Résultats classiques sur les endomorphismes nilpotents

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Transcription:

Résultats classiues sur les endomorphismes nilpotents Soit K un corps commutatif, E un K ev de dimension finie n, u un endomorphisme nilpotent de E. 1. Démontrer ue u est trigonalisable. Le polynôme scindé X p (p est un entier naturel non nul) annule u. 2. Déterminer le polynôme caractéristiue de u. Le polynôme caractéristiue de u est scindé (car u est trigonalisable). La seule valeur propre possible pour u est 0 (seule racine de X p ). Il n y au unpolynômescindéunitairededegrén ui a comme seule racine 0 :c estx n. Il y a beaucoup de manières différentes d arriver à ce résultat. On peut par exemple prendre une base dans lauelle la matrice de u est triangulaire supérieure, il n y a ue des 0 sur la diagonale, le polynôme caractéristiue de u se calcule facilement... 3. En utilisant le théorème de Cayley-Hamilton, démontrer ue l indice de nilpotence de u est au plus égal à n. Le polynôme caractéristiue est X n ;lepolynômeminimalestdonc X p pour un certain p n (le théorème de Cayley-Hamilton dit ue le polynôme minimal divise le polynôme caractéristiue). On a alors u p =Θ(X p annule u) etu p 1 =Θ(X p 1 n annule pas u). Donc p est l indice de nilpotence de u. 13

4. Retrouver le résultat de la uestion précédente sans utiliser le théorème de Cayley-Hamilton, à l aide de l exercice classiue sur les «noyaux itérés». On a (voir exercice sur les noyaux itérés) : Ker(u 0 ) Ker(u 1 ) Ker(u p 1 ) Ker(u p )=E La suite finie dim Ker u k est donc une suite strictement croissante d entiers naturels, ce ui impliue facilement, pour tout k 0 k p entre 0 et p, dim Ker u k k (récurrence «finie»). Et, partant, n p. 5. Démontrer ue, sur C, unematriceestnilpotentesietseulement si 0 est son uniue valeur propre. Est-ce encore vrai sur R? Si une matrice est nilpotente, sa seule valeur propre est 0, ueluesoitle corps. Réciprouement, si la seule valeur propre est 0, comme on est sur C, le polynôme minimal est scindé, il est donc de la forme X p.donclamatrice est nilpotente. En revanche, sur R, lamatrice 0 0 0 0 0 1 0 1 0 (construite à partir d un bloc 2 2 de matrice de rotation d angle π/2) a pour seule valeur propre 0, etpourtantn estpasnilpotente(maisbiensûr, elle a des valeurs propres complexes non nulles). 14

Sous-espaces caractéristiues et réduction de Dunford 1. Soit u un endomorphisme nilpotent d un espace de dimension finie non nulle n. On appelle p l indice de nilpotence de u, c est-à-dire le plus petit entier naturel pour leuel u p =Θ.Démontrer ue u est trigonalisable. Quel est le polynôme minimal de u, sonpolynômecaractéristiue?démontreruep n. u peut-il être diagonalisable? Le polynôme scindé X p est annulateur de u, doncu est trigonalisable. Son polynôme minimal est un diviseur de X p,doncilestdelaforme X k où k p. Mais, par définition de p, sik<pon a u k =Θ,donc le polynôme minimal de u est nécessairement X p. Et donc la seule racine possible pour le polynôme caractéristiue de u est 0 (c est la seule valeur propre possible pour u). Or ce polynôme caractéristiue est scindé (car u est trigonalisable), unitaire de degré n, c estdoncx n. Et, par le théorème de Cayley-Hamilton (le polynôme minimal divise le polynôme caractéristiue) on a p n. Si u est diagonalisable, comme il a une seule valeur propre (donc un seul sous-espace propre), c est une homothétie, de rapport cette valeur propre, ici 0. Doncu =Θ. 2. Soit u un endomorphisme d un espace E de dimension finie non nulle n. Onsupposeuelepolynômecaractéristiuede u est scindé. On note λ 1,...,λ ses racines, de multiplicités respectives m 1,...,m. 15

On note, pour chaue i entre 1 et : F i =Ker (λ i Id u) m i. F i est appelé sous-espace caractéristiue associé à la valeur propre λ i. (a) Démontrer ue F i est stable par u et contient le sousespace propre E i associé à la valeur propre λ i. F i est le noyau de P i (u), avecp i =(λ i X) m i. Comme P i (u) commute avec u (c est un polynôme de u), son noyau F i est stable par u (cours). Mais, si f est un endomorphisme, si k<k,ona ker(f k ) ker(f k ),doncenparticulierici ker λ i Id u ker (λ i Id u) m i ce ui traduit bien ue E i F i (b) Démontrer ue E est somme directe des F i (1 i ). L utilisation du théorème de Cayley-Hamilton et du théorème de décomposition des noyaux dans cette uestion est un grand classiue de la réduction. Le polynôme caractéristiue de u, supposé scindé,est χ u = (X λ i ) m i Si i = j, X λ i X λ j =1,donc(X λ i ) m i (X λ j ) m j =1; 16

le théorème de décomposition des noyaux dit alors : ker χ u (u) = ker (u λ i Id m i ] Mais, d après le théorème de Cayley-Hamilton, χ u (u) =Θ,donc ker χ u (u) = E, etonconclutbien: E = F i (c) Démontrer ue u est diagonalisable si et seulement si F i = E i pour tout i. On a vu dans le a. ue, pour tout i, dim(e i ) dim(f i ).Onajoute toutes ces inégalités, on obtient : dim(e i ) dim(f i )=dim(e) Mais on sait ue u est diagonalisable si et seulement si dim(e i )=dim(e), doncsietseulementsil inégalitéci-dessusest une égalité. Or en ajoutant des inégalités (de même sens bien sûr, sinon c est interdit!) dont une au moins est stricte, on obtient une inégalité stricte. Donc u est diagonalisable si et seulement si les inégalités dim(e i ) dim(f i ) sont toutes des égalités, donc si et seulement si (sachant ue chaue E i est inclus dans le F i correspondant) F i = E i pour tout i 17

3. On se place sous les hypothèses de la uestion précédente. On appelle u i l endomorphisme induit par u sur F i,etp i la projection sur F i parallèlement à F j. j=i (a) Démontrer ue u i s écrit comme somme d une homothétie h i et d un endomorphisme nilpotent n i de F i. Si x F i,pardéfinitiondecesous-espaceona (λ i Id u) m i (x) =0 E =0 Fi. Mais, sur F i, u coïncide avec u i,donc (λ i Id Fi u i ) m i (x) =0 Fi.NotantΘ i l endomorphisme nul de F i, on obtient (λ i Id Fi u i ) m i =Θ i.doncu i λ i Id est nilpotent. Notons-le n i,etnotonsh i l homothétie λ i Id.Onabien: u i = n i + h i (b) Construire, en utilisant ce ui précède, deux endomorphismes d et n, respectivementdiagonalisableetnilpotent, tels ue u = d + n et dn = nd Soit x un élément de E. OnpeutledécomposersurlesF i : x = p i (x). Donc u(x) = u p i (x) = u i pi (x) = h i pi (x) + n i pi (x) 18

ce ui incite à définir d = h i p i et n = n i p i On a, par ce ui précède, u = d + n. SurchaueF i, d coïncide avec h i ; on sait u alors d est diagonalisable. Sur chaue F i, n coïncide avec n i.orn m i i m =max(m i ), n m i =Θ i,donc,si =Θ i.doncn m est une application linéaire nulle sur chaue F i,orlasommedirectedesf i est E, doncn m =Θ. Et ainsi, n est nilpotent. Mais n d et d n coïncident sur chaue F i (car h i n i = n i h i ), donc sont égaux : nd=dn Remarue : Chaue n i est trigonalisable. Il existe donc une base de F i dans lauelle sa matrice est triangulaire supérieure «stricte». En réunissant de telles bases, on obtient une base de E dans lauelle la matrice de u est de la forme A 1 A 2 M =...... (diagonale par bocs), chaue A k étant un bloc m k m k triangulaire, de la forme λ k. 0.. ( ) A k =....... 0... 0 λ k 19 A

M est donc diagonale par blocs et triangulaire ; d est l endomorphisme dont la matrice dans cette base est la diagonale de M, n est l endomorphisme dont la matrice dans cette base est la matrice triangulaire supérieure stricte dont les coefficients hors diagonale sont ceux de M (les coefficients diagonaux étant nuls). On peut construire une base pour ue, dans M, lesseulscoefficients non nuls hors de la diagonale soient tous égaux à 1 et situés juste audessus ce celle-ci (c est-à-dire en ligne i et colonne i +1pour certains i dans [1,n 1]). C est la réduction de Jordan, plus techniue. 4. Toute matrice M s écrit donc comme somme D + N d une matrice diagonalisable et d une matrice nilpotente ui commutent. Quel est l intérêt pour le calcul des puissances de M? Comme D et N commutent, les puissances de leur somme peuvent être calculées en utilisant le binôme de Newton. De plus, si j n, ona N j =0.Donc,sik n 1, onpourraécrire n 1 k (D + N) k = N j D k j j j=0 5. On suppose u = d + n une autre décomposition vérifiant les conditions de 3.b. Vérifier ue les F i sont stables par d et n, en déduire ue d = d et n = n. 20

Si d commute avec n,ellecommuteavecn + d = u, etdoncellecommute, par récurrence, avec toutes les «puissances» (pour ) deu et, par combinaison linéaire, avec tous les polynômes de u. Doncd laisse stables tous les F i (ui sont des noyaux de polynômes de u). De même pour n. On peut alors noter d i et n i les endomorphismes induits par d et n sur F i. Soit µ une valeur propre de d i ;lesous-espacepropreassociéker(d i µid Fi ) est stable par n i,etl endomorphismeinduitparn i sur ce sous-espace ne peut être injectif (sinon, ce serait un automorphisme, or il a une puissance (pour ) nulle,c estdoncimpossible).ilexistedoncx i ker(d i µid Fi ) tel ue n i(x i )=0 E. Mais alors u i (x) =d i(x) +n i(x) =µx, or(x λ i ) m i est annulateur de u i,doncsaseulevaleurproprepossibleestλ i,doncµ = λ i. Finalement, d i,uiauneuniuevaleurpropreetestdiagonalisable,esth i, et donc n i = n i,l unicités ensuit. 21