Introduction à la modélisation financière en temps continue & Calcul Stochastique



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Introduction à la modélisation financière en temps continue & Calcul Stochastique Mireille Bossy INRIA pour le MASTER IMAFA à Polytech Nice Sophia Antipolis 16 novembre 213

2 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

SOMMAIRE Sommaire 1 Processus Stochastiques 5 1.1 Généralités sur les processus stochastiques.................. 5 1.2 Le mouvement brownien............................. 6 1.2.1 Quelques propriétés du mouvement brownien............. 7 1.2.2 Quelques propriétés de la trajectoire brownienne........... 7 1.2.3 Mouvement brownien vectoriel...................... 9 1.2.4 Mouvement brownien vectoriel corrélé................. 9 2 Premiers éléments de Calcul Stochastique 11 2.1 Filtration et adaptation.............................. 11 2.1.1 Martingales en temps continue..................... 12 2.1.2 Des exemples de martingales....................... 13 2.1.3 L inégalité maximale de Doob....................... 13 2.2 Sur la convergence des variables aléatoires.................. 14 2.2.1 Variation quadratique du mouvement brownien............ 15 2.3 Intégrale d Itô le cas unidimensionnel..................... 15 2.3.1 Différents espaces de processus..................... 16 2.3.2 Intégration des processus élémentaires................. 16 2.3.3 Intégration des processus de MF 2, T................. 19 2.3.4 Intégration de processus de L 2 F, T.................. 2 2.3.5 L intégrale stochastique comme processus............... 21 2.4 Formule d Itô le cas unidimensionnel..................... 22 2.5 Processus d Itô et martingale........................... 24 2.6 Caractérisation de Lévy du mouvement brownien............... 26 2.7 Changement de Probabilité............................ 27 2.7.1 Exemple élémentaire............................ 27 2.7.2 Le cas des variables gaussiennes.................... 28 3 Options européennes, modèle de Black et Scholes unidimensionnel 29 3.1 Description du modèle de marché Black et Scholes............. 29 3.2 Les stratégies de financement.......................... 3 3.2.1 Les stratégies autofinancées....................... 3 3.2.2 Actualisation, changement de numéraire................ 31 3.3 Opportunité d arbitrage et probabilité risque neutre............. 32 3.3.1 Lien entre A.O.A et probabilité risque neutre............. 32 3.4 Stratégies admissibles............................... 34 3.5 Options européennes............................... 34 3.5.1 Le pricing d option européenne dans le modèle de Black et Scholes 34 3.5.2 Premier énoncé pour le pricing d une option européenne...... 36 3.5.3 Second énoncé pour la valorisation d une option européenne.... 37 3.5.4 La formule de Black et Scholes..................... 39 3 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

SOMMAIRE 4 Un peu plus de calcul stochastique 41 4.1 Caractérisation de Lévy du mouvement brownien............... 41 4.2 Temps d arrêt.................................... 41 4.2.1 Temps d arrêt et intervalle aléatoire................... 42 4.2.2 Exemples de temps d arrêt et propriétés................ 42 4.2.3 Quelques propriétés des temps d arrêt................. 42 4.2.4 Temps d arrêt et filtration......................... 43 4.2.5 Théorème d arrêt et inégalité martingale................ 43 4.2.6 Intégrale d Itô et temps d arrêt...................... 45 4.3 Intégrale d Itô multidimensionnelle....................... 46 4.4 Formule d Itô multidimensionnelle....................... 46 4.5 Équations différentielles stochastiques..................... 48 4.5.1 Les hypothèses sous lesquelles on démontre l existence....... 49 4.5.2 Exemples d EDS.............................. 52 4.5.3 Propriété de Markov et propriété de flot des EDS........... 52 4.6 Le théorème de Girsanov............................. 54 4.7 Mouvement brownien et équation de la chaleur................ 56 4.8 Lien entre EDS et EDP : la formule de Feynman Kac............. 58 4.8.1 Le cas unidimensionnel.......................... 58 4.8.2 Ce qui change en dimension > 1..................... 6 4.8.3 Application de la formule de Feynman Kac aux O.E.......... 61 5 Valorisation d options européennes, cadre des EDS 63 5.1 Description du modèle de marché........................ 63 5.2 Le pricing d option européenne......................... 66 4 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 1. PROCESSUS STOCHASTIQUES Chapitre 1 Processus Stochastiques 1.1 Généralités sur les processus stochastiques Un processus stochastique est un modèle mathématique pour décrire l état d un phénomène aléatoire évoluant dans le temps. Processus stochastique, fonction aléatoire ou signal aléatoire en sont des synonymes. Soit un espace de probabilité Ω, F, P. On désigne par T l ensemble des temps. On appelle processus aléatoire toute application de T Ω dans E, t, ω T Ω X t ω E. En général, on note X ou X t, t T cette application. Dans le cadre de ce cours, T sera R + ou un intervalle borné [, T ] ou [t 1, t 2 ]. E est l espace des états du processus, égal à R ou R d et muni de la tribu E, égale à BR ou BR d, d 1. On supposera toujours que la fonction ω X t ω est mesurable de Ω, F dans R d, BR d, de sorte que X t soit une variable aléatoire à valeurs R d, d 1. Définition 1.1.1. On appelle processus stochastique à temps continu, une collection de v.a. X t, t R + sur Ω, F à valeurs dans R d, BR d. L observation d un processus stochastique revient à fixer un ω dans Ω. On appelle trajectoire la fonction de T dans R d, obtenue en fixant ω dans Ω, t R + X t ω R d. La valeur à l instant t T d un processus X est la fonction de Ω dans R d, obtenue en fixant t dans T, ω Ω X t ω R d. On notera X t la valeur du processus à l instant t, qui pour des raisons techniques évidentes sera toujours supposée être une v.a., c.à.d une fonction mesurable de Ω, F dans R d, BR d. Toujours pour des raisons techniques, il est commode de supposer une mesurabilité jointe quand on considère un processus comme fonction des deux variables t, ω : 5 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 1. PROCESSUS STOCHASTIQUES Définition 1.1.2. Un processus X t, t R + est dit mesurable si l application 1 est mesurable. t, ω R + Ω, BR + F X t ω R d, BR d Lorsque l on considère un processus particulier, il est naturel de s intéresser à la régularité de ses trajectoires. Dans le cadre de ce cours, nous ne considérerons que des processus à trajectoires continues. Proposition 1.1.3. Si X t, t R + est un processus à trajectoires continues on dit aussi processus continu, c.a.d. tel que la fonction t X t ω pour tout ω Ω est une fonction continue, il est mesurable. Définition 1.1.4. La loi temporelle d un processus aléatoire X est définie par la donnée de ses distributions fini dimensionnelles, c est à dire la donnée des lois de probabilités de tous les vecteurs aléatoires X t1,..., X tk pour tout k 1 et t 1 <... < t k dans T. 1.2 Le mouvement brownien Le mouvement brownien et les processus de diffusion que l on en déduit, jouent un rôle central dans la théorie des processus stochastiques. Ils fournissent des modèles simples pour de nombreuses applications sur lesquelles de nombreux calculs peuvent être faits. Le mouvement brownien tire son nom du botaniste Robert Brown qui décrivit en 1827 le mouvement de fines particules pollens en suspension dans un fluide. Entre la description de Brown et la définition actuelle du mouvement brownien, cet objet a retenu l attention de physiciens comme Einstein et Smoluchowski et de mathématiciens comme Wiener, Levy et Itô. Historiquement, le mouvement brownien est associé à l observation d un mouvement qui évolue au cours du temps de façon si désordonnée qu il semble imprévisible mais qui présente une certaine homogénéité dans le temps : la date du début de l observation n est pas importante mais sa durée oui. Définition 1.2.1. Un mouvement brownien standard réel sur R + est un processus W t, t réel et à trajectoires continues, tel que - W =. - Tout accroissement W t W s où s < t suit une loi gaussienne centrée, de variance t s. - Pour tout = t < t 1 < t 2 <... < t n, les accroissements W ti+1 W ti ; i n sont indépendants. Le mouvement brownien est un processus à accroissements indépendants, stationnaires et gaussiens. - W t est une v.a. de loi gaussienne N, t et PW t [x, x + dx] = pxdx = 1 2πt exp x2 2t dx. - En particulier, W t [ 1.96 t, 1.96 t] avec une probabilité de 95% car P Z 1.96.95 lorsque Z est de loi gaussienne N, 1. On peut montrer que cette propriété est vérifiée pour toute la trajectoire brownien. 1 Pour E 1, E 1,..., E n, E n n espaces mesurables, la tribu produit E 1... E n est la tribu de E 1... E n engendrée par les pavés Γ 1... Γ n pour Γ 1 E 1,..., Γ n E n. L espace mesurable ainsi défini est le produit des n espaces mesurables. 6 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 1. PROCESSUS STOCHASTIQUES L existence d un mouvement brownien, au sens de la définition précédente, n est pas évidente. Voir par exemple la construction de Wiener dans [5], ou encore [?] et [8]. En général, les phénomènes observés ne sont pas aussi normalisés que le mouvement brownien standard. Définition 1.2.2. On appelle encore mouvement brownien, issu de x, de dérive b et de coefficient de diffusion σ, le processus X t = x + σw t + bt. X est encore un processus à accroissements indépendants, stationnaires et gaussiens mais non centré et tel que X = x. Dans la suite, en l absence de précision, mouvement brownien désignera le mouvement brownien standard. 1.2.1 Quelques propriétés du mouvement brownien Les propriétés suivantes sont classiques et très utiles pour les calculs. Proposition 1.2.3. i Propriété de symétrie : Si W t, t est un mouvement brownien standard, il en est de même de W t, t. ii Propriété d échelle : Si W t, t est un mouvement brownien standard, alors pour tout c >, il en est de même du processus Wt c, t défini pour tout t par W c t = 1 c W c 2 t. iii Invariance par translation : Le mouvement brownien translaté de h >, W h t = W t+h W h ; t est un mouvement brownien, indépendant du mouvement brownien arrêté en h W s, s h. iv Retournement du temps : Le processus retourné à l instant T, Ŵ T t = W T W T t est un mouvement brownien sur [, T ]. 1.2.2 Quelques propriétés de la trajectoire brownienne Proposition 1.2.4. Le mouvement brownien oscille entre et + quand le temps augmente indéfiniment. En effet, presque sûrement, Mais, lim sup W t = t + lim inf W t =. t + lim sup W u = +, t + u t W t t, p.s. t +. La vitesse de divergence du mouvement brownien est moins grande que celle de t. Remarque : I. Principe de symétrie des trajectoires du MVB : a Montrer que pour tout α, PW t α = PW t α. b Calculer la loi du maximum courant du mouvement brownien : M t = sup W s, t s t. 7 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 1. PROCESSUS STOCHASTIQUES Calcul de la loi jointe de W t, M t : PW t da, M t db = b a PW t a, M t bdadb. A l aide d un petit dessin et du principe de symétrie, il faut se convaincre que, pour b a, PW t a, M t b = PW t 2b a, M t b 22b a 2πt 3 = PW t 2b a. D où, par différentiation PW t da, M t db = 2 exp a 2πt = exp Calcul de la loi de M t : PM t db = PW t b, M t db b = PW t da, M t dbda db b 2 = exp 2πt = = b [ 2 2πt exp 2b a2 da db 2t a 2 2b a2 exp a 2πt 2t 2b a2 da 2t ] a=b a= da db Au passage, on remarque que PM t db = P W t db. 2b a2 dadb 2t 2b a2 2t dadb. = 2 2πt exp b2 2t db. II. L intervalle de confiance pour l ensemble de la trajectoire brownienne : On montre que pour tout t, En effet, pour tout t, Or, Psup s t Psup W s 2 t 9%. s t W s 2 t = 1 Psup W s 2 t. s t Psup W s 2 t Pinf W s 2 t + Psup W s 2 t s t s t s t = 2Psup W s 2 t s t = 2P W t 2 t 1%, car P Z 1.96.95 lorsque Z est de loi gaussienne N, 1. Ce qui implique le résultat. Proposition 1.2.5 Sur l irrégularité des trajectoires. a Si W t, t est un mouvement brownien standard, le processus en temps inversé B t = tw 1 t, t >, B = est un mouvement brownien. b Le mouvement brownien n est pas dérivable en zéro et donc par stationnarité des accroissements, n est dérivable en aucun point. 8 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 1. PROCESSUS STOCHASTIQUES 1.2.3 Mouvement brownien vectoriel Définition 1.2.6. On appelle mouvement brownien vectoriel standard, un processus à trajectoires continues, à valeurs dans R d, W t = W 1 t, W 2 t,..., W d t, t tel que - W =, - tout accroissement W t W s où s < t, suit une loi gaussienne sur R d centrée et de matrice de covariance t sid. - Pour tout = t < t 1 < t 2 <... < t n, les accroissements W ti+1 W ti, avec i n, sont indépendants. Les processus des coordonnées W i t, t,i = 1,..., d sont des mouvements browniens réels standard indépendants. Réciproquement, des mouvements browniens standard indépendants engendrent un mouvement brownien vectoriel. 1.2.4 Mouvement brownien vectoriel corrélé Définition 1.2.7. Un vecteur aléatoire X = X 1,..., X d à valeurs dans R d est gaussien d si toute combinaison linéaire a i X i est de loi normale éventuellement dégénérée. i=1 Si X = X 1,..., X d est un vecteur gaussien, la matrice carré Γ := Γ i,j 1 i d,1 j d avec Γ i,j = EX i X j EX i EX j, appelée matrice de covariance est une matrice symétrique et positive à valeurs propres positives 2. Théorème 1.2.8. X est une variable aléatoire gaussienne à valeurs dans R d, d espérance µ et de covariance Γ, si est seulement si sa fonction caractéristique est de la forme φ X u = exp{i < u, µ > 1 < u, Γu >}, 2 où µ R d et Γ est une matrice non nulle, symétrique et positive. On notera N d µ, Γ la loi du vecteur aléatoire X. Lorsque Γ est inversible, la loi N d µ, Γ a la densité x R d 1 2π d/2 Γ exp où Γ désigne le déterminant de la matrice Γ. 1 2 x µt Γ 1 x µ Définition 1.2.9. On appelle mouvement brownien vectoriel corrélé, un processus à trajectoires continues, à valeurs dans R d, B t = B 1 t, B 2 t,..., B d t, t tel que - B =, - tout accroissement B t B s où s < t, suit une loi gaussienne sur R d centrée et de matrice de covariance t sk, où K est la matrice de covariance du vecteur gaussien B 1 et est donnée. - Pour tout = t < t 1 < t 2 <... < t n, les accroissements B ti+1 B ti, avec i n, sont indépendants. La matrice K est toujours symétrique. Ses valeurs propres sont positives ou nulles, mais elle peut ne pas être inversible. Lorsqu il n existe aucune relation affine presque sûre entre les composantes du vecteur aléatoire B 1, la matrice K est à valeurs propres strictement positives : elle est définie positive, est donc inversible. 2 Une matrice symétrique M est positive si r R d, z t Mz ou encore z.mz. Une matrice symétrique M est définie positive si r R d, z t Mz, et si toutes les valeurs propres de M sont strictement positives ; la matrice M est alors inversible., 9 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 1. PROCESSUS STOCHASTIQUES Calcul de covariance. Soit Wt 1, Wt 2 un mouvement brownien standard en dimension 2. Soit ρ [ 1, 1]. On pose B 1 t = W 1 t B 2 t = ρw 1 t + 1 ρw 2 t Calculer la matrice 2 2 de la covariance de B 1. Décomposition de Cholesky. Toute matrice Γ non nulle, symétrique définie et positive admet une décomposition de Cholesky. Ainsi, il existe une unique matrice L triangulaire inférieure telle que Γ = L t L. Cette propriété est très utile pour construire des variables gaussiennes de loi donnée. En effet, soit Γ une matrice carré d d non nulle, symétrique définie positive et µ un vecteur de R d. Construisons une v.a de loi N d µ, Γ. Soit L issu de la décomposition de Cholesky de Γ. Soit G une va gaussienne N d, Id. Alors la v.a X = µ + LG est de loi N d µ, Γ. En effet, calculons la matrice de covariance de X d Γ G i, j = EX i X j EX i EX j = EX i X j = E L i,k G k = d L i,k L j,d EG 2 k = L t L i,j = Γ i,j. k=1 k=1 d L j,l G l Cas fréquent en finance. On observe souvent que la matrice de corrélation d un panier de d titres est à diagonale dominante. 1 5% ρ = \ 1.1 5% 1 On se donne un modèle de prix pour la couverture optionnelle de la forme lns t = σb t où σ est un vecteur de volatilité et où B est un mouvement brownien corrélé de corrélation ρ. Comment simuler B et S? On pose la matrice de covariance : l=1 Γ = ρ i,j σ i σ j i,j Cette matrice est symétrique, et si on a de la chance elle est aussi positive. Il existe des algorithmes 3 très efficace pour le calcul de la matrice L issu de la décomposition de Cholesky de Γ. Si W est un mouvement brownien standard, B = LW t est de loi N d, tγ. 3 Notons que pour calculer L telle que M = L t L, pour tout x on pose y = Mx alors, connaissant y, x il faut trouver L et z tels que L t z = y et Lx = z 1 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Chapitre 2 Premiers éléments de Calcul Stochastique 2.1 Filtration et adaptation Lorsque l on s intéresse à l étude des processus stochastiques, il est naturel de vouloir rapprocher des événements présents à une date courante t d événements passés ou futurs. Les tribus ensembles structurés d évènements vont jouer un grand rôle dans l étude des processus. On associe à un espace de probabilité Ω, F, P une suite de tribus indicées par le temps appelé filtration. Le rôle de la filtration est de formaliser une chronologie des évènements de la tribu F. Définition 2.1.1. Un espace de probabilité filtré est un espace de probabilité Ω, F, P auquel on associe une famille croissante au sens de l inclusion de sous tribus de F, notée F t, t : s < t, F s F t. On notera Ω, F, F t t, P, l espace de probabilité filtré, de filtration F t t. Exemple : La filtration engendrée par un processus On note Ft X, t la filtration engendrée par le processus X t, t. Elle est définie de la manière suivante : Pour tout t, Ft X est la plus petite tribu qui rend mesurable toutes les applications ω Ω X θ ω quelque soit θ t : F X t := σx θ, θ t. Ainsi, toute les valeurs passés du processus X sont des variables aléatoires sur l espace de probabilité Ω, Ft X, P. Les conditions habituelles Dans la suite, pour des raisons techniques, on supposera toujours qu une filtration possède les deux propriétés suivantes, appelées les conditions habituelles : Soit N l ensemble des événements négligeables de F pour P : N = {A F; PA = }. On va supposer : 11 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE a Si A N, alors pour tout t, A F t. On exige ainsi que toutes les sous tribus de la filtration contiennent tout les événements négligeable de F ou encore que N F. b F t, t est continue à droite, c est à dire t, F t = F t + = ε> F t+ε. La filtration engendrée par un processus X ne vérifie pas en générale ces conditions. On corrige alors cette filtration pour obtenir ce qu on appelle la filtration naturelle : = σ σx s, s t + ε N. F X t ε> Définition 2.1.2. Un processus X t, t est dit F t adapté si pour tout t, X t est une variable aléatoire F t mesurable. Exemples de processus adaptés - X est naturellement F X t adapté. - Soit maintenant F t et X un processus F t adapté. Alors ft, X t, t est lui aussi F t adapté dès que f est mesurable. - fs, X s ds, t est F t adapté pourvu que l intégrale soit bien définie. - Si de plus X est continu, le processus M X t = sup s t X s, t est F t adapté. Les fonctions mesurables de ces processus sont aussi F t adapté. En modélisation, deux situations peuvent se rencontrer : a F t est la filtration naturelle d un processus particulier, sur Ω, F, P. En général, il s agira de la filtration naturelle d un mouvement brownien. b La filtration F t sur Ω, F, P est imposée. Dans ce cas, on doit définir un mouvement brownien adapté à cette filtration donnée : Définition 2.1.3. Soit Ω, F, F t t, P un espace de probabilité filtré. Un F t mouvement brownien standard on dit aussi processus de Wiener, W t, t est un processus stochastique à valeurs réelles et à trajectoires continues qui vérifie : W t, t est un processus F t -adapté, càd t, W t est F t mesurable. s t, W t W s est indépendant de F s. s t, W t W s a même loi que W t s et est gaussien N, t s. W = P p.s. pour le standard Si F t = Ft W, i.e si la filtration imposée est la filtration naturelle du mouvement brownien, alors les deux définitions 1.2.1 et 2.1.3 coïncident. 2.1.1 Martingales en temps continue On se donne un espace probabilisé filtré Ω, F, F t, P. Définition 2.1.4. Un processus M t, t est une F t martingale si i M t est un processus F t adapté. ii E M t < +, pour tout t, i.e. le processus M t est intégrable. 12 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE iii Pour tout s t, EM t F s = M s. Si on remplace iii par : iii Pour tout s t, EM t F s M s, on dit que M t est une sur martingale. Si on remplace iii par : iii Pour tout s t, EM t F s M s, on dit que M t est une sous martingale. Si un processus M t est une F t martingale, alors t, EM t = EM. L espérance d une martingale reste constante au cours du temps! Le terme de martingale est emprunté au jeux de hasard. Le processus sur sous- martingale est alors dans ce contexte le gain à chaque étape du jeux cas de martingale à temps discret. Un des grands intérêts de la propriété de martingale est qu elle permet de faire des calculs sur le processus. 2.1.2 Des exemples de martingales L exemple le plus simple de martingale : soit X une v.a réelle, intégrable alors, le processus M t défini pour tout t par M t = EX F t est une martingale. Soit maintenant W t, t un F t mouvement brownien standard. 1. W t est une F t martingale. 2. W 2 t t, t est une F t martingale. 3. expσw t σ2 2 t, t est une F t martingale. 2.1.3 L inégalité maximale de Doob Les martingales sont des objets qui jouent un grand rôle dans la théorie des processus stochastiques, notamment parce qu on peut leur appliquer l inégalité maximale suivante : Théorème 2.1.5. Inégalité de Doob. Soit M t une F t martingale réelle et continue ie à trajectoires continues. Pour tout p > 1 tel que M T L p Ω i.e. E M p T < +, on a 1 MT := sup M t est dans L p Ω ie E MT p < +. t T 2 { E M p } 1 p T p p 1 {E M T p } 1 p. Ce résultat se démontre à l aide du Théorème d arrêt 4.2.8 au chapitre 4. La preuve est reportée à la section 4.2.5. A l aide de l inegalité de Jensen, montrer que a + b p 2 p 1 a p + b p. Considérons le cas où M est un brownien standard W. Alors, en utilisant la loi explicite du maximum du mouvement brownien voir la section 1.2.2, on peut montrer 13 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE que { { E M p} 1 p T = E { E sup W t t T p } 1 p = sup W t inf W t t T t T { E max p } 1 p {2 p E W T p } 1 p 2 {E W T p } 1 p. sup W t, inf W t t T t T p } 1 p Pour p = 2, on retrouve ci-dessus l inégalité de Doob, pour le mouvement brownien. Pour p > 2, le calcul ci-dessus, bien que exploitant une identité connue sur la loi du maximum du mouvement brownien, devient une estimation plus grossière que la l inégalité de Doob en effet, 2 > p/p 1 dès que p > 2. 2.2 Sur la convergence des variables aléatoires Suivant le contexte, x désignera la valeur absolue sur R ou la norme euclidienne sur R d. Définition 2.2.1. Une suite de v.a. X n n 1 converge presque sûrement vers une v.a. X si l ensemble { } N = ω Ω : lim X nω Xω n + est P-négligeable i.e. PN =. On utilisera la notation P{ω Ω : lim X nω = Xω} = PN c = 1. n + lim X n = X p.s. n + Définition 2.2.2. Une suite de v.a. X n n 1 converge dans L p vers une v.a. X si les variables X n appartiennent à L p Ω, F, P i.e. E X n p < +, X appartient à L p Ω, F, P i.e. E X p < + et On utilisera la notation X n L p X. lim X n X L p = lim E X n X p 1 p =. n + n + Si X n n 1 est une suite de v.a. intégrables i.e. dans L 1 Ω, F, P, lim X L n = X p.s. X n X. n + En effet, il faut montrer que lim n + Ω X n X dp =. Or pour cela on a besoin d une hypothèse supplémentaire. Par exemple pour appliquer le théorème de convergence dominée, il faut supposer que les variables X n X sont majorées par une v.a. intégrable. Définition 2.2.3. Une suite de v.a. X n n 1 converge en probabilité vers X si pour tout ε > On écrit simplement, et on note X n P X. lim P {ω : X nω Xω > ε} =. n + lim P X n X > ε = n + 1 14 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Théorème 2.2.4. Soit X n n 1 une suite de v.a. a Si X n L p X, p 1, alors X n P X. b Si X n X presque sûrement, alors X n P X. b Si X n P X, alors on peut extraire de la suite Xn n 1 une sous suite X νn n 1 qui converge vers X presque sûrement. Les trois notions de convergence ci-dessus p.s., dans L p, en probabilité sont des variantes de la convergence point par point de l analyse classique, c est à dire une convergence en valeur des fonctions considérées. 2.2.1 Variation quadratique du mouvement brownien Sur un intervalle [, T ], on considère une partition τδ = { = t < t 1 <... < t n = T } de pas δ = maxt j t j 1. On définit la p variation p > d un processus X t, t sur l intervalle [, T ] par n V p T τδ, X = X tk X tk 1 p. k=1 La 1-variation de pas δ, VT 1 τδ, X est la variation usuelle de X. La 2-variation de pas δ, VT 2 τδ, X est appelée variation quadratique de X. Considérons le cas particulier du mouvement brownien qui est une martingale de carré intégrable : Proposition 2.2.5. Soit T > fixé et τδ une partition de l intervalle [, T ] de pas δ. a Pour tout t >, la variation quadratique sur [, t] du mouvement brownien W converge vers t, dans L 2 Ω et presque sûrement, quand le pas δ tend vers : lim V t 2 τδ, W = t, δ c Presque toutes les trajectoires du mouvement brownien W sont à 1-variation infinies, sur tout compact. Lorsque X est une fonction continûment différentiable i.e de classe C 1 de R + dans R, sa variation VT 1τ, X est bornée et sa variation quadratique V T 2 τ, X tend vers. p.s. 2.3 Intégrale d Itô le cas unidimensionnel - Les trajectoires du mouvement brownien sont presque sûrement de 1-variations infinies sur tout compact et nulle part différentiable. Ceci signifie qu il n est pas possible de définir une intégrale de la forme T X s ωdw s ω au sens de Lebesgue Stieljes sur les trajectoires ie ω par ω, presque sûrement. - On montre que la p variation du mouvement brownien sur tout compact tend vers dès que p > 2. La variation quadratique est la bonne quantité à étudier pour la construction de intégrale stochastique pour une classe appropriée d intégrants X. - Cette construction a été introduite par Itô 1942 pour définir des intégrales contre le mouvement brownien et a ensuite été généralisée pour les intégrales contre des martingales continues et de carré intégrable par Kunita et Watanabe 1967. - Dans le cadre de ce cours, nous ne parlerons que de l intégrale d Itô. 15 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE 2.3.1 Différents espaces de processus Soit Ω, F, F t, P et W un F t mouvement brownien réel. Définition 2.3.1. Pour T > fixé, on définit l espace MF 2, T par { MF, 2 T = φ t, t T processus réel, mesurable T et F t adapté tel que E φ 2 θdθ } < +, T quotienté par la relation : φ ψ E φ θ ψ θ 2 dθ =. On vérifie que MF 2, T est un espace de Hilbert 1 pour le produit scalaire T φ, ψ = E φ θ ψ θ dθ. On définit de la même manière MF 2 R+. MF 2 est un ensemble de processus pour lesquels on va définir l intégrale d Itô. Cette intégrale aura la particularité d être une martingale de carré intégrable. A l espace MF 2, T, on va associer l espace de processus élémentaires suivant Définition 2.3.2. On note EF b, T, le sous espace de M F 2, T des processus en escalier et borné qui s écrivent sous la forme n 1 φ t ω = φ i ω1 ]ti,t i+1]t, i= où = t < t 1 <... < t n = T et où les φ i sont des v.a. F ti -mesurables et bornées, i.e. i, C i, φ i C i P p.s.. Proposition 2.3.3 Densité de E b F, T dans M 2 F, T.. Tout processus φ t de M 2 F, T est limite d une suite φ n t de processus de E b F, T : T lim E φ s φ n s 2 ds =. n + 2.3.2 Intégration des processus élémentaires n 1 Soit φ t, t [, T ] un processus élémentaire de EF b, T de la forme φ t = φ i 1 ]ti,t i+1]t avec = t < t 1 <... < t n = T. et on note Iφ = n 1 On pose Iφ = φ i W ti+1 W ti T φ s dw s. i= 1 On appelle espace préhilbertien réel un R-espace vectoriel muni d un produit scalaire euclidien. Un espace de Hilbert est un espace préhilbertien complet. i= 16 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE De la même façon, pour tout t [, T ], on pose et on note I t φ = n 1 I t φ = φ i Wti+1 t W ti t φ s dw s. Enfin, on notera, pour tout s t, Remarque 2.3.4. - Par construction, le processus i= s φ θ dw θ pour I t φ I s φ. n 1 I t φ = φ i Wti+1 t W ti t, t [, T ] i= est à trajectoire continue en temps. - Il est facile de voir que I t φ, t [, T ] est un processus F t -adapté. - Il est également facile de voir que pour tout t, l application I t : φ I t φ est linéaire pour φ EF b, T. Théorème 2.3.5. Pour φ, ψ des processus élémentaires bornés i.e. appartenant à EF b, T et pour tout s t T, i E Fs φ θ dw θ =. s En particulier, I t φ est une F t martingale continue. ii E Fs φ θ dw θ ψ θ dw θ = E Fs s s s φ θ ψ θ dθ. En particulier : 2 E Fs φ θ dw θ = E Fs s s φ 2 θdθ. L égalité ci-dessus est appelée l isométrie d Itô. Le processus I 2 t φ φ2 θ dθ, t T est une F t martingale continue. Preuve. Par la propriété de linéarité de I t et de E, il suffit de vérifier les points i et ii pour φ et ψ de la forme φ t = Φ1 ]a,t ] t avec Φ une v.a. F a mesurable ψ t = Ψ1 ]b,t ] t avec Ψ une v.a. F b mesurable. I t φ = ΦW t W t a I t ψ = ΨW t W t b. On suppose que a b, l autre cas se déduira par symétrie. 17 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Preuve de i. Il faut calculer E Fs I t φ I s φ. On distingue les cas s < a et s a. Si s < a, alors I s φ = et Si a < s < t : E Fs I t φ = E Fs ΦW t W t a = E Fs Φ E Fa W t W t a =. } {{ } = E Fs I t φ = E Fs ΦW t W a = ΦE Fs W t W a = Φ E Fs W t W s + ΦE Fs W s W a } {{ } } {{ } = F s-mesurable = ΦW s W a = I s φ. Donc E Fs I t φ = I s φ et I t φ t [,T ] est bien une F t martingale. Preuve de ii. On applique les mêmes arguments : on doit calculer J = E I Fs t φ I s φi t ψ I s ψ. Remarquons que par i, J = E I Fs t φi t ψ I s φi s ψ = E ΦΨW Fs t W t a W t W t b I s φi s ψ. Par ailleurs, on note également H = E Fs s φ θ ψ θ dθ = E Fs ΦΨ = E ΦΨ Fs 1 ]b,t ] θdθ car a b s = E Fs ΦΨ t b s b. s 1 ]a,t ] θ1 ]b,t ] θdθ On doit montrer que J = H. Il faut examiner les différents cas : si b t, alors b s et I s ψ = ainsi que J = H =. Si b < t, il n y a deux sous cas : Cas s b < t : alors, H = E Fs ΦΨ t b, I s ψ = et J = E Fs ΦΨW t W a W t W b = E Fs ΦΨW t W b 2 + E Fs ΦΨW b W a W t W b. Or, l accroissement W t W b est indépendant de la tribu F b, donc est indépendant de F s, Φ et Ψ. D autre part W b W a, Φ et ψ sont F b mesurables. Donc J = t be Fs ΦΨ + E Fs ΦΨW b W a E F b W t W b. } {{ } = Cas b s t : se traite de la même façon. 18 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Ainsi, E Fs I 2 t + φ 2 θdθ I 2 s φ s φ 2 θdθ = ce qui prouve que I 2 t φ φ2 θ dθ, t T est bien une F t martingale. Corollaire 2.3.6. Pour un processus élémentaire borné φ EF b, T, on a l inégalité maximale E [ max t T ] 2 T φ s dw s 4E φ 2 sds. Preuve. On vient de voir que I t φ est une F t martingale, il suffit donc d appliquer l inégalité de Doob 2.1.5 pour p = 2 : [ ] 2 T 2 E max t T φ s dw s 4E φ s dw s et d appliquer le point ii l isométrie d Itô. Pour tout t T, l application I t : EF, b T L 2 Ω, F, P, φ n 1 i= φ i Wti+1 t W ti t est linéaire et continue pour la topologie induite sur EF b, T par la norme de M F 2, T. Nous sommes ramené à la situation suivante : Soit E est un espace vectoriel normé, de norme, on notera E l ensemble des applications linéaires de E R. E est appelé le dual topologique de E. Corollaire 2.3.7 du Théorème de Hahn Banach forme analytique :. Soit G un sous espace vectoriel de E et soit g : G R une application linéaire continue de norme g G = sup x G, x 1 gx. Alors il existe f E qui prolonge g et tel que f E = g G. 2.3.3 Intégration des processus de M 2 F, T On a obtenu que pour tout t T, l application I t : E b F, T L 2 Ω, F, P n 1 φ φ i Wti+1 t W ti t i= est linéaire et cf. Corollaire 2.3.6 continue pour la topologie induite sur EF b, T par la norme de MF 2, T. Donc cf. Corollaire 2.3.7 du Th. de Hahn Banach l application I t peut être prolongée par une application linéaire continue notée encore I t : MF 2, T L2 Ω, F, P. En particulier, par densité de EF,T b dans M F,T 2, pour tout φ dans M F 2, T, il existe une suite φ n, n d éléments de EF b, T telle que I t φ = lim I tφ n dans L 2 Ω. n + Il suffit d extraire une sous suite pour que la convergence soit presque sûre. On en déduit que I t φ est F t mesurable comme limite d une suite de v.a F t mesurable. I t φ t [,T ] est donc un processus F t -adapté. 19 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE De plus, il y a unicité du prolongement I t au sens ou si I t est un autre prolongement par unicité de la limite presque sure. φ M 2 F, T I t φ = I tφ P p.s Théorème 2.3.8. Pour φ et ψ dans MF 2, T, il existe une modification adaptée et continue du Z t «processus I tφ, t T notée φ θ dw θ, t T telle que, s t T, i E Fs φ θ dw θ =, en particulier s ii E Fs φ θ dw θ ψ θ dw θ = E Fs s s En particulier, on a l isométrie d Itô [ 2 ] E Fs φ θ dw θ s [ 2 ] E φ θ dw θ s s φ θ dw θ, t T est une F t martingale. φ θ ψ θ dθ. = E Fs s φ 2 θdθ. = E φ 2 θdθ. s iii Si W 1 t, W 2 t, t est un F t mouvement brownien en dimension 2, alors E Fs φ θ dwθ 1 s s ψ θ dwθ 2 =. Un processus Y t, t est dit modification de X t, t si pour tout t PY t = X t = 1. Preuve. Pour démontrer l existence d une modification continue, il faut montrer qu une suite φ n t d éléments de E b F, T qui converge vers φ t dans M 2 F,T, converge uniformément en temps On montre cela à l aide du Lemme de Borel Cantelli. Les points i, ii et iii sont démontrés pour des processus élémentaires bornés cf. Théorème 2.3.5 et sa preuve. Par passage à la limite ils sont vrais pour le prolongement I t. Ils sont vrais aussi pour la modification continue car : X, Y L 2 Ω et X = Y p.s. E G X = E G Y pour toute sous tribu G de F. 2.3.4 Intégration de processus de L 2 F, T On aura besoin d étendre la construction de l intégrale à une classe plus vaste de processus F t adaptés pour lesquels l hypothèse d intégrabilité est relaxée : Définition 2.3.9. On définit l espace L 2 F, T par { L 2 F, T = φ t, t T processus réel, mesurable T } et F t adapté tel que φ 2 θdθ < + P p.s.. 2 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Proposition 2.3.1. Densité de E F, T dans L 2 F, T. E F, T est le sous espace de L 2 F, T des processus en escalier non forcement bornésde la forme φ t ω = φ i ω1 ]ti,t i+1]t, où = t < t 1 <... < t n = T et où les φ i n 1 sont i= des v.a. F ti -mesurables et dans L 2 Ω. Tout processus φ t de L 2 F, T est limite d une suite φ n t de processus de E F, T au sens suivant T lim φ s ω φ n s ω 2 ds =, P p.s. n + Définition et Proposition 2.3.11. Soit φ un processus de L 2 F, T et φn une suite de processus de E F, T telle que T φ s φ n s 2 ds en probabilité, quand n +. L existence d une telle suite est assuré par le résultat de densité. Alors, il existe une v.a limite en probabilité de T φn s dw s. Si φ n est une autre suite de processus vérifiant la même propriété que φ n alors les limites en probabilité de T φn s dw s et T φ n s dw s sont égales presque sûrement. On note Iφ toute limite d une suite de la forme T φn s dw s avec φ n comme ci-dessus. 2.3.5 L intégrale stochastique comme processus Pour φ L 2 F, T, on construit I tφ, pour chaque t [, T ], si les hypothèses sont vérifiées sur [, T ], elles le sont sur [, t] pour tout t T. I t φ est donc la limite en probabilité d une suite de v.a. F t mesurables de la forme φ n θ dw θ, donc I t φ est la limite presque sûre d une sous suite F t mesurable. On n peut donc en conclure que I t φ, t T est un processus F t adapté. De plus, Théorème 2.3.12. Pour tout φ L 2 F, T, I tφ, t T admet une modification adaptée et continue qui sera notée φ θ dw θ, t T. Remarque 2.3.13. 1 De manière évidente, si φ L 2 F, T et φ M F 2, T, les intégrales stochastiques de φ comme processus de L 2 F, T et comme processus de M F 2, T sont modifications l une de l autre. 2 Contrairement à l intégrale stochastique de processus de MF 2, T, celle de processus de L 2 F, T n est pas une martingale et ne vérifie pas a priori l isométrie d Itô. 21 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Résumé : Soit W t t un F t mvt brownien et φ t t T un processus F t adapté. On peut définir l intégrale stochastique φ sdw s t T dès que T φ2 sds < + P p.s., c est à dire dès que φ L 2 F, T T dès que E φ2 sds < + càd dès que φ MF 2, T. t φ T sdw s est une martingale si E t T φ2 sds < +, c est à dire si φ MF 2, T et l isométrie d Itô s applique. T La condition E φ2 sds < + est équivalente à t 2 E sup φ t [,T ] sdw s < +. Dans ce cas, l isométrie d Itô T 2 implique que E φ T sdw s = E φ2 sds. 2.4 Formule d Itô le cas unidimensionnel Soient Ω, F, F t t, P un espace probabilisé filtré et W t, t un F t -mouvement brownien standard réel unidimensionnel. Définition 2.4.1. Un processus d Itô réel, est un processus X à valeurs dans R, continu et adapté de la forme X t = X + b θ dθ + σ θ dw θ, P p.s., ce qu on note encore { dxt = b t dt + σ t dw t X = X, 1 X est une v.a. F mesurable. 2 b t t T est un processus réel, F t adapté, tel que T b s ds < +, P p.s. 3 σ t t T est un processus réel appartenant à L 2 F, T ie, σ t est F t adapté et T σ s 2 ds < +, P p.s.. Des contraintes sur les coefficients b et σ, il résulte bien que le processus X t est F t adapté et continu. Théorème 2.4.2 Formule d Itô en dimension un. Soit f : R R de classe C 2 R. Soit X un processus d Itô réel. Presque sûrement, pour tout t [, T ] fx t =fx + Forme différentielle : =fx + f X s dx s + 1 2 f X s b s ds + σ 2 sf X s ds f X s σ s dw s + 1 2 dfx t = f X t dx t + 1 2 σ2 sf X t dt. Si f dépend aussi du temps, f : [, T ] R R de classe C 1,2 [, T ] R, ft, X t =f, X + f t s, X sds + f x s, X sdx s + 1 2 où σ 2 sf X s ds σs 2 2 f x 2 s, X sds. 22 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Preuve. - Il suffit de démontrer la formule pour la date t = T seulement. En effet, T est arbitraire et si les hypothèses sont satisfaites sur [, T ], elles le sont aussi bien sure [, θ] pour θ T. Ainsi, montrer la formule d Itô à l instant T revient à montrer que pour tout t [, T ] fx t = fx + Z t f X sdx s + 1 2 Z t σ 2 sf X sds presque sûrement. La continuité en temps des termes de gauche et de droite de l égalité permet de passer le presque sûrement avant le pour tout t ie Pgauche t = droite t, t [, T ] = 1. - On montre qu on peut se ramener à démontre la formule d Itô dans le cas où les coefficients b et σ sont presque sûrement uniformément bornés sur [, T ] ceci en construisant des suites b n et σ n de tronquation de b et σ par des valeurs de plus en plus grandes et en utilisant les hypothèses d intégrabilité de b et σ + le théorème de convergence de l intégrale stochastique qui convergence en probabilité et donc p.s. quitte à extraire une sous suite. - On considère une subdivision de [, T ] de la forme = t N < t N 1 = T N <... < tn N = T, de pas h = T N où N N. Alors, A := fx T fx = N 1 j= fx j+1h fx jh. On rappelle que si X n n est une suite de v.a. telle que X n P X et X n P Y alors X = Y presque sûrement. Il suffit donc de montrer la convergence en probabilité du terme de droite de l égalité ci-dessus vers le terme de droite de la formule d Itô comme fx T fx converge vers lui-même en probabilité le rappel ci-dessus nous donne l égalité presque sure des deux limites. - On applique la formule de Taylor à l ordre 2 en espace : il existe une suite β j ω ], 1[ telle que A = N 1 X j+1h X jh f X jh j= + 1 N 1 X j+1h X jh 2 f X jh + β j X j+1h X jh 2 i= := A 1 + A 2. Pour A 1. En remplaçant X j+1h X jh par sa valeur : A 1 = N 1 i= j+1h b s f X jh ds + jh := A 11 + A 12. N 1 i= j+1h σ s f X jh dw s jh T A 11 b s f X s ds par convergence dominée. Pour A 12, il faut utiliser un théorème de convergence en probabilité de l intégrale stochastique : pour que A 12 T σ sf s, X s dw s, σ étant N 1 X Z j+1h presque sûrement bornée, il suffit de montrer que f X jh f X s 2 ds en probabilité. Or, la convergence ci-dessus à lieu presque sûrement par la continuité des trajectoires i= jh de X. 23 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Pour A 2. A 2 = 1 2 + + 1 2 b étant borné, C 2 N 1 i= N 1 i= 2 j+1h b s ds f X jh + β j X j+1h X jh jh j+1h j+1h b s ds σ s dw s f X jh + β j X j+1h X jh N 1 i= jh jh 2 j+1h σ s dw s f X jh + β j X j+1h X jh jh = C 1 + C 2 + C 3. j+1h jh b s ds 2 Bh 2 et donc C 1 p.s.. N 1 i= Bh sup k k+1h Comme t σ sdw s est continue, C 2. kh σ s dw s sup f X kh + β j X k+1h X kh. k Pour C 3. Il faut maintenant montrer que C 3 1 T σ 2 2 sf P X s ds. Dans le cas où σ = cte et où f x = cte la relation ci-dessus devient N 1 i= t t j+1 t j W tj+1 W tj 2 P N 1 i= Wtj+1 W t j 2 P ce qui est vrai par la convergence presque sure de la variation quadratique du mouvement brownien. Exemple élémentaire : Soit W t un brownien réel. Montrer en utilisant la formule d Itô que le processus W 2 t t est une martingale. 2.5 Processus d Itô et martingale Soit Ω, F, F t t, P un espace probabilisé filtré et W t, t un F t mouvement brownien standard réel dim 1. Proposition 2.5.1. 1 Si M t, t [, T ] est une F t -martingale de carré intégrable i.e EMt 2 < +, alors E M t M s 2 /F s = EM 2 t M 2 s /F s. 24 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE 2 Si M t, t [, T ] est une F t -martingale, telle que pour tout t [, T ], M t = b s ds, avec P p.s., T b s ds < +, pour que M t soit bien définie. Alors, P p.s. tout t [, T ], M t =. Preuve. Montrons 1. Notons que EM t M s /F s = M 2 s. Ainsi E M t M s 2 /F s = E M 2 t 2M t M s + M 2 s /F s = EM 2 t M 2 s /F s. Montrons 2. Pour montrer que M t = pour tout t, il suffit de montrer que EM 2 T =. Nous donnons ici une version simplifié de la preuve du point 2 2. On ajoute à la proposition l hypothèse suivante : il existe une constante déterministe C telle que, P p.s., T b s ds C < +. M est alors une martingale de carré intégrable. Pour n N, considérons une partition t n i = i T, i =,..., n de [, T ]. Alors, par le n point 1 et pour tout n, EMT 2 = E MT 2 M 2 n n = E Mt 2 M 2 n i t = E M n i 1 t n i M t n i 1 2. i=1 i=1 i=1 D autre part, n n n E M t n i M t n i 1 2 i = E t n i 1 b s ds 2 CE T i=1 max 1 [t i=1,...,n ni 1,t ni ] sb s ds. La suite de la preuve utilise un outil classique sur la convergence des martingales : Théorème 2.5.2 - Convergence dominée ou théorème de Lebesgue. Soit f n n N une suite de fonctions mesurables sur R, BR, λ, à valeurs réelles telle que : a la suite f n n N converge simplement sur R vers une fonction f ; b il existe une fonction intégrable g telle que n N, x R, f n x gx. Alors f est intégrable et lim f n x fx dx =, n R ce qui entraîne que lim f n xdx = lim f nx dx = fx dx. n n R R Théorème 2.5.3 - Version probabiliste. Soit X n n N une suite de v.a. à valeurs réelles telle que : a la suite X n n N converge X P-presque surement ; b il existe une v.a. Y intégrable telle que n N, X n Y. Alors lim EX n = EX. n + On pose alors X n = T max i=1,...,n constante C. Montrons que X n, P-presque surement. Pour cela, on pose maintenant R 1 [t ni 1,t ni ] sb s ds ; Cette suite est dominée par la f n sω = max i=1,...,n 1 [t n i 1,t n i ] sb s ω. On observe que f n sω simplement quand n +, et f n s est dominée par la constante C. 2 La preuve complète utilise la notion de temps d arrêt qui sera introduite au Chapitre 4. 25 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE En appliquant successivement les deux versions du théorème de convergence dominée, on obtient E T 1 [t ni 1,t ni ] sb s, et ainsi que EMT 2 =. max i=1,...,n Ceci entraine que P p.s., M T =. De l inégalité maximale de Doob pour les martingales, on obtient encore que P p.s., t [, T ], M t =. Corollaire 2.5.4. 1 La décomposition d un processus d Itô X est unique. Si X t = X + k s ds + h s dw s = X + alors X = X P p.s., k s = b s et h s = σ s, ds dp p.p. 2 Si X t, t [, T ] est une martingale de la forme X t = X + b s ds + σ s dw s, b s ds + σ s dw s, avec P p.s., T b s ds < + et T σ s 2 ds < +, alors b s = ds dp p.p. Preuve. A nouveau, nous donnons seulement une idée de la preuve, en ajoutant l hypothèse que h t et σ t sont des processus appartenant à MF 2, T. Montrons 1. On commence par remarquer immédiatement que X = X. on applique le point 2 de la proposition précédente, avec la martingale M t = h s σ s dw s et b t := k t b t. On en déduit que k t = b t P-presque surement. D après l isométrie d Itô, = EM 2 t = E k s b s 2 ds. On en déduit finalement que k t = b t, dt dp. Pour montrer le point 2, il suffit d appliquer la linéarité de la propriété de martingale au processus X t σ sdw s, t [, T ], et conclure que b t =, dt dp. 2.6 Caractérisation de Lévy du mouvement brownien Soit Ω, F, F t t, P un espace probabilisé filtré et W t, t un F t mouvement brownien standard réel dim 1. La propriété que W t W s a une moyenne nulle, indépendamment de F s signifie que le mouvement Brownien est une martingale. De plus, nous avons énoncé que la variation quadratique de W converge vers t, dans L 2 Ω et presque sûrement, quand le pas δ tend vers : lim V t 2 τδ, W = t, δ p.s. Le fait remarquable est que la contraposée de cet énoncé est vraie : le mouvement Brownien est la seule martingale qui a cette variation quadratique. Ce résultat est connu sous le nom de caractérisation de Lévy 26 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Théorème 2.6.1 -Caractérisation de Lévy du mouvement brownien. Soit X t, t une martingale locale 3 telle que X =. On a alors les équivalences suivantes * X t, t est un mouvement brownien standard, dans l espace de probabilité filtré de la martingale. * X t, t est continue et X 2 t t, t est une martingale locale. * La variation quadratique de X t, t sur [, t] est égale à t. Ce résultat se généralise en dimension quelconque. 2.7 Changement de Probabilité Pourquoi changer de probabilité? - Statistique : Théorie de l estimation par maximum de vraisemblance. - Etude des martingales : de nombreuses propriétés sur les solutions d EDS découlent des techniques de changement de probabilité. Dans le cas de modèles discrets, les changement de probabilité sont fréquents. Les transformations sont très simples est on ne les références pas comme changement de probabilité. - En finance : Harrison & Pliska 1987 introduisent la notion de probabilité risque neutre pour son lien avec la complétude des marchés financiers et l absence d opportunité d arbitrage. Définition 2.7.1. Changement de Probabilité. Soit Ω, F, P un espace de probabilité de référence. Une probabilité Q sur Ω, F définit un changement de probabilité par rapport à P, s il existe une v.a. Z positive, F-mesurable, telle que QA = E P Z1 A, pour tout A F. gωqdω = gωzωdpω, f mesurable bornée. Ω Ω La v.a. Z s appelle la vraisemblance ou la densité de Q par rapport à P. Remarquons que E P Z = 1. On note souvent Q = ZP ou dq = ZdP ou encore dq = Z. dp F Définition 2.7.2. Probabilités équivalentes. On dit que des probabilités Q et P sont équivalentes si Z est strictement positive P p.s. ce qui entraîne que P est un changement de probabilité par rapport à Q de densité Z 1. Lorsque les probabilités P et Q sont équivalentes, on écrit souvent Z sous la forme expy. 2.7.1 Exemple élémentaire En finance : le modèle binomiale à une période. Soit U une v.a. qui prend deux valeurs u et d avec les probabilités p et 1 p. Pour F, on prend la tribu engendrée par U. S est le prix connu aujourd hui. S = S U, le prix demain. Soit r le taux d intérêt sur la période. 3 La notion de martingale locale est plus générale que la notion de martingale au sens où toute martingale est une martingale locale. Cette notion de martingale locale sera introduite avec la notion de temps d arrêt 27 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 2. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CALCUL STOCHASTIQUE Chercher une probabilité Q si elle existe telle que le rendement espéré de l actif risqué soit identique au rendement de l actif non risqué. En particulier E Q S = S 1 + r. Trouver l unique si elle existe densité Z correspondant à ce changement de probabilité. Les probabilités P et Q sont elles équivalentes? 2.7.2 Le cas des variables gaussiennes Soit U une v.a de loi N, σ 2 et F la tribu engendrée par U. On considère encore S = S U même si le choix de la loi gaussienne n est pas réaliste dans ce contexte. Trouver Q une probabilité risque neutre, c est à dire vérifiant E Q S = S 1 + r. Réponse : il y en a une infinité, mais une seule probabilité Q est telle que U soit encore de loi gaussienne, de variance σ 2, sous la nouvelle probabilité Q. Proposition 2.7.3. Soit X v.a. de loi N m, σ 2 sous P, σ 2 >. Soit ] Z = exp [λx λ2 2 σ2. Z est une v.a. positive, d espérance 1 qui définit une nouvelle probabilité Q, par dq = ZdP, sous laquelle X est une v.a. de loi gaussienne N m + σλ, σ 2. Preuve. Prenons tout d abord, X de loi N, 1. Alors pour toute fonction f continue et bornée : E Q fx = E P fx expλx 1 2 λ2 = E P fx + λ. Maintenant, si G est de loi Nm, σ 2 : E Q fg = E Q fσx + m = E P f X expλx 1 2 λ2 = E P f X + λ = E P fm + σx + λ = E P fg + σλ où on a posé f x = fm + σx. 28 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy

CHAPITRE 3. OPTIONS EUROPÉENNES, MODÈLE DE BLACK ET SCHOLES UNIDIMENSIONNEL Chapitre 3 Valorisation d options européennes, dans le cadre du modèle de Black et Scholes unidimensionnel 3.1 Description du modèle de marché Black et Scholes Soit T une date de fin de gestion par exemple la date d échéance d une option. On considère un marché ou un sous marché composé de - un titre risqué S t, t [, T ] - un titre non risqué S t, t [, T ] On se place dans le cadre simplifié suivant : L action sous-jacente ne distribue pas de dividende durant la durée de vie de l option ; Les transactions sur l action se font au comptant ; La courbe des taux est plate et invariante dans le temps. L actif risqué. Le processus S t, t [, T ] suit le modèle de Black et Scholes : S t = S exp µ 12 σ2 t + σw t, où S est le prix observé aujourd hui à la date, µ est la rentabilité instantané moyenne et σ la volatilité de l actif. En appliquant la formule d Itô pour différencier S, on obtient la forme différentielle suivante pour S : ds t = S t µdt + σdw t. Le modèle est nécessairement posé dans un espace de probabilité filtré Ω, F, F t, t T, P, W t est un mouvement brownien de dimension 1. 29 Cours de maths financières IMAFA 213-14 / M. Bossy