Propagation des Ondes Sismiques

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Propagation des Ondes Sismiques Jean-Arthur Olive Notes de cours de sismologie - Ecole Normale Supérieure, Département Terre-Atmosphère-Océan

Table des matières 1 Equation des ondes de volume 3 1.1 Equation du mouvement..................... 3 1.2 Equation des ondes sismiques.................. 4 1.3 Introduction des Potentiels.................... 6 1.4 Solution en ondes planes..................... 8 1.4.1 Ondes P.......................... 8 1.4.2 Ondes S.......................... 10 1.4.3 Synthèse.......................... 10 1.5 Ondes P sphériques........................ 11 2 Théorie des Rais 13 2.1 Equation de l Eikonale...................... 13 2.2 Rai sismique............................ 15 2.2.1 Notion de rai....................... 15 2.3 Milieux stratifiés en vitesse.................... 19 2.3.1 Milieux à une couche................... 19 2.3.2 Milieux à deux couches.................. 22 2.3.3 Milieux à n-couches.................... 22 2.3.4 Cas particuliers...................... 22 2.4 Milieux à variations continues de vitesse............ 22 2.5 Reflections et conversions..................... 22 2.6 Rais dans une Terre sphérique.................. 22 3 Ondes de surface 23 3.1 Ondes de Rayleigh........................ 23 3.2 Ondes de Love........................... 23 3.3 Cas général............................ 23 3.4 Oscillations libres de la Terre.................. 23 1

4 Anisotropie 24 4.1 Loi de Hooke........................... 24 4.2 Equation des ondes de volume en milieu anisotrope...... 24 4.3 Front d onde - Surface de lenteur................ 25 Note Ces notes sont adaptées des cours et TDs de Sismologie de Jérôme Vergne, Raul Madariaga et Mathias Delescluse en Licence 3 et Master 1 de la formation prédoctorale du département Terre-Atmosphère-Océan de l Ecole Normale Supérieure. Les compléments ont été librement inspirés de l ouvrage Introduction to Seismology de Peter M. Shearer (Cambridge University Press, 1999). 2

Chapitre 1 Equation des ondes de volume Les ondes de volume sont des vibrations capables de se propager à l intérieur d un volume, par opposition aux ondes de surface, qui se propagent le long d une interface. Dans cette partie, nous dérivons leurs équations de propagation à partir du principe fondamental de la dynamique, puis en identifions une famille de solutions en géométrie cartésienne et sphérique. 1.1 Equation du mouvement Considérons un volume infinitésimal dv d un solide de masse volumique ρ, délimité par la surface ds. Ce milieu est soumis à des forces de volume que nous regroupons dans le terme f, ainsi qu à des forces surfaciques décrites par le tenseur des contraintes σ ij. Nous adoptons un système de coordonées cartésiennes dans un repère à 3 directions orthogonales x 1, x 2, et x 3. D après la relation de Cauchy, la i-ème composante de la force élémentaire s exercant sur une surface ds de normale unitaire n s écrit df i = σ i,j n j ds (1.1) avec la convention de sommation par indices répétés. Appliquons le principe fondamental de la dynamique à un volume macroscopique V délimité par la surface S. Nous égalisons le produit de la masse par l accélération avec la somme des forces, et notons v le champ de vitesse au sein de ce solide. V ρ dv i dt dv = σ ij n j ds + f i dv (1.2) S V 3

D après le théorème de Gauss σ ij n j ds = avec la notation et l opérateur d dt S V σ ij,j dv (1.3) σ ij,j = σ ij x j (1.4) désignant la dérivée lagrangienne d dt = t + v (1.5) On peut donc, à partir de l équation (1.2), revenir à l échelle mésoscopique et écrire l équation du mouvement ( ) vi ρ t + v j j v i = σ ij,j + f i (1.6) 1.2 Equation des ondes sismiques Le passage d une onde sismique dans un volume rocheux V se traduit par de brèves vibrations d amplitude extrêmement faible par rapport à la taille du volume (déformations de l ordre d 1 mm par km, soit 10 6, éventuellement 10 5 à proximité de la source). Dans ces conditions, on peut considérer que le matériau se comporte de façon élastique, et non plastique ou visqueuse. On peut donc négliger dans l équation (1.6) le terme d advection v j j v i. Introduisons alors le champ de déplacement u traduisant le changement de position des points constituant le solide, de sorte que v = t u. Enfin, nous considérons l effet des forces volumiques négligeable, car nous nous plaçons en champ lointain, c est à dire loin de la source des ondes sismiques. Nous négligeons par ailleurs tout effet de la gravité, hypothèse valide dans le cadre des ondes de volume mais non valide pour l étude des vibrations basse fréquence. L équation (1.6) se simplifie ainsi en ρ 2 u i t 2 = σ ij,j (1.7) 4

Le terme de gauche fait intervenir les 3 composantes du champ de déplacement tandis que le terme de droite fait appel aux contraintes. On peut toutefois relier contraintes et déformations dans le cadre de l élasticité linéaire par σ ij = C ijkl ɛ kl (1.8) où C ijkl désigne un tenseur d ordre 4 contenant 21 paramètres élastiques indépendants décrivant le comportement du matériau dans chaque direction de l espace. Nous nous plaçons dans le cas dit isotrope, où les propriétés du matériau sont indépendantes de la direction considérée. Le nombre de constantes élastiques indépendantes est alors ramené à seulement 2 : les coefficients de Lamé λ et µ. Le coefficient µ exprime une résistance au cisaillement, mais le paramètre λ n a pas d interprétation physique simple. Le couple (λ, µ) peut être relié au couple module d Young - coefficient de Poisson (E, ν), d interprétation plus explicite. Dans les solides, on a souvent λ µ, avec une valeur avoisinant 30 GPa dans la croûte et 70 GPa dans le manteau (rappel : 1 GPa correspond à 10000 atmosphères!). En revanche, µ = 0 dans les liquides, qui n ont aucune resistance au cisaillement. La relation contrainte déformation en cas isotrope s écrit σ ij = λɛ kk δ ij + 2µɛ ij (1.9) La déformation est elle même reliée au déplacement par On peut donc ecrire σ ij,j = j [λ k u k δ ij + µ ( i u j + j u i )] ɛ ij = 1 2 ( iu j + j u i ) (1.10) = i (λ k u k ) + ( i u j + j u i ) j µ + µ j ( i u j + j u i ) = λ i k u k + ( k u k ) i λ + ( i u j + j u i ) j µ + µ ( j i u j + j j u i ) On obtient alors l équation complète (1.11) ρ 2 u i = (λ + µ) ( u) + µ 2 u + ( λ) u + ( u + t u ) µ (1.12) t 2 En considérant négligeables les variations des paramètres élastiques µ et λ dans le milieu, cette équation se simplifie en ρ 2 u t 2 = (λ + µ) ( u) + µ 2 u (1.13) 5

Nous introduisons alors l identité vectorielle 2 u = ( u) u (1.14) et obtenons l équation des ondes élastiques en milieu isotrope et homogène ρ 2 u t 2 = (λ + 2µ) ( u) µ u (1.15) Prenons à présent la divergence des deux membres de l équation (1.15). La divergence d un rotationnel étant nulle, ceci donne ρ 2 t 2 ( u) = (λ + 2µ) 2 ( u) (1.16) Et en prenant le rotationnel des deux membres de l équation (le rotationnel d un gradient étant nul), nous obtenons ρ 2 t ( u) = µ ( u) 2 ( ) = µ ( ( u)) = µ 2 ( u) (1.17) Interprétation L équation d ondes (1.15) décrit à la fois le transport d une variation de volume (les ondes de compression-dilatation, décrites par le terme u) et de petites rotations (les ondes de cisaillement, décrites par le terme u). La Terre oppose de façon générale beaucoup moins de résistance aux dilatations qu aux rotations, c est pourquoi les ondes de compressiondilatation sont toujours les premières arrivées, d où leur nom d ondes P. Les ondes de cisaillement arrivent en second, et sont communément appellées ondes S. 1.3 Introduction des Potentiels Pour pousser un peu plus loin l interprétation précédente, nous décomposons le champ vectoriel de déplacement u = (u 1, u 2, u 3 ) en un potentiel scalaire φ 6

et un potentiel vectoriel ψ = (ψ 1, ψ 2, ψ 3 ) en posant u = φ + ψ (1.18) Cette décomposition introduit à priori 4 composantes indépendantes (φ, ψ 1, ψ 2, ψ 3 ) au lieu des trois initiales (u 1, u 2, u 3 ). Il faut donc introduire une relation supplémentaire entre ces composantes pour réduire leur degré de liberté. C est l interêt de la condition de jauge de Coulomb On a alors, puisque div(rot) = 0 et, puisque rot(grad) = 0 ψ = 0 (1.19) u = 2 φ (1.20) u = ψ = 2 ψ + ( ψ) = 2 ψ (1.21) Les équations (1.16) et (1.17) se réécrivent respectivement ρ 2 t 2 ( 2 φ) = (λ + 2µ) 2 ( 2 φ) (1.22) ρ 2 t 2 ( 2 ψ) = µ 2 ( 2 ψ) (1.23) Ces deux équations peuvent s écrire sous la forme 2 ( 2 F t 2 ) c2 2 F = 0 (1.24) où c désigne une constante homogène à une vitesse, et F désigne alternativement φ ou ψ. Intéressons nous à la solution la plus simple : il s agit du cas où la fonction à l intérieur du laplacien est uniformément nulle. On obtient alors la forme simplifiée 2 F t 2 c2 2 F = 0 (1.25) 7

1.4 Solution en ondes planes 1.4.1 Ondes P Cas général Dans le cas du potentiel scalaire φ, l équation d ondes (1.25) s écrit avec la constante 2 φ t 2 α2 2 φ = 0 (1.26) α = λ + 2µ ρ (1.27) Une famille de solutions de cette équation est la famille des ondes planes progressives se propageant à la vitesse α, de la forme ( φ( r, t) = f + k t ) ( r + f t + ) k r α α (1.28) où r = (x 1, x 2, x 3 ) dénote la position du point considéré et k = (k1, k2, k3) le vecteur d onde unitaire (normalisé), donnant la direction de propagation de l onde. Dans le cas du potentiel φ, le déplacement u = φ s écrit u i = φ x i = k i α f + ( t k j x j α ) + k i α f ( t + k j x j α ) (1.29) et est donc clairement colinéaire à k. Le déplacement s effectue donc dans la direction de propagation de l onde. On peut parler d onde longitudinale, de compression-dilatation, ou onde P. Cas unidimensionnel Considérons ici le cas de la propagation de l onde P dans une seule direction x 2 φ t 2 φ 2 α2 x = 0 (1.30) 2 8

t t 5 4 pente 1/α 3 2 1 ф + (x) @ t=0 0 10 8 6 4 2 0 2 4 6 8 10 5 4 pente - 1/α 3 2 x 1 ф - (x) @ t=0 0 10 8 6 4 2 0 2 4 6 8 10 x 1 0.8 0.6 0.4 0.2 1 0.8 0.6 0.4 0.2 Figure 1.1 Propagation unidimensionelle sous forme d onde P d un signal gaussien φ. On distingue les deux composantes φ + (en haut) et φ + (en bas) introduites à l équation (1.31). Les unités de temps et distance étant arbitraires, on a choisi une vitesse α = 0.5. Le signal gaussien initial se propage à la vitesse α en conservant parfaitement sa forme. Dans ce cas k = (1, 0, 0), et les solutions s écrivent φ(x, t) = φ + (t x α ) + φ (t + x α ) (1.31) Supposons un profil φ + (x) quelconque à t = 0. D après l équation (1.31), la valeur φ + (0) doit se retrouver en des points de l espace-temps vérifiant t x α = 0, c est à dire le long de la droite t = x/α, appelée droite caractéristique de la propagation de l onde. La grandeur 1/α, inverse de la vitesse, est appellée lenteur de l onde. Par extension, le signal existant en t = 0 se retrouve à l identique au temps t à une position différente (x = αt), comme illustré figure 1.1, avec l exemple d un signal gaussien. L onde P se propage donc bien à la vitesse α, et son signal se conserve parfaitement au cours de la propagation (dans le cas unidimensionnel, il n y a aucune dissipation d énergie, donc pas de perte d amplitude). 9

1.4.2 Ondes S L essentiel des propriétés identifiées dans le cas des ondes P s appliquent aux ondes S, avec toutefois une différence majeure : les ondes S sont décrites à l aide d un potentiel vectoriel ψ. L équation des ondes (1.25) s écrit dans ce cas 2 ψ t 2 β2 2 ψ = 0 (1.32) avec la constante µ β = (1.33) ρ Comme pour les ondes P, des solutions de l équation (1.32) sont les ondes planes progressives de la forme ( ψ( r, t) = k {g + k t ) ( r + g t + ) k r } (1.34) β β Le potentiel ψ étant colinéaire à k, le déplacement associé u = ψ est perpendiculaire à la direction de propagation de l onde. On en déduit que l onde S est une onde transversale. On divise communément ce déplacement en deux composantes : Le mouvement contenu dans un plan vertical comprenant le vecteur k, que l on nomme onde SV. Le mouvement horizontal dans la direction perpendiculaire à ce plan, que l on nomme onde SH. 1.4.3 Synthèse Le déplacement associé aux ondes de volume décrites par l équation (1.15) se décompose en une onde P longitudinale comportant à la fois dilatation (changement de volume) et cisaillement (changement de forme) et une onde S transversale purement cisaillante (changement de forme sans changement de volume), elle même décomposable en onde SV et onde SH. Ces ondes sont illustrées figure 1.2. L onde P se propage plus rapidement que l onde S (α 3 β), et les ondes S ne se propagent pas dans les liquides. 10

z x y trajectoire PLAN VERTICAL PLAN HORIZONTAL SH SV k* P Figure 1.2 Les ondes de volume. L onde P, longitudinale, correspond à un déplacement dans la direction de propagation. L onde S, transversale, correspond à un déplacement perpendiculaire à la direction de propagation, décomposable en composantes SH et SV. 1.5 Ondes P sphériques Considérons à présent le cas d ondes P émises par une source ponctuelle dans un milieu homogène. Le choix des coordonnées sphériques est désormais plus judicieux pour décrire leur propagation. La symétrie radiale nous permet d expliciter le laplacien dans ce nouveau repère, et d obtenir 2 φ t 2 α2 1 r 2 r ( r 2 φ r On a alors une nouvelle famille de solutions, de la forme ) = 0 (1.35) φ(r, t) = 1 4πr }{{} décroissance géométrique s(t r α ) } {{ } signal de la source (1.36) Il est facile de montrer que s obéit à l équation d une onde P unidimensionelle 2 s t 2 α2 2 s r 2 = 0 (1.37) 11

Le signal s émis à la source se propage donc à la vitesse α sans autre modification qu une diminution géométrique de son amplitude (en 1/r). Dans un milieu homogène, l énergie d un pulse émis au temps 0 se répartit uniformément sur une sphère de rayon R = αt. Ce n est pas le cas dans la Terre, où les vitesses sismiques augmentent avec la profondeur. Dans le chapitre suivant, nous allons adopter une description particulaire (et non ondulatoire ) des ondes de volume, en introduisant la théorie des rais sismiques. 12

Chapitre 2 Théorie des Rais 2.1 Equation de l Eikonale Considérons les solutions de l équation des ondes dites ondes planes harmoniques, de la forme F ( r, t) = A( r) exp(i (ωt k r) ) (2.1) } {{ } phase où ω désigne la pulsation, r la position et k le vecteur d onde. On définit le facteur de phase T par T ( r) = t k r (2.2) ω et l on introduit la notation complexe F = A e iωt ( r) (2.3) On appelle front d onde l ensemble des points de même phase, ou de même facteur de phase, représenté figure 2.1. Dérivons les équations d évolution d un front d onde, moyennant quelques approximations. Première approximation : la vitesse de l onde (c) varie peu dans l espace considéré, c est à dire sur environ une longueur d onde du signal. On peut donc utiliser l équation des ondes de volume en milieu homogène et isotrope : 2 F t 2 c2 2 F = 0 (2.4) 13

k T = cste FRONT D ONDE k RAI t t + dt M k SOURCE 3 1 2 Figure 2.1 Illustration de la notion de front d onde : l ensemble des points de même phase. Chaque point M du front d onde se déplace selon la normale au front, donnée par le vecteur d onde k. L amplitude du déplacement est donné par T, fonction de la vitesse sismique locale. Le rai sismique est partout normal au front d onde. En injectant la solution (2.3) dans l équation (2.4), on trouve d une part ( ( ) ) c 2 2 F = c 2 e iωt 2 2 A T Aω 2 + 2iω A T + iωa 2 T (2.5) x 2 i x 2 i x i x i x i x 2 i et d autre part 2 F t = 2 Aω2 e iωt (2.6) En égalisant les parties réelles des deux expressions précédentes, il vient 2 A x 2 i Ce que l on peut également écrire Aω 2 ( T x i ) 2 = A2 ω 2 2 A Aω 2 T 2 = A2 ω 2 c 2 (2.7) c 2 (2.8) Deuxième approximation : On considère des ondes de haute fréquence, ω tend vers + (hypothèse non valide pour les ondes de surface). L équation (2.8) se simplifie en A T 2 = A2 c 2 (2.9) 14

ce qui conduit à l équation de l eikonale T = 1 c (2.10) Interprétation La grandeur T ( r, t) est homogène à un temps et peut s interpréter simplement comme le temps nécessaire au front d onde pour atteindre la position r. Par conséquent, entre un temps t et t + dt, chaque point du front d onde se déplace dans le sens et la direction du gradient de facteur de phase T, normal au front d onde, comme illustré figure 2.1. Le vecteur T/ T est donc une normale unitaire au front d onde. Notons que, par définition, le vecteur k = k/ k est également une normale unitaire au front d onde. On peut donc écrire qui devient, grâce à l équation de l eikonale (2.10) T T = k (2.11) T = 1 c k = s (2.12) avec s le vecteur lenteur défini par s = 1 c k (2.13) 2.2 Rai sismique 2.2.1 Notion de rai Paramètre de rai Un rai sismique est une trajectoire partout normale au front d onde, comme illustré figure 2.1. Il s agit d un axe support de l onde, le long duquel de l énergie est transportée. On se place en 2 dimensions, dans un repère (x 1, x 3 ) (illustré figure 2.2) afin de simplifier les représentations. Localement, le front d onde peut être 15

i dx 3 dx 1 Front d onde ds x 1 t t + dt RAI x 3 Figure 2.2 Evolution locale d un front d onde, en deux dimensions. assimilé à son plan tangent, et le rai à une droite, avec un angle d incidence i. Soit s une distance le long du rai. On considère ici une onde P, mais les résultats seront transposables aux ondes S. Le vecteur k, normale unitaire au front d onde, peut s écrire k i = ds i ds = dx i ds (2.14) D après l équation (2.12), on a T = n dx i x i ds (2.15) où n = 1/α désigne la lenteur du rai. Afin d étudier l évolution du rai, dérivons l expression (2.15) par rapport 16

à la coordonnée s. ( d n dx ) i = d ( T ds ds ds x i = ( dt x i ds = x i = x i ( 3 ( j=1 n ) ) ) T dx j x j ds 3 ( ) ) 2 dxj ds j=1 (2.16) D où l on déduit ( d n dx ) i = n (2.17) ds ds x i ce qui traduit le fait que l évolution du rai n est fonction que du gradient de lenteur. Dans le cas particulier où la lenteur ne varie qu avec la profondeur (x 3 ), l équation (2.17) prévoit ( d n dx ) 1 = 0 (2.18) ds ds or, dx 1 = sin i (2.19) ds ce qui conduit à la loi de Snell-Descartes On définit p, le paramètre de rai par n sin i = cste (2.20) p = sin i α = cste (2.21) Le paramètre de rai est constant le long d un rai. Il correspond à la lenteur horizontale du rai. En effet, la vitesse horizontale apparente (composante horizontale de la vitesse) du rai vaut α/ sin i = 1/p. Cette lenteur est donc constante le long d un rai donné. 17

Onde incidente α 1 i 1 i 1 Onde réfléchie i 2 α 2 Onde réfractée Figure 2.3 Rai incident, réfléchi et réfracté au niveau d une interface entre deux milieux de vitesse différente α 1 et α 2. Notons qu un rai se propageant verticalement a un paramètre de rai nul, tandis qu un rai se propageant horizontalement a un paramètre de rai de 1/α. Ces deux cas représentent les valeurs extrêmes de p. Comportement d un rai à une interface On peut développer une analogie avec l optique (la lumière étant une onde de très haute fréquence) : Lorsqu un rai incident rencontre une interface entre deux milieux de propriétés différentes, il est réfléchi selon un angle égal à l angle d incidence, et réfracté selon un angle régi par la loi de Snell-Descartes. Avec les notations introduites à la figure 2.3, on a Angle d incidence et vitesse p = sin i 1 α 1 = sin i 2 α 2 (2.22) Toujours dans l hypothèse de la lenteur ne variant que selon x 3, l équation (2.17) prévoit ( d n dx ) 3 = n (2.23) ds ds x 3 or, dx 3 = cos i (2.24) ds 18

Dérivons à présent la quantité n dx 3 /ds = n cos i par rapport à la variable s. d dn (n cos i) = cos i ds ds = cos i dn ds di n sin i ds dx 3 di n sin i ds ds = cos 2 i dn dx 3 n sin i di ds (2.25) L équation (2.23) nous permet alors d écrire En remarquant enfin que dn dx 3 = L équation (2.26) se simplifie en di ds = 1 dn sin i (2.26) n dx 3 d dx 3 ( ) 1 = 1 dα (2.27) α α 2 dx 3 di ds = p dα dx 3 (2.28) Cette dernière égalité montre bien que si α augmente avec la profondeur, l angle d incidence i augmente : le rai se courbe jusqu à atteindre une incidence critique à partir de laquelle il est entièrement réfracté (cas correspondant à i 2 = π/2 dans la figure 2.3). Etudions à présent le cas de milieux stratifiés verticalement en vitesse. 2.3 Milieux stratifiés en vitesse 2.3.1 Milieux à une couche Construisons une courbe hodochrone (temps d arrivée T des ondes en fonction de la distance source - station X) pour le milieu séparant une couche d épaisseur H et de vitesse sismique α 1 d un demi-espace infini de vitesse sismique α 2, représenté figure 2.4. 19

SOURCE i c onde directe Pg distance X STATION onde reflechie PmP CROÛTE α 1 H Moho MANTEAU α 2 i c onde refractée Pn i i i c Figure 2.4 Onde directe, refléchie et réfractée dans un milieu à une couche, à travers l exemple des ondes P à l interface croûte - manteau. Une station suffisamment éloignée de la source recevra 3 arrivées d onde P : L onde P directe, correspondant à un angle d incidence de π/2, qui se propage horizontalement juste sous la surface. Son paramètre de rai est p = 1/α 1, et elle parvient à la station en T = px (2.29) L onde P réfléchie au bas de la couche, pouvant correspondre à n importe quel angle d incidence. On a dans ce cas [ T 2 = 4 ( ) ] 2 X H 2 + (2.30) α1 2 2 Notons que l équation (2.30) permet de retrouver l équation de l onde directe lorsque X devient très grand devant H. L onde P réfractée critiquement, dans le cas où α 2 > α 1. Elle correspond à l angle d incidence critique i c tel que son paramètre de rai vaut p = sin i c α 1 = sin(π/2) α 2 = 1 α 2 (2.31) L onde réfractée se propage parallèlement à l interface à la vitesse α 2. Elle peut renvoyer des ondes dans le milieu 1 avec une incidence i c, ce qui dissipe son énergie. On a alors T = px + 2H ( ) 1 p 2 α 2 1 2 1 (2.32) α 1 20

16 14 Pg PmP Pn 12 10 T (s) 8 6 4 2 0 0 10 20 30 40 50 60 X (km) Figure 2.5 Hodochrone montrant les temps d arrivée de l onde directe, refléchie et réfractée dans un milieu à une couche (une croûte de 6 km d épaisseur et de vitesse sismique 4 km/s surplombant un manteau de vitesse caractéristique 8 km/s) en fonction de la distance source - station. On représente ces résultats à la figure 2.5. Notons que la première onde réfractée ne peut être observée qu à partir d une distance X n = 2H tan i c. Si l on représente des sismogrammes correspondant à plusieurs distances source - station dans le plan (X, T ) et que l on pointe la première arrivée pour chacun d entre eux, l on obtient une droite de pente 1/α 1 jusqu à une certaine distance X c, puis une seconde droite de pente 1/α 2. En effet, pour des distances X X c, l onde réfractée arrive avant l onde directe. On montre aisément que α1 + α 2 X c = 2H (2.33) α 2 α 1 L étude de ces courbes hodochrones nous permet de déterminer les paramètres α 1, α 2 et H. Mohorovicic fût le premier à mettre en évidence l interface croûte - manteau en 1909, grâce à une démarche analogue. Le raisonnement que nous avons développé ici est d ailleurs à la base de la sismique réfraction : l utilisation des ondes réfractées pour étudier la géométrie (épaisseur, orientation) et les propriétés (structure en vitesse) d un milieu. 21

2.3.2 Milieux à deux couches 2.3.3 Milieux à n-couches 2.3.4 Cas particuliers 2.4 Milieux à variations continues de vitesse 2.5 Reflections et conversions 2.6 Rais dans une Terre sphérique 22

Chapitre 3 Ondes de surface 3.1 Ondes de Rayleigh 3.2 Ondes de Love 3.3 Cas général 3.4 Oscillations libres de la Terre 23

Chapitre 4 Anisotropie 4.1 Loi de Hooke 4.2 Equation des ondes de volume en milieu anisotrope Développons l équation du mouvement (1.7) avec la loi de Hooke, dans un milieu homogène et anisotrope ρ t 2u i = j (C ijkl ɛ kl ) ( ) 1 = j C ijkl 2 ( ku l + l u k ) = j ( 1 2 C ijkl k u l + 1 2 C ijkl l u k ) = j ( 1 2 C ijlk k u l + 1 2 C ijkl l u k ) = j (C ijkl l u k ) = C ijkl j l u k (4.1) Considérons les solutions en ondes planes de la forme u = ge iω(t s r) (4.2) avec g le vecteur de polarisation indiquant le mouvement des particules en vibration, s le vecteur lenteur, perpendiculaire au front d onde, de norme 24

égale à l inverse de la vitesse de phase c, et r la position. Comme nous travaillons dans un milieu homogène, g et s sont constants. Nous avons donc d une part t 2u i = ω 2 g i e iω(t s r) (4.3) et d autre part L équation (4.1) s écrit donc Ce qui se reformule en j k u k = ω 2 s j s l g k e iω(t s r) (4.4) ρg i = C ijkl s j s l g k (4.5) [C ijkl s j s l ρδ ik ] g k = 0 (4.6) Nous définissons alors le tenseur Γ = C/ρ et le vecteur lenteur normalisé s = c s et réécrivons (4.6) [ Γijkl s js l c 2 δ ik ] gk = 0 (4.7) Enfin, nous introduisons le tenseur M d ordre 2, fonction de la direction considérée s M ik = Γ ijkls js l (4.8) ce qui conduit à [ Mik c 2 δ ik ] gk = 0 (4.9) Il s agit d un problème de valeurs propres : pour une direction donnée s, on définit un tenseur M possédant généralement 3 valeurs propres qui sont autant de valeurs autorisées pour c 2. Chaque valeur de c 2 correspond à une onde de volume (1 onde quasi-p et deux composantes d une onde quasi-s). A chacune est associé un vecteur propre g k, le vecteur de polarisation. 4.3 Front d onde - Surface de lenteur Pour chaque direction considérée dans un milieu anisotrope, seules certaines lenteurs sont autorisées. Une façon simple de les visualiser est de représenter la surface de lenteur, figure connectant tous les points de l espace des lenteurs (s 1, s 2, s 3 ) satisfaisant l équation (4.9). 25

0.4 0.3 0.2 0.1 0 0.1 0.2 0.3 0.4 ISOTROPIC MEDIUM Slowness surface Wavefront @ t = 1 s 0.3 5 0.2 qs 1 qs 2 4 3 qp Vertical slowness (s/km) 0.1 0 0.1 qp x3 (km) 2 1 0 1 2 qs 2 0.2 3 4 qs 1 0.3 Horizontal slowness (s/km) 5 6 4 2 0 2 4 6 x1 (km) ANISOTROPIC OLIVINE CRYSTAL Slowness surface 8 Wavefront @ t = 1 s 0.2 0.15 qs 2 6 qp Vertical slowness (s/km) 0.1 0.05 0 0.05 0.1 qp qs 1 x3 (km) 4 2 0 2 4 qs 2 qs 1 0.15 6 0.2 0.25 0.2 0.15 0.1 0.05 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 Horizontal slowness (s/km) 8 10 8 6 4 2 0 2 4 6 8 10 x1 (km) Figure 4.1 Surface de lenteur (gauche) et front d onde (droite) après 1 seconde de propagation à partir d un point source dans un milieu isotrope (en haut) et dans un cristal d olivine anisotrope à symétrie hexagonale (en bas). 26