IDE et évolution du commerce extérieur

Transcription

1 Leila Nasri Docteur en Sciences Économiques, Spécialité : Économie Internationale IDE et évolution du commerce extérieur en Tunisie 2

2 2

3 Résumé Le nouveau contexte économique international se caractérise, aujourd hui, par une généralisation du processus d ouverture et de libéralisation des économies. L IDE est devenu, également, depuis trois décennies, l un des aspects les plus importants de la manifestation de la mondialisation. Dans ce contexte, l investissement direct étranger paraît comme un vecteur de développement et de modernisation incontournable. C est, ainsi, que les pays tant développés qu en développement, n ont pas cessé de se livrer à une concurrence acharnée afin d améliorer l attractivité de leur site aux IDE. A l instar d autre pays en développement, la Tunisie a engagé beaucoup de réformes afin d attirer plus d IDE qui seront voués à réaliser ses objectifs en matière de croissance économique, notamment à travers l augmentation de ses flux commerciaux. L objectif de cet article est ainsi, d évaluer empiriquement l effet de l IDE reçu par la Tunisie sur ses flux d échange commerciaux à travers une analyse de séries temporelles et de données de panel. Mots clefs : IDE, flux commerciaux, séries temporelles, données de panel. 2 3

4 Abstract The new international economic environment is characterized today by a generalization of the process of opening and liberalization of economies. FDI has become, also, for three decades, one of the most important aspects of the manifestation of globalization. In this context, foreign direct investment appears as a vector of development and modernization. It is thus, that both developed and developing countries have not ceased to engage in fierce competition to improve the attractiveness of their site to FDI. Like other developing countries, Tunisia has undertaken many reforms to attract FDI that will be dedicated to achieve its goals of economic growth, particularly through the increase in trade flows. The objective of this paper is thus, to evaluate empirically the effect of FDI received by Tunisia on its commercial trade flows through an analysis of time series and panel data. Keywords : FDI, trade flows, time series, panel data. 24

5 Introduction L exploration de la relation IDE-commerce parait dépendre largement du cadre d analyse dans lequel elle doit s inscrire. En effet, c est à cause d un environnement en perpétuel mouvement et qui devient de plus en plus complexe que la question de la nature de la relation se pose aujourd hui. En effet, il ne s agit plus d un cadre simple basé sur les avantages comparatifs et la différence de dotations factorielles comme a été considéré pendant longtemps mais plutôt d un nouveau cadre où les modèles traditionnels des rendements constants et de la concurrence pure et parfaite ont été complétés voir supplantés par une nouvelle génération de modèles qui mettent l accent sur les rendements croissants et la concurrence imparfaite (Krugman 1989). De même, les firmes multinationales «point aveugle des théories traditionnelles» (Rainelle. M (2001)) ont été exclues des analyses traditionnelles. En effet, l hypothèse constitutive de la nation est celle de l immobilité internationale des facteurs de production et donc, notamment, des capitaux. Cela a pour conséquence d exclure du champ d étude des 2 5

6 théories traditionnelles du commerce international, les firmes multinationales. Ainsi, et vu les grandes transformations qu a connues l économie internationale, notamment, pendant ces dernières années, il convient de situer la relation IDE commerce dans un cadre qui tient compte de la complexité mais aussi des exigences du nouveau cadre international. La Tunisie, comme la majorité des pays en développement, considère les IDE comme l une des solutions les plus importantes pour accélérer la croissance économique. C est ce qui s est traduit dans la réalité par plusieurs efforts engagés pour encourager les entreprises étrangères à investir en Tunisie. L IDE est ainsi considéré comme un moyen pour participer efficacement dans l approvisionnement du marché international où la compétitivité des multinationales est prônée par tous. Il serait, donc, important de voir, avec l augmentation des flux d IDE vers la Tunisie, l efficacité de cette stratégie d attractivité appréciée par l augmentation des échanges commerciaux de ce pays. IL est, donc, important de commencer par situer la relation IDE-commerce dans un cadre d analyse récent dans lequel, nous étudions l influence de certains aspects théoriques mais aussi empiriques sur cette relation. Ensuite, nous allons étudier, empiriquement à travers une analyse de séries temporelles et une analyse en panel, l effet des IDE reçus par la Tunisie sur les échanges commerciaux du pays. I Liens théoriques et empiriques entre commerce extérieur et IDE : revue de la littérature : 1 Liens théoriques entre l IDE et le commerce extérieur : Les approches théoriques récentes des IDE ont essayé 26

7 d éclaircir le débat existant en ce qui concerne la relation complémentarité/substituabilité en présentant les flux d IDE comme le résultat des décisions stratégiques des firmes multinationales qui cherchent à conquérir tous les marchés. Il s agit surtout de deux stratégies qui ont beaucoup influencé la relation IDE-Commerce : la stratégie horizontale et celle verticale. 1-1 Stratégie horizontale et substituabilité entre IDE et commerce : Les modèles de concurrence imparfaite explicitent le comportement de chaque multinationale face à la possibilité d exporter vers le marché étranger à partir de son pays d origine, ou bien, de manière alternative, de choisir de servir ce marché par une localisation sur place à proximité de ses consommateurs. A ce niveau, plusieurs déterminants importants des IDE et de la stratégie d exportation sont mis en relief par les prédictions relatives à ces modèles théoriques. En effet, suivant ces modèles, l exportation est une stratégie qui permet d économiser les coûts fixes d implantation d une filiale à l étranger mais qui implique aussi d avoir supporté des coûts variables de transport et des droits de douane. Au contraire, la multinationalisation de la firme est une stratégie qui privilégie les coûts fixes. Dans ce contexte d analyse, Markusen (1984) a développé un modèle qui considère l IDE comme une stratégie permettant aux entreprises multinationales d avoir accès aux marchés des pays hôtes de l investissement à moindre coût. Celles-ci seraient, ainsi encouragées à détourner les droits de douane (hypothèses de tariff-jumping) et à éviter les coûts de transport en établissant des usines semblables produisant, 2 7

8 ainsi, les mêmes biens dans de différents pays. Il s agit, à ce niveau, d une stratégie rationnelle (Markusen 1984) quand les obstacles au commerce sont assez importants. Le modèle prédit, donc, que l imposition de restrictions commerciales encourage les IDE horizontaux qui substitueraient le commerce. Dans le même esprit, Hymer (1979) explique l IDE par l existence d avantages spécifiques à la firme multinationale. Ces avantages concurrentiels ou compétitifs peuvent résulter des imperfections du marché (image de marque, détention exclusive d une technologie ), de la disponibilité ou encore de la différenciation des produits, des prix de facteurs, des économies d échelle et des politiques économiques (barrières commerciales etc). Le postulat de départ de la théorie du Hymer (1979) relative aux avantages spécifiques est que toute firme s implantant à l étranger, est désavantagée par rapport aux firmes locales à cause des barrières linguistiques et culturelles, des pratiques juridiques etc. Face à ces coûts, la firme multinationale dispose de certains avantages spécifiques par rapport aux firmes locales. Ainsi, lorsque les gains engendrés par ces avantages excédent les coûts de la délocalisation, l entreprise préfère la multinationalisation à l exportation. Toutefois, la possession d au moins un avantage spécifique, transférable internationalement est considérée par Smith (1987) comme une condition nécessaire mais insuffisante puisqu une firme peut exploiter son avantage en produisant dans son pays et exporter, ou vendre une licence évitant ainsi un coût de délocalisation supplémentaire. Pour se rendre compte des comportements d implantation à l étranger relatifs aux multinationales américaines, Vernon (1966) a développé la théorie du cycle 28