Les Pygmées Bagyeli. marginalisé et menacé : Pour la survie d un peuple. au Cameroun

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1 8, rue du Château des Rentiers PARIS Tél Fax sos.enfants@wanadoo.fr CCP H LA SOURCE Pour la survie d un peuple marginalisé et menacé : Les Pygmées Bagyeli au Cameroun Octobre 2009

2 I - Situation générale La population Pygmée Bagyeli vit dans le sud-ouest du Cameroun, près de la côte Atlantique, dans une zone couvrant les secteurs de Bipindi, Kribi, Akom II et Campo. Coincée au milieu des collines forestières, Bipindi est une localité très enclavée. Elle subit un climat chaud et humide, avec deux saisons de pluies annuelles qui rendent son accès encore plus difficile. Le manque de moyens de communication place l ensemble des populations dans la précarité, avec tout son cortège de malnutrition et de maladies. A cela s ajoutent de multiples facteurs contribuant à l aggravation de la pauvreté : manque d infrastructures sanitaires, économiques et sociales, absence d électrification villageoise, rareté des marchés locaux et désintérêt général pour la région. Dans cette situation d abandon, ce sont les Pygmées Bagyeli qui sont les plus touchés. Car la population Bantoue, dominante dans le pays, traite depuis toujours les Pygmées comme un peuple d esclaves qu ils méprisent et exploitent. Peuple des forêts vivant traditionnellement de chasse et de cueillette, les Pygmées Bagyeli ont vu ces dernières décennies leur territoire et leurs moyens de subsistance considérablement réduits par les coupes forestières, la création de parcs nationaux réservés et la construction de l oléoduc Tchad-Kribi. Aux problèmes déjà cités (habitat médiocre, absence d existence au regard de l état civil, précarité de l alimentation, de la santé, de l éducation ) s ajoute à présent le problème du VIH/SIDA introduit dans les campements Pygmées par la vague de travailleurs du pipe-line qui se sont installés des mois durant à Bipindi. C est la population jeune qui a été la plus exposée, et donc la plus atteinte. Les conflits Pygmées-Bantous se sont également accentués du fait de l introduction d une importante masse monétaire provenant de ce même chantier. Les «maîtres» Bantous n entendaient pas voir leurs «esclaves» Pygmées bénéficier des compensations pour l expropriation des parties de la forêt sur lesquelles ils vivaient. Et de fait, les Pygmées se sont vus chassés de leur forêt sans toucher la moindre compensation. Inadaptés à l'environnement social qui leur est aujourd hui imposé, les Pygmées Bagyeli se retrouvent totalement marginalisés par la non reconnaissance de leurs droits fondamentaux : destruction de leur milieu de vie naturel, habitat précaire, insécurité sociale et alimentaire, absence d état civil, non accès aux soins de santé primaires, à l éducation, à la formation et à l emploi. C est leur survie même qui s'en trouve menacée. II - Le partenaire local : Foyer Notre Dame de la Forêt (FONDAF) Le FONDAF travaille avec une trentaine de campements Pygmées recensés dans les quatre secteurs de la région et regroupant environ personnes semi-nomades. Son objectif est l adaptation progressive des Pygmées Bagyeli au monde qui les entoure, la réduction de leur marginalisation et la reconnaissance de leurs droits fondamentaux. Pour cela, le Foyer Notre-Dame de la Forêt centre son action sur la scolarisation des enfants avec un double impératif : 1 Former les jeunes Pygmées Bagyeli pour leur permettre d'aider la communauté Pygmée à prendre conscience de son état de marginalisation et à dépasser le complexe d infériorité qu elle manifeste dans ses relations avec ses voisins Bantous ; 2 Développer en eux la conscience de leurs valeurs humaines, les aider à les mettre en évidence et leur donner les moyens de revendiquer leurs droits élémentaires. Le FONDAF est devenu l âme de ce peuple qui lui est fortement attaché car, au-delà de la scolarisation, le Foyer développe des activités répondant directement à ses besoins : réduction des conflits entre Pygmées et Bantous, lutte contre la pauvreté et l analphabétisme, dans le respect de sa culture, de sa dignité et de ses différences.

3 III - Activités du FONDAF Le FONDAF assure l éducation et favorise l auto-promotion des populations Pygmées. Les domaines d intervention du FONDAF - Promotion de l Education de la population Pygmée Bagyeli ; 1 Education de la population Pygmée Bagyeli ; 2 Scolarisation dans un système d internat des enfants Pygmées Bagyeli des arrondissements de Lolodorf, Bipindi et Kribi selon la méthode ORA (Observer- Refléchir-Agir) ; 3 Appui aux formations sanitaires pour les opérations de vaccination ; 4 Sensibilisation communautaire dans la lutte contre le paludisme en milieu Pygmée ; 5 Promotion de la moustiquaire imprégnée d insecticide ; 6 Formation et recyclage d animateurs au sein des campements ; 7 Animation des séances de sensibilisation communautaire dans la prévention du VIH ; 8 Mobilisation des communautés au dépistage volontaire ; Suivi accompagnement de proximité et évaluation des activités menées - Reconnaissance de la société Bagyeli et de ses droits. 9 Renforcement des capacités institutionnelles et organisationnelles ; 10 Défense et promotion des droits fondamentaux ; 11 Elaboration, en collaboration avec l Administration, d une procédure simplifiée de déclaration des naissances et de régularisation des actes d état civil ; 12 Régularisation auprès des services d état civil pour tous les enfants pensionnaires. - Réduction de la dépendance extérieure des Bagyeli et appui à l auto-promotion et au développement durable. 13 Promotion des activités traditionnelles génératrices de revenus ; 14 mise en place d une palmeraie ; 15 mise en place d une structure d élevage ; La vie au FONDAF Projets éducatifs - Foyer internat Le foyer internat reçoit chaque année une centaine d enfants issus des campements des pygmées Bagyeli. Quinze animateurs et encadreurs travaillent au FONDAF, à quelques exceptions près, ils sont tous issus de la communauté Bagyeli et formés sur place. Les enfants accueillis au sein du foyer participent aux diverses activités : entretien des locaux et des espaces, aide dans les palmeraies et à la porcherie... Les parents accompagnent à chaque rentrée scolaire leurs enfants et sont sollicités eux aussi pour participer deux jours durant à l entretien des terrains où sont situées les deux palmeraies. Le même travail leur est demandé juste avant la fin de chaque trimestre quand ils reviennent chercher les enfants. A cette occasion, il est aussi proposé aux parents d assister à des sessions de formation diverses. Telles que des séances de sensibilisation sur l importance pour les enfants d être inscrits au registre d état civil et d avoir un acte de naissance ou bien concernant le VIH Sida. Ce sont toujours des animateurs pygmées formés qui mènent ces séances. Ces sujets sont abordés aussi de façon régulière au sein des campements dans le courant de l année. Chaque année des enfants ne peuvent être acceptés au Foyer par manque de place à l internat. La demande de la part des familles est de plus en plus pressante, les frères et sœurs de ceux qui ont été accueillis veulent à leur tour venir suivre une scolarisation.

4 - Scolarisation des enfants Accueillis dès l âge de 5 ans, ils suivent deux années scolaires au sein des locaux du Foyer pour apprendre le Français selon une méthode adaptée aux peuples pygmées, la méthode ORA (Observer Réfléchir Agir). A l issue de cet apprentissage, les enfants sont capables de rejoindre l école primaire du village où ils seront mêlés aux enfants de l ethnie dominante, les Bantous. Certains de ces enfants poursuivent ensuite leurs études au niveau secondaire, à Bipindi pour un enseignement général, à Ebolowa pour les garçons ou à Baham pour les filles qui suivent un enseignement technique. Beaucoup des animateurs présents au FONDAF avaient eux aussi suivi ce cycle secondaire. Des formations professionnelles sont également mises en place dans le cadre du Foyer. Elles permettent aux jeunes Pygmées de trouver leur place dans la société camerounaise et à l ensemble de la communauté de préparer son avenir. Les échecs scolaires et les abandons sont rares, les résultats obtenus pas les élèves sont globalement très satisfaisants. Les chiffres et les statistiques parlent d'eux-mêmes : pour 80% des enfants ayant entamé une scolarité obtiennent le Certificat Primaire et Elémentaire, 5% vont jusqu à décrocher le Diplôme de Fin du Premier Cycle de l Enseignement Général. Les enseignants de la méthode ORA sont eux-mêmes des pygmées Bagyeli formés à cette pédagogie particulière. Dix semaines de formation sont nécessaires, des sessions de perfectionnement doivent être envisagées dans les années qui suivent la formation initiale. - Formation des animateurs L action du FONDAF repose sur les Bagyeli eux-mêmes. Tous les animateurs présents ont été eux-mêmes formés au FONDAF. Il est nécessaire de renforcer la formation pour certains et de permettre à de nouveaux candidats d accéder à une formation. Le nombre des animateurs Bagyeli apparaît en effet trop réduit aujourd hui face au travail à accomplir, il conviendrait de l élargir pour favoriser une rotation du personnel et donner un niveau plus élevé à l ensemble de la structure. Certains sont demandeurs pour évoluer vers d autres responsabilités. Les domaines de formation : enseignant pour la méthode ORA, animateur éducatif, hygiène/santé, élevage (porcherie, volailles, chèvres), développement pour les palmeraies. Le développement social au sein des campements Les animateurs exerçant au FONDAF sont des piliers pour la transmission de connaissances, pour mener des sensibilisations au sein des campements. Des personnes au sein de ces mêmes campements acceptent d être des relais et de renforcer la diffusion des messages transmis par le FONDAF. Les dernières campagnes menées concernent le VIH Sida, le paludisme et la citoyenneté (établissement d actes de naissances pour les enfants et importance pour les parents d enregistrer leur enfant dès sa naissance). Les Bagyeli accordent une grande confiance aux initiatives menées par le FONDAF. Les activités génératrices de revenu mises en place au sein du FONDAF - La porcherie L élevage n appartient absolument pas à la tradition pygmée, pourtant en raison de leur sédentarisation forcée et la diminution du gibier en forêt, il est aujourd hui vital pour eux de s initier à ces techniques. Par le biais de la porcherie un apprentissage est proposé aux

5 enfants qui pourront à leur tour initier leurs parents. Les enfants participent à l entretien de la porcherie sous le contrôle d un responsable. Actuellement, la structure dispose d une quinzaine de porcs. L équipe a la volonté de renforcer cette activité et de l étendre. - la palmeraie Il existe deux palmeraies, une plus ancienne que l autre. La production de la première palmeraie couvrait jusqu en 2006 les besoins en huile du Foyer. Une deuxième plus petite a été plantée en vue de suppléer dans l avenir à la plus ancienne. Là aussi, il faudrait envisager l extension de la seconde palmeraie pour anticiper la fin de la première palmeraie donc la production va aller en diminuant. Une étude va également être menée pour voir comment pourraient être exploitées par la suite les terres de la première palmeraie. - Le projet de l accueil hôtelier et de l éco-tourisme Un bâtiment abritant à l origine le personnel a été rénové et est prêt à accueillir des personnes de passage. Il n existe aucune structure hôtelière à Bipindi. Cela représente une source de revenus pour participer au fonctionnement du FONDAF. Il manque un peu d équipements intérieurs pour achever cette action. Ainsi, au cours de l année scolaire , les gains ont été de 475 (entre septembre 2008 et juin 2009), au cours de l été 2009 les gains ont été de 244 puis septembre à mioctobre 2009 de 137. Ceci prouve que les gains vont en croissant et qu il participe de façon non négligeable au fonctionnement du Foyer. Des formules d éco-tourisme pourront être envisagées. Des jeunes pourraient être formés pour accompagner des voyageurs souhaitant visiter la région et découvrir les milieux de vie traditionnelle des pygmées. Les possibilités d hébergement offertes par le FONDAF assureraient une base de départ pour rayonner dans la région. Le projet du FONDAF est de valoriser la culture pygmée. Dans ce but, un musée va être mis en place avec exposition d outils, d objets traditionnels, d éléments relatant l osmose du peuple Bagyeli avec la forêt qui l héberge, de photos et toute autre chose pouvant mettre en valeur cette culture pygmée si riche mais, hélas, menacée. Le FONDAF est le seul centre au Cameroun à proposer, en réponse aux particularismes socioculturels de la population Pygmée et dans le cadre d un internat, un système éducatif appliquant des stratégies et des méthodes adaptées tant à la scolarisation des enfants de la forêt qu à l instruction de leurs parents. A ce titre, il mérite vraiment d être soutenu dans son action.

6 Année scolaire Répartition des élèves par niveau scolaire Préscolaire (ORA 1 et ORA 2) 46 élèves Primaire 54 élèves Secondaire - Lycée de Bipindi 3 élèves - CETIC de Bipindi 4 élèves (Formation professionnelle sur 4 ans) - Maison de la Femme Bipindi 3 élèves (Formation ménagère) - Hôpital de Bipindi 2 élèves - SAR /SM de Kribi 4 élèves (Formation professionnelle sur 2 ans) - Maison de la Femme Kribi 2 élèves - CETIF de Baham 2 élèves