son déveoppement en série entière est ( ) n x n+ n= (n + )! et ses approximations à n importe que ordre n qui sont des fonctions poynomiaes ne sont pas périodiques et encore moins π-périodiques. Dans un premier temps, nous étudierons e cas de fonctions π-périodiques. Parmi ces fonctions, es pus simpes sont évidemment de a forme x cos(n x) et x sin(n x) où x R et n N. Les premières sont paires et es secondes, impaires. Ensuite, nous passerons au cas des fonctions T -périodiques où T est un nombre rée positif queconque. Définition 5.. On appee série trigonométrique une série de fonctions u n (x) dont e terme généra u n (x) est de a forme u (x) = a et n N, u n (x) = a n cos(n x) + b n sin(n x). (I.) Convention On conviendra d écrire es sommes partiees d une série trigonométrique (I.) sous a forme où on pose b =. a n + (a k cos(k x) + b k sin(k x)). k= Définition 5.. Une fonction f : R C, π-périodique, est déveoppabe en série trigonométrique si ee est imite simpe (ou somme) d une série trigonométrique. Exempes
. Les fonctions sin et cos sont déveoppabes en séries trigonométriques (déterminer es coefficients a n et b n correspondants). cos(n x). La série de terme généra est trigonométrique. n 3. Représenter es graphes des fonctions π-périodiques f, g : R R définies par f (x) = { x si x [ π,[, x si x [,π[, { x si x [ π,[, g (x) = si x [,π[, Autre écriture des séries trigonométriques Après substitution cos(n x) = ei n x + e i n x, sin(n x) = ei n x e i n x, i e terme généra (I.) devient α n e i n x + β n e i n x où α n = a n i b n somme partiee a p + (a n cos(n x) + b n sin(n x)) s écrit aussi (écriture exponentiee compexe ) p n= p c n e i n x, et β n = a n + i b n. La où, pour n N, es coefficients c n sont égaux à α n et es coefficients c n à β n. I s ensuit que c = a. Comme dans e cas généra des séries de fonctions, on rencontre a notation (imite) a + (a n cos(n x) + b n sin(n x)), ou n= c n e i n x pour désigner es séries trigonométriques. Convention : convenons de noter ces derniers objets n Zc n e i n x. I s agit de suites de fonctions de a forme p Exercices p n= p c n e i n x où p N.. Écrire es coefficients c n des séries trigonométriques cos(n x) n et sin(n x) n p. Inversement, écrire es coefficients a n et b n des séries trigonométriques : et p n= p e i n x n +. n= p ne i n x n +
II. Convergence des séries trigonométriques La notion de convergence peut, bien-sûr, s appiquer aux séries trigonométriques écrites seon a définition. Ee correspond, sous écriture exponentiee compexe, à a définition suivante : Définition 5.3. Une série trigonométrique n Zc n e i n x est convergente sur une partie D de R s i existe une fonction f : D C qui vérifie assertion : x D,, ε >, N (ε, x) N; p > N (ε, x) = On posera f (x) = c n e i n x p n= p c n e i n x f (x) < ε. Exercice. Écrire de façon anaogue es définitions de convergence uniforme, absoue et normae d une série trigonométrique c n e i n x. n= Une série trigonométrique est une série de fonctions particuières définies sur tout R. Par conséquent, tous es théorèmes et propositions vus dans e chapitre des séries de fonctions restent vrais. I en résute a proposition suivante. Proposition. Si es séries numériques [ a n ] et [ b n ] convergent, aors a série trigonométrique [a n cos(n x) + b n sin(n x)] converge normaement (donc uniformément) et sa somme est une fonction continue. DÉMONSTRATION- Exercice. Exempe cos(n x) + sin(n x) La somme de a série [ ] existe et est continue. n En fait, grâce au théorème d Abe (appiqué à a série trigonométrique en écriture compexe) et à a majoration du reste, nous avons respectivement es théorèmes suivants. Théorème. Si es suites de nombres réees (a n ) et (b n ) sont positives, décroissantes et convergentes vers, aors a série trigonométrique de terme généra (a n cos(n x) + b n sin(n x)) converge sur ensembe R \ {kπ;k Z}. DÉMONSTRATION- Appiquer e coroaire du théorème d Abe. Théorème 3. Si es suites de nombres rées positifs (a n ) et (b n ) sont décroissantes et convergent vers, aors, a série trigonométrique de terme généra (a n cos(n x) + b n sin(n x)) converge uniformément sur tout intervae de type [kπ + δ,(k + )π δ] où k Z. DÉMONSTRATION- Admis
II. Propriétés de a fonction somme De a convergence uniforme étabie dans e théorème précédent, on déduit e théorème suivant. Théorème 4. La somme d une série trigonométrique est π- périodique et continue sur R \ {kπ;k Z}. DÉMONSTRATION- Admis Théorème 5. Si a série [a n cos(n x) + b n sin(n x)] converge vers une fonction f sur un intervae I et si a série dérivée [na n cos(n x) nb n sin(n x)] est uniformément convergente sur I, aors cette dernière converge vers une fonction g tee que f = g. DÉMONSTRATION- Admis Exercice Trouver a somme de a série trigonométrique de terme généra exponentiee compexe) n cos(n x) n (utiiser écriture II. Dérivation et intégration d une série trigonométrique Théorème 6. Si a série n= n ( c n + c n ) est convergente, aors a série f (x) = c + (c n e i n x + c n e i n x ) est convergente. Sa somme f (x) est continument dérivabe et sa dérivée f s obtient par dérivation terme à terme : f (x) = DÉMONSTRATION- En cours (c n e i n x + c n e i n x ) = i n(c n e i n x c n e i n x ). Coroaire 7. Si a série n= c n e i n x ) est continue, et a série ( c n + c n ) est convergente, aors a fonction f (x) = c x + ( c i e i x + c i e i x ) +... + ( c n n i ei n x + c n n i e i n x ) +... = est une primitive de f (x). DÉMONSTRATION- I suffit d appiquer e théorème précédent à a série n= ( c n n i ei n x + c n n i e i n x ). n= n= (c n e i n x + ( c n n i ei n x + c n n i e i n x )
III. Coefficients et série de Fourier Jusqu à présent, nous nous sommes intéressés à étude des séries trigonométriques dont on connait au départ eurs coefficients. Dans ce paragraphe, nous nous interesserons au probème inverse. On se donne une fonction f : R C, π- périodique. Sous quees conditions suppémentaires admet-ee, dans un domaine D de R (à préciser), un déveoppement en série trigonométrique et dans e cas où un te déveoppement existe, comment déterminer D ainsi que es coefficients a n et b n correspondants? III. Cas des séries trigonométrique L origine des séries trigonométriques est a résoution de ce probème inverse (voir a note historique) et, pus précisémment, dans a décomposition d une soution de équation des cordes vibrantes en somme infinie de fonctions périodiques. Pusieurs réponses ont été données. La pus compète (dans e cadre de notre unité d enseignement) est cee qui est contenue dans e théorème de Dirichet-Jordan. Avant d énoncer ce théorème, nous avons besoin de queques définitions et notations. Définition 5.4. On dit qu une fonction f : R C est continue par morceaux si, sur tout intervae borné, ee ne possède qu un nombre fini de points de discontinuité (et ee est continue aieurs). Définition 5.5. On dit qu une fonction f : R C est continûment dérivabe par morceaux si sur tout intervae borné, à exception d un nombre fini de points, ee est dérivabe et sa dérivée est continue. Exempe La fonction u : R R définie par u(x) = x x est continûment dérivabe par morceaux puisqu ee est sur R \ Z et que intersection de Z avec tout intervae borné est fini. Notations. On note E espace vectorie (à vérifier) des fonctions définies sur R, π-périodiques, continûment dérivabes par morceaux et possédant en tout point de discontinuité a, des imites à gauche et à droite.. On note f (a + ) et f (a ) es imites à droite et à gauche de f en a. I est cair qu une fonction est continue si, et seuement si, ses imites à gauche et à droite en tout point sont égaes. Exempes. La fonction v : R R, π-périodique, définie sur [ π, π[ par v(x) = x est un éément de E.. La fonction w : R R, π-périodique, définie sur [,π[ par f () = et f (x) = sin x si x ],π[ est continûment dérivabe par morceaux, mais n appartient pas a E.
Pour i, j N, posons δ i,j = si i j et δ i,i = (c est e symboe de Kronecker). Pour tous i, j N, un petit cacu montre que on a : π cos(i x) cos(j x)d x = δ i,j, π Si on avait une reation du type f (x) = a + cos(i x) sin(j x)d x =, π sin(i x) sin(j x)d x = δ i,j. (a n cos(n x) + b n sin(n x)) aors es reations ci-dessus donnent une idée de comment cacuer es coefficients a n et b n («sous de bonnes hypothèses»). Définition 5.6. On appee coefficients de Fourier d une fonction f E, es nombres rées a n et b n définis par a n = π f (x)cos(n x)d x, b n = π La série trigonométrique définie par es sommes partiees f (x) sin(n x)d x. est appeée série de Fourier de f. Exercices S p (f ) = a + p (a n cos(n x) + b n sin(n x)). Soit u un éément de E. Montrer que pour tout nombre rée α, on a : et en particuier, u(x)d x = u(x)d x = α+π α π π u(x)d x u(x)d x.. Montrer que es coefficients c n de a série de Fourier (deuxième écriture n Zc n e i n x ) associée à a fonction π-périodique f ont pour expressions : c n = π f (x)e i n x d x Le ien entre a fonction f et sa série de Fourier est étabi par e théorème suivant. Théorème 8. (théorème de Dirichet-Jordan) Soit f E. Aors, a série de Fourier associée à f converge ponctueement vers a fonction g, définie sur R par DÉMONSTRATION- Admis g (x) = f (x+ ) + f (x ).
Coroaire 9. Si a fonction f E est continue en a, sa série de Fourier converge ponctueement en a vers f (a). Grâce à ce théorème, on peut voir que si f est paire, tous es coefficients b n sont nus et si f est impaire, es coefficients a n, à sont nus (a fonction de départ f peut ne pas s annuer en ). Exempes. Soit f a fonction π-périodique définie par f (x) = α si x [,π[ et f (x) = β si x [ π,[. La série de Fourier [u n ] associée à f est définie par α β a = α + β, et n N, a n =, b n =, b n+ = (n + )π. Que devient cette série orsque α = β?. Soit g a fonction π-périodique définie par f (x) = αx si x [,π[ et f (x) = βx si x [ π,[. La série de Fourier [v n ] associée à g est définie par et a = α β β α π + (n + ) π, n N β α, a n =, a n+ = (n + ) π, b n = ( )n (α + β). n III. Le cas compexe Théorème. Soit f une fonction compexe, périodique de période π. Si f (x) = c + n= (c n e i n x + c n e i n x ) est a somme d une série trigonométrique, et si cette série converge uniformément, on a pour tout k Z, c k = f (x)e i kx d x. π On note parfois f ˆ (k) = c k ce k-ième coefficient de Fourier. DÉMONSTRATION- Admis On a a correspondance suivante pour es coefficients de Fourier dans écriture réee ou compexe : a = c = f (x)d x π a n = c n + c n = f (x)(e i n x + e i n x )d x = f (x) cos(n x)d x π π b n = i (c n c n ) = f (x)(e i n x e i n x )d x = f (x) sin(n x)d x. π π
III.3 Cas des fonctions T -périodiques Comme pour es fonctions π-périodiques, es fonctions T -périodiques de base sont x cos( πx ) et x sin(πx ). Ees sont indéfiniment dérivabes. La première est paire et a seconde est impaire. T T Tous es résutats et propriétés étabis jusqu ici peuvent s appiquer aux fonctions T -périodiques. Les coefficients de Fourier deviennent dans ce cas : a n = T T f (x)cos( nπ T x)d x, b n = T T f (x) sin( nπ x)d x, T c n = f (x)e nπi T x d x. T Exercice Montrer que es fonctions définies sur R par : T x x x ; x ( ) x sont périodiques, de périodes respectivement égaes à et. Cacuer eurs coefficients de Fourier. Exempe : Considérons a fonction, définie sur R, périodique de période π, définie par π pour x ] π 4, π [; f (x) = π pour x ] π 4, 3π [; pour x = π ou x = π. Etudions a série de Fourier de f. Cette fonction vérifie es condition du théorème et pour tout x R, f (x+) + f (x ) f (x) =. Donc, on a pour tout x R, f (x) = n= Cacuons es coefficients de Fourier de f. On a (c n e i n x + c n e i n x ). c n = π 3π π f (x)e i n x d x = 8 π π e i n x d x 8 3π π e i n x d x. Pour n =, on a c =. Pour n, on a par intégration et donc c n = 8 e i n π e i n π i n 8 e i n 3π e i n π i n 8i nc n = e i n π e i n π = (i sin(n π ).
I s ensuit que c n = n sin(n π ). Si n est pair, on a c n = et si n = k + est impair, on a c n = n ( )k. Comme f est paire, on obtient, pour tout x R, f (x) = n= n cos(n + )x ( ). n + En posant x =, on obtient π 4 = ( ) n n= n +. IV. IV. Interprétation géométrique Produit scaaire sur un espace vectorie E On sait que dans espace eucidien R 3, a notion de produit scaaire sert à définir orthogonaité de deux vecteurs et à étabir des reations métriques dans espace comme - e théorème de Pythagore, - et expression des coordonnées d un vecteur v par rapport à une base (e,e,e 3 ) comme produits scaaires de v et des ééments e i. En fait, ces reations métriques peuvent se retrouver dans n importe que espace vectorie (même de dimension infinie) pourvu que on puisse y définir un produit scaaire. Rappeons qu une appication ϕ : E E C définit un produit scaaire dans e C- espace vectorie E si c est est une forme biinéaire, symétrique et définie positive :. x, x, y E, λ, µ C, ϕ(λx + µx, y) = λϕ(x, y) + µϕ(x, y) ; x, y, y E, x λ, µ C, ϕ(x,λy + µy ) = λϕ(x, y ) + µϕ(x, y ),. x, y E, ϕ(x, y) = ϕ(y, x), 3. x, E \ {}, ϕ(x, x) >. On note souvent e produit scaaire,. Le nombre x, x = x est a ongueur (norme) de x. Exercice Montrer que si e produit scaaire de deux vecteurs u et v est nu, aors u + v = u + v (théorème de Pythagore). Produits scaaires. La forme biinéaire dans R 3, définie par (x, y) x y + x y + x 3 y 3 définit e produit scaaire eucidien cassique.. a forme biinéaire (f, g ) vectorie E. Ce deuxième exempe est fondamenta pour a suite. f (x)g (x)d x définit un produit scaaire sur e C-espace
IV. Égaité de Parseva Pour p, q N, posons δ p,q = si p q et δ p,p = (c est e symboe de Kronecker). Pour tous p, q N, rappeons es reations d orthogonaité vues pus haut : cos(p x) sin(q x)d x =, cos(p x) cos(q x)d x = δ p,q, sin(p x) sin(q x)d x = δ p,q. π π Ces reations montrent que a famie de fonctions { sin(p x), cos(p x); p N} est orthonormae. Est-ee une base de E? Nous détaierons a réponse en cours. Au sens du produit scaaire défini sur E, a norme (ou ongueur) d un éément f de E est égae à f = f (x) f (x)d x. Théorème (Égaité de Parseva). Soit f E. Notons S n (f ) a somme partiee d ordre n de a série de Fourier (en exponentiee) : S n (f ) = n k= n c k e i kx.. La suite (S n (f )) converge en moyenne quadratique vers f, c est à dire :. k= c k = f (t) d t = f. π im f (t) S n f (t) d t =. n Si e déveoppement en série de Fourier vient de a décomposition d un signa, es coefficients c k sont es contributions des harmoniques. L égaité de Parseva s interprète donc en disant que énergie totae du signa s obtient en sommant es contributions des différentes harmoniques. Dans e cas d un déveoppement rée, égaité de Parseva devient V. Note historique f = 4 a + (a n + b n ). Le point de départ était équation aux cordes vibrantes (cas idéa) u t = c u t pour aquee D Aembert (77-783) trouva des soutions (en 747) de a forme u(x, t) = f (ct + x) f (ct x) où f est une fonction queconque périodique, de période ( est a ongueur de a corde et c, a vitesse de a a propagation de onde).
u(x,t) corde x La courbe ci-dessus représente graphiquement a position initiae de a corde à instant t =. Pour un x donné, u(x,.) est une fonction périodique en temps t. En 753, Danie Bernouii (7-78) entreprit de considérer des fonctions f de a forme ( nπx ) ( nπct sin cos ou encore ( nπ(ct + x) ) ( nπ(ct x) ) sin sin. Sachant que es fonctions sin et cos sont es fonctions périodiques es pus simpes, i eut idée d exprimer a fonction f de a soution de D Aembert sous forme d une série trigonométrique f (u) = a + [ a n cos ( nπu ) ( nπu )] + b n sin ) = a + nπ(u β) α n sin. Les termes de cette denière série désignent es harmoniques. En prenant cette fonction comme soution de D Aembert et ensuite en substituant t =, on obtient a condition initiae qui doit être une fonction périodique en x. Se pose aors a question : comment écrire une fonction queconque comme somme infinie de fonctions sinus d arcs mutipes? Cette question fut résoue par J. Fourier (77-837) en 87, en étudiant équation de a chaeur. Les séries trigonométriques sont aussi utiisées en astronomie, acoustique, optique et bien d autres domaines.