Etude sur les fonctions logistiques des structures et programmes de santé dans cinq régions d Afrique de l Ouest et de Madagascar Résumé L'article de ce mois présente le résumé des résultats issus de l'étude sur les fonctions logistiques des structures et programmes de santé qui a été menée par l'institut Bioforce, en 2012, dans cinq régions d'afrique de l'ouest et à Madagascar. Auteurs du résumé: Abdramane DIALLO, Coordinateur Réseau des logisticiens de santé au Centre d'expertise, de Recherche et de Développement en Logistique de Santé de l'institut Bioforce; Marion MARTINEZ VALIENTE, Appui aux Projets internationaux et administratrice du Resolog au Centre d'expertise, de Recherche et de Développement en Logistique de Santé de l'institut Bioforce. Source: "Etude sur les fonctions logistiques des structures et programmes de santé dans cinq régions d'afrique de l'ouest et de Madagascar" - Abdramane DIALLO (1), Benoit SILVE (2), Anne-Catherine REA (3), André SAVADOGO (4), Jessica NARDONE (5). (1) Coordinateur Réseau des logisticiens de santé au Centre d'expertise, de Recherche et de Développement en Logistique de Santé de l'institut Bioforce (2) Directeur Général de l'institut Bioforce, (3) Responsable du Département Opérations de l'institut Bioforce, (4) Chef de Mission au Centre d'expertise, de Recherche et de Développement en Logistique de Santé de l'institut Bioforce, (5) Chargée de projets internationaux au sein du Département Opérations de l'institut Bioforce. Institut Bioforce 1
Article La logistique est une fonction stratégique des systèmes de santé. Introduction Les décideurs et les professionnels de santé ne disposent pas d assez de données ou d analyses sur la mise en œuvre des activités logistiques. Pourtant, les plus grandes organisations mondiales s'entendent désormais pour considérer que la logistique de santé est une fonction stratégique des systèmes de santé 1. L étude des fonctions logistiques dans les structures et programmes des régions sanitaires des Hauts Bassins et des Cascades (Burkina Faso), de Saint-Louis, de Matam (Sénégal) et Atsinanana (Madagascar), est un état des lieux de la logistique au sein des programmes et structures de ces régions. Cette étude a permis d évaluer de manière exhaustive la pratique actuelle de la logistique de santé. Elle s'accompagne de propositions pour l amélioration de la conduite des activités logistiques au sein des programmes et structures de santé des différentes régions concernées. Objectifs Le but de cette étude est de réaliser un état des lieux de l emploi des ressources matérielles indispensables à l efficacité, la qualité et l efficience des activités sanitaires de cinq régions d Afrique de l Ouest et de Madagascar. Méthodes Cette étude est le fruit d une recherche opérationnelle descriptive transversale. La méthodologie ici suivie, est construite autour de deux axes de recherche que sont : l organisation des ressources humaines en charge des fonctions logistiques et le renforcement des compétences et l accompagnement de ces ressources humaines. Des techniques qualitatives et quantitatives de récolte de données ont été utilisées. Le chargé de cette étude et un professionnel de santé - désigné par les autorités sanitaires des régions et accompagnant le chargé d étude -, ont collecté les données par le biais d une revue documentaire, l administration de questionnaires et la conduite d entretiens individuels. La revue documentaire, se basant sur une grille d analyse, a permis de renseigner les indicateurs clés portant sur la logistique. Le questionnaire a été administré aux informateurs-clés et la grille d entretien a concerné les premiers responsables techniques et politiques des différentes régions concernées. Enfin, notons que l unité statistique ici considérée est le professionnel de santé exerçant des responsabilités sur des activités et/ou des tâches logistiques. 1 www.peoplethatdeliver.org Institut Bioforce 2
Résultats Ce sont 166 professionnels de santé qui ont participé à cette étude sur 178 initialement contactés, soit un taux de participation de 90%. L étude a concerné 44 structures et programmes de santé. 1. Organisation, coordination et gestion des activités La planification des activités logistiques repose sur l utilisation de deux outils : le plan d action ou le plan de travail annuel. Au sein des régions et districts sanitaires, des services ou unités sont chargés de coordonner les activités logistiques. Suite à cette étude, on constate que la coordination de la maintenance n est assurée que dans deux régions sur les cinq étudiées. Une partie des activités logistiques est contractualisée avec un taux de satisfaction de 80% pour les hôpitaux de référence des régions étudiées. Il s agit principalement de la restauration, la maintenance des équipements biomédicaux lourds, la maintenance informatique et la maintenance des véhicules, le nettoyage ainsi que la sécurité de la structure. 2. Infrastructures immobilières Dans l ensemble, les infrastructures immobilières sont dans un état acceptable. Les principaux problèmes concernent l étanchéité, la peinture ou encore la présence de fissures dans les murs. On notera que le Centre Hospitalier de District souffre d un manque d entretien et de budget alloué aux réparations et procédures de réhabilitation. 3. Gestion de la maintenance des infrastructures, des équipements et services généraux o Moyens généraux Sur un plan technique et matériel, les centres hospitaliers souffrent de problèmes en matière d acquisition de consommables. De plus, les Technologies de l Information et de la Communication utilisées dans les structures et les programmes doivent être améliorées. Ainsi, si l on considère le ratio d ordinateurs disponibles par personnel (23 poste d ordinateurs pour 276 personnels pour un hôpital de référence d une région étudiée), la fonction support «Informatique» n apparait pas comme satisfaisante. De même, l accès à Internet au sein des structures est limité : les connexions, lorsqu elles existent, sont instables avec des débits trop faibles. Sur un plan énergétique, les hôpitaux de référence font face à des coupures d électricité répétées qui affectent le fonctionnement de leurs services et plus particulièrement celui de services sensibles tel que le service pédiatrique. Les centres hospitaliers de référence et de district disposent de groupes électrogènes de relai qui ne sont pas suffisamment approvisionnés en carburant pour jouer pleinement leur rôle. De plus, seulement 15% de ces hôpitaux disposent d une source d approvisionnement en eau qui permette de prendre le relais et d assurer les opérations en cours et autres urgences en cas de coupure d eau. o Gestion des déchets biomédicaux Trois principaux résultats ressortent de cette étude en ce qui concerne la gestion et le traitement des déchets biomédicaux. Tout d abord, il apparait que le volume des déchets biomédicaux n est pas connu. Deuxièmement, afin de traiter et d éliminer ces déchets, 3/5 ème des hôpitaux disposent d un Institut Bioforce 3
incinérateur fonctionnel. Troisièmement, malgré l existence d incinérateurs, il n existe pas de plan de maintenance ni de réhabilitation de ces machines. o Gestion et maintenant des équipements Moyens de transports : la gestion du parc de véhicules et la durée d utilisation des véhicules sont à améliorer. Ainsi, de nombreux véhicules dont des ambulances sont stationnés dans les hôpitaux, souffrant de pannes qui auraient pu être évitées. Chaîne de froid : un plan de maintenance existe mais pas n est cependant pas mis en œuvre. De plus, l inventaire des équipements de froid est disponible mais n est pas régulièrement mis à jour. Maintenance des équipements biomédicaux : les équipes hospitalières font état de pannes d équipements récurrentes. Lorsque cela se produit ou lorsqu un équipement présente un dysfonctionnement, il existe un réel problème de coordination entre les utilisateurs, les techniciens et l administration des structures de santé. De plus, l acquisition de ces équipements par le biais de mécanismes de passation de marché public est source de frustrations entre les techniciens et l administration des structures de santé. Ces conditions contribuent à instaurer un cercle vicieux dans lequel chacun des acteurs impliqué dans la gestion des équipements se dégage de sa responsabilité. Ces conditions contribuent à instaurer un cercle vicieux dans lequel chacun des acteurs impliqué dans la gestion des équipements et lié au traitement de ces dysfonctionnements, se dégage de sa responsabilité. Gestion de la chaîne d approvisionnement : les conditions de stockage sont à améliorer, que ce soit en termes de capacité (augmenter le nombre de magasins de stockage) ou en termes de qualité du système d information et de gestion logistique que les professionnels en charge de l approvisionnement jugent passable. Ainsi, il n existe pas de plan de distribution et la gestion n est pas informatisée dans toutes les structures. 4. Les RH en charge des activités logistiques Les 166 professionnels de santé qui ont participé à cette étude ont été regroupés en trois (3) grandes familles d activités relatives à la logistique de santé: la gestion de la chaîne d approvisionnement (1), la gestion et la maintenance des équipements biomédicaux et médicotechniques (2) et les services généraux, l administration et le management de ces activités logistiques (3). Parmi ces professionnels, 63 (38%) sont des professionnels travaillant sur les aspects administratifs, ressources humaines et le management général 27 (16%) travaillent dans la gestion et la maintenance des équipements biomédicaux et médicotechniques et 36 (22%) interviennent dans le domaine des services généraux. Ce sont au total 63 (38%) des participants à cette étude qui interviennent sur l axe de la gestion maintenance des équipements et des services généraux. 40 (24%) travaillent sur la gestion des approvisionnements des produits notamment les médicaments. Institut Bioforce 4
Les disparités entre les participants à l étude l existence même de ces disparités représente déjà un élément hautement significatif -, existent autant au niveau des responsabilités qu au niveau des professions. L étude a été l occasion de répertorier les professions ayant trait aux questions logistiques au sein des structures, formations et programmes de santé. Au total, vingt-six (26) professions ont été identifiées comme travaillant explicitement ou à défaut sur les activités logistiques. Ces professions vont du cadre (médecins, pharmaciens, administrateurs des centres et services de santé etc.) aux personnels de soutien et agents communautaires de base (techniciens et ouvriers polyvalents). Conclusion L étude conduit à penser que la gestion et la maintenance des infrastructures, des équipements et des services généraux sont un maillon faible des structures de santé. Cette difficulté pourrait s expliquer par un manque de coordination et de budget alloué à la conduite des activités logistiques. On dénombre une multitude de professions impliquées explicitement ou à défaut dans la conduite des activités logistiques dont du personnel de soins (infirmiers, médecins etc.). Au terme de cette étude, des recommandations peuvent être faites en matière d organisation des ressources humaines, d approvisionnement, de gestion/maintenance des équipements et services généraux, mais aussi en matière de gestion administrative et financière. Au titre des recommandations prioritaires, on compte le renforcement des capacités et des compétences des professionnels en charge de la conduite des activités logistiques. Ce renforcement des capacités peut se faire au travers de formations continues ou de partages entre paires sur des expériences réussies (best practices). La diversité des profils impliqués dans la conduite des activités nécessite la mise en place d une coordination de ces activités. Cette coordination favoriserait la complémentarité des activités et des compétences. On pourrait ainsi créer des services ou unités de coordination de la logistique en charge de la supervision des activités d approvisionnement, de gestion, de la maintenance des équipements et de l administration des activités logistiques. Ces unités pourraient être composées de personnel techniques et/ou managérial. Ces propositions pourraient faire l objet d une recherche action qui serait menée dans quelques hôpitaux de référence. Institut Bioforce 5