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Cours d'algèbre linéaire Yannick Henrio 5 mars 2013

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Table des matières 1 L'espace vectoriel R n 1 11 R n est un espace vectoriel sur R 1 12 Combinaisons linéaires 1 13 Sous-espaces vectoriels de R n 2 14 Exercices du chapitre 1 3 2 La méthode du pivot de Gauss 5 21 Dénition d'une matrice 5 22 Opérations élémentaires sur les lignes d'une matrice 5 23 Matrices échelonnées 6 24 Echelonnement d'une matrice 6 241 Enoncé du théorème d'existence 6 242 Méthode du pivot de Gauss 7 243 Rang d'une matrice 7 25 Réduction d'une matrice échelonnée 8 251 Existence et unicité d'un échelonnement réduit 8 252 Méthode de réduction d'une matrice échelonnée 8 26 Exercices du chapitre 2 9 3 Résolution des systèmes linéaires 11 31 Généralités sur les systèmes linéaires 11 311 Matrices associées à un système 11 312 Ensemble des solutions d'un système 12 32 Description de l'ensemble des solutions d'un système linéaire 12 33 Structure de l'ensemble des solutions d'un système 14 331 Le cas particulier d'un système homogène : Noyau d'une matrice 14 332 Cas général 14 34 Quelques conséquences de la structure des solutions 15 35 Exercices du chapitre 3 16 4 Familles de vecteurs de R n 17 41 Généralités sur les familles de vecteurs de R n 17 42 Matrice d'une famille de vecteurs dans une base 18 43 Dimension d'un sous-espace vectoriel de R n 19 44 Calcul d'une base de l'image d'une matrice et interprétation du rang 19 45 Compléter une famille libre en une base 20 46 Le théorème du rang 20 47 Exercices du chapitre 4 21 3

4 TABLE DES MATIÈRES 5 Matrices 23 51 M n,p est un espace vectoriel 23 52 Produit de deux matrices 23 53 Matrices carrées inversibles 25 531 Généralités 25 532 Matrice d'une opération élémentaire sur les lignes 25 533 Critères d'inversibilité 26 534 Calcul de l'inverse : Méthode de Gauss-Jordan 26 54 Calcul de l'image d'une matrice 27 55 Exercices du chapitre 5 27 6 Espaces vectoriels de dimension nie et applications linéaires 29 61 Dimension nie 30 611 Généralités 30 612 Matrice d'une famille de vecteurs dans une base 31 613 Matrices de passage 31 62 Applications linéaires 32 621 Généralités 32 622 Cas des dimensions nies 33

Chapitre 1 L'espace vectoriel R n Soit n 1 un entier On rappelle que R n est l'ensemble des suites de réels u = (x 1,, x n ) Les éléments de R n seront appelés vecteurs de longueur n Le réel x i est appelé i-ième coordonnée canonique du vecteur u On notera 0 n = (0,, 0) le vecteur nul de longueur n 11 R n est un espace vectoriel sur R Soient u = (x 1,, x n ) et v = (y 1,, y n ) des vecteurs de R n, et α un réel On note u + v = (x 1 + y 1,, x n + y n ) et α u = (αx 1,, αx n ) On dénit ainsi une addition Rn R n R n ( u, v) u + v R R n R n Ces opérations satisfont les (α, u) α u et une action des scalaires sur les vecteurs Propriétés 1 (R n, +, ) est un espace vectoriel sur R Autrement dit, si u, v et w sont des vecteurs de R n, et si α et β sont des scalaires, alors les assertions suivantes sont satisfaites : [EV1] ( u + v) + w = u + ( v + w) [EV2] u + v = v + u [EV3] u + 0 p = 0 p + u = u [EV4] u + ( 1) u = 0 p [EV5] α( u + v) = α u + α v [EV6] (α + β) u = α u + β u [EV7] (αβ) u = α(β u) [EV8] 1 u = u 12 Combinaisons linéaires Dénition 1 Soit p 1 un entier Considérons une famille nie F = ( u 1,, u p ) de vecteurs de R n Une combinaison linéaire de la famille F est un vecteur de la forme p α k u k = α 1 u 1 + + α p u p, k=1 avec (α 1,, α p ) R p 1

2 CHAPITRE 1 L'ESPACE VECTORIEL R N On note vect (F) l'ensemble des combinaisons linéaires de la famille F Par convention, on pose également vect ( ) = { 0 n } vect (F) = { v R n : (α 1,, α p ) R p v = p α k u k } Exemple 1 Si 1 i n, notons e i = (0,, 0, 1, 0,, 0) le vecteur de R n dont toutes les coordonnées canoniques sont nulles, sauf la i-ième qui vaut 1 Si x 1,, x n sont des réels, alors n (x 1,, x n ) = x i e i On en déduit que tout vecteur de R n est de manière unique combinaison i=1 linéaire de la famille ( e 1,, e n ) On appelle cette famille la base canonique de R n Exemple 2 Notons ( e 1,, e n ) la base canonique de R n Si 1 k n, alors k=1 vect ( e 1,, e k ) = { (x 1,, x n ) R n : x k+1 = = x n = 0 } En eet, si (α 1,, α k ) R k, alors k α i e i = (α 1,, α k, 0,, 0), donc i=1 k α i e i { (x 1,, x n ) R n : x k+1 = = x n = 0 } i=1 Réciproquement, si u = (x 1,, x n ) R n satisfait x k+1 = = x n = 0, alors u = (x 1,, x k, 0,, 0) = k x i e i vect ( e 1,, e k ) i=1 13 Sous-espaces vectoriels de R n Un sous-espace vectoriel (parfois noté sev) de R n est une partie V de R n satisfaisant les trois conditions : [SEV1] 0 n V [SEV2] u V v V ( u + v) V [SEV3] α R u V (α u) V Exemple 3 R n est clairement un sous-espace vectoriel de R n L'ensemble { 0 n } est lui aussi un sous-espace vectoriel de R n Proposition 1 Soit V un sous-espace vectoriel de R n Soit ( u 1,, u p ) une famille de vecteurs de V Toute combinaison linéaire de la famille ( u 1,, u p ) appartient à V Proposition 2 Soit ( u 1,, u p ) une famille de vecteurs de R n L'ensemble vect ( u 1,, u p ) est le plus petit sous-espace vectoriel contenant tous les u j Précisément, [1] j {1,, p} u j vect ( u 1,, u p ) [2] vect ( u 1,, u p ) est un sous-espace vectoriel de R n [3] Si V est un sev de R n contenant les vecteurs u j, alors vect ( u 1,, u p ) V

14 EXERCICES DU CHAPITRE 1 3 Dénition 2 Soit V un sous-espace vectoriel de R n Une famille génératrice de V est une famille ( u 1,, u p ) de vecteurs de R n telle que V = vect ( u 1,, u p ) Cela revient à dire que les vecteurs u i sont tous dans V et que tout vecteur de V peut s'écrire comme combinaison linéaire de la famille ( u 1,, u p ) Exemple 4 Posons F = { (x, y, z) R 3 : x + 2y 3z = 0 } Alors F est un sev de R 3 En eet, SEV1 : 0 + 20 30 = 0 donc 0 F SEV2 : Supposons u = (x, y, z) F et v = (x, y, z ) F Autrement dit, on a x + 2y 3z = 0 et x + 2y 3z = 0 En additionnant ces deux équations, on obtient (x + x ) + 2(y + y ) 3(z + z ) = (x + 2y 3z) + (x + 2y 3z ) = 0 + 0 = 0 Ainsi, u + v = (x + x, y + y, z + z ) F F est donc stable par addition SEV3 : Supposons u = (x, y, z) F et α R On a donc x + 2y 3z = 0 En multipliant cette équation par le scalaire α, on obtient (αx) + 2(αy) 3(αz) = α(x + 2y 3z) = α0 = 0 Ainsi, α u = (αx, αy, αz) F F est donc stable par multiplication par un scalaire Remarquons qu'un vecteur de F s'écrit ( 2y + 3z, y, z) = y( 2, 1, 0) + z(3, 0, 1) Ainsi tout vecteur de F est combinaison de la famille ( u 1 = ( 2, 1, 0), u 2 = (3, 0, 1)) Par ailleurs, u 1 F ( car ( 2) + 21 30 = 0 ) et u 2 F ( car 3 + 20 31 = 0 ) Ainsi la famille ( u 1, u 2 ) est génératrice de F Proposition 3 Soient V et W des sous-espaces vectoriels de R n Alors V W est un sous-espace vectoriel de R n Dénition 3 Soient V et W des sous-espaces vectoriels de R n On dit qu'ils sont en somme directe, et on note V W, lorsque V W = { 0 n } Proposition 4 Soient V et W des sous-espaces vectoriels de R n Alors l'ensemble est un sous-espace vectoriel de R n V + W = { u R n : v V w W u = v + w } Dénition 4 Soient V et W des sous-espaces vectoriels de R n On dit que W est un supplémentaire de V si V W = { 0 n } et V + W = R n Proposition 5 Soit V un sous-espace vectoriel de R n Si W est un supplémentaire de V, alors u R n!( v, w) V W u = v + w 14 Exercices du chapitre 1 Exercice 1 : Considérons les vecteurs de R 2 : u 1 = (1, 1), u 2 = (2, 3), u 3 = (4, 5) 1 Calculer les combinaisons linéaires suivantes : 3 u 1 +2 u 2 u 3, u 1 +5 u 2 4 u 3, 2 u 1 +9 u 2 5 u 3, et u 1 + u 2 + 6 u 3 2 Déduire d'un calcul précédent que u 3 est combinaison linéaire de u 1 et u 2 3 En déduire que vect ( u 1, u 2, u 3 ) = vect ( u 1, u 2 )

4 CHAPITRE 1 L'ESPACE VECTORIEL R N Exercice 2 : Parmi les parties suivantes de R 3, lesquelles sont des sous-espaces vectoriels de R 3? Pour chacun de ces sous-espaces vectoriels, trouver une famille génératrice 1 A = { (x, y, z) R 3 : xyz = 0 } 2 B = { (x, y, z) R 3 : 3x + 2y + 5z = 0 } 3 C = { (x, y, z) R 3 : x + y + z = 4 } 4 D = { (x, y, z) R 3 : x + 2z = 0 et y 3z = 0 } Exercice 3 : Posons V = { (x, y, z) R 3 : 8x 18y + 7z = 0 }, u = (1, 2, 4) et v = ( 3, 1, 6) 1 Vérier que V est un sous-espace vectoriel de R 3 2 Vérier que u V et v V 3 Montrer que ( u, v) est une famille génératrice de V Exercice 4 : Notons V = { (x, y) R 2 : y = 0 } et W = { x, y) R 2 : x = 0 } 1 Représenter V et W dans le plan R 2 2 Vérier que V et W sont des sous-espaces vectoriels de R 2 3 La partie V W est-elle un sous-espace vectoriel de R 2? Exercice 5 : Soient V et W deux sous-espaces vectoriels de R n On dénit un ensemble V + W = { u R n : v V w W u = v + w } 1 Montrer que V + W est un sous-espace vectoriel de R n 2 Soit ( v 1,, v p ) une famille génératrice de V et ( w 1,, w q ) une famille génératrice de W Montrer qu'alors ( v 1,, v p, w 1,, w q ) est une famille génératrice de V + W Exercice 6 : Notons V l'ensemble des solutions du système à 5 inconnues : x 1 2x 3 8x 5 = 0 x 2 5x 3 + 3x 5 = 0 x 4 x 5 = 0 1 Montrer que V est un sous-espace vectoriel de R 5 2 Vérier que si v V, alors toutes les coordonnées canoniques de v V peuvent s'écrire en fonction des seules coordonnées x 3 et x 5 En déduire la forme générale d'un vecteur de V 3 Construire une famille génératrice à deux vecteurs de V 4 Existe-t'il un vecteur u de V satisfaisant V = vect ( u)?

Chapitre 2 La méthode du pivot de Gauss 21 Dénition d'une matrice Dénition 5 Soient n > 0 et p > 0 des entiers Une matrice A de taille (n, p) est un tableau A[1, 1] A[1, p] A = de nombres réels à n lignes et p colonnes On note aussi souvent A[n, 1] A[n, p] a i,j = A[i, j] Si n = 1, on dira que A est un vecteur ligne Si p = 1, on dira que A est un vecteur colonne Si 1 i n, on note L i (A) = ( A[i, 1] A[i, p] ) la i-ième ligne de la matrice A Si 1 j p, on note C j (A) = A[1, j] A[n, j] la j-ième colonne de la matrice A Exemple 5 La matrice nulle 0 n,p est la matrice de taille (n, p) dont tous les coecients sont nuls Exemple 6 La matrice unité I n de taille n est la matrice carrée de taille n dont tous les coecients non diagonaux sont nuls, et dont tous les coecients diagonaux sont égaux à 1 : 1 0 I n = 0 1 On appelle symbole de Kronecker le réel δ i,j déni par δ i,j = 1 si i = j et δ i,j = 0 sinon On a alors (i, j) {1,, n} 2 I n [i, j] = δ i,j 22 Opérations élémentaires sur les lignes d'une matrice Il existe 3 types d'opérations élémentaires sur les lignes d'une matrice : Transvection, dilatation et permutation Dénition 6 On se donne deux numéros de lignes i k, et un scalaire λ quelconque L'opération de transvection de rapport λ sur la ligne L i le long de la ligne L k est l'opération notée L i L i + λl k consistant à remplacer la ligne L i par la ligne L i + λl k 5

6 CHAPITRE 2 LA MÉTHODE DU PIVOT DE GAUSS Exemple 7 ( 1 4 2 2 3 7 ) L 2 L 2 2L 1 produit la matrice ( 1 4 2 0 5 11 Dénition 7 On se donne un numéro de ligne i, et un scalaire non nul λ L'opération de dilatation de rapport λ sur la ligne i, notée L i λl i, consiste à multiplier la ligne L i par le scalaire λ Exemple 8 ( 1 5 2 6 ) L 2 1 2 L 2 produit la matrice ( 1 5 1 3 Dénition 8 On se donne deux numéros de lignes i k L'opération de permutation des lignes L i et L k, notée L i L k, consiste à échanger les lignes L i et L k ( ) ( ) 0 8 1 9 Exemple 9 produit la matrice 1 9 L 1 L 2 0 8 23 Matrices échelonnées Dénition 9 Soient A une matrice de taille (n, p), et k un entier satisfaisant 1 k n Si la ligne L k de A est nulle, on pose j k (A) = p Sinon, on appelle pivot de la ligne L k (A) son premier coecient non nul en partant de la gauche On note alors j k (A) le nombre de zéros de la ligne situés à gauche du pivot L'entier j k (A) sera nommé la profondeur de la ligne L k (A) Remarquons tout de suite que la ligne L k (A) est nulle si et seulement si j k (A) = p Exemple 10 Nous avons entouré les pivots de la matrice ) 0 1 5 0 1 3 7 4 0 0 6 8 0 0 0 0 ) j 1 = 1 j 2 = 0 j 3 = 2 j 4 = 4 Dénition 10 Soit M une matrice de taille (n, p) Nous dirons que la matrice M est échelonnée si les deux conditions suivantes sont satisfaites : Ech1 La suite (j 1 (M),, j n (M)) est croissante Ech2 Si k est un entier tel que 1 k < n et j k (M) < p, alors j k (M) < j k+1 (M) Les pivots sont donc rangés par ordre strictement croissant dans la matrice En particulier, chaque colonne contient au plus un pivot Une colonne d'une matrice échelonnée est dite principale si elle contient un pivot Sinon, on dit que la colonne est auxiliaire Nous noterons P M = { j {1,, p} : C j (M) est principale } et A M = { j {1,, p} : C j (M) est auxiliaire } Exemple 11 La matrice de l'exemple précédent n'était pas échelonnée, car j 2 < j 1 Si on échange 1 3 7 4 les deux premières lignes, on obtient en revanche une matrice échelonnée : 0 1 5 0 0 0 6 8 0 0 0 0 Les 3 premières colonnes sont principales, la dernière est auxiliaire 24 Echelonnement d'une matrice 241 Enoncé du théorème d'existence Dénition 11 Soit A une matrice Un échelonnement de A est une matrice échelonnée B déduite de A par une suite d'opérations élémentaires sur les lignes Théorème 1 Soit A une matrice de taille (n, p) Il existe au moins un échelonnement de A

24 ECHELONNEMENT D'UNE MATRICE 7 242 Méthode du pivot de Gauss Soit A une matrice non échelonnée de taille (n, p) En particulier, A est non nulle et possède donc des pivots La notation M désignera une matrice variable Au départ, M = A En aboutissement de la méthode du pivot de Gauss, la variable M devient un échelonnement de A Nous utilisons deux curseurs, l'un L pour les lignes de M et l'autre C pour ses colonnes Au départ, L = L 1 et C est le colonne la plus à gauche qui contient un pivot (autrement dit la première colonne non nulle) Notons a le coecient à l'intersection de la ligne L et de la colonne C Si a = 0, soit i le numéro d'une ligne d'un pivot de la colonne C En permutant les lignes L i et L, on se ramène au cas où a 0 Soit b un autre pivot de la colonne C Si i désigne le numéro de ligne du pivot b, la transvection L i L i b L nous ramène au cas où b = 0 En faisant cette a opération pour chaque pivot de la colonne C autre que a, on se ramène au cas où C ne contient que ce seul pivot Si M n'est toujours pas échelonnée, on déplace le curseur de ligne d'un cran vers le bas, et le curseur de colonne vers la droite jusqu'à la colonne suivante contenant un pivot, et on recommence le processus jusqu'à obtenir l'échelonnement cherché Exemple 12 Nous allons échelonner la matrice suivante : 2 3 6 7 4 11 18 18 L 2 L 2 2L 1 2 3 6 0 L 3 L 3 L 1 2 13 4 10 L 4 L 4 + L 1 2 3 6 7 0 5 6 4 0 0 0 7 0 10 2 3 2 3 6 7 0 5 6 4 0 0 0 7 0 0 14 5 2 3 6 7 0 5 6 4 0 0 14 5 L 4 L 4 + 2L 2 L 3 L 4 0 0 0 7 Cette matrice est échelonnée 243 Rang d'une matrice Proposition 6 Soit A une matrice de taille (n, p) Soient B et B sont deux échelonnement de A Alors P B = P B Dénition 12 Soit A une matrice de taille (n, p) Le nombre de pivots d'un échelonnement B de A est égal à cardp B, donc ne dépend pas du choix de cet échelonnement : On l'appelle le rang de la matrice A, noté rg(a) Exemple 13 Soit A = matrice : 1 1 1 1 1 3 5 2 5 11 13 8 Pour calculer le rang de A, nous échelonnons la

8 CHAPITRE 2 LA MÉTHODE DU PIVOT DE GAUSS 1 1 1 1 1 3 5 2 L 2 L 2 L 1 5 11 13 8 L 3 L 3 5L 1 1 1 1 1 0 2 6 1 0 6 18 3 L 3 L 3 3L 2 0 2 6 1 Cette matrice échelonnée contient 2 pivots, donc rg(a) = 2 1 1 1 1 0 0 0 0 Proposition 7 Soit A une matrice de taille (n, p) Alors, rg(a) min(n, p) Cela résulte du fait qu'il y a au plus un pivot par ligne et un pivot par colonne dans une matrice échelonnée 25 Réduction d'une matrice échelonnée 251 Existence et unicité d'un échelonnement réduit Dénition 13 Soit A une matrice de taille (n, p) On dira que A est échelonnée réduite si A est échelonnée, si les pivots sont tous égaux à 1, et si chaque colonne principale de A ne possède qu'un seul coecient non nul : le pivot de cette colonne Autrement dit, A est échelonnée et chaque colonne principale de A est un vecteur de la base canonique de R n Théorème 2 Soit A une matrice Il existe un unique échelonnement réduit de A 252 Méthode de réduction d'une matrice échelonnée Soit A une matrice échelonnée de taille (n, p) On commence avec M = A Si M est nulle, elle est échelonnée réduite Sinon, on place les curseurs de ligne L sur la dernière ligne non nulle de A et le curseur de colonne C sur la colonne portant le pivot de L Soit a la valeur de ce pivot On eectue la dilatation L i 1 a L i pour se ramener au cas où a = 1 Puis, à l'aide de transvections de la forme L i L i + λl, on annule tous les coecients dans la colonne C au-dessus du pivot Si M n'est toujours pas réduite, on déplace le curseur de ligne L d'un cran vers le haut et le curseur de colonne C sur la colonne portant le pivot de L On recommence alors le processus jusqu'à ce que la matrice soit réduite Exemple 14 On part de la matrice échelonnée suivante Remarquons qu'on peut mettre tous les pivots à la valeur 1 dès le départ Nous n'indiquons que le curseur de colonne pour le pas 1 2 3 4 surcharger 0 11 13 20 L 2 1/11 L 2 0 0 16 39 L 3 1/16 L 3 1 2 3 4 0 1 13/11 20/11 0 0 1 39/16 1 2 0 53/16 0 1 0 17/16 0 0 1 39/16 1 0 0 19/16 0 1 0 17/16 0 0 1 39/16 L 1 L 1 3L 3 L 2 L 2 13/11L 3 L 1 L 1 2L 2 Cette matrice est échelonnée réduite

26 EXERCICES DU CHAPITRE 2 9 26 Exercices du chapitre 2 Exercice 1 : Pour chacune des matrices A i ci-dessous, 0 1 3 4 8 5 0 7 2 4 8 5 A 1 = 0 0 0 1 2 3 0 0 0 4 5 6, A 2 = 1 0 0 5 2 3 2 0 0 3 5 4 0 0 2 0 8 9 0 0 2 0 8 9 A 3 = A 5 = 1 0 0 5 5 7 0 0 1 0 2 3 0 0 0 0 2 3 0 0 0 0 0 0, A 4 = 1 2 7 3 7 15 13 27 93 32 54 151 23 48 165 56 92 263 1 2 3 4 5 6 0 0 0 5 2 3 4 0 0 5 0 7 0 0 8 0 4 3, A 6 = 1 2 5 1 2 7 4 5 1 1 7 7 3 4 3 5 1) Donner les profondeurs des lignes de A i La matrice A i est-elle échelonnée? 2) Calculer un échelonnement M i de A i 3) Déterminer les colonnes principales et les colonnes auxiliaires de M i 4) Donner le rang de A i 5) Calculer l'échelonnement réduit B i de A i Exercice 2 : Soit M une matrice de taille (n, p) Si 1 q p, on note M q la matrice formée des q premières colonnes de M 1) Vérier que si 1 k n, alors j k (M q ) = min(j k (M), q) 2) En déduire que si M est échelonnée, alors M q est échelonnée Exercice 3 : Expliquer comment calculer un échelonnement d'une matrice quelconque seulement avec des transvections Exercice 4 : Pour toute matrice A de taille (n, p) et pour tout q {1,, p}, on note V q (A) le sous-espace vectoriel engendré par les q premières colonnes de A On note par ailleurs ( e 1,, e n ) la base canonique de R n 1 Vérier que A M n,p q {1,, p 1} V q (A) V q+1 (A) 2 Vérier que A M n,p q {1,, p 1} V q (A) = V q+1 (A) C q+1 (A) V q (A) 3 On suppose ici que A est une matrice échelonnée réduite de taille (n, p) On note j 0 (A) = 0 Vérier que si 0 k n 1 et si j k (A) < q j k+1 (A), alors V q (A) = vect ( e 1,, e k ) 4 Soit A une matrice de taille (n, p) et B une matrice déduite de A par une opération élémentaire sur les lignes Vérier que q {1,, p 1} V q (A) = V q+1 (A) V q (B) = V q+1 (B) 5 En déduire une preuve de la proposition 6 du chapitre 2

10 CHAPITRE 2 LA MÉTHODE DU PIVOT DE GAUSS

Chapitre 3 Résolution des systèmes linéaires Soit p 1 un entier Une équation linéaire d'inconnues (x 1,, x p ) est une équation de la forme a 1 x 1 + + a p x p = b Les a i et le coecient b sont des constantes réelles Un système linéaire d'inconnues (x 1,, x p ) est une suite nie d'équations linéaires en ces inconnues Une solution du système est un vecteur de R p solution de chacune des équations formant le système On présente traditionnellement un tel système linéaire S à n équations comme suit : S : a 1,1 x 1 + + a 1,p x p = b 1 a n,1 x 1 + + a n,p x p = b n Exemple 15 Le système d'équations à deux équations et trois inconnues x, y et z ci-dessous est linéaire : { 2x + y + 3z = 21 3x + 2y + 5z = 32 31 Généralités sur les systèmes linéaires 311 Matrices associées à un système On reprend les notations précédentes Notons A la matrice de taille (n, p) dont les coecients sont les a i,j, où 1 i n et 1 j p On dit que A est la matrice du système S On appelle matrice augmentée du système S la matrice de taille (n, p + 1) : (A b) = a 1,1 a 1,p b 1 a n,1 a n,p b n Exemple 16 On reprend le système de l'exemple 15 Sa matrice est A = ( ) 2 1 3 21 matrice augmentée est (A b) = 3 2 5 32 ( 2 1 3 3 2 5 ) Sa 11

12 CHAPITRE 3 RÉSOLUTION DES SYSTÈMES LINÉAIRES 312 Ensemble des solutions d'un système L'ensemble des solutions du système S est la partie de R p ci-dessous : Sol(S) = Sol(A b) = { (t 1,, t p ) R p : i {1,, n} a i,1 t 1 + + a i,p t p = b i } Nous dirons d'un système S qu'il est compatible si Sol(S) Proposition 8 Soient S et S deux systèmes linéaires, de matrices augmentées (A b) et (A b ) respectivement Si la matrice (A b ) peut de déduire de (A b) par une suite d'opérations élémentaires sur les lignes, alors Sol(S ) = Sol(S) Exemple 17 Calculons l'ensemble des solutions du système de l'exemple 15 : On applique la méthode du pivot de Gauss pour obtenir une matrice échelonnée réduite La proposition précédente assure ( que l'ensemble ) des solutions n'est pas modié par les opérations sur les lignes eectuées 2 1 3 21 3 2 5 32 L 2 L 2 3 2 L 1 ( ) 2 1 3 21 L1 1/2L 1 ( 0 1/2 1/2 1/2 1 1/2 3/2 21/2 ) L 2 2L 2 L1 L 1 1/2L 2 ( 0 1 1 ) 1 1 0 1 10 0 1 1 1 Ainsi, l'ensemble des solutions cherché est aussi l'ensemble des solutions du système { x + z = 10 y + z = 1 Donc Sol(S) = {(10 z, 1 z, z) : z R} { x = 10 z y = 1 z 32 Description de l'ensemble des solutions d'un système linéaire Lemme 1 Soit M une matrice échelonnée réduite de taille (n, p), et S = (M b) un système de matrice M Notons r le nombre de pivots de la matrice M Si 1 k r, la k-ième équation du système S s'écrit x jk +1 + q A M M[k, q]x q = b k Si r + 1 k n, la k-ième équation du système s'écrit 0 = b k Théorème 3 Soit M une matrice échelonnée réduite de taille (n, p) Si q P M, la colonne C q possède un seul pivot, et on note i q le numéro de ligne de ce pivot Soit b un vecteur de R n On note S le système de matrice augmentée (M b) [1] Le système S est compatible si et seulement si, pour chaque ligne nulle L i de la matrice A, le coecient b i est nul [2] Supposons S compatible Si (t j ) j AM R A M, il existe une unique solution du système satisfaisant x j = t j pour tout j A M Ses coordonnées principales sont données par la formule q P x q = b iq M[i q, j]t j (31) j A M

32 DESCRIPTION DE L'ENSEMBLE DES SOLUTIONS D'UN SYSTÈME LINÉAIRE 13 Exemple 18 Nous allons résoudre le système linéaire d'inconnues x, y, z et t donné par x + y + z 5t = 16 3x + 3y + z 9t = 36 2x + 2y z t = 14 Nous commençons par mettre sa matrice sous forme échelonnée réduite : 1 1 1 5 16 3 3 1 9 36 L 2 L 2 3L 1 2 2 1 1 14 L 3 L 3 2L 1 1 1 1 5 16 0 0 2 6 12 0 0 3 9 18 1 1 1 5 16 L 3 L 3 3 2 L 2 0 0 2 6 12 L 2 1 2 L 2 0 0 0 0 0 Ce dernier système est sous forme échelonnée Les variables auxiliaires sont y et t Les variables principales sont x et z 1 1 1 5 16 L 1 L 1 L 2 0 0 1 3 6 0 0 0 0 0 1 1 0 2 10 x + y 2t = 10 0 0 1 3 6 : On obtient z 3t = 6 0 0 0 0 0 { 0 = 0 x = 10 y + 2t Ainsi (x, y, z, t) est solution du système si et seulement si z = 6 + 3t L'ensemble des solutions est donc { (10 y + 2t, y, 6 + 3t, t) : (y, t) R 2 } Corollaire 1 Critère de compatibilité pour un système échelonné Soit S un système échelonné de matrice augmentée (A b) Alors S est compatible si et seulement si, pour toute ligne nulle L i de la matrice A, le coecient b i correspondant au second membre est nul x + y + z = 2 Exemple 19 Nous allons vérier que le système 3x + 2y + z = 4 x + z = 7 est incompatible : 1 1 1 2 3 2 1 4 1 0 1 7 1 1 1 2 0 1 2 10 0 1 2 9 1 1 1 2 0 1 2 10 0 0 0 1 L 2 L 2 3L 1 L 3 L 3 + L 1 L 3 L 3 + L 2 En regardant la dernière ligne, on obtient l'équation 0 = 1 qui n'a clairement pas de solution : Le système est bien incompatible

14 CHAPITRE 3 RÉSOLUTION DES SYSTÈMES LINÉAIRES 33 Structure de l'ensemble des solutions d'un système 331 Le cas particulier d'un système homogène : Noyau d'une matrice Dénition 14 Un système linéaire est homogène lorsque tous ses seconds membres sont nuls Théorème 4 Soit S un système linéaire homogène à p inconnues Alors son ensemble des solutions est un sous-espace vectoriel de R p En particulier, S est compatible : Il admet la solution nulle Dénition 15 Soit A une matrice de taille (n, p) On appelle noyau de A le sous-espace vectoriel de R p formé des solutions du système (A 0 n ) On note ker(a) = Sol(A 0 n ) Théorème 5 Soit M une matrice échelonnée réduite de taille (n, p) Si j A M, notons s j l'unique vecteur de ker(m) satisfaisant x j = 1 et x l = 0 si l A M et l j s ker(m)!(t j ) j AM R A M s = j A M t j s j Nous dirons que la famille ( s j ) j AM est une base de ker(m) Exemple 20 Considérons le système linéaire homogène de matrice échelonnée réduite : 1 0 8 2 0 9 0 1 3 5 0 4 0 0 0 0 1 1 Les variables auxiliaires sont x 3, x 4 et x 6 Construisons la base de solutions ( s 3, s 4, s 6 ) donnée par le théorème précédent : Le vecteur s 3 s'obtient en résolvant le système avec les conditions supplémentaires x 3 = 1, x 4 = 0 et x 6 = 0 On trouve s 3 = (8, 3, 1, 0, 0, 0) Le vecteur s 4 s'obtient en résolvant le système avec les conditions supplémentaires x 3 = 0, x 4 = 1 et x 6 = 0 On trouve s 4 = ( 2, 5, 0, 1, 0, 0) Le vecteur s 6 s'obtient en résolvant le système avec les conditions supplémentaires x 3 = 0, x 4 = 0 et x 6 = 1 On trouve s 6 = (9, 4, 0, 0, 1, 1) 332 Cas général Dénition 16 Une partie D de R p est un sous-espace ane de R p s'il existe un vecteur u 0 et un sous-espace vectoriel V de R p tels que u R p u D ( u u 0 ) V Nous dirons que D est le sous-espace ane de direction V passant par u 0 Théorème 6 Soit S un système linéaire, de matrice augmentée (A b) Si s 0 est une solution particulière de S, Sol(S) est le sous-espace ane de direction ker(a) passant par s 0 Compte tenu de la description des solutions d'un système homogène, on obtient nalement le

34 QUELQUES CONSÉQUENCES DE LA STRUCTURE DES SOLUTIONS 15 Théorème 7 Soit S un système linéaire compatible, de matrice augmentée (A b) échelonnée réduite, de taille (n, p) Soit s 0 = (x 0,, x n ) l'unique solution du système S telle que x j = 0 si j A Notons ( s j ) j A la base de solutions de ker(a) construite au théorème 5 Alors Sol(S) = { s 0 + j A t j s j : (t j ) j A R A } Ainsi, pour résoudre un système linéaire quelconque, il sut de le mettre sous forme échelonnée réduite On lit directement sous cette forme une solution particulière s'il est compatible, et une base de solutions du système homogène associé Exemple 21 Nous allons résoudre le système linéaire : x 1 + 4x 2 22x 3 + x 4 + 9x 5 = 33 5x 1 + x 2 15x 3 16x 5 = 17 2x 1 + x 2 9x 3 + x 4 7x 5 = 14 On commence par mettre le système sous forme échelonnée réduite : 1 4 22 1 9 33 5 1 15 0 16 17 L 2 L 2 5L 1 2 1 9 1 7 14 L 3 L 3 2L 1 1 4 22 1 9 33 0 19 95 5 61 148 0 7 35 1 25 52 1 4 22 1 9 33 L 3 L 3 7 19 L 2 0 19 95 5 61 148 16 0 0 0 48 L 48 2 1 19 L 2 L 3 19 16 19 19 19 3 1 4 22 1 9 33 L 5 61 148 1 L 1 L 3 0 1 5 L 2 L 2 5 19 19 19 19 3 0 0 0 1 3 3 1 4 22 0 12 30 0 1 5 0 4 7 L 1 L 1 4L 2 0 0 0 1 3 3 1 0 2 0 4 2 0 1 5 0 4 7 0 0 0 1 3 3 Ce système échelonné n'a aucune ligne nulle, donc il est compatible Une solution particulière est donnée en résolvant le système avec les conditions supplémentaires x 3 = x 5 = 0 On trouve s 0 = (2, 7, 0, 3, 0) Par ailleurs, une base de solutions du système homogène associé est donnée par les vecteurs s 3 = (2, 5, 1, 0, 0) et s 5 = (4, 4, 0, 3, 1)) Les solutions du système sont donc les vecteurs de la forme : s 0 + α s 3 + β s 5 = (2 + 2α + 4β, 7 + 5α 4β, α, 3 + 3β, β) où α et β sont des scalaires quelconques 34 Quelques conséquences de la structure des solutions Proposition 9 Soit S = (A b) un système compatible à p inconnues Alors S possède une seule solution si et seulement si rg(a) = p

16 CHAPITRE 3 RÉSOLUTION DES SYSTÈMES LINÉAIRES Proposition 10 Soit A une matrice de taille (n, p) Tout système de matrice A est compatible si et seulement si rg(a) = n 35 Exercices du chapitre 3 Exercice 1 : Pour chacun des systèmes ci-dessous, a) Déterminer s'il est compatible b) S'il est compatible, donner l'ensemble de ses solutions c) S'il est compatible, donner une solution particulière et une base de solutions du système homogène associé 1 2 3 4 5 x + 2y + 3z = 10 2x + y z = 3 x + 3y + 2z = 5 3x 4y + 5z = 1 7x 2y 4z = 3 x 6y + 14z = 8 6x + 10y + 4z 7t = 33 7x + 9y + 10z + 12t = 57 4x + 5y + 6z + 8t = 38 6x 1 + 6x 2 + 2x 3 58x 4 + x 5 = 53 3x 1 + 3x 2 + x 3 29x 4 + x 5 = 31 5x 1 + 5x 2 + 2x 3 50x 4 + x 5 = 48 3x 1 + 3x 2 24x 4 + x 5 = 24 4x + 5y + 3z + 21y = 18 3x + 3y + 4z + 27t = 10 2x + 2y + 3z + 20t = 10 18x + 22y + 15z + 104t = 85 Exercice 2 : Trouver tous les polynômes f(x) = ax 3 + bx 2 + cx + d satisfaisant f( 1) = 0, f(0) = 5, f(1) = 4 et f (1) = 0 Exercice 3 : On considère un rectangle satisfaisant les conditions suivantes : Si on augmente de 5 m la largeur d'un rectangle et de 4 m sa longueur, son aire augmente de 180 m 2 Si on diminue sa largeur de 2 m et sa longueur de 3 m, l'aire diminue de 72 m 2 Calculez les dimensions du rectangle Exercice 4 : Soit D un sous-espace ane de R n de direction V Vérier qu'alors v R n v V ( u 1 D u 2 D v = u 2 u 1 ) En déduire que la direction de D est entièrement déterminée par V Exercice 5 : On note E l'ensemble des applications de f : R R satisfaisant (α, β) R 2 x R f(x) = α cos x + β sin x 1 Montrer que les scalaires α et β sont uniquement déterminés par f 2 Vérier que toutes les fonctions f de E sont dérivables 3 Montrer qu'il existe une unique fonction f de E telle que f( π 4 ) = 1 et f ( π 6 ) = 3

Chapitre 4 Familles de vecteurs de R n 41 Généralités sur les familles de vecteurs de R n Fixons une famille F = ( u 1,, u p ) de vecteurs de R n Dénition 17 On dit que F est libre, ou encore linéairement indépendante, si (α 1,, α p ) R p α 1 u 1 + + α p u p = 0 n α 1 = = α p = 0 Autrement dit, la seule combinaison linéaire de la famille F donnant le vecteur nul est celle dont tous les coecients sont nuls Par convention, la famille vide est libre Dans le cas contraire, on dit que F est liée ou linéairement dépendante Exemple 22 Notons u = (1, 1), v = (1, 2), et w = (1, 3) Nous allons vérier que la famille ( u, v) est libre et que la famille ( u, v, w) est liée : Pour voir le premier point, soient α et β des scalaires Alors α u + β v = (α + β, α + 2β) Donc, si α u + β v = 0, on a α + β = 0 et α + 2β = 0 On a alors β = (α + 2β) (α + β) = 0 0 = 0 et ensuite α = α + 0 = α + β = 0 La famille ( u, v) est libre Pour voir le second point, soient α, β et γ des scalaires Alors α u + β v + γ w = (α + β + γ, α + 2β + 3γ) Donc α u + β v + γ w = 0 si ( et seulement ) si (α, β, γ) est solution du système homogène de matrice : 1 1 1 ( 1 2 3 1 1 1 ) L 2 L 2 L 1 L1 L 1 L 2 0 1 2 ( ) 1 0 1 0 1 2 La colonne C 3 est l'unique colonne auxiliaire Une base de solutions du système est donné par le vecteur (1, 2, 1) En particulier, u 2 v + w = 0 La famille ( u, v, w) est donc liée Dénition 18 Soit V un sous-espace vectoriel de R n contenant les vecteurs de la famille F On rappelle que F est génératrice de V si de plus tout vecteur de V est combinaison linéaire de la famille F On dit que F est une base de V si c'est une famille libre et génératrice de V Par convention, pour V = { 0}, son unique base est la famille vide Exemple 23 La base canonique de R n est une base de R n 17

18 CHAPITRE 4 FAMILLES DE VECTEURS DE R N Théorème et dénition 1 Soit B = ( e 1,, e d ) une base d'un sous-espace vectoriel V de R n Alors tout vecteur de V s'écrit de manière unique comme combinaison linéaire de la famille B : v V!(α 1,, α d ) R d v = α 1 e 1 + + α d e d Le scalaire α i est la i-ième coordonnée de v dans la base B Exemple 24 Reprenons les notations de l'exemple 22 On a déjà vu que la famille ( u, v) est libre Montrons qu'elle est également génératrice, autrement dit une base de R 2 Soit (x, y) R 2 Le vecteur (x, y) est combinaison linéaire de la famille ( u, v) si et seulement si il existe des scalaires α et β tels que ( (x, y) = α u ) + β v = (α + β, α + 2β) Cela revient à dire que le système 1 1 x de matrice augmentée est compatible Vérions le : 1 2 y ( ) 1 1 x ( 1 2 y 1 1 x L 2 L 2 L ) 1 L1 L 1 L 2 ( 0 1 y x 1 0 2x y ) 0 1 y x Ce système possède donc une unique solution : α = 2x y et β = y x En particulier, on obtient (x, y) R 2 (x, y) = (2x y) u + (y x) v vect ( u, v) Ainsi, la famille ( u, v) engendre R 2 : C'est une base de R 2 Les coordonnées du vecteur (x, y) dans la base B = ( u, v) sont (2x y) et (y x) d'après l'équation ci-dessus 42 Matrice d'une famille de vecteurs dans une base Fixons un sous-espace vectoriel V de R n, et soit B = ( e 1,, e d ) une base de V Si F = ( v 1,, v p ) est une famille de vecteurs de V, nous noterons a i,j la i-ième coordonnée du vecteur v j dans la base B, pour 1 i d et 1 j p Autrement dit, j {1,, p} v j = d a i,j e i On obtient ainsi une matrice de taille (d, p) notée Mat B ( v 1,, v p ) = (a i,j ) 1 i d,1 j p Sa j-ième colonne donne les coordonnées du vecteur v j dans la base B On dira que c'est la matrice de la famille F dans la base B de V Exemple 25 On reprend la base B = ( u, v) de l'exemple 24 Posons ( w 1 = (4,) 7) et w 2 = (5, 6) 1 4 Comme w 1 = 1 u + 3 v et w 1 = 4 u + 1 v, on obtient Mat B ( w 1, w 2 ) = 3 1 Proposition 11 Caractérisation matricielle des familles libres Soit V un sous-espace vectoriel de R n, et soit B = ( e 1,, e d ) une base de V Si ( v 1,, v p ) est une famille de vecteurs de V, soit A = Mat B ( v 1,, v p ) Les assertions suivantes sont équivalentes : [1] La famille ( v 1,, v p ) est libre [2] Le système homogène de matrice A possède une unique solution (la solution nulle) [3] rg(a) = p i=1

43 DIMENSION D'UN SOUS-ESPACE VECTORIEL DE R N 19 Proposition 12 Caractérisation matricielle des familles génératrices Soit V un sous-espace vectoriel de R n, et soit B = ( e 1,, e d ) une base de V Si ( v 1,, v p ) est une famille de vecteurs de V, soit A = Mat B ( v 1,, v p ) Les assertions suivantes sont équivalentes : [1] La famille ( v 1,, v p ) est génératrice de V [2] Tout système de matrice A est compatible [3] rg(a) = d Corollaire 2 Soit V un sous-espace vectoriel de R n possédant une base à d vecteurs Soit ( v 1,, v p ) V p Alors, [1] Si ( v 1,, v p ) est une famille libre, alors p d [2] Si ( v 1,, v p ) est une famille génératrice de V, alors p d 43 Dimension d'un sous-espace vectoriel de R n Théorème 8 Soit V un sous-espace vectoriel de R n Il existe au moins une base de V Théorème et dénition 2 Soit V un sev de R n Toutes les bases de V ont le même nombre d de vecteurs On appelle ce nombre la dimension de V, et on note dim(v ) = d Cela résulte immédiatement du corollaire 2 Exemple 26 dim(r n ) = n car la base canonique de R n contient n vecteurs Proposition 13 Soient V et W des sev de R n satisfaisant V W Alors : [1] dim(v ) dim(w ) [2] Si dim(v ) = dim(w ), alors V = W 44 Calcul d'une base de l'image d'une matrice et interprétation du rang Dénition 19 Soit A une matrice de taille (n, p) On appelle image de la matrice A le sousespace vectoriel de R n engendré par les vecteurs colonnes de A On note im(a) = vect ( C 1 (A),, C p (A) ) Proposition 14 Soit A une matrice de taille (n, p) et v un vecteur colonne de R n Alors v im(a) le système (A v) est compatible En eet, (x 1,, x p ) est une solution de (A v) si et seulement si p x j C j (A) = v Théorème 9 Soit A une matrice de taille (n, p) Soit P l'ensemble des colonnes principales d'un échelonnement B de A Alors ( C j (A) ) j P est une base de im(a) En particulier, dim im(a) = rg(a) j=1

20 CHAPITRE 4 FAMILLES DE VECTEURS DE R N Exemple 27 Pour trouver une base de l'image de A = 1 1 3 2 5 4 2 1, on commence 1 4 2 5 par échelonner : 1 3 5 2 1 2 4 1 L 2 L 2 L 1 1 4 2 5 L 3 L 3 L 1 1 3 5 2 0 1 1 1 0 7 7 7 L 3 L 3 7L 2 1 3 5 2 0-1 1 1 On a P = {1, 2}, donc ((1, 1, 1), (3, 2, 4)) est une base de im(a) 0 0 0 0 45 Compléter une famille libre en une base Théorème 10 Théorème de la base incomplète Soit V un sous-espace vectoriel de R n Soit B une base de V Soit L une famille libre de V Alors, on peut compléter L avec des vecteurs de la base B pour obtenir une base de V contenant cette famille libre Exemple 28 La famille ( u = (1, 2, 3, 4), v = (1, 1, 2, 5) ) est libre On échelonne la matrice suivante dont l'image est égale à R 4 : Ces 4 dernières colonnes forment la base canonique 1 1 1 0 0 0 2 1 0 1 0 0 L 2 L 2 2L 1 3 2 0 0 1 0 L 3 L 3 3L 1 4 5 0 0 0 1 1 1 1 0 0 0 0 1 2 1 0 0 0 1 3 0 1 0 0 1 4 0 0 1 1 1 1 0 0 0 0 1 2 1 0 0 0 0 1 1 1 0 0 0 6 1 0 1 L 4 L 4 4L 1 L 3 L 3 L 2 L 4 L 4 + L 2 1 1 1 0 0 0 0-1 2 1 0 0 0 0-1 1 1 0 0 0 0 7 6 1 L 4 L 4 6L 3 On a P = {1, 2, 3, 4} Donc, en notant e 1 = (1, 0, 0, 0) et e 2 = (0, 1, 0, 0), la famille ( u, v, e 1, e 2 ) est une base de R 4 qui complète la famille libre ( u, v) 46 Le théorème du rang Théorème 11 Théorème du rang Soit A une matrice de taille (n, p) Alors dim ker(a) + rg(a) = p

47 EXERCICES DU CHAPITRE 4 21 47 Exercices du chapitre 4 Exercice 1 : Pour chacune des familles de vecteur F k de R n k ci-dessous, F 1 = ( (1, 2, 3), (2, 3, 4) ), n 1 = 3 F 2 = ( (1, 5), (3, 8), (7, 4) ), n 2 = 2 F 3 = ( (4, 5, 6), (6, 2, 1), (0, 11, 16) ), n 3 = 3 F 4 = ( (1, 1, 1, 1), (1, 2, 5, 9), (3, 2, 1, 4) ), n 4 = 4 1) Donner la matrice de la famille F k dans la base canonique de R n k 2) Déterminer si la famille F k est libre ou liée 3) Si F k est liée, donner une relation de dépendance linéaire entre ses vecteurs 4) Déterminer si la famille F k est génératrice de R n k 5) Si F k n'est pas génératrice de R n k, donner une condition nécessaire et susante pour qu'un vecteur de R n k soit combinaison linéaire de la famille F k Exercice 2 : Soit F = ( u 1, u 2, u 2, u 4, u 5 ), où u 1 = (1, 2, 3, 4), u 2 = ( 1, 5, 0, 7), u 3 = (1, 9, 6, 15), u 4 = (4, 7, 3, 1), u 5 = (4, 21, 9, 23) 1) Donner la matrice de la famille F dans la base canonique de R 4 2) Donner une base de vect F Quelle est sa dimension? 1 3 5 2 3 5 7 Exercice 3 : A = 10 7 13 0 2 1 8 5 4 6 5 3 2 6 1) Donner une base et la dimension de ker(a) 2) Compléter cette base de ker(a) en une base de R 7 Exercice 4 : Soit V un sous espace vectoriel de R n et (e 1,, e d ) une base de V Soient (e d+1,, e n ) une famille de vecteurs de R n telle que la famille (e 1,, e n ) soit une base de R n Montrer que W = vect (e d+1,, e n ) est un supplémentaire de V 1 2 3 4 5 Exercice 5 : Soit A = 2 1 0 6 7 1 8 5 4 6 En utilisant le résultat précédent, trouver 3 19 21 2 1 un supplémentaire W de im(a) dans R 4 et un supplémentaire V de ker(a) dans R 5

22 CHAPITRE 4 FAMILLES DE VECTEURS DE RN

Chapitre 5 Matrices On note M n,p l'ensemble des matrices de taille (n, p) Si n = p, on notera plus simplement M n = M n,n 51 M n,p est un espace vectoriel On dénit une addition sur M n,p par : a 1,1 a 1,p b 1,1 b 1,p + a n,1 a n,p b n,1 b n,p = a 1,1 + b 1,1 a 1,p + b 1,p a n,1 + b n,1 a n,p + b n,p On dénit une multiplication externe par un scalaire λ par : a 1,1 a 1,p λa 1,1 λa 1,p λ = a n,1 a n,p λa n,1 λa n,p Propriétés 2 Soient A, B et C des matrices de taille (n, p) Soient λ R et µ R Alors, [1] (A + B) + C = A + (B + C) [2] A + B = B + A [3] A + 0 n,p = 0 n,p + A = A [4] A + ( 1)A = 0 n,p [5] λ(a + B) = λa + λb [6] (λ + µ)a = λa + µa [7] (λµ)a = λ(µa) [8] 1A = A 52 Produit de deux matrices On va dénir un produit AB de deux matrices A et B seulement si la condition suivante est satisfaite : Le nombre de colonnes de A coïncide avec le nombre de lignes de B On commence par dénir le cas particulier où B est un vecteur colonne 23

24 CHAPITRE 5 MATRICES Dénition 20 Soient n 1 et p 1 des entiers, on dénit une application M n,p M p,1 M n,1 en posant ( A, X ) AX p A[1, j]x j x 1 A[1, j] A p p j=1 = x j C j (A) = x j = x j=1 j=1 p A[n, j] p A[n, j]x j On dit que AX est le produit de la matrice A par la matrice colonne X ( ) 1 7 2 Exemple 29 1 ( ) ( ) ( 1 1 7 2 = ( 1) + 1 + 2 2 3 6 2 3 6 2 j=1 ) = ( 10 7 Propriétés 3 On considère deux matrices A et B de taille (n, p), deux vecteurs colonnes X et Y de hauteur p, et un scalaire λ R Alors, [1] A(X + Y ) = AX + AY [2] (A + B)X = AX + BX [3] A(λX) = λ(ax) = (λa)x Dénition 21 Soient n, p et q des entiers strictement positifs Soient A une matrice de taille (n, p) et B une matrice de taille (p, q) Si 1 k q, la colonne C k (B) est de hauteur p, donc on peut former le vecteur colonne AC k (B)de hauteur n Il existe une unique matrice notée AB de taille (n, q) dont la k-ième colonne est AC k (B) pour 1 k q On a ainsi construit une application M n,p M p,q M n,q ( A, B ) AB Proposition 15 Calcul d'un produit de matrices Soient n, p et q des entiers strictement positifs Alors, si A M n,p et B M p,q, p i {1,, n} j {1,, q} (AB)[i, j] = A[i, k]b[k, j] Exemple 30 Prenons A = 1 2 5 2 3 7 k=1 et B = ( 4 1 5 8 2 6 8 5 ) ) Le nombre de colonnes de A est 2 Le nombre de lignes de B est 2 On peut donc calculer la matrice produit AB : On peut présenter les calculs comme suit : ( ) 4 1 5 8 = B 2 6 8 5 A = 1 2 5 2 3 7 0 24 2 11 17 39 21 9 71 2 50 11 = AB Par exemple, AB[1, 1] = 14 + 2( 2) = 4 4 = 0 et AB[2, 3] = 55 + ( 2)8 = 25 16 = 9

53 MATRICES CARRÉES INVERSIBLES 25 Propriétés 4 Soient n, p, q et r des entiers strictement positifs Alors 2 [1] A M n,p (B, C) M p,q A(B + C) = AB + AC [2] (A, B) M n,p 2 C M p,q (A + B)C = AC + BC [3] λ R A M n,p B M p,q A(λB) = λ(ab) = (λa)b [4] A M n,p B M p,q C M q,r (AB)C = A(BC) [5] A M n,p I n A = A [6] A M n,p AI p = A 53 Matrices carrées inversibles 531 Généralités Proposition et dénition 1 Soit U une matrice carrée de taille n On dit que U est inversible s'il existe une matrice V telle que UV = V U = I n La matrice V est alors unique et s'appelle l'inverse de U On notera V = U 1 Nous devons vérier l'unicité d'une matrice V satisfaisant UV = V U = I n Supposons que W soit une autre matrice carrée de taille n satisfaisant UW = W U = I n Alors W = WI n = W(UV ) = (WU)V = I n V = V Exemple 31 La matrice unité I n est inversible, et est son propre inverse, car I 2 n = I n Exemple 32 Soit D une matrice diagonale Autrement dit, D[i, j] = 0 si i j Alors D est inversible si et seulement si i {1,, n} D[i, i] 0 De plus, dans ce cas, D[1, 1] 1 0 D 1 = 0 D[n, n] 1 Proposition 16 Soient P et Q deux matrices inversibles de taille n Alors P Q est inversible, d'inverse (P Q) 1 = Q 1 P 1 En eet, (Q 1 P 1 )(P Q) = Q 1 (P 1 P )Q = Q 1 I n Q = Q 1 Q = I n et P Q(Q 1 P 1 ) = P (QQ 1 )P 1 = P I n P 1 = P P 1 = I n La matrice Q 1 P 1 est donc l'inverse de la matrice P Q Proposition 17 Soient U et V des matrices carrées de taille n Alors UV = I n VU = I n 532 Matrice d'une opération élémentaire sur les lignes Dénition 22 La matrice d'une opération élémentaire sur les lignes est la matrice obtenue en appliquant cette opération à la matrice identité I n Proposition 18 Soit U la matrice d'une opération élémentaire sur les lignes [1] La matrice U est inversible [2] Soit A une matrice de taille (n, p) Le produit UA s'identie à la matrice déduite de A en eectuant cette opération élémentaire Corollaire 3 Soit A une matrice de taille (n, p) et B un échelonnement de A Il existe une matrice inversible U telle que B = UA

26 CHAPITRE 5 MATRICES 533 Critères d'inversibilité Théorème 12 Soit U une matrice carrée de taille n Les assertions suivantes sont équivalentes : [1] La matrice U est inversible [2] Il existe une matrice carrée V telle que VU = I n [3] ker(u) = { 0 n } [4] rg(u) = n [5] im(u) = R n [6] Il existe une matrice carrée V telle que UV = I n [7] L'échelonnement réduit de U est la matrice I n En particulier, toute matrice inversible peut de décomposer en un produit de matrices d'opérations élémentaires sur les lignes Corollaire 4 Soient A et B deux matrices de taille (n, p) On peut déduire la matrice B de la matrice A par une suite d'opérations élémentaires sur les matrices si et seulement si il existe une matrice inversible U telle que B = UA Corollaire 5 Soit A une matrice de taille (n, p) Il existe une matrice inversible U de taille n telle que UA soit échelonnée Pour calculer une telle matrice, on peut employer la méthode suivante : On forme la matrice (A I n ) et on opère sur les lignes jusqu'à obtenir une matrice (A P ), où A est un échelonnement de A La matrice P est inversible et satisfait PA = A 534 Calcul de l'inverse : Méthode de Gauss-Jordan Théorème 13 Soit U une matrice carrée inversible de taille n On forme la matrice A = (U I n ) de taille (n, 2n) On applique à A la méthode du pivot de Gauss pour mettre la matrice U sous forme échelonnée réduite On obtient alors la matrice A = (I n U 1 ) 1 2 3 Exemple 33 Soit U = 2 7 6 Nous allons appliquer la méthode de Gauss-Jordan pour 3 1 5 vérier que U est inversible, et calculer son inverse : 1 2 3 1 0 0 2 7 6 0 1 0 L 2 L 2 2L 1 3 1 5 0 0 1 L 3 L 3 3L 1 1 2 3 1 0 0 0 3 0 2 1 0 0 5 4 3 0 1 L 3 L 3 + 5 3 L 2 1 2 3 1 0 0 0 3 0 2 1 0 L 2 1/3L 2 0 0 4 19/3 5/3 1 L 3 1/4L 3 Cette dernière matrice est échelonnée avec 3 pivots, donc de rang 3 Ainsi U est de rang 3, et donc inversible On poursuit le pivot de Gauss pour obtenir une matrice échelonnée réduite : 1 2 3 1 0 0 L 1 L 1 3L 3 0 1 0 2/3 1/3 0 0 0 1 19/12 5/12 1/4

54 CALCUL DE L'IMAGE D'UNE MATRICE 27 1 2 0 15/4 5/4 3/4 0 1 0 2/3 1/3 0 L 1 L 1 2L 2 0 0 1 19/12 5/12 1/4 1 0 0 29/12 7/12 3/4 0 1 0 2/3 1/3 0 Ainsi, U 1 = 0 0 1 19/12 5/12 1/4 29/12 7/12 3/4 2/3 1/3 0 19/12 5/12 1/4 54 Calcul de l'image d'une matrice Théorème 14 Soit A une matrice de taille (n, p) de rang r Soit U une matrice inversible de taille n telle que UA soit échelonnée Alors Exemple 34 A = 1 5 1 0 0 0 1 6 0 1 0 0 1 5 0 0 1 0 1 7 0 0 0 1 U[r + 1, 1] U[r + 1, p] im(a) = ker U[n, 1] U[n, n] 1 5 1 6 1 5 1 7 1 5 1 0 0 0 0 11 1 1 0 0 0 0 1 0 1 0 0 2 1 0 0 1 On commence par calculer U : L 2 L 2 L 1 L 3 L 3 L 1 L 4 L 4 L 1 1 5 1 0 0 0 0 11 1 1 0 0 0 0 1 0 1 0 0 0 13 2 0 11 L 4 11L 4 + 2L 2 Ainsi, l'image de A est égale à ker x 1 x 2 x 3 x 4 ( 1 0 1 0 13 2 0 11 ) Autrement dit, im(a) x 1 + x 3 = 0 et 13x 1 + 2x 2 + 11x 4 = 0 55 Exercices du chapitre 5 Exercice 1 : On considère les matrices suivantes : A =, B = 2 5 4 3 1 5 7 0 3 1 2 0 1 7 2 9 3 1, C = 0 5 6 1 2 5 8 4 2 0 4 0

28 CHAPITRE 5 MATRICES Calculer tous les produits( de matrices ) possibles( avec ces) 3 matrices 2 3 7 1 Exercice 2 : Soit A = et B = Calculer AB et BA Le produit de 5 6 2 4 matrices dans M 2 est-il commutatif? 0 1 2 Exercice 3 : Soit A = 0 0 5 Calculer A 2 et A 3 Que remarquez vous? 0 0 0 Exercice 4 : Soient A et B des matrices tels que le produit AB ait un sens Vérier que ker(b) ker(ab) et que im(ab) im(a) 17 240 96 Exercice 5 : Considérons la matrice A = 18 269 108 42 630 253 1) Vérier que A 2 = I 3 2) On pose V = ker(a I 3 ) Vérier que V est de dimension 2 et donner une base ( u 1, u 2 ) de V 3) On pose W = ker(a + I 3 ) Vérier que W est de dimension 1 et donner une base u 3 de W 4) Vérier que B = ( u 1, u 2, u 3 ) est une base de R 3 5) Soit P de la base B dans la base canonique de R 3 Justier sans calcul que P est inversible, puis calculer P 1 6) Calculer D = P 1 AP Que remarquez-vous? Exercice 6 : Soit M une matrice carrée de taille d On rappelle que M 0 = I d 1) Vérier que, pour tout entier n 1, (I d + M) n ( 1) k M k = I d + ( 1) k+1 M k+1 2) On suppose que M est nilpotente, c'est-à-dire qu'il existe un entier q 1 tel que M q = 0 Déduire de la question précédente qu'alors I d + M est inversible, et donner son inverse 3 21 30 3) Soit A = 13 98 137 Calculer A 2 et A 3 En déduire que A est nilpotente 9 68 95 k=0 4) Calculer (I 3 + A) 1 sans utiliser la méthode de Gauss-Jordan 5) Soit X = 1 0 0 Vérier que B = (X, AX, A 2 X) est une base de R 3 6) Soit P la matrice de la base B dans la base canonique de R 3 Calculer P 1 avec la méthode de Gauss-Jordan, puis calculer B = P 1 AP

Chapitre 6 Espaces vectoriels de dimension nie et applications linéaires Dénition 23 Un espace vectoriel sur R est un ensemble E, muni d'une addition E E E (u, v) u + v et d'une multiplication par un scalaire R E E qui satisfait les axiomes suivants : (λ, v) λv (EV 1 ) L'addition est associative : (EV 2 ) L'addition est commutative : (u, v, w) E 3 (u + v) + w = u + (v + w) (u, v) E 2 v + u = u + v (EV 3 ) L'addition possède un élément neutre noté 0 E : 0 E E u E u + 0 E = 0 E + u = u (EV 4 ) Tout vecteur possède un opposé : u E v E u + v = v + u = 0 E (EV 5 ) Distributivité par rapport à l'addition dans E λ R (u, v) E 2 λ(u + v) = λu + λv (EV 6 ) Distributivité par rapport à l'addition des scalaires : (λ, µ) R 2 u E (λ + µ)u = λu + µu (EV 7 ) Associativité externe : (EV 8 ) Action de l'unité : (λ, µ) R 2 u E u E (λµ)u = λ(µu) 1u = u 29

30CHAPITRE 6 ESPACES VECTORIELS DE DIMENSION FINIE ET APPLICATIONS LINÉAIRES Exemple 35 Un sous-espace vectoriel de R n est un espace vectoriel sur R M n,p est un espace vectoriel sur R Exemple 36 Soit X un ensemble quelconque On rappelle que R X est l'ensemble des applications de X dans R On dénit une addition sur R X par : f R X g R X x X (f + g)(x) = f(x) + g(x) On dénit une multiplication externe sur R X par : λ R f R X x X (λf)(x) = λf(x) Muni de ces opérations, R X est un espace vectoriel sur R Proposition 19 Soit E un espace vectoriel sur R Alors : [1] L'élément neutre pour l'addition dans E est unique On l'appelle le vecteur nul de E [2] u E 0u = 0 E [3] Si u E, son opposé est égal à ( 1)u On le note u Dénition 24 Soit E un espace vectoriel sur R Un sous-espace vectoriel de E est une partie V de E satisaisant les conditions : [SEV1] 0 E V [SEV2] u V v V ( u + v) V [SEV3] α R u V (α u) V 61 Dimension nie 611 Généralités Dénition 25 Soit E un espace vectoriel sur R Pour tout entier p 1 et pour toute famille (u 1,, u p ) E p, on notera vect (u 1,, u p ) = { u E : (α 1,, α p ) R p u = l'ensemble des combinaisons linéaires de cette famille p α j u j } Dénition 26 Soit E un espace vectoriel sur R et F = (u 1,, u p ) E p une famille nie de vecteurs de E [1] On dira que F est libre si j=1 (α 1,, α p ) R p p α j u j = 0 E = α 1 = = α p = 0 j=1 [2] On dira que F est génératrice de E si vect (u 1,, u p ) = E [3] On dira que F est une base de E si c'est une famille libre et génératrice de E Dénition 27 Soit E un espace vectoriel sur R On dit qu'il est de dimension nie lorsqu'il existe un entier p 1 et une famille (u 1,, u p ) E p génératrice de E