Macroéconomie. Olivier Blanchard & Daniel Cohen. Chapitre 6 Le modèle IS/LM. 5 e édition

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Transcription:

Macroéconomie 5 e édition Olivier Blanchard & Daniel Cohen Chapitre 6 Le modèle IS/LM Préparé par : Fernando Quijano et Yvonn Quijano Adaptation : C. Nouveau

Le modèle IS/LM Le modèle IS/LM correspond à l extension proposée par Hicks du livre de Keynes, La Théorie générale de l emploi, de l intérêt et de la monnaie (1936). Hicks a formalisé en 1937 ce qu il considérait comme l une des contributions principales de Keynes : l étude conjointe des marchés financiers et du marché des biens. Malgré sa simplicité, le modèle IS/LM est encore pour de nombreux économistes un modèle essentiel qui saisit une grande partie de ce qui se passe à court terme dans l économie.

6.1. La demande globale En économie fermée, la demande totale de biens est la somme de la consommation des ménages, de l investissement des ménages et des entreprises, et des dépenses publiques.

Sur le réalisme de l hypothèse d économie fermée

La consommation (C) Le principal déterminant de la demande globale est la consommation des ménages. Le ménage doit arbitrer entre la consommation du bien agrégé aujourd hui et la consommation du bien dans le futur, c est-à-dire entre la consommation et l épargne. La fonction de consommation peut s écrire : C = C (y D, i) ( +, ) y D est le revenu disponible des ménages, c est-à-dire le revenu qui leur reste après qu ils ont payé les impôts et perçu les transferts publics. i est le taux d intérêt.

L investissement (I) L investissement, I, mesure les dépenses brutes des entreprises et des ménages pour accroître leur stock de capital (productif ou immobilier). Pour les entreprises, l investissement dépend : du niveau des ventes courantes et prévues ; du taux d intérêt. Supposons qu une entreprise doive s endetter pour acquérir une nouvelle machine. Plus le taux d intérêt est élevé, moins l entreprise sera susceptible d emprunter et d acheter la machine. I = I( Y, i) ( +, )

Les dépenses gouvernementales (G) Les dépenses gouvernementales, G, sont la troisième composante de la demande globale. Avec les impôts, T, elles représentent les variables de la politique budgétaire (les choix d impôts et de dépenses du gouvernement). Nous prendrons ces variables G et T comme exogènes, pour deux raisons : Le gouvernement ne se comporte pas avec la même régularité que les ménages ou les entreprises, ce qui rend problématique de postuler une relation de «comportement» de l État. Une des tâches du macroéconomiste consiste à conseiller le gouvernement sur ses décisions de dépenses et d impôts.

La demande globale (Z) En ajoutant C, I et G, on trouve une demande globale sur le marché des biens qui s écrit : Z(Y-T,i,G) = Z = C(Y-T,i) + I(Y,i) + G Cette relation de demande globale saisit les effets de Y, T, i et G sur la dépense totale dans l économie. Elle dépend positivement du revenu (C et I augmentent avec Y), et négativement du taux d intérêt (C et I baissent en cas de hausse des taux).

6.2. L équilibre sur le marché des biens (IS) Si l on note Q la production totale vendue par les entreprises et Z la demande globale des agents, il faut nécessairement que Q = Z. De plus,l offre vendue Q est nécessairement égale au revenu Y des agents, puisque la production est la source des revenus distribués. L égalité entre offre et demande s écrit donc : Y = C(Y-T,i) + I(Y,i) + G

L équilibre sur le marché des biens (IS) Y = C(Y-T,i) + I(Y,i) + G On note S l épargne des ménages : S(Y-T,i) = Y - T - C(Y-T,i) La relation de demande globale peut alors se réécrire : S(Y-T,i) = I(Y,i) + G T L épargne doit être égale à la somme de l investissement et du déficit public : l appellation IS provient de cette égalité entre investissement et épargne (saving).

L équilibre sur le marché des biens (IS) Figure 6.1 Les effets d une hausse du taux d intérêt sur la production Une hausse du taux d intérêt fait baisser la demande de biens quel que soit le niveau de production. La courbe ZZ représente la demande en fonction de la production pour une valeur donnée du taux d intérêt i. L équilibre est atteint au point où la demande est égale à la production (point A). Une hausse du taux d intérêt fait baisser la demande de biens quel que soit le niveau de production.

L équilibre sur le marché des biens (IS) Une hausse du taux d intérêt entraîne une baisse de l investissement. Une baisse de l investissement entraîne une baisse de la production, qui à son tour entraîne une baisse de la consommation et de l investissement. En d autres termes, la baisse initiale de l investissement entraîne une baisse plus importante de la production : c est l effet multiplicateur.

L équilibre sur le marché des biens (IS) Figure 6.2 Construction de la courbe IS L équilibre sur le marché des biens implique que la production est une fonction décroissante du taux d intérêt. La courbe IS est décroissante.

Déplacements de la courbe IS Nous avons construit la courbe IS pour des valeurs données des impôts T et des dépenses publiques G. Mais tout changement de T ou de G va déplacer la courbe IS. Par exemple, considérons une hausse de T. Pour un taux d intérêt i donné, la consommation décroît, entraînant une baisse de la demande sur le marché des biens et, par l effet multiplicateur, une baisse du niveau de production d équilibre. La courbe IS se déplace donc vers la gauche : quel que soit le taux d intérêt, le niveau de production d équilibre est plus faible qu auparavant.

Déplacements de la courbe IS Figure 6.3 Déplacements de la courbe IS Une hausse des impôts entraîne un déplacement de la courbe IS vers la gauche.

Déplacements de la courbe IS Plus généralement : Tout facteur qui, à taux d intérêt donné, fait baisser le niveau de production d équilibre entraîne un déplacement de la courbe IS vers la gauche : hausse des impôts T, baisse des dépenses publiques G, baisse de la confiance des ménages. Au contraire, une baisse des impôts, une hausse des dépenses publiques ou une hausse de la confiance des ménages entraînent un déplacement de la courbe IS vers la droite.

Déplacements de la courbe IS Pour résumer : L équilibre sur le marché des biens implique que la production est une fonction décroissante du taux d intérêt. Cette relation est représentée par la courbe décroissante IS. Tout facteur qui diminue la demande de biens pour un taux d intérêt donné déplace la courbe IS vers la gauche. Tout facteur qui accroît la demande de biens pour un taux d intérêt donné déplace la courbe IS vers la droite.

6.3. Les marchés financiers et la relation LM Pour étudier le taux d intérêt, on ajoute l équation d équilibre entre offre et demande de monnaie : M = PYL(i) (relation LM) M = masse monétaire nominale PYL(i) = demande de monnaie PY = revenu nominal i = taux d intérêt Une hausse du revenu nominal augmente la demande de monnaie. Une hausse du taux d intérêt réduit la demande de monnaie.

Les marchés financiers et la relation LM M = PYL(i) On suppose : que la Banque centrale contrôle directement M ; que le niveau des prix P est fixe à court terme (cela est une des hypothèses centrales du modèle IS/LM). Dans ce cas, l offre de monnaie va directement influencer le niveau des taux d intérêt (cf. chapitre 5). La relation LM est la relation entre le taux d intérêt et le revenu qu implique cette équation d équilibre entre offre et demande de monnaie. Pour la construire, regardons d abord les effets d une hausse du revenu sur le taux d intérêt.

Les marchés financiers et la relation LM Figure 6.4 Les effets d une hausse du revenu sur le taux d intérêt Une hausse du revenu entraîne, à taux d intérêt donné, une hausse de la demande de monnaie. L offre de monnaie étant fixe, cela conduit à une hausse du taux d intérêt d équilibre.

Les marchés financiers et la relation LM Figure 6.5 Construction de la courbe LM L équilibre sur les marchés financiers implique que le taux d intérêt est une fonction croissante du revenu. La courbe LM est croissante.

Déplacements de la courbe LM Un changement de M/P, qu il provienne d une modification du niveau nominal de la masse monétaire M ou d une modification du niveau des prix P, va déplacer la courbe LM. Supposons par exemple une augmentation de l offre nominale de monnaie, de M à M. Cette hausse de la masse monétaire entraîne, pour un revenu Y donné, une baisse du taux d intérêt d équilibre. La courbe LM se déplace vers le bas.

Déplacements de la courbe LM Figure 6.6 Déplacements de la courbe LM Une hausse de la masse monétaire induit un déplacement de LM vers le bas.

Déplacements de la courbe LM Pour résumer : L équilibre sur les marchés financiers implique que le taux d intérêt est une fonction croissante du revenu. Cette relation est représentée par la courbe croissante LM. Un accroissement de la masse monétaire entraîne un déplacement de LM vers le bas. Une baisse de la masse monétaire entraîne un déplacement de LM vers le haut.

6.4. Le modèle IS/LM Figure 6.7 Le modèle IS/LM L équilibre sur le marché des biens implique que la production est une fonction décroissante du taux d intérêt. L équilibre sur les marchés financiers implique que le taux d intérêt est une fonction croissante de la production. Le seul point auquel le marché des biens et les marchés financiers sont simultanément en équilibre est le point A. IS : Y = C(Y-T) + I (Y,i) + G LM : M = PYL(i)

Politique budgétaire, activité et taux d intérêt Une hausse du déficit budgétaire, qu elle soit due à une hausse des dépenses ou à une baisse des impôts, est appelée une expansion budgétaire. Une contraction budgétaire, ou consolidation budgétaire, est une politique qui réduit le déficit budgétaire. Une telle politique affecte la courbe IS, mais pas la courbe LM. Par exemple, considérons une hausse des impôts, les dépenses publiques étant inchangées. La courbe IS se déplace vers la gauche.

Politique budgétaire, activité et taux d intérêt Figure 6.8 Les effets d une hausse des impôts Une hausse des impôts déplace IS vers la gauche et entraîne une baisse de la production et du taux d intérêt. L économie se déplace le long de la courbe LM.

Politique budgétaire, activité et taux d intérêt La hausse des impôts diminue le revenu disponible des ménages, qui de ce fait consomment moins. Par l effet du multiplicateur, on assiste à une baisse de la production et du revenu global. La baisse du revenu global fait baisser la demande de monnaie, ce qui induit une baisse du taux d intérêt. La baisse du taux d intérêt réduit, mais ne compense pas tout à fait, l effet de la hausse des impôts sur la demande de biens. Au total : G ne bouge pas ; C diminue ; l effet sur I est ambigu (baisse de i et baisse de Y) ; Y diminue.

Gros plan La réduction des déficits est-elle bonne ou mauvaise pour l investissement? Investissement = épargne privée + épargne publique I = S + (T G) Peut-on en déduire que réduire le déficit laisse plus d épargne disponible pour financer l investissement, qui augmente donc? Cela n est vrai que si l épargne privée est constante (c est le cas dans les modèles de croissance analyse du long terme-, où l on suppose que l économie tourne au plein de ses capacités de production). Si la politique budgétaire restrictive fait baisser l épargne privée (en raison de la baisse du revenu global), elle peut entraîner une baisse de l investissement.

Politique monétaire, activité et taux d intérêt Une hausse de l offre de monnaie est appelée une expansion monétaire. Une baisse de l offre de monnaie est appelée une contraction monétaire. La politique monétaire entraîne un déplacement de la courbe LM, mais pas de la courbe IS. Par exemple, supposons que la Banque centrale augmente la masse monétaire M par une opération d open market. La courbe LM se déplace vers le bas.

Politique monétaire, activité et taux d intérêt Figure 6.9 Les effets d une expansion monétaire Une expansion monétaire conduit à une production plus forte et à un taux d intérêt plus faible.

Politique monétaire, activité et taux d intérêt La hausse de la masse monétaire entraîne une baisse du taux d intérêt i. La baisse du taux d intérêt entraîne une hausse de l investissement et, par l effet multiplicateur, une hausse de la demande et de la production. Au total : C augmente (hausse de Y et baisse de i) ; I augmente (hausse de Y et baisse de i) ; G ne bouge pas ; Y augmente.

Pour résumer : Le modèle IS/LM on doit se souvenir de la méthode utilisée pour étudier les effets d un changement de politique économique sur l activité et le taux d intérêt ; le tableau ci-dessous résume les effets étudiés.

6.5. Le policy-mix La combinaison des politiques monétaire et budgétaire est appelée le policy-mix. Parfois, les politiques monétaire et budgétaire sont utilisées dans le même but. Aux États-Unis, dans les années 1990, les politiques monétaire et budgétaire ont permis de soutenir à la fois une réduction des déficits et une hausse du produit (policy-mix coopératif Clinton- Greenspan). Le policy-mix peut aussi résulter d un désaccord entre le gouvernement (qui dirige la politique budgétaire) et la Banque centrale (en charge de la politique monétaire). Si la Banque centrale désapprouve une expansion budgétaire, elle peut opérer une contraction monétaire pour annuler certains effets de la politique budgétaire sur l activité du pays: policy-mix non coopératif.

Gros plan Le policy- mix Clinton-Greenspan Lorsque Clinton a été élu président des États-Unis en 1992, le déficit budgétaire était très élevé (4,5 % du PIB), et de nombreux économistes pensaient que la récession de 1990-1991 n était pas terminée. Par un accord implicite avec le président de la Fed, Greenspan, Clinton a proposé un plan de réduction du déficit, et la Fed a réduit ses taux d intérêt.

Gros plan Le policy- mix Clinton-Greenspan La courbe IS s est déplacée vers la gauche, et la courbe LM, vers le bas. Il en a résulté une croissance soutenue de la production et une réduction du déficit. Figure 1. Réduction des déficits et expansion monétaire Une juste combinaison d une contraction budgétaire et d une expansion monétaire peut permettre de réduire les déficits, sans effets négatifs sur la production.

Gros plan Le policy- mix Clinton-Greenspan Tableau 1. Variables macroéconomiques pour les États-Unis, 1991-1998 Attention: d autres facteurs peuvent également expliquer la forte croissance de la production aux États-Unis entre 1992 et 1998 : à partir de 1995 notamment, la confiance des consommateurs et des entreprises et un marché financier euphorique ont conduit à des déplacements favorables de la courbe IS.

Gros plan La réunification allemande et la lutte monétaro-budgétaire L un des effets de la réunification a été d augmenter le pouvoir d achat à l Est, d accroître les dépenses publiques, pour construire de nouvelles infrastructures, verser des allocations chômage aux employés perdant leur emploi et subventionner les entreprises des Länder de l Est jusqu à ce qu elles deviennent compétitives. Devant cette évolution, la Bundesbank eut peur que la croissance soit trop forte et crée de l inflation. Elle décida donc de freiner la croissance, en menant une politique monétaire restrictive. Ce policy-mix a eu pour conséquence une très forte hausse des taux d intérêt qui a eu des conséquences, non seulement en Allemagne, mais aussi dans le reste de l Europe, qui a connu une récession au début des années 1990.

Gros plan La réunification allemande et la lutte monétaro-budgétaire Figure 2 Le policy-mix en Allemagne après la réunification

6.6. Aspects dynamiques Revenons sur l effet d une hausse des impôts sur IS. Il est raisonnable de supposer que la production va décroître lentement : Il faut du temps pour que la production réponde à la baisse de la demande (les entreprises peuvent d abord stocker avant de réduire la production). Il faut du temps pour que les consommateurs répondent à la baisse de leur revenu par une baisse de la consommation. Il faut du temps pour que les entreprises révisent leurs plans d investissement suite à la baisse de la demande. De même, on peut supposer que la production croît lentement lorsqu elle est à gauche de l équilibre.

Aspects dynamiques À l inverse, l ajustement du taux d intérêt aux variations de l offre et de la demande de monnaie est très rapide. Le marché des bons du Trésor, sur lequel la Banque centrale achète et vend des titres, s ajuste à la seconde à l offre et à la demande : on peut considérer que l économie est toujours sur la courbe LM.

Aspects dynamiques Figure 6.11 Les effets dynamiques d une contraction monétaire Une contraction monétaire entraîne une hausse immédiate du taux d intérêt. Ce taux d intérêt entraîne progressivement une baisse de la production. La hausse finale du taux d intérêt est moindre que la hausse initiale (car la demande de monnaie diminue avec la baisse de la production).

Aspects dynamiques En conséquence, la politique monétaire peut affecter rapidement le taux d intérêt, mais pas le niveau de production. La Banque centrale doit donc éviter de livrer une bataille trop tardive : il n y a aucun intérêt à lutter contre une récession en baissant le taux d intérêt si cette récession est terminée lorsque le faible taux d intérêt commence à affecter l activité économique.

6.7. Le modèle IS/LM décrit-il vraiment ce qui se passe dans l économie? Toute théorie doit passer deux tests : Les hypothèses et simplifications doivent être «raisonnables». Les implications majeures de la théorie doivent être compatibles avec ce que l on observe réellement dans le monde. À l aide de l économétrie, on peut mesurer les effets des changements dans les politiques monétaire et budgétaire.

Le modèle IS/LM décrit-il vraiment ce qui se passe dans l économie? Figure 6.12 Les effets empiriques d une hausse du Federal Funds Rate À court terme, la hausse du taux d intérêt entraîne une baisse de la production et une hausse du taux de chômage, mais elle a peu d effets sur le niveau des prix.

Le modèle IS/LM décrit-il vraiment ce qui se passe dans l économie? La figure 6.12 montre les effets d une hausse de 1 % du Federal Funds Rate sur l économie. On observe : une baisse des ventes au détail. La plus forte baisse est atteinte après cinq trimestres ; une baisse de la production, plus lente et plus lisse que celle des ventes ; une baisse de l emploi, et une hausse du chômage ; une faible évolution des prix à court terme. La prise en compte de l évolution des prix, que l on pouvait ignorer dans le court terme, devient essentielle à long terme. Comprendre les enchaînements produits par l évolution des prix sera l objet des prochains chapitres.