Université Pierre et Marie Curie 1M001 L ensemble des nombres réels 1 Entiers, rationnels et réels N = {0, 1,...} est l ensemble des entiers naturels. Z = {...,, 1, 0, 1,,...} est l ensemble des entiers relatifs. Q = { p q, p Z, q N } est l ensemble des nombres rationnels. R est l ensemble des nombres réels. Exemple: 1 4 = 0, 5, 3 = 0, 666..., 5 6 = 0, 8333..., 3 = 0, 13636... sont des nombres rationnels. On remarque que leur développement décimal devient périodique à partir d un certain rang. En fait, cette propriété les caractérise. Proposition. Un nombre est rationnel si et seulement si son développement décimal est périodique à partir d un certain rang. On comprend bien pourquoi sur un exemple: prenons la fraction 3. Pour trouver son développement décimal, on fait la division euclidienne de 3 par. On trouve 3 = 0 + 3. Le nombre avant la virgule est donc 0. Pour trouver le chiffre suivant, on multiplie le reste par 10 et on répète la division. On trouve 30 = 1 + 8. Le chiffre suivant est donc 1 et le reste est 8. On recommence: 80 = 3 + 14, le chiffre suivant est donc 3 et le reste 14. Ensuite 140 = 6 + 8, le chiffre suivant est donc 6 et le reste 8. A partir de là, la procédure fait une boucle, on retombe toujours sur les mêmes divisions 80 = 3 + 14 puis 140 = 6 + 8. On aura donc 3 = 0, 13636... On voit que la procédure fait une boucle dès que l on retombe sur un reste que l on a déjà obtenu, ici le reste 8. Dans le cas général d un nombre rationnel p q, on a q valeurs possibles pour le reste, à savoir 0,..., q 1. On est donc sûr qu après au plus q + 1 étapes, un même reste aura été obtenu fois. Par conséquent, le développement décimal deviendra périodique à partir du rang au plus q + 1. Remarque 1. Il existe des nombres réels qui ne sont pas rationnels, on les appelle les irrationnels. Il suffit de prendre un nombre dont le développement décimal n est pas périodique pour obtenir un nombre irrationnel. En résumé, N Z Q R, les inclusions étant strictes. Remarque. Par contre, tout nombre réel x peut être approché par des nombres rationnels. Il suffit de tronquer le développement décimal de x à un rang arbitrairement grand (plus le rang sera grand, meilleure sera la précision). On dit que Q est dense dans R. En particulier, tout intervalle [x, y] avec x < y contient une infinité de nombres rationnels. 1
Exemple. Le nombre est irrationnel. En effet, raisonnons par l absurde et supposons que = p/q avec p et q entiers tels que la fraction p/q est irréductible. Alors p = q. Donc p est pair, donc p est pair (cf cours 0). On peut donc écrire p = k avec k entier. D où p = 4k puis q = k. Ainsi q est pair, donc q l est aussi. La fraction p/q n est donc pas irréductible ce qui est une contradiction. L ordre sur R R est muni d une relation d ordre qui est l inégalité. Elle permet de comparer nombres réels. Si x, y R, on a soit x y soit y x: nombres réels sont donc toujours comparables. On dit que R est totalement ordonné. Remarque. Pour montrer que x = y, on a juste à montrer que x y puis que y x. On le fera souvent en pratique. Définition. (Majorant/minorant) Soit A une partie de R. (i) On dit que A est majorée s il existe un nombre M tel que x M pour tout x A. M est appelé un majorant de A. (ii) On dit que A est minorée s il existe un nombre m tel que x m pour tout x A. m est appelé un minorant de A. (iii) On dit que A est bornée si elle est majorée et minorée. Exemple: ] ; 10] est majorée mais pas minorée. De même pour ] ; 10[. Pour ces parties, l ensemble des majorants est [10; + [. La partie ] 4; 3] ] ; 5[ est bornée. L ensemble de ses majorants est [5; + [ et l ensemble de ses minorants est ] ; 4]. Définition. (Maximum/minimum). Soit A une partie de R. (i) On dit que A admet un plus grand élément s il existe a A tel que x a pour tout x A. On dit que a est le maximum de A. (ii) On dit que A admet un plus petit élément s il existe a A tel que x a pour tout x A. On dit que a est le minimum de A. Remarque 1. Si une partie A admet un maximum (resp. un minimum), il est unique. Preuve. Supposons que a et b soient des maxima de A. En particulier a A. Comme b est plus grand que n importe quel élément de A, on a b a. Par symétrie, a b. Donc a = b. On raisonne de même pour le minimum. Exemple: ] ; 10] admet 10 comme maximum. Par contre, ] ; 10[ n admet pas de maximum. On voit donc que toute partie de R n admet pas forcément un maximum ou un minimum. Dans la partie ] ; 10[, on pourra toujours trouver des nombres arbitrairement proches de 10, mais on ne peut pas dire que 10 est un maximum car il n appartient pas à la partie. On introduira alors le concept de borne supérieure (cf ci-dessous). Exemple. La partie Q [0, 1[ n admet pas de maximum.
Remarque. Toute partie non vide et majorée de N admet un maximum. Toute partie non vide de N admet un minimum. Application. On redémontre l irrationnalité de. Soit S := {n N : n est entier }. On veut montrer que S est l ensemble vide. Supposons par l absurde que ce n est pas le cas. (a) Justifier le fait que l on peut trouver un plus petit entier k 1 tel que k est entier. (b) Montrer que dans ce cas, k( 1) est aussi un élément de S. (c) En déduire une contradiction, puis que S est l ensemble vide. (d) En déduire l irrationnalité de. Définition. (i) Soit A une partie non-vide et majorée de R. On appelle borne supérieure de A le plus petit majorant de A. On le note sup(a). (ii) Soit A une partie non-vide et minorée de R. On appelle borne inférieure de A le plus grand minorant de A. On le note inf(a). Remarque 1. Cette définition est en fait aussi un théorème: il nous dit que l ensemble des majorants (resp. des minorants) admet un minimum (resp. un maximum), ce qui n est pas trivial.. Remarque. L ensemble des majorants d une partie majorée A peut donc s écrire [sup(a), + [. Remarque 3. Pour montrer que a = sup(a), il suffit donc de montrer que a est un majorant de A et que tout majorant de A est plus grand que a. De même, pour montrer que a = inf(a), on montre que a est un minorant de A et que tout minorant de A est plus petit que a. Remarque 4. Pour montrer que a = sup(a), on peut aussi montrer que a est un majorant de A et que pour tout réel x < a, il existe un élément y A tel que y > x (Exercice: le montrer). Exemple 1: Soit A une partie de R qui admet un maximum. Alors sup(a) = max(a). Preuve. D abord max(a) est un majorant de A car max(a) x pour tout x A par définition du maximum. Soit maintenant un majorant M de A. Comme max(a) A, on a en particulier M max(a). On a donc bien montré que max(a) est un majorant et qu il est le plus petit. Exemple : Soit A une partie majorée et b R. Notons A + b = {x + b : x A}. Alors sup(a + b) = sup(a) + b. Preuve. Soit x A. On a sup(a) x car sup(a) est un majorant. Donc sup(a) + b x + b pour tout x A. Ainsi sup(a) + b est un majorant. Montrons que c est le plus petit majorant. Soit M un majorant de A + b. Alors M x + b pour tout x A. Donc M b x pour tout x A. Ainsi M b est un majorant de A, donc M b sup(a). On a donc bien M sup(a) + b. Exemple 3: Soient A et B parties majorées. Notons A + B = {a + b : a A, b B}. Montrer que sup(a + B) = sup(a) + sup(b). 3
Exemple 4: Soit A une partie minorée. Notons A = { x : x A}. Alors sup( A) = inf(a). Preuve. On montre d abord que inf(a) est un majorant de A. Soit x A. On a inf(a) x, donc inf(a) x pour tout x A. Ainsi inf(a) est un majorant de A. Soit maintenant M un majorant de A. On a M x pour tout x A. Donc M x pour tout x A. Ainsi, M est un minorant de A, d où M inf(a), ce qui équivaut à M inf(a). On a bien montré que inf(a) est le plus petit majorant de A. 3 Valeur absolue Définition. Pour tout x R, la valeur absolue de x est définie par x := max( x, x). Proposition. (i) x 0 (ii) x = 0 x = 0 (iii) xy = x y (iv) x + y x + y (inégalité triangulaire) Preuve. (i) Si x 0, on a x = x 0. Si x 0, on a x = x 0. Dans tous les cas, x 0. (ii) Si x = 0, on a x = 0. Réciproquement, supposons que x = 0. Comme x a pour valeur x ou x, on doit avoir x = 0 ou x = 0. Dans tous les cas, x = 0. (iii) Si x 0 et y 0, on a xy = xy, x = x et y = y, donc on a bien l égalité. On raisonne de la même façon pour les autres cas. (iv) On a x + y = (x + y) = x + y + xy x + y + x y = ( x + y ). Remarque 1. x M M x M. Remarque. x = x (mais x x). Corollaire. Pour tous x, y R, x y x y. Preuve. On utilise l inégalité triangulaire: x = (x y)+y x y + y donc x y x y. En inversant les rôles de x et y, on obtient y x y x = x y. D où x y x y. Remarque. Le nombre x y peut être vu comme la distance séparant les réels x et y. 4 Partie entière Définition. On appelle partie entière de x l unique entier relatif n Z tel que n x < n + 1. On le notera E(x). 5 Intervalles Définition. Un intervalle I est une partie de R telle que si x et y appartiennent à I, alors [x, y] I. Proposition. Tout intervalle a l une des écritures suivantes: 4
[a; b]: intervalle fermé, ]a; b[: intervalle ouvert ]a; b] ou [a; b[: intervalles semi-ouverts ] ; a], ] ; a[,[a; [,]a; [, R : intervalles non bornés Remarque. Une réunion d intervalles n est pas nécessairement un intervalle. Par exemple [ ; 5] [7; 15] n est pas un intervalle. 6 Exercices 1. Montrer que le nombre ln(3) ln(). Montrer que est irrationnel. max(x, y) = x + y + x y 3. Résoudre x 7 < 5. Résoudre x > 10. et min(x, y) = x + y x y. 4. Résoudre x + x 3 = 1. 5. Soit A := {xy, x +y }. Montrer que A possède une borne inférieure et une borne supérieure. Les déterminer. 6. Calculer E(x) E(x). (Séparer deux cas). 7. Soit x < y deux réels. a) Montrer qu on peut trouver un rationnel p n tel que x < p n < y. (On pourra prendre n tel que 1 n < x y ). En déduire que tout intervalle non vide de R contient une infinité de rationnels. b) Montrer de même que tout intervalle non vide de R contient une infinité d irrationnels. (On pourra trouver p n tel que x < p n < y et vérifier que p n n est pas rationnel). 8. Montrer que toute application croissante de [0; 1] dans [0; 1] admet un point fixe. 7 Questions de cours Développement décimal d un rationnel; Q est dense dans R; majoration/minoration; maximum/minimum; borne supérieure/inférieure; inégalité triangulaire; partie entière; définition d un intervalle; 5