ASSET ET ALLOCATIONS LA LETTRE DE LA FRANÇAISE ALLOCATION GLOBALE D'ACTIFS Numéro 2 Achevée de rédiger le 22 10 2015 La pertinence d une couverture sur l exposition en actions dans une allocation globale d actifs Le principe de couverture d une exposition en actions Les actions sont par essence des actifs d efficacité, dont le principal moteur de performance repose sur les plus-values générées par la croissance économique, par opposition aux actifs de rendement comme les obligations, dont le moteur repose sur un taux d intérêt sans espoir de plus-values si elles sont gardées jusqu à échéance. Dans cette optique l immobilier est un actif mixte, combinant des caractéristiques d actifs de rendement au travers des baux, et des caractéristiques d actifs d efficacité au travers de l indexation des loyers. Les actions et l immobilier ne capturent cependant pas la croissance économique de la même façon : les actions sont plus sensibles à la croissance en volume alors que l immobilier est plus sensible à l inflation. Néanmoins les actions présentent une volatilité des performances nettement supérieure à celle des fondamentaux qui sous-tendent leur évolution. C est une anomalie de marché bien analysée par la finance comportementale sous le nom de "l énigme de la volatilité excessive". Il en existe beaucoup d autres, la plus connue étant "l énigme du momentum", qui signifie que les mouvements de baisse ou de hausse des cours s auto-entretiennent. Capter le maximum de performance des actions sans supporter une volatilité excessive tel est l objectif des stratégies de couverture. Ces stratégies peuvent être multiples mais elles ont un fondement commun : couvrir les baisses par l achat d option de vente, équivalent à la souscription d une assurance à la baisse, financé par la vente d option d achat, équivalent à l émission d une assurance à la hausse. La performance est ainsi encadrée : elle est assurée à la baisse mais limitée à la hausse. On élimine ainsi les mouvements excessifs à la baisse comme à la hausse, tout en gardant la dynamique fondamentale de la performance des actions. - 1 -
Sur le marché américain, le Chicago Board of Option Exchange organise la négociation des options sur l indice phare des actions S&P 500 et publie des indices de couverture dont le plus connu est le CBOE S&P 500 CLL construit à partir de l indice S&P 500 avec une stratégie systématique d achat d option de vente à trois mois avec un prix d exercice égal à 95 % de la valeur de l indice à un instant donné financé par la vente d option d achat à un mois avec un prix d exercice égal à 110 % de la valeur de l indice (1). Le graphique 1 montre l évolution des performances globales (2) des deux indices sur une période de quinze ans qui couvre trois événements marquants : l éclatement de la bulle Internet en 2000, la hausse subséquente des cours et la dégringolade liée à la crise financière globale de 2008 et enfin la remontée vers les plus hauts de cette année. On remarque bien la moindre volatilité des performances de l indice couvert par rapport à l indice de base, aussi bien à la hausse qu à la baisse. Basée sur les performances annuelles, elle est de 18 % pour l indice de base et de 11 % pour l indice couvert. Simultanément la volatilité des performances de l indice des US Treasuries à 10 ans est de 6 % et celle de l indice de NCREIF Office, qui représente l immobilier de bureaux Prime détenu par les fonds de pension, de 10 %. La volatilité de l indice couvert est du niveau de celle de l immobilier. Le profil de performance et de volatilité tel que présenté par l indice CBOE S&P 500 CLL n est pas reproductible à partir d une allocation stable en actions et en instruments monétaires. Afin de reproduire la performance de l indice couvert, les instruments monétaires devraient représenter les deux tiers de l allocation tandis qu ils devraient représenter un quart pour reproduire la volatilité. Graphique 1 : Indices de performance globale En zone euro, le marché de dérivés Eurex, du groupe Deutsche Börse, organise la négociation des options sur l indice phare des actions DJ Euro STOXX 50. Il n existe pas de publication officielle d indice couvert mais le groupe La Française a développé une technologie de couverture voisine de celle du CBOE (3). (1) Les différences de prix d exercice et les décalages dans les échéances sont déterminés de façon à ce que le coût de la couverture soit nul à moyen terme tout en réduisant autant que faire se peut le manque à gagner sur les mouvements de hausse (2) Variation en capital plus dividendes réinvestis (3) La stratégie se différencie par les caractéristiques de l option de vente de maturité proche d un an avec un prix d exercice proche de 90 % de la valeur de l indice, financée par la vente d option d achat court terme avec un prix d exercice variable s ajustant aux conditions de marché - 2 -
Le graphique 2 montre l évolution des performances globales des deux indices. L indice couvert est également bien moins volatile que l indice de base. Basée sur les performances annuelles, la volatilité est de 21 % pour l indice de base et de 11 % pour l indice couvert. Simultanément la volatilité des performances de l indice EMTX des emprunts d état de la zone euro à 7-10 ans est de 8 % et celle de l indice EDHEC IEIF des SCPI investies en immobilier d entreprise en France (4) est de 4 %. La volatilité de l indice couvert se rapproche de celle des emprunts d état à long terme. La performance de l indice couvert est également supérieure à celle de l indice de base, ce qui n est pas le cas aux USA. Cette surperformance tient en grande partie au fait que l indice DJ Euro STOXX 50 a fluctué sans tendance de long terme marquée contrairement à l indice S&P 500. En conséquence la protection contre les mouvements baissiers a joué pleinement tout en capturant les faibles mouvements haussiers. Cette configuration tient au manque de dynamisme de l économie de la zone euro par rapport à l économie américaine avant et après la crise financière globale de 2008. Tout laisse à penser que ce décalage de conjoncture va perdurer dans un futur proche. Graphique 2 : Indices de performance totale L impact de la couverture de l exposition en actions sur la diversification de portefeuille Si les stratégies de couverture de l exposition en actions délivrent bien leur promesse en termes de volatilité, leur impact sur les corrélations entre les actions et les autres grandes classes d actifs doit être évalué afin de juger correctement de leur bénéfice dans une allocation diversifiée. Le graphique 3 décrit les performances globales lissées (taux de variation annuel sur trois ans) des indices actions DJ Euro STOXX 50 de base et couvert comparées avec celles de l indice EMTX des emprunts d état de la zone euro à 7-10 ans et de l indice EDHEC IEIF des SCPI investies en immobilier d entreprise. Le comportement de l indice couvert est très différent de celui de l indice de base durant les périodes de baisse des actions, ce qui laisse penser que les corrélations des actions couvertes avec les obligations et l immobilier pourraient être nettement modifiées par rapport à celles des actions non couvertes. (4) L indice EDHEC IEIF est une bonne estimation de l indice MSCI IPD Bureaux France et présente l avantage d être trimestriel et publié rapidement, voir Asset et Allocation du 2 e trimestre 2015-3 -
Graphique 3 : Indices de performance globale De fait les stratégies de couverture modifient surtout les corrélations des actions par rapport aux emprunts d état ainsi qu il ressort du tableau ci-dessous. Le pouvoir de diversification des actions diminue tout en restant important. Les corrélations avec les obligations d entreprise et l immobilier d entreprise ne sont pas fondamentalement modifiées. Il est important de souligner que la corrélation négative entre les actions et les emprunts d état, manifeste depuis 1999, n est pas la configuration observée sur très longue période où elle est en moyenne modérément positive. L articulation entre l évolution des taux d intérêt et les anticipations de croissance économique a été profondément modifiée depuis que les banques centrales ont adopté des politiques d assouplissement quantitatif, en fait depuis que la Fed a ouvert les vannes de la liquidité pour la première fois lors de la crise des pays émergents en 1997 et 1998. Corrélations des performances globales annuelles Juin 1999 Sept. 2015 EMTX emprunts d état zone euro à 3-5 ans DJ Euro STOXX 50 DJ Euro STOXX 50 couvert -47 % -29 % EMTX emprunts d état zone euro à 7-10 ans Obligations d entreprise zone euro Investment Grade BOFA Obligations d entreprise zone euro High Yield BOFA EDHEC IEIF SCPI Immobilier d entreprise -20 % -6 % 28 % 27 % 58 % 60 % 15 % 7 % - 4 -
Portefeuilles optimaux avec et sans couverture de l exposition actions Quelles sont les conséquences de ces changements de corrélation sur les allocations optimales en termes de rentabilité ajustée du risque intégrant ces différents actifs? Le calibrage des rentabilités attendues des actifs à fin septembre 2015 est obtenu en faisant la somme des rendements courants, des gains en capital à long terme (5) et des primes de volatilité exigées (6). L optimisation est réalisée sous la contrainte d une exposition en immobilier maximum de 10 % pour tenir compte des exigences de liquidité du portefeuille. Ainsi que le montre le graphique 4, la couverture sur les actions permet de déplacer le lieu des portefeuilles optimaux vers plus de rentabilité et moins de volatilité. Le gain en termes de réduction de volatilité est proche de 15 % pour des rentabilités désirées de l ordre de 4 à 5 %. Graphique 4 : Frontière des portefeuilles optimaux Quelle part de l exposition en actions doit-elle être optimalement couverte? Une démarche purement basée sur la rentabilité ajustée du risque indique que la couverte de l exposition en actions n apporte pas de bénéfices pour des rentabilités désirées faibles, de l ordre de 2 %, et en revanche doit être intégrale pour des rentabilités désirées supérieures à 2 %. C est une position très tranchée, qui peut être biaisée par les hypothèses de rentabilité attendues. Si l on s affranchit de ces hypothèses et ne considère que les données de risque : volatilités, corrélations et covariances, la conclusion est plus nuancée. Le graphique 5 donne la répartition du portefeuille optimal moyen sur un spectre de stratégies d allocation tenant compte de différents niveaux d information considérée (7). L exposition en actions est répartie en 40 % d actions couvertes et 60 % d actions non couvertes. (5) La croissance économique nominale anticipée pour les actions, l inflation anticipée pour l immobilier (6) Ces primes sont calculées à partir de la volatilité historique des performances des actifs supposée donner une estimation fiable de la volatilité future (7) De la stratégie d équipondération (information retenue minimale) à la stratégie du maximum de rentabilité ajustée du risque (information retenue maximale) en passant par les stratégies de parité de risque, de maximum de décorrélation et de minimum de variance - 5 -
Graphique 5 : Portefeuille optimal moyen L impact de la couverture en actions sur le capital exigé pour les investisseurs soumis à la réglementation Solvabilité II La formule standard du capital de solvabilité prévoit un choc de 39 % sur les actions (8). Pour les actions couvertes, protégées par une option de vente dont le prix d exercice est 10 % en dessous du niveau de l indice, le choc est très fortement réduit, il n est plus que de 12 % environ (9). En appliquant le même raisonnement que précédemment pour la recherche du portefeuille optimal moyen avec la différence que les mesures de risque ne sont plus celles constatées historiquement mais celles du modèle standard de la réglementation, on aboutit à la répartition de portefeuille indiquée au graphique 6. Comparé à la répartition indiquée au graphique 5, le résultat est très différent au niveau de l exposition en actions, elle est supérieure de 12 % et répartie en 90 % d actions couvertes et 10 % d actions non couvertes. La couverture en actions apporte un avantage indéniable dans l univers de la réglementation Solvabilité II. Graphique 6 : Portefeuille optimal moyen à partir du modèle standard de risque (8) Ce choc est modulé par un ajustement symétrique de plus ou moins 10% destiné à limiter l effet de procyclicité, il est également soumis à une période transitoire (9) La différence par rapport à 10% tient au prix de l option de vente à un an partiellement compensé par le rendement du dividende sur l année - 6 -
Conseil en allocation stratégique d actifs, un service de La Française L allocation stratégique d actifs est responsable de près des trois quart de la variance de la performance d un portefeuille diversifié*, le complément étant apporté par l allocation tactique et la sélection active sur chaque classe d actifs. Afin d assister ses clients institutionnels dans leur analyse de portefeuille, La Française leur propose un service de conseil en allocation stratégique d actifs reposant sur deux piliers : un diagnostic sur la composition du portefeuille avec détermination des paramètres financiers implicites de rentabilité attendue, risque, rendement courant et horizon d investissement, et une optimisation de portefeuille assortie de recommandations éventuelles sur les arbitrages souhaitables. Ces travaux sont éventuellement réactualisés tous les trimestres en fonction des nouvelles données de marché. L optimisation de portefeuille utilise un ensemble de techniques faisant appel ou non à des hypothèses sur les rentabilités attendues, les volatilités des performances et les corrélations des actifs entre eux. Des scénarios économiques propres à chaque investisseur peuvent être pris en compte. Pour les compagnies d assurance, l optimisation peut également être réalisée en prenant pour mesure de risque les exigences en capital de Solvency II. L univers de l allocation d actifs couvre près de 70 actifs mondiaux couvrant l ensemble du spectre des actifs d investissement : actions et emprunts d état de pays développés et émergents, obligations d entreprise de diverses catégories, immobilier de bureaux et résidentiel, Hedge Funds, matières premières, Private Equity et Private Debt. Une originalité du service est l intégration de classes d actifs relativement illiquides tels que l immobilier ou le Private Equity en utilisant des indices de valeurs d expertise délissés. En fondement de l analyse, les performances totales (variations en capital et revenus réinvestis) en plusieurs devises de base avec ou sans couverture de change sont calculées en historique mensuel sur au moins 10 ans pour l ensemble des actifs et depuis 1974 pour un grand nombre d actifs. * Voir en particulier : J.T.Hoermann, D.A.Junkans and C.M. Zarate, "Strategic Asset Allocation and Other Determinants of Portfolio Returns", Journal of Wealth Management, Winter 2005, Vol. 8, No. 3, p. 26-38 G.P. Brinson, B.D. Singer and G.L. Beebower,"Determinants of Performance", Financial Analysts Journal, May/June 1991, Vol. 47, No. 3, p. 40-48 R.G. Ibbotson, P.D. Kaplan,"Does Asset Allocation Policy explain 40, 90 or 100 percent of Performance?, January/ February 2000, Vol. 56, No. 1, p. 26-34. Publications éditées par La Française, Société anonyme à directoire et conseil de surveillance au capital de 76 606 140 - RCS : 480 871 490. Rédaction : Pierre Schoeffler Les informations contenues dans ce document ne sauraient constituer un conseil en investissement, une proposition d investissement ou une incitation quelconque à opérer sur les marchés financiers. Les appréciations formulées reflètent l opinion de leurs auteurs à la date de publication et sont susceptibles d évoluer ultérieurement. Le Groupe La Française ne saurait être tenu responsable, de quelque façon que ce soit, de tout dommage direct ou indirect résultant de l usage de la présente publication ou des informations qu elle contient. La présente publication ne peut être reproduite, totalement ou partiellement, diffusée ou distribuée à des tiers, sans l autorisation écrite préalable du Groupe La Française. XX2369 - Octobre 2015 www.lafrancaise-group.com 173, bd Haussmann 75008 Paris - France - Tél. +33 (0)1 44 56 10 00 - Fax +33 (0)1 44 56 11 00-480 871 490 RCS PARIS